Vu la requête, enregistrée le 8 novembre 2006, présentée pour Mlle Anne-Marie X, demeurant ..., par Me Herry, avocat au barreau d'Alençon ; Mlle X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 05-1783 en date du 19 septembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2000, 2001 et 2002 ;
2°) de lui accorder la décharge demandée ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 000 euros ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 octobre 2007 :
- le rapport de M. Martin, rapporteur ;
- et les conclusions de M. Hervouet, commissaire du gouvernement ;
Sur la déduction des frais de double résidence :
Considérant qu'aux termes de l'article 83 du code général des impôts : “Le montant net du revenu imposable est déterminé en déduisant du montant brut des sommes payées et des avantages en argent ou en nature accordés : 3° Les frais inhérents à la fonction ou à l'emploi lorsqu'ils ne sont pas couverts par des allocations spéciales (…) La déduction à effectuer est calculée forfaitairement en fonction du revenu brut (…) ; elle est fixée à 10 % du montant de ce revenu (…) Les bénéficiaires des traitements et salaires sont également admis à justifier de leurs frais réels (…) Les frais de déplacement de moins de 40 km entre le domicile et le lieu de travail sont admis, sur justificatifs, au titre des frais professionnels réels. Lorsque la distance est supérieure, la déduction admise porte sur les 40 premiers km, sauf circonstances particulières notamment liées à l'emploi justifiant une prise en compte complète” ;
Considérant qu'en vertu de ces dispositions, les frais de transport réellement exposés par les contribuables pour se rendre à leur lieu de travail et en revenir doivent, en règle générale et à condition qu'ils ne soient pas couverts par des allocations spéciales, être regardés comme inhérents à leur fonction ou à leur emploi et, par suite, admis, sur demande, en déduction de leurs rémunérations brutes ; qu'il n'en va autrement que lorsque, sauf circonstances particulières, l'installation ou le maintien du domicile dans un lieu différent du lieu de travail entraînant des frais de transport importants ainsi éventuellement que des frais de double résidence présente un caractère anormal ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mlle X, qui habite au Merlerault (Orne) au domicile de ses parents, a trouvé, en avril 1999, un premier emploi salarié à Malicorne (Sarthe), à une distance de 125 km du Merlerault ; qu'elle a pris en location à proximité de son lieu de travail un logement meublé dans lequel elle résidait en semaine ; qu'elle rejoignait son domicile du Merlerault le mercredi après-midi et chaque fin de semaine ; qu'elle a déduit de ses revenus imposables les frais réels qu'elle a exposés à raison de sa double résidence ; que l'administration a remis en cause cette déduction au titre des années 2000, 2001 et 2002 ;
Considérant qu'il est constant que l'emploi de clerc de notaire que Mlle X, célibataire, a occupé à Malicorne jusqu'en janvier 2006, ne présentait pas un caractère précaire ; qu'en admettant que c'est en raison de l'absence d'offre d'emploi correspondant à sa qualification dans le département de l'Orne que la requérante a été contrainte de travailler à 125 km de son domicile, cette circonstance, s'agissant d'un premier emploi, n'était pas de nature à justifier le maintien de son domicile au Merlerault ; que ce maintien ne saurait être davantage justifié par la circonstance que la requérante, qui indique ne pas avoir cessé durant les années en litige de chercher un travail plus proche de son domicile, n'envisageait pas de s'installer définitivement à Malicorne ; que si elle invoque l'état de santé de ses parents âgés, elle n'établit pas, par les pièces qu'elle produit, et notamment un certificat médical peu circonstancié, que sa présence auprès de ceux-ci, au demeurant limitée dans le temps du fait de ses obligations professionnelles, représentait une nécessité absolue ; que la circonstance que ses parents n'avaient pas recours à une aide ménagère est sans incidence à cet égard ; que si la requérante indique qu'elle possédait des bovins au Merlerault nécessitant sa présence régulière dans cette commune, elle n'apporte pas la preuve de ce que cette situation aurait été dictée par un choix autre que de pure convenance personnelle ; que, dès lors, l'administration était fondée à regarder le maintien du domicile à une distance aussi éloignée du lieu de travail comme présentant un caractère anormal et à remettre en cause, en application des dispositions précitées de l'article 83 du code général des impôts, le caractère déductible des frais entraînés par la double résidence ; que si Mlle X soutient à titre subsidiaire que lesdites dispositions l'autorisent à déduire ses frais de déplacement entre son domicile et son lieu de travail dans la limite de 40 km, elle ne justifie pas que le montant de ces frais excéderait la déduction forfaitaire de 10 % qui lui a été appliquée ;
Considérant que Mlle X n'est fondée à se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, ni de l'instruction administrative 5 F-99 du 30 décembre 1998, ni de la documentation administrative 5 F-2542, n°s 4 et 5, du 10 février 1999, ni de la réponse ministérielle à M. Fournier sénateur, reprise dans l'instruction administrative 5 F-18-01 du 13 septembre 2001, dès lors que ces doctrines ne donnent pas de la loi fiscale une interprétation différente de celle dont il vient d'être fait application ;
Sur la déduction des dépenses de travaux immobiliers :
Considérant qu'en vertu de l'article 28 du code général des impôts, les revenus des propriétés bâties sont imposables, dans la catégorie des revenus fonciers, à raison de “la différence entre le montant du revenu brut et le total des charges de la propriété” ; que, selon le I de l'article 31 du même code, ces charges déductibles comprennent notamment : “1 °pour les propriétés urbaines : a) les dépenses de réparation et d'entretien (…) ; b) les dépenses d'amélioration afférentes aux locaux d'habitation, à l'exclusion des frais correspondant à des travaux de construction, de reconstruction ou d'agrandissement (…)” ; qu'au sens de ces dispositions, doivent être regardés comme des travaux de reconstruction, ceux qui comportent la création de nouveaux locaux d'habitation, ou qui ont pour effet d'apporter une modification importante au gros oeuvre, ainsi que des travaux d'aménagement interne qui, par leur importance, équivalent à des travaux de reconstruction, et, comme des travaux d'agrandissement, ceux qui ont pour effet d'accroître le volume ou la surface habitable des locaux existants ;
Considérant que Mlle X a acquis le 17 août 2000, en vue de la donner en location, une maison d'habitation située à Ronai (Orne) comprenant, au rez-de-chaussée, une pièce commune, une laverie et une chambre, et, à l'étage, un grenier ; qu'elle a réalisé dans cet immeuble des travaux qui ont consisté à créer, au rez-de-chaussée, une salle de séjour, une cuisine, une arrière-cuisine, des toilettes et une chambre et, à l'étage, une seconde chambre et une salle de bains ; que si la requérante admet que l'aménagement des combles a eu pour effet d'accroître la surface habitable de la maison, et que les dépenses afférentes à cet aménagement, à l'exception selon elle de celles concernant la salle de bains, ne sont pas déductibles de ses revenus fonciers, elle soutient que les autres travaux auxquels elle a procédé au rez-de-chaussée sont dissociables de ceux réalisés à l'étage et lui ouvrent un droit à déduction ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que les travaux de restructuration du rez-de-chaussée ont consisté, notamment, en la création d'un mur de refend, au remplacement d'un plancher en bois par une dalle en béton afin de consolider la construction, en l'ouverture d'une fenêtre qui avait été précédemment murée et en la redistribution complète du cloisonnement intérieur ; que si certains travaux ont consisté en une simple amélioration de l'existant, ils ne présentent pas un caractère dissociable de ceux précédemment décrits ; que, dans ces conditions, l'administration était fondée à regarder ces travaux, réalisés dans une maison constituant une seule unité d'habitation, qui ont affecté le gros oeuvre de façon significative, comme ne correspondant pas à des dépenses d'entretien, de réparation ou d'amélioration au sens des dispositions précitées de l'article 31 du code général des impôts ; que c'est, par suite, à bon droit qu'elle a refusé la déduction des dépenses litigieuses des revenus fonciers de la requérante qui ne peut utilement se prévaloir de ce que les dispositions du code civil imposent au propriétaire de donner en location un logement décent ;
Considérant que si Mlle X se prévaut, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des documentations administratives 5 D-2224 et 5 D-2225 et d'une réponse ministérielle à M. Carat, sénateur (JO Sénat du 9 février 1982), ces doctrines ne contiennent aucune interprétation de la loi fiscale différente de celle dont il a été fait application ; qu'en ce qui concerne en particulier la possibilité reconnue par la documentation 5 D-2224, n° 39, dans le cas exceptionnel où l'installation d'une salle de bains a donné lieu à l'édification ou l'aménagement d'une construction isolée de l'habitation, de déduire les frais de raccordement ainsi que d'achat et de pose des installations, la requérante n'est pas fondée à s'en prévaloir dès lors qu'en l'espèce, il résulte de l'instruction que la salle de bains a été créée dans le grenier et non dans une construction ajoutée à la maison ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mlle X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à Mlle X la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mlle X est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mlle Anne-Marie X et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
N° 06NT01899
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