Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 1er avril 2022 par lequel le préfet de la Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an.
Par un jugement n° 2201635 du 18 octobre 2022, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 22 juin 2023, M. B..., représenté par Me Hami-Znati, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
Sur la légalité du refus de titre de séjour :
- la décision en litige est entachée d'incompétence de son signataire ;
- elle est entachée d'insuffisance de motivation ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article 9 du code civil ;
- la décision en litige est entachée d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
- la décision en litige est entachée d'incompétence de son signataire ;
- elle est intervenue en méconnaissance de son droit d'être entendu, garanti par un principe général du droit de l'Union européenne ;
- il ne pouvait pas faire l'objet d'une mesure d'éloignement, alors qu'il remplit les conditions de délivrance des titres de séjour prévus aux articles L. 423-22, L. 422-1, L. 435-1 et L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article 9 du code civil ;
- la décision en litige est entachée d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- la décision en litige est illégale compte tenu de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :
- la décision en litige est entachée d'incompétence de son signataire ;
- elle méconnaît les articles L. 423-22, L. 422-1, L. 435-1 et L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article 9 du code civil ;
Sur la légalité de l'interdiction de retour sur le territoire français :
- la décision en litige est entachée d'incompétence de son signataire ;
- elle est entachée d'insuffisance de motivation et de défaut d'examen de sa situation ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article 9 du code civil.
Le préfet de la Marne a produit des pièces, enregistrées le 11 août 2023.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 juin 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le traité sur l'Union européenne ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code civil ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme Brodier, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant malien déclarant être né le 3 mai 2001, est entré irrégulièrement sur le territoire français le 18 juillet 2017, à l'âge de 16 ans. Il a été confié à l'aide sociale à l'enfance du département de la Marne par une ordonnance de placement provisoire du 18 août 2017. Le 12 février 2019, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Une décision implicite de rejet est née du silence gardé par le préfet. L'intéressé en a demandé l'annulation devant le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne qui, par un jugement du 26 novembre 2020, a rejeté sa demande. Le 6 décembre 2021, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 1er avril 2022, le préfet de la Marne a refusé de faire droit à sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. B... relève appel du jugement du 18 octobre 2022 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté en litige :
2. Le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté en litige doit être écarté par le même motif que celui retenu à juste titre par les premiers juges.
Sur la légalité du refus de titre de séjour :
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".
4. Il ressort de la décision en litige qu'elle rappelle le parcours de l'intéressé en France, à savoir son entrée le 18 juillet 2017 alors qu'il est encore mineur, sa prise en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance, la présentation d'une demande de titre de séjour sur le fondement de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'examen des documents d'état civil qu'il avait produits par les services de la police aux frontières qui les ont expertisés comme étant contrefaits, l'intervention d'une décision implicite de rejet de sa demande en l'absence de justificatif probant de son identité et le rejet par un jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de sa demande tendant à l'annulation de cette décision. La décision en litige vise ensuite la demande de titre de séjour formulée le 6 décembre 2021 par M. B..., sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, précise qu'il n'a apporté aucun document permettant de conclure au fait qu'il entrerait dans un des cas de délivrance d'un titre de séjour prévu par cet article, indique que sa situation personnelle et professionnelle ne saurait justifier une admission exceptionnelle au séjour. La décision portant refus de titre de séjour souligne également qu'il ne remplit pas non plus les conditions de l'article R. 431-10 du même code imposant qu'il présente des documents justifiant de son état civil et de sa nationalité et écarte enfin la possibilité de lui délivrer un titre de séjour étudiant, en l'absence de visa de long séjour.
5. La décision en litige, qui procède à l'examen de la demande de titre de séjour formulée au regard de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, comporte ainsi les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, sans que M. B... ne puisse faire grief au préfet d'avoir oublié de mentionner certaines dates de son parcours, ni d'avoir joint à l'arrêté les rapports d'expertise des services de la police aux frontières qui y sont mentionnés, ni encore de ne pas avoir précisé si des poursuites pénales avaient été engagées par le Procureur de la République à raison des documents d'état civil considérés comme contrefaits. Enfin, le bien-fondé des motifs retenus par le préfet pour refuser à M. B... la délivrance d'un titre de séjour est sans incidence sur la motivation même de cette décision. Par suite, le moyen tiré d'une insuffisance de motivation de la décision de refus de titre de séjour ne peut qu'être écarté.
6. En deuxième lieu, il ne ressort pas de la décision en litige que le préfet de la Marne aurait refusé de délivrer à M. B... le titre de séjour prévu par les dispositions de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui concerne les étrangers confiés au service de l'aide sociale à l'enfance au plus tard le jour de leurs seize ans. Le requérant n'allègue au demeurant, ni n'établit avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour en application de ces dispositions, dont il ne remplit en tout état de cause par les conditions. Par suite, M. B... ne saurait utilement soutenir que la décision en litige méconnaît les dispositions de cet article.
7. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui établit qu'il suit un enseignement en France ou qu'il y fait des études et qui justifie disposer de moyens d'existence suffisants se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant " d'une durée inférieure ou égale à un an. / En cas de nécessité liée au déroulement des études ou lorsque l'étranger a suivi sans interruption une scolarité en France depuis l'âge de seize ans et y poursuit des études supérieures, l'autorité administrative peut accorder cette carte de séjour sous réserve d'une entrée régulière en France et sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / (...) ".
8. Il n'est pas contesté que M. B... était inscrit, à la date de la décision en litige, en première professionnelle " technicien menuisier agenceur ". Toutefois, et ainsi que le préfet le lui a opposé, il ne justifie pas d'un visa de long séjour, conformément aux prescriptions de l'article L. 412-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par ailleurs, à supposer qu'il se prévale du deuxième alinéa de la disposition précité, M. B... ne justifie pas avoir suivi sans interruption une scolarité en France depuis l'âge de seize ans, ni être entré régulièrement en France. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision en litige méconnaît les dispositions précitées de l'article L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
9. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 ".
10. M. B..., qui résidait sur le territoire français depuis quatre ans et demi à la date de la décision en litige, a été pris en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance à son arrivée en France à l'âge de 16 ans et demi. Il a tout d'abord bénéficié, au titre de l'année 2017/2018, d'un parcours de formation dans le cadre de la mission de lutte contre le décrochage scolaire. Il s'est ensuite inscrit en formation de CAP carreleur mosaïste. Toutefois, il n'a pas commencé son contrat d'apprentissage, qui a fait l'objet d'une résiliation par l'employeur. En revanche, après deux années de formation au titre des années 2019/2020 et 2020/2021, il a obtenu son diplôme de CAP " menuisier fabricant de menuiserie, mobilier et agencement ", avec une moyenne de 15,12/20. Il a alors travaillé, en contrat à durée déterminée, entre le 21 mai et le 30 septembre 2021 à temps complet comme commis de cuisine. A la date de la décision en litige, il suivait sa première année de bac professionnel " technicien menuisier agenceur ". Ces éléments relatifs à la capacité d'insertion professionnelle future de M. B... ne constituent toutefois pas motifs exceptionnels au sens de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision en litige méconnaîtrait ces dispositions.
11. En cinquième lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article 9 du code civil : " Chacun a droit au respect de sa vie privée ".
12. Si M. B..., entré mineur, résidait sur le territoire depuis quatre ans et demi à la date de la décision de refus de séjour, il y est dépourvu d'attaches familiales. Sa poursuite d'une troisième année de scolarité en lycée professionnel et sa capacité d'insertion professionnelle ne suffisent toutefois pas à le faire regarder comme ayant, alors, définitivement ancré en France l'essentiel de ses attaches privées. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision de refus de séjour méconnaît les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni, en tout état de cause, les dispositions de l'article 9 du code civil.
13. En dernier lieu, pour les mêmes motifs qu'énoncés aux points 10 et 12 du présent arrêt, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les justificatifs d'identité qu'il a produits au soutien de sa demande, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le refus de séjour qui lui a été opposé serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
14. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français serait illégale compte tenu de l'illégalité de la décision lui refusant un titre de séjour.
15. En deuxième lieu, le droit d'être entendu, qui fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union, se définit comme celui de toute personne de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours d'une procédure administrative avant l'adoption de toute décision susceptible d'affecter de manière défavorable ses intérêts. Ce droit ne saurait cependant être interprété en ce sens que l'autorité nationale compétente est tenue, dans tous les cas, d'entendre l'intéressé lorsque celui-ci a déjà eu la possibilité de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur la décision en cause.
16. Il résulte par ailleurs de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne que toute irrégularité dans l'exercice des droits de la défense lors d'une procédure administrative concernant un ressortissant d'un pays tiers en vue de son éloignement ne saurait constituer une violation de ces droits et, en conséquence, que tout manquement, notamment, au droit d'être entendu n'est pas de nature à entacher systématiquement d'illégalité la décision prise. Il revient à l'intéressé d'établir devant le juge chargé d'apprécier la légalité de cette décision que les éléments qu'il n'a pas pu présenter à l'administration auraient pu influer sur le sens de cette décision et il appartient au juge saisi d'une telle demande de vérifier, lorsqu'il estime être en présence d'une irrégularité affectant le droit d'être entendu, si, eu égard à l'ensemble des circonstances de fait et de droit spécifiques de l'espèce, cette violation a effectivement privé celui qui l'invoque de la possibilité de mieux faire valoir sa défense dans une mesure telle que cette procédure administrative aurait pu aboutir à un résultat différent.
17. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que M. B... a pu présenter sur sa situation les observations qu'il estimait utiles dans le cadre de l'examen de sa demande de titre de séjour. Alors qu'il ne pouvait ignorer qu'en cas de rejet de cette demande, il était susceptible de faire l'objet d'une mesure d'éloignement, il n'allègue pas avoir sollicité en vain un entretien auprès des services préfectoraux, ni même avoir été empêché de présenter d'autres observations avant que ne soit prise la décision portant obligation de quitter le territoire français en litige. Il ne fait valoir aucun élément pertinent qu'il n'a pu présenter et qui aurait pu influer sur le contenu de la décision en litige. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du droit d'être entendu doit être écarté.
18. En troisième lieu, lorsque la loi prescrit l'attribution de plein droit d'un titre de séjour à un étranger, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure d'obligation de quitter le territoire français. Tel n'est pas le cas de la mise en œuvre des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lesquelles ne prescrivent pas la délivrance d'un titre de plein droit mais laissent à l'administration un large pouvoir pour apprécier si l'admission au séjour d'un étranger répond à des considérations humanitaires ou si elle se justifie au regard des motifs exceptionnels dont l'intéressé se prévaut.
19. D'une part, il résulte de ce qui précède que M. B... ne saurait utilement soutenir que la mesure d'éloignement méconnaît les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. D'autre part, ainsi qu'il a été dit au point 6, il ne saurait pas plus utilement soutenir qu'il devait se voir délivrer le titre de séjour prévu par les dispositions de l'article L. 422-22 du même code. Par ailleurs, compte tenu de ce qui précède, M. B... ne justifie pas remplir les conditions pour se voir délivrer le titre de séjour prévu par les dispositions de l'article L. 422-1 de ce code. Enfin, la demande de titre de séjour formée par l'intéressé sur le fondement de l'article L. 435-3 avait fait l'objet d'une décision implicite de rejet, qui n'a pas été contestée, tandis que le requérant ne justifie pas qu'il remplirait encore les conditions de délivrance du titre de séjour que ces dispositions prévoient. Par suite, les moyens tirés de ce qu'il ne pouvait pas légalement faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français doivent être écartés.
20. En quatrième lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 10 et 12 du présent arrêt, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la mesure d'éloignement en litige méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni, en tout état de cause, les dispositions de l'article 9 du code civil. Le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dont serait entachée la décision en litige doit être écarté pour les mêmes motifs.
Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :
21. En premier lieu, M. B... ne saurait utilement se prévaloir, pour contester la légalité de la décision fixant le pays de destination, des dispositions des articles L. 423-22, L. 422-1, L. 435-1 et L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui sont relatives à la délivrance de titres de séjour.
22. En second lieu, aux termes de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut désigner comme pays de renvoi : 1° Le pays dont l'étranger a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu la qualité de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; 2° Un autre pays pour lequel un document de voyage en cours de validité a été délivré en application d'un accord ou arrangement de réadmission européen ou bilatéral ; 3° Ou, avec l'accord de l'étranger, tout autre pays dans lequel il est légalement admissible ".
23. Il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision fixant le pays dont M. B... a la nationalité comme pays à destination duquel il pourrait être renvoyé d'office méconnaîtrait son droit au respect de sa vie privée et familiale. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et, en tout état de cause, de l'article 9 du code civil, doit être écarté.
Sur la légalité de l'interdiction de retour sur le territoire français :
24. En premier lieu, aux termes de l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque l'étranger n'est pas dans une situation mentionnée aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative peut assortir la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. / Il en est de même pour l'édiction et la durée de l'interdiction de retour mentionnée à l'article L. 612-8 (...) ".
25. Il ressort de la décision en litige qu'elle comporte une motivation non stéréotypée, le préfet de la Marne ayant tenu compte de la durée de présence de M. B... sur le territoire français depuis 2017, de l'absence de précédente mesure d'éloignement, mais aussi de ce que l'intéressé avait présenté de faux documents d'identité afin d'obtenir frauduleusement un titre de séjour. Cette motivation révèle qu'il a été procédé à l'examen de la situation de M. B.... Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation et du défaut d'examen de sa situation manque en fait et doit être écarté.
26. En second lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que, compte tenu de ce qui a été dit aux points 10 et 12 du présent arrêt, l'interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an porterait une atteinte excessive au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et, en tout état de cause, de l'article 9 du code civil, doit être écarté.
27. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er avril 2022. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions, y compris celles tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Me Hami-Znati et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de la Marne.
Délibéré après l'audience du 30 mai 2024, à laquelle siégeaient :
M. Martinez, présidente,
M. Agnel, président-assesseur,
Mme Brodier, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 juin 2024.
La rapporteure,
Signé : H. Brodier Le président,
Signé : J. Martinez
La greffière,
Signé : C. Schramm
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
C. Schramm
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N° 23NC01998