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07/11/2023 | FRANCE | N°23NC02907

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 07 novembre 2023, 23NC02907


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par un jugement n° 2100176 du 1er décembre 2022, le tribunal administratif de Besançon a, d'une part, annulé la décision du 7 décembre 2020 par laquelle le ministre de l'intérieur et des outre-mer a rejeté le recours administratif préalable obligatoire formé par Mme B... à l'encontre de la décision portant mutation d'office à la brigade de proximité de Saint-Hyppolyte à compter du 1er juillet 2020 et, d'autre part, enjoint au ministre de l'intérieur et des outre-mer de réintégrer Mme B... dans l'e

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par un jugement n° 2100176 du 1er décembre 2022, le tribunal administratif de Besançon a, d'une part, annulé la décision du 7 décembre 2020 par laquelle le ministre de l'intérieur et des outre-mer a rejeté le recours administratif préalable obligatoire formé par Mme B... à l'encontre de la décision portant mutation d'office à la brigade de proximité de Saint-Hyppolyte à compter du 1er juillet 2020 et, d'autre part, enjoint au ministre de l'intérieur et des outre-mer de réintégrer Mme B... dans l'emploi qu'elle occupait avant l'exécution de cette décision, sous les réserves exposées au point 6 des motifs du jugement, et de reconstituer sa carrière dans un délai de trois mois à compter de la notification de ce jugement.

Procédure d'exécution :

Par une lettre enregistrée le 4 avril 2023 sous le n° 23EX26, Mme C... B..., représentée par Me Maumont, a demandé à la cour, sur le fondement de l'article L. 911-4 du code de justice administrative, l'exécution du jugement n° 2100176 rendu le 1er décembre 2022 par le tribunal administratif de Besançon.

Elle fait valoir que le ministre de l'intérieur et des outre-mer n'a pas respecté l'injonction prononcée par le tribunal lui imposant de la réintégrer dans l'emploi qu'elle occupait à la suite de l'annulation de sa mutation d'office dans l'intérêt du service à la brigade de proximité de Saint-Hippolyte et n'a pas versé la somme de 1 500 euros mise à sa charge en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par lettre du 2 mai 2023, la présidente de la cour a invité le ministre de l'intérieur et des outre-mer à justifier de la nature et de la date des mesures prises pour l'exécution du jugement ou à faire connaître les raisons qui pourraient retarder cette exécution.

Par des courriers du 12 juillet 2023 et du 8 août 2023, le ministre de l'intérieur et des outre-mer a précisé avoir exécuté l'injonction lui imposant de réintégrer Mme B... car cette dernière a été affectée au centre d'opérations et de renseignements de la gendarmerie de Nouméa conformément à l'un des choix qu'elle a formulés sur la fiche de vœux adressée à sa hiérarchie.

Par une ordonnance du 14 septembre 2023, la présidente de la cour a décidé l'ouverture d'une procédure juridictionnelle.

Par un mémoire enregistré le 29 septembre 2023, Mme B..., représentée par Me Maumont, demande à la cour :

1°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur et des outre-mer de l'affecter à l'unité d'information recrutement et sélection (CIR - CSC - CRCS) à Nouméa, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle a bien perçu les frais d'instance de 1 500 euros mis à la charge de l'Etat par le jugement du 1er décembre 2022 ;

- le rattrapage de la solde des trois dernières années, versé en un mois par l'administration, lui a entrainé des difficultés financières importantes en terme de taux d'imposition ; elle s'étonne des modalités de versement des cotisations sociales locales ;

- la gestion de sa mutation et de son retour en métropole démontre une volonté manifeste de ne pas satisfaire ses choix ;

- elle a perdu ses reliquats de congés d'éloignement et le bénéfice de la demi-campagne bien qu'elle ait travaillé en métropole.

Le ministre de l'intérieur et des outre-mer, à qui la procédure a été communiquée, n'a pas produit de mémoire.

Vu :

- le jugement n° 2100176 du tribunal administratif de Besançon du 1er décembre 2022 ;

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience publique.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Roussaux,

- les conclusions de M. Michel, rapporteur public,

- et les observations de Me Moumni, représentant Mme B... et de Mme A..., représentant le ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Une note en délibéré du ministre de l'intérieur et des outre-mer a été enregistrée le 11 octobre 2023.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 911-4 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander à la juridiction, une fois la décision rendue, d'en assurer l'exécution. / Si le jugement ou l'arrêt dont l'exécution est demandée n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte ". L'article R. 921-6 du même code dispose que : " Dans le cas où le président estime nécessaire de prescrire des mesures d'exécution par voie juridictionnelle, et notamment de prononcer une astreinte, ou lorsque le demandeur le sollicite dans le mois qui suit la notification du classement décidé en vertu du dernier alinéa de l'article précédent et, en tout état de cause, à l'expiration d'un délai de six mois à compter de sa saisine, le président de la cour ou du tribunal ouvre par ordonnance une procédure juridictionnelle. (...) Cette ordonnance n'est pas susceptible de recours. L'affaire est instruite et jugée d'urgence. Lorsqu'elle prononce une astreinte, la formation de jugement en fixe la date d'effet ".

2. Le jugement du 1er décembre 2022 du tribunal administratif de Besançon, après avoir annulé la décision du 7 novembre 2020 du ministre de l'intérieur rejetant le recours administratif préalable obligatoire de Mme B..., a enjoint au ministre de l'intérieur et des outre-mer de réintégrer Mme B... dans l'emploi qu'elle occupait avant l'exécution de la décision annulée, sous les réserves exposées au point 6, et de reconstituer sa carrière dans un délai de trois mois à compter de sa notification. Le point 6 du jugement réserve les hypothèses où la réintégration est impossible, soit que cet emploi ait été supprimé ou substantiellement modifié, soit que l'intéressée ait renoncé aux droits qu'elle tient de l'annulation prononcée par le juge ou qu'elle n'ait plus la qualité d'agent public. L'article 3 de ce jugement prévoit que L'Etat versera à Mme B... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

3. Il résulte de l'instruction, d'une part, qu'à la suite de ce jugement, le ministre de l'intérieur et des outre-mer a, conformément à l'article 3 du jugement, versé à Mme B... la somme de 1 500 euros mise à sa charge en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D'autre part, Mme B... a été affectée au centre d'opérations et de renseignements de la gendarmerie de Nouméa conformément à l'un des choix qu'elle a formulés sur la fiche de vœux adressée à sa hiérarchie.

4. Si Mme B... critique les modalités selon lesquelles le rattrapage de solde a été réalisé, ainsi que le versement des cotisations sociales locales et si elle évoque la perte d'avantages, elle ne démontre pas que l'administration aurait procédé, sur ce point, à une exécution inexacte ou incomplète du jugement du tribunal administratif de Besançon.

5. Si elle demande également dans le cadre de cette procédure à ce qu'il soit enjoint au ministre de l'intérieur et des outre-mer de l'affecter à l'unité d'information recrutement et sélection (CIR - CSC - CRCS) à Nouméa, cet emploi est distinct de celui qu'elle occupait préalablement à la décision litigieuse de mutation d'office. L'exécution du jugement ne saurait donc emporter comme conséquence qu'elle soit affectée sur ce poste. Si elle se prévaut de la méconnaissance d'engagements pris par l'administration lors des entretiens préalables à sa réaffectation, cette demande constitue un litige distinct, et donc irrecevable, dont il n'appartient pas au juge de l'exécution de connaitre.

6. En revanche, Mme B..., qui conserve la qualité d'agent public, n'a pas été affectée dans le poste qu'elle occupait préalablement à la décision litigieuse de mutation d'office dans l'intérêt du service. Il ne résulte pas de l'instruction que son ancien poste a été supprimé ou substantiellement modifié. Il n'est pas non plus établi que l'intéressée a renoncé aux droits qu'elle tient de l'annulation prononcée par le tribunal administratif de Besançon, alors que la seule circonstance que l'intéressée a complété une fiche de vœux n'incluant pas ce poste ne peut être regardée comme susceptible de caractériser une telle renonciation.

7. Dans ces conditions la requérante est fondée à soutenir que l'article 2 du jugement n'a pas été exécuté. Dès lors, il y a lieu de prononcer à l'encontre du ministre de l'intérieur et des outre-mer une astreinte de 100 euros par jour de retard s'il ne justifie pas avoir, dans un délai de trois mois suivant la notification du présent arrêt, exécuté l'article 2 du jugement du 1er décembre 2022 du tribunal administratif de Besançon, sauf à ce que Mme B... renonce expressément au droit, qu'elle tient de l'annulation prononcée par le jugement, de se voir réaffecter sur l'emploi qu'elle occupait avant la décision de mutation dans l'intérêt du service litigieuse.

8. Enfin, il est constant que l'article 3 du jugement du 1er décembre 2022 du tribunal administratif de Besançon, relatif aux frais d'instance a été exécuté. Les conclusions à fin d'exécution de cet article ont, par suite, perdu leur objet et il n'y a plus lieu d'y statuer.

9. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de Mme B... présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de Mme B... tendant à l'exécution de l'article 3 du jugement n° 2100176 du 1er décembre 2022 du tribunal administratif de Besançon.

Article 2 : Une astreinte de 100 euros par jour de retard est prononcée à l'encontre du ministre de l'intérieur et des outre-mer s'il ne justifie pas avoir, dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt, exécuté l'article 2 du jugement du 1er décembre 2022 du tribunal administratif de Besançon, sauf à ce que Mme B... renonce au droit de se voir réaffecter sur l'emploi qu'elle occupait avant la décision de mutation dans l'intérêt du service.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B..., et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Délibéré après l'audience du 10 octobre 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Samson-Dye, présidente,

- Mme Roussaux, première conseillère,

- M. Denizot, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 novembre 2023.

La rapporteure,

Signé : S. Roussaux

La présidente,

Signé : A. Samson-Dye

La greffière,

Signé : N. Basso

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

N. Basso

2

N° 23NC02907


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NC02907
Date de la décision : 07/11/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme SAMSON-DYE
Rapporteur ?: Mme Sophie ROUSSAUX
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : SOCIETÉ D'AVOCATS MAUMONT MOUMNI

Origine de la décision
Date de l'import : 25/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2023-11-07;23nc02907 ?
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