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20/12/2013 | FRANCE | N°11NT02546

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 20 décembre 2013, 11NT02546


Vu la requête, enregistrée le 7 septembre 2011, présentée pour la Société Géode Environnement, dont le siège est 22, Chemin Vert à Nantes (44300), représentée par son gérant, M. A..., par Me Oillic, avocat au barreau de Nantes ; la Société Géode Environnement demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rennes n° 0802094 du 15 juillet 2011 en tant qu'il a limité à 2 500 euros la somme que la communauté de communes de la Presqu'île de Rhuys a été condamnée à lui verser en réparation du préjudice résultant de l'attribution irrégu

lière du marché d'exploitation et de gestion de la déchetterie de la Lande du Matz ...

Vu la requête, enregistrée le 7 septembre 2011, présentée pour la Société Géode Environnement, dont le siège est 22, Chemin Vert à Nantes (44300), représentée par son gérant, M. A..., par Me Oillic, avocat au barreau de Nantes ; la Société Géode Environnement demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rennes n° 0802094 du 15 juillet 2011 en tant qu'il a limité à 2 500 euros la somme que la communauté de communes de la Presqu'île de Rhuys a été condamnée à lui verser en réparation du préjudice résultant de l'attribution irrégulière du marché d'exploitation et de gestion de la déchetterie de la Lande du Matz de Sarzeau à la SA Sita Ouest ;

2°) de condamner la communauté de communes de la Presqu'île de Rhuys à lui verser :

- à titre principal, la somme de 57 336 euros ;

- à titre subsidiaire, la somme de 19 112 euros ;

- à titre infiniment subsidiaire, la somme de 2 500 euros ;

3°) d'assortir l'indemnité allouée des intérêts au taux légal à compter du 12 mars 2008 ainsi que des intérêts des intérêts ;

4°) de mettre à la charge de la communauté de communes de la Presqu'île de Rhuys le versement de la somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et les dépens ;

elle soutient que :

- le tribunal administratif de Rennes a reconnu qu'elle n'était pas dépourvue de toute chance de remporter le marché, mais a refusé de lui reconnaître une chance sérieuse d'obtenir le marché ;

- il n'est pas contestable que son offre a été rejetée de manière irrégulière, la procédure d'attribution du marché étant elle-même irrégulière aux motifs que le Syndicat intercommunal des ordures ménagères (SICTOM) de Rhuys avait retenu trois critères de choix de l'offre économiquement la plus avantageuse, pris en compte par ordre d'importance relative décroissante, alors que le recours à la pondération était obligatoire en 2004 ; en réalité lors de l'examen des offres, le SICTOM de Rhuys n'a pas respecté la règle qu'il a énoncée et il a appliqué, sans en donner le poids respectif, des critères pondérés, puisque c'est au vu de ces trois critères et non d'un seul, le premier classé par ordre d'importance, que le choix a été effectué ;

- le tribunal a commis une erreur de droit en donnant des effets juridiques à une décision de classement des offres qui est irrégulière et en n'appréciant pas lui même les offres en lieu et place de la commission d'appel d'offres, au regard des trois critères annoncés, alors même que cette mission lui incombe ;

- elle avait une chance sérieuse de remporter le marché ;

- c'est à tort que le tribunal administratif de Rennes a considéré que l'offre de la SA Sita Ouest ne pouvait être regardée comme non conforme en raison du volume du caisson proposé ;

- la commission d'appel d'offres a commis une erreur de droit en confondant " qualité " et " diversité " des filières de recyclage, estimant ainsi que la S.A. Sita Ouest proposait des filières de recyclage plus diversifiées que la sienne ;

- c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté ses conclusions au motif qu'elle n'apportait pas la preuve qu'elle avait perdu une chance sérieuse d'obtenir l'attribution du marché ; la communauté de communes de la Presqu'île de Rhuys n'a donné aucune suite à sa demande de communication des offres des autres candidats et du rapport d'analyse des offres ; il appartenait au tribunal, dans le cadre de ses pouvoir d'instruction, de demander toute pièce ou document utile et, après que le rapporteur eût demandé lors de l'audience à la communauté de communes de la Presqu'île de Rhuys de communiquer ces pièces et documents et à défaut de réponse de cette dernière, de condamner la collectivité à l'indemniser de l'intégralité de son manque à gagner ;

- dès lors que l'analyse des offres devait être effectuée selon un ordre de priorité décroissant, l'offre de la société Charier DV aurait dû être retenue puisque le premier critère " valeur technique " permettait selon le rapport de présentation, de distinguer favorablement cette offre de celles des autres candidats ;

- non seulement la commission d'appel d'offres n'a pas respecté la règle qu'elle s'était fixée puisqu'elle a mis en oeuvre globalement les trois critères, et non dans un ordre décroissant, mais encore, contrairement au code des marchés publics en vigueur, ces critères devaient être pondérés, et la pondération devait être énoncée dans l'avis d'appel public à concurrence ; les modalités d'analyse des offres des quatre candidats étant illégales, la communauté de communes ne peut soutenir que son offre était insuffisante au regard des critères " valeur technique " et " qualité des filières de recyclage ", précisément parce que le SICTOM de Rhuys n'avait pas préalablement affiché la valeur relative de ces critères ; si les critères avaient été pondérés et les offres notées au regard de ces critères, et non pas classées, il ne pouvait être exclu, compte tenu du poids généralement important du critère prix, que son offre aurait été classée première, ainsi qu'il ressort du rapport de présentation ;

- la commission d'appel d'offres a commis une erreur manifeste d'appréciation en classant son offre quatrième au regard du critère " valeur technique " ;

- l'offre de la S.A. Sita Ouest était irrégulière dès lors qu'il est manifeste, à la lecture du bordereau des prix et du détail estimatif, que des chiffres ont été modifiés ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la mise en demeure adressée à la communauté de communes de la Presqu'île de Rhuys le 24 novembre 2011 en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 23 décembre 2011, présenté pour la communauté de communes de la Presqu'île de Rhuys, représentée par son président en exercice, par Me Marchand, avocat au barreau de Nantes, qui conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la société Géode Environnement une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que :

- un requérant est sans intérêt à faire appel des dispositions d'un jugement conformes aux conclusions qu'il avait présentées en première instance ; le tribunal administratif de Rennes ayant fait droit aux conclusions de la requérante tendant à la condamner au paiement de la somme de 2 500 euros en raison du fait qu'elle n'était pas dépourvue de toute chance de remporter le marché, de telles conclusions d'appel sont irrecevables ;

- la requérante ne disposait en aucun cas d'une chance sérieuse de remporter le marché, et donc d'obtenir l'indemnisation de son manque à gagner ;

- l'annulation de la décision de la commission d'appel d'offres n'a pas pour effet de priver les premiers juges de la possibilité de retenir les éléments d'analyse de ladite commission ; la référence au classement des offres, et donc aux mérites et inconvénients de chacune d'elles, n'est pas contestable en soi, dès lors que l'annulation de la décision de la commission d'appel d'offres ne repose pas sur une erreur d'appréciation des offres mais seulement sur une irrégularité procédurale, à savoir l'application de la méthode de la hiérarchisation et non de la pondération des critères de sélection des offres ;

- dans le cadre d'une demande indemnitaire, il n'appartient pas au juge administratif de se substituer à la commission d'appel d'offres pour procéder à un nouveau classement, mais seulement de vérifier si cette commission n'a pas commis une erreur manifeste dans l'appréciation des mérites respectifs des offres, et ceci afin d'apprécier l'éventuelle chance dont disposait le requérant d'obtenir le marché ;

- en proposant un caisson de 15 m3, la société retenue n'a fait que proposer un équipement de capacité supérieure, sans que cela puisse être considéré comme ne répondant pas aux besoins du pouvoir adjudicateur tels qu'énoncés dans le CCTP ; le fait de proposer un équipement de qualité supérieure à celle exigée par le pouvoir adjudicateur ne saurait rendre l'offre irrecevable ;

- si le rapport de présentation fait bien état de surcharges dans l'offre de l'attributaire, il précise également que celle-ci " est lisible sans ambigüité " ; c'est donc de manière parfaitement régulière que le pouvoir adjudicateur n'a pas déclaré cette offre irrégulière ;

- en 2004, date de la passation du marché, le recours à la pondération des critères de sélection des offres n'était pas, contrairement à ce que laisse entendre la requérante, obligatoire, l'article 53 du code des marchés publics laissant une alternative aux acheteurs publics entre pondération et hiérarchisation ; dans ces conditions, l'analyse des offres a été régulièrement faite sur la base des critères hiérarchisés tels qu'indiqués dans l'avis de marché ;

- le critère de la " qualité des filières de recyclage " n'avait pas pour but de vérifier que les centres de traitement étaient ou non pourvus des autorisations requises au titre de la réglementation des installations classées - le respect de ces exigences étant supposé -, mais de permettre à la collectivité d'évaluer la souplesse et l'efficacité de l'intervention de l'attributaire ; ce n'est donc pas le nombre de filières qui importait mais la possibilité pour la collectivité de bénéficier, pour un coût identique, d'un choix de filières plus varié et plus sûr dans le temps ;

- le prix ne constituait que le deuxième critère de sélection des offres par ordre d'importance ; ainsi, dès lors qu'il était démontré que la valeur technique de l'offre de la Société Géode Environnement était inférieure, le prix des prestations ne pouvait permettre de qualifier son offre d'économiquement la plus avantageuse ;

- le pouvoir adjudicateur a procédé au classement des offres sur la base du contenu des offres techniques et non sur le volume des documents produits ;

- la requérante prétend à tort que le pouvoir adjudicateur n'aurait pas mis le tribunal en mesure de statuer sur sa requête en s'abstenant de produire l'intégralité des documents que celle-ci exigeait en première instance ; compte tenu des documents communiqués par ses soins, le tribunal était parfaitement en mesure d'apprécier si la société requérante disposait ou non d'une chance d'obtenir le marché, comme le démontre d'ailleurs l'analyse à laquelle il s'est livré ;

- dépourvue de toute chance d'obtenir le marché, la Société Géode Environnement ne peut prétendre à l'indemnisation du préjudice allégué ; en tout état de cause, le préjudice réclamé par la société appelante est manifestement surévalué ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 17 janvier 2012, présenté pour la Société Géode Environnement, qui conclut aux mêmes fins que la requête, à l'exception des conclusions présentées à titre infiniment subsidiaire ;

elle soutient, en outre, que :

- pour qualifier la perte de chance, le tribunal n'a pas retenu les éléments d'analyse de la commission d'appel d'offres, qui n'ont d'ailleurs pas été communiqués, mais le classement irrégulier des offres ; dès lors que le pouvoir adjudicateur ne met pas le juge en capacité de qualifier la perte de chance du candidat évincé, il convient de le sanctionner en qualifiant la perte de chance de " perte de chance sérieuse " ;

- les caissons de 15 m3 dépassaient nécessairement la charge maximale puisque

l'article 10.2 du CCTP précise que les conteneurs doivent être pleins ;

- la communauté de communes de la Presqu'île de Rhuys ne dit pas en quoi des conteneurs à déchets de 30 m3 répondent mieux à ses besoins et aux attentes des usagers ;

Vu le nouveau mémoire en défense, enregistré le 9 mars 2012, présenté pour la communauté de communes de la Presqu'île de Rhuys, qui conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire, par les mêmes moyens ;

elle soutient, en outre, que :

- contrairement à ce qu'affirme la requérante, le CCTP n'exigeait pas que le transport des conteneurs se fasse au maximum de leur capacité potentielle mais devait nécessairement être entendu comme au maximum de leur capacité réglementaire, c'est-à-dire dans le respect de la charge maximale autorisée sur les véhicules ;

- le pouvoir adjudicateur et la commission d'appel d'offres étaient parfaitement libres d'estimer que, eu égard aux marchés précédents ainsi qu'à l'organisation technique, administrative et financière du service, la fourniture de bacs de 30 m3 paraissait plus appropriée ; c'est donc sans erreur de fait que la commission d'appel d'offres a pu considérer, sur la base de l'organisation du service décrite au CCTP, que la fourniture de bacs de 30 m3 correspondait mieux à ses besoins ;

Vu le courrier en date du 4 octobre 2013 adressé aux parties en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative ;

Vu l'ordonnance en date du 22 octobre 2013 portant clôture immédiate de l'instruction en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative ;

Vu le jugement rendu le 14 février 2008 par le tribunal administratif de Rennes dans l'instance n° 044459 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 décembre 2013 :

- le rapport de M. Madelaine, faisant fonction de premier conseiller ;

- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public ;

- les observations de Me Oillic, avocat de la société Géode Environnement ;

- et les observations de Me Gourdain, avocat de la communauté de communes de la Presqu'île de Rhuys ;

1. Considérant qu'en août 2004, le Syndicat intercommunal des ordures ménagères (SICTOM) de Rhuys a engagé une procédure d'appel d'offres ouvert en vue de la passation d'un marché à bons de commande, d'une durée d'un an reconductible deux fois, pour la gestion et l'exploitation de la déchetterie de la Lande du Matz de Sarzeau ; que la Société Géode Environnement a présenté une offre ; que, par une lettre du 13 octobre 2004, le Président du SICTOM de Rhuys l'a informée que cette offre n'avait pas été retenue ; que le marché a été attribué à la S.A. Sita Ouest pour un montant annuel estimé de 159 486,71 euros TTC et signé le 27 octobre 2004 ; que, par un jugement du 14 février 2008, devenu définitif, le tribunal administratif de Rennes a, sur requête de la société Géode Environnement, annulé la décision du SICTOM de Rhuys rejetant son offre, la délibération du comité syndical autorisant son président à signer le marché avec la S.A. Sita Ouest, ainsi que la décision du président de signer le marché, et a enjoint au SICTOM de Rhuys de provoquer la résolution du contrat, soit d'un commun accord entre les parties soit en saisissant le juge, aux motifs que le syndicat ne pouvait faire application de la procédure du marché à bons de commande visée à l'article 71 du code des marchés publics, dès lors qu'il n'établissait pas qu'il lui était impossible de prévoir les quantités de déchets à traiter pour une année, et que l'avis de marché publié ne comportait aucune mention, même succincte, relative aux modalités essentielles de financement du marché ; que toutefois, par le jugement attaqué n° 0802094 du 15 juillet 2011, le tribunal administratif de Rennes n'a fait droit que partiellement à sa demande d'indemnisation du préjudice résultant de l'attribution irrégulière du marché en condamnant la communauté de communes de la Presqu'île de Rhuys, venant aux droits du SICTOM de Rhuys, à lui verser la somme de 2 500 euros correspondant uniquement aux frais de présentation de son offre ; que la Société Géode Environnement relève appel de ce jugement et conclut à sa réformation en tant qu'il n'a pas condamné la communauté de communes de la Presqu'île de Rhuys à lui payer, à titre principal, la somme de 57 336 euros, à titre subsidiaire, la somme de 19 112 euros, en réparation de la perte d'une chance sérieuse de se voir attribuer le marché ;

2. Considérant que lorsqu'une entreprise candidate à l'attribution d'un marché public demande la réparation du préjudice né de son éviction irrégulière de ce marché, il appartient au juge de vérifier d'abord si l'entreprise était dépourvue de toute chance de remporter le marché ; que, dans l'affirmative, l'entreprise n'a droit à aucune indemnité ; que, dans la négative, elle a droit en principe au remboursement des frais qu'elle a engagés pour présenter son offre ; que, dans le cas où l'entreprise avait des chances sérieuses d'emporter le marché, elle a droit à l'indemnisation de l'intégralité du manque à gagner qu'elle a subi ;

Sur la perte d'une chance sérieuse de remporter le marché :

3. Considérant que la société requérante soutient que, si le SICTOM de Rhuys avait suivi une procédure de passation régulière, elle avait une chance sérieuse d'obtenir l'attribution du marché ;

4. Considérant, en premier lieu, que la société Géode soutient que l'offre de la société attributaire aurait dû être déclarée irrecevable car elle proposait, pour les gravats, des caissons d'un volume de 15 m3 incompatible avec la charge maximale autorisée de 26 tonnes des véhicules chargés de leur enlèvement ; que l'article 10.2 du CCTP stipule que " l'enlèvement des conteneurs pleins fait l'objet de la signature d'un bordereau en deux exemplaires indiquant la nature, le poids, le volume, la destination des déchets ainsi que le jour et l'heure d'enlèvement " et précise que " les déchets collectés doivent être pesés sur un pont bascule et les tickets de pesée doivent être joints au bordereau d'enlèvement " ; qu'ainsi ces prescriptions doivent être entendues comme exigeant uniquement que le transport des conteneurs se fasse au maximum de leur capacité réglementaire, c'est-à-dire dans le respect de la charge maximale des véhicules autorisée par le code de la route, ainsi que l'exige par ailleurs l'article 8.2 du CCTP ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que si l'offre de la S.A. Sita Ouest comporte des ratures et surcharges, rien ne permet d'affirmer que celles-ci correspondent à des modifications apportées après le dépôt de l'offre ; que, par suite, l'allégation selon laquelle l'offre de la S.A. Sita Ouest serait irrégulière pour ce motif doit être écartée ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort de l'avis d'appel public à la concurrence du marché litigieux que les trois critères " pris en compte lors du jugement des offres [étaient] par ordre d'importance relative décroissante : / 1. Valeur technique des prestations. / 2. Prix des prestations. / 3. Qualité des filières de recyclage. " ; qu'il résulte toutefois des dispositions du dernier alinéa du II de l'article 53 du code des marchés publics, dans sa version de 2004 applicable au marché en cause, que les critères de choix des offres sont pondérés ou à défaut hiérarchisés et que c'est donc seulement si la pondération des critères d'attribution est impossible que la personne publique qui s'apprête à passer un marché peut se borner à procéder à leur hiérarchisation ; que le SICTOM de Rhuys, qui n'a pas justifié d'une telle impossibilité, aurait donc dû pondérer les critères d'attribution et non les hiérarchiser ; que, toutefois, il résulte de l'instruction que, pour procéder au choix de l'entreprise attributaire du marché, la commission d'appel d'offres a accordé la même importance aux trois critères susmentionnés, et n'a pas appliqué la hiérarchisation initialement prévue mais les a en fait pondérés en leur attribuant un coefficient équivalent, pour ensuite doter chacun d'eux d'une note de 1 à 4, l'offre ayant la note cumulée la plus faible remportant le marché ; que l'offre de la société Geode Environnement, arrivée en dernière position des quatre entreprises candidates, a ainsi été classée, respectivement, quatrième pour la valeur technique, première pour le prix et quatrième pour la qualité des filières de recyclage ; qu'il résulte de ce qui précède que, s'il est constant que la procédure d'attribution du marché était irrégulière, les trois critères ont finalement été mis en oeuvre suivant une méthode de pondération conforme aux dispositions du dernier alinéa du II de l'article 53 du code des marchés publics ; que, dans ces conditions, la Société Géode Environnement n'est pas fondée à soutenir que dès lors qu'elles ont été émises dans le cadre d'une procédure irrégulière l'ensemble des appréciations de la commission d'appel d'offres devraient être écartées pour déterminer si elle avait une chance sérieuse d'emporter le marché ;

7. Considérant, en quatrième lieu, que l'article 11 du CCTP autorisait chaque candidat à proposer pour certains types de déchets les sites de traitement les mieux adaptés et que la Société Géode Environnement ne peut dès lors sérieusement soutenir que le critère de la qualité des filières de recyclage n'était pas de nature à permettre de départager les offres au seul motif que cet article imposait par ailleurs certains centres de valorisation et d'élimination et que le SICTOM de Rhuys se réservait " le droit d'imposer à l'exploitant des repreneurs dont les conditions lui [sembleraient] plus intéressantes " ; que la commission d'appel d'offres a pu sans commettre d'erreur de droit, pour apprécier la pertinence des offres au regard du critère de la qualité des filières de recyclage, se baser sur " la possibilité pour la collectivité de bénéficier, pour un coût identique, d'un choix de filières plus varié et plus sûr dans le temps ", et ce " notamment dans l'hypothèse d'une saturation au cours du marché d'un site de collecte " ; que la diversité des sites de collecte constituant ainsi une garantie de la qualité des filières de recyclage, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que la commission d'appel d'offres se serait davantage fondée sur le nombre de filières que sur leur qualité ;

8. Considérant, en cinquième lieu, qu'il résulte de l'instruction que, contrairement à ce que fait valoir la société Geode Environnement, la commission d'appel d'offres n'a pas interprété son offre comme méconnaissant l'exigence du CCTP prévoyant une ouverture de la déchetterie le dimanche matin de 9H à 12H et ne l'a pas dévalorisée à tort pour un tel motif dans l'appréciation de sa valeur technique ;

9. Considérant, en sixième lieu, qu'en se bornant à soutenir qu'il n'est pas établi que la fourniture de caissons de 40 m3, qu'elle proposait pour le recueil des déchets autres que les gravats, répondait de façon moins adéquate aux besoins des usagers, la Société Géode Environnement n'établit pas elle-même que la commission d'appel d'offres aurait entaché son appréciation du critère de la valeur technique d'une erreur manifeste au motif qu'elle a estimé au regard de l'exigence d'adaptation à l'organisation et au fonctionnement de la déchetterie tels que décrits à l'article 6 du CCTP " que la fourniture de bacs de 30 m3 correspondait mieux à ses besoins " ;

10. Considérant ainsi que la Société Géode Environnement n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, qu'en raison des irrégularités dont a été entachée la procédure de passation elle aurait perdu une chance sérieuse d'obtenir l'attribution du marché ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Géode Environnement n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a limité à 2 500 euros la somme que la communauté de communes de la Presqu'île de Rhuys a été condamnée à lui verser, en réparation du préjudice résultant de l'attribution irrégulière du marché d'exploitation et de gestion de la déchetterie de la Lande du Matz de Sarzeau à la SA Sita Ouest, et a rejeté le surplus de sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la Société Géode Environnement à payer à la communauté de communes de la presqu'île de Rhuys une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'en revanche ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la communauté de communes de la presqu'île de Rhuys, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande la société Géode Environnement au même titre ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la Société Géode Environnement est rejetée.

Article 2 : La Société Géode Environnement versera à la communauté de communes de la Presqu'île de Rhuys la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à la Société Géode Environnement et à la communauté de communes de la presqu'île de Rhuys.

Délibéré après l'audience du 2 décembre 2013, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- Mme Aubert, président-assesseur,

- M. Madelaine, faisant fonction de premier conseiller.

Lu en audience publique le 20 décembre 2013.

Le rapporteur,

B. MADELAINE

Le président,

L. LAINÉ

Le greffier,

N. CORRAZE

La République mande et ordonne au préfet du Morbihan en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 11NT025462


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 11NT02546
Date de la décision : 20/12/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: M. Bernard MADELAINE
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : OILLIC

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2013-12-20;11nt02546 ?
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