Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté en date du 4 novembre 2021 par lequel le maire de la commune de Morhange l'a suspendu de ses fonctions pour une durée de 4 mois.
Par un jugement n° 2200148 du 16 juin 2022, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé cet arrêté.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 28 juin 2022, la commune de Morhange, représentée par Me Iochum, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 16 juin 2022 ;
2°) de mettre à la charge de M. A... le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que M. A... a commis des fautes d'une gravité justifiant l'arrêté de suspension litigieux.
Par un mémoire en défense, enregistré le 21 avril 2025, M. B... A..., représenté par Me Bizzari, conclut eu rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la commune de Morhange la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens soulevés par la commune de Morhange ne sont pas fondés.
Une note en délibéré a été produite le 15 mai 2025 pour M. A... et n'a pas été communiquée.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Barlerin,
- les conclusions de Mme Bourguet, rapporteure publique,
- et les observations de Me Bizzari, représentant M. A....
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 4 novembre 2021, le maire de la commune de Morhange a suspendu de ses fonctions pour une durée de 4 mois M. B... A..., chef de la police municipale. La commune de Morhange relève appel du jugement du 16 juin 2022 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a annulé cet arrêté.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article 30 de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 : " En cas de faute grave commise par un fonctionnaire, qu'il s'agisse d'un manquement à ses obligations professionnelles ou d'une infraction de droit commun, l'auteur de cette faute peut être suspendu par l'autorité ayant pouvoir disciplinaire qui saisit, sans délai, le conseil de discipline. / Le fonctionnaire suspendu conserve son traitement, l'indemnité de résidence, le supplément familial de traitement et les prestations familiales obligatoires. Sa situation doit être définitivement réglée dans le délai de quatre mois. / Si, à l'expiration d'un délai de quatre mois, aucune décision n'a été prise par l'autorité ayant le pouvoir disciplinaire, le fonctionnaire qui ne fait pas l'objet de poursuites pénales est rétabli dans ses fonctions. S'il fait l'objet de poursuites pénales et que les mesures décidées par l'autorité judicaire ou l'intérêt du service n'y font pas obstacle, il est également rétabli dans ses fonctions à l'expiration du même délai. Lorsque, sur décision motivée, il n'est pas rétabli dans ses fonctions, il peut être affecté provisoirement par l'autorité investie du pouvoir de nomination, sous réserve de l'intérêt du service, dans un emploi compatible avec les obligations du contrôle judiciaire auquel il est, le cas échéant, soumis. A défaut, il peut être détaché d'office, à titre provisoire, dans un autre corps ou cadre d'emplois pour occuper un emploi compatible avec de telles obligations. L'affectation provisoire ou le détachement provisoire prend fin lorsque la situation du fonctionnaire est définitivement réglée par l'administration ou lorsque l'évolution des poursuites pénales rend impossible sa prolongation. ".
3. L'arrêté suspendant M. B... A... de ses fonctions a été motivé par " un ensemble de comportements fautifs portant gravement atteinte au service ". Il ressort des pièces du dossier que M. B... A..., chef de la police municipale de la commune de Morhange depuis 2006, s'est vu reprocher un ensemble de faits, qui se sont déroulés entre le 25 mars et le 21 octobre 2021. Ainsi, le jeudi 25 mars, il a déposé une main courante à l'encontre de deux de ses collègues, en lieu et place d'une personne qu'il a considérée comme " sous tutelle ", alors qu'elle ne l'était pas et que l'intéressée ne souhaitait pas y procéder. Le 4 septembre 2021, lors du marché d'automne, il a fait procéder à la mise en fourrière du véhicule d'un administré alors qu'aucune interdiction de stationner n'était édictée à cet endroit et a fait le reproche à plusieurs personnes de ne pas porter de masque, le même jour au même endroit, alors que lui-même n'en portait pas. Le 13 septembre 2021, il s'est rendu à une formation sans en avertir sa hiérarchie ou ses collègues, ou encore s'est abstenu, le 21 octobre 2021, de réaliser la fermeture d'un site, tâche qui lui incombe. Par ailleurs, il choisit d'alerter les élus de façon intempestive au moindre problème sur la voie publique au lieu de chercher, d'abord, à faire intervenir les services techniques compétents et il a été absent à plusieurs reprises pour assurer la sécurité de la sortie d'une école alors qu'il était prévu que ce soit lui qui y procède. Il ressort également des pièces du dossier et n'est pas sérieusement contesté qu'à plusieurs reprises, M. A... a adopté des comportements déplacés vis-à-vis de ses collègues, en leur adressant des mails agressifs ou, parfois, en déposant des mains courantes, mais aussi formulé des remarques publiques désobligeantes à l'encontre de la nouvelle équipe municipale.
4. Ces comportements, répétés dans une période de temps relativement courte, émanant du chef de la police municipale, lequel, au demeurant, a déjà fait l'objet d'une sanction disciplinaire d'exclusion du service pour trois jours pour avoir refusé d'assurer une mission de sécurisation le 20 avril 2021, ont entravé le bon fonctionnement de la police municipale et nuit à la crédibilité de ses actions. Ils constituent dès lors des manquements dont la gravité était de nature à justifier une suspension de fonctions pour une durée de quatre mois.
5. Il résulte de ce vient d'être dit que la commune de Morhange est fondée à soutenir c'est à tort que, par le jugement du 16 juin 2022, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé l'arrêté du maire suspendant M. A... de ses fonctions pour une durée de quatre mois. Ce jugement doit dès lors être annulé et il y a lieu pour la cour, saisie de l'entier litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens dirigés contre l'arrêté du maire.
6. La mesure provisoire de suspension prévue par les dispositions législatives précitées ne présente pas, par elle-même, un caractère disciplinaire. Elle est uniquement destinée à écarter temporairement un agent du service, en attendant qu'il soit statué disciplinairement ou pénalement sur sa situation. Dès lors, elle n'est ni au nombre des décisions qui doivent être motivées par application de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration, ni au nombre des mesures pour lesquelles le fonctionnaire concerné doit être mis à même de consulter son dossier. Il s'ensuit que les moyens tirés de ce que la décision attaquée n'était pas motivée et que M. A... n'aurait pas eu connaissance des faits qui lui sont reprochés, doivent être écartés.
7. Il ne ressort pas des pièces du dossier et de l'ensemble de ce qui précède que M. A... aurait été la cible de comportements visant à nuire à sa personne. Ainsi, le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi.
8. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que le jugement en date du 16 juin 2022 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a annulé l'arrêté du 4 novembre 2021 du maire de la commune de Morhange suspendant M. B... A... de ses fonctions pour une durée de 4 mois doit être annulé.
Sur les frais liés au litige :
9. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Morhange, qui n'est pas la partie perdante, la somme que M. A... sollicite sur ce fondement. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner M. A... à verser à la commune une somme à ce titre.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 2200148 du tribunal administratif de Strasbourg du 16 juin 2022 est annulé.
Article 2 : Les conclusions présentées en première instance et en appel par M. A... sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions présentées par la commune de Morhange au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Morhange et à M. B... A....
Délibéré après l'audience du 13 mai 2025, à laquelle siégeaient :
- Mme Rousselle, présidente,
- M. Barlerin, premier conseiller,
- Mme Peton, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 3 juin 2025.
Le rapporteur,
Signé : A. BarlerinLa présidente,
Signé : P. Rousselle
Le greffier,
Signé : A. Betti
La République mande et ordonne au préfet de la Moselle en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Le greffier,
A. Betti
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N° 22NC1653