Vu la requête, enregistrée le 29 juin 2012, présentée pour M. B... A... demeurant "..., par Me Boamah avocat au barreau de la Seine-Saint-Denis ; M. A... demande à la cour ;
1°) d'annuler le jugement n° 12-2570 du 24 mai 2012 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 6 février 2012 du préfet de la Sarthe portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Sarthe de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans les 15 jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, à défaut que sa situation soit réexaminée dans le même délai et que lui soit remis dans l'attente une autorisation provisoire de séjour, le tout sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient :
- que le refus de titre de séjour est entaché d'un défaut de motivation ; que le préfet n'a pas statué explicitement sur l'existence d'un droit à la vie privée et familiale ni sur l'existence de circonstances exceptionnelles de nature à justifier ou non une régularisation exceptionnelle sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- que le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ; que le préfet s'est borné à viser d'autres fondements que celui dont entendait se prévaloir M. A... ; qu'il fallait regarder sa demande comme étant fondée soit sur le fondement du 7ème alinéa de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, soit sur le fondement de l'article L. 313-14 du même code ;
- que le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions du 7ème alinéa de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il est pris en charge par l'aide sociale à l'enfance depuis son entrée en France et fait l'objet d'un contrat d'accompagnement jeune majeur depuis le 28 juillet 2011 ; qu'il est inscrit en 1ère année de CAP maintenance des bâtiments de collectivités ; qu'il a obtenu une moyenne de 16,4 pour le premier semestre 2011/2011 ; qu'il poursuit ses études en vue d'obtenir une formation professionnelle ; que sa volonté d'intégration en France est incontestable ; qu'il n'a plus d'attache effective dans son pays d'origine ;
- que le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de sa mesure sur sa situation personnelle ;
- que préfet a méconnu les dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il remplit les conditions requises par cet article ;
- que le préfet a méconnu les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que l'absence de prise en compte de la particulière vulnérabilité de l'isolement tant géographique que psychologique entache d'illégalité le refus de lui délivrer un titre de séjour ;
- que le préfet a méconnu l'étendue de sa compétence en s'estimant lié par les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 9 octobre 2012 présenté par le préfet de la Sarthe qui conclut au rejet de la requête ;
Le préfet soutient :
- que le refus de titre de séjour est suffisamment motivé ;
- que la situation de M. A... a fait l'objet d'un examen particulier ;
- que les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'ont pas été méconnues ;
- que le refus de titre de séjour ne méconnait pas les dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- que le refus de titre de séjour ne méconnait pas les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- que le préfet n'a pas méconnu l'étendue de sa compétence ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 janvier 2013 :
- le rapport de Mme Tiger, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Martin, rapporteur public ;
1. Considérant que M. A..., ressortissant indien, relève appel du jugement du 24 mai 2012 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 février 2012 du préfet de la Sarthe portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : "A titre exceptionnel et sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire prévue au 1° de l'article L. 313-10 portant la mention "salarié" ou la mention "travailleur temporaire" peut être délivrée, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, à l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Le respect de la condition prévue à l'article L. 311-7 n'est pas exigé. " ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A... est entré en France en mars 2010 à l'âge de 16 ans et a été placé le 19 avril 2010 auprès des services de l'aide sociale à l'enfance de Seine Saint-Denis en qualité de mineur isolé ; qu'il a ensuite bénéficié d'un contrat " jeune majeur " pris en charge par le département de Seine Saint-Denis à compter du 9 juillet 2011 ; qu'en raison de ses facilités d'apprentissage, M. A... a pu intégrer en janvier 2010 la première année de CAP "maintenance des bâtiments des collectivités", puis en septembre 2011, la deuxième année de cette même formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle ; que le requérant est l'un des meilleurs éléments de sa classe, ainsi qu'en attestent ses bulletins scolaires ; qu'il démontre une réelle volonté d'intégration en perfectionnant son français et en participant aux activités culturelles et sportives qui lui sont proposées ; qu'il se rend un week-end sur deux et durant une partie des vacances scolaires dans une famille d'accueil et bénéficie d'un avis favorable de la structure d'accueil quant à son intégration dans la société française ; que M. A... affirme sans être utilement contredit qu'il n'a plus de contact avec sa mère et ses soeurs résidant en Inde ; qu'ainsi, au regard des circonstances particulières de l'espèce, l'arrêté contesté du 6 février 2012 du préfet de la Sarthe, obligeant le requérant à interrompre ses études en cours d'année et lui faisant perdre une chance sérieuse d'obtenir un diplôme à finalité professionnelle en cours de préparation, est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Considérant qu'il résulte nécessairement du présent arrêt, eu égard à son motif, et sous réserve d'un changement dans la situation de droit ou de fait de l'intéressé, d'enjoindre au préfet de la Sarthe de délivrer un titre de séjour à M. A... dans le délai de deux mois à compter de la notification dudit arrêt, sans qu'il y ait lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement au conseil de M. A... de la somme de 1 200 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de la renonciation de cet avocat à percevoir la somme correspondant à la part contributive versée par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 12-2570 du tribunal administratif de Nantes du 24 mai 2012 et l'arrêté du préfet de la Sarthe du 6 février 2012 portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français dans le délai de 30 jours sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Sarthe de délivrer un titre de séjour à M. A... dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera au conseil de M. A... la somme de 1 200 (mille deux cents) euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de la renonciation de cet avocat à percevoir la somme correspondant à la part contributive versée par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A...et au ministre de l'intérieur.
Une copie sera transmise au préfet de la Sarthe.
Délibéré après l'audience du 7 janvier 2013, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- M. Villain, premier conseiller,
- Mme Tiger, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 25 janvier 2013.
Le rapporteur,
N. TIGERLe président,
L. LAINÉ
Le greffier,
S. BOYÈRE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 12NT01753 2
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