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19/12/2014 | FRANCE | N°13NT00967

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 19 décembre 2014, 13NT00967


Vu la requête, enregistrée le 3 avril 2013, présentée pour le préfet du Loiret par Me Moulet, avocat au barreau d'Orléans ; le préfet du Loiret demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1203559 du 14 février 2013 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a annulé sa décision du 9 mai 2012 refusant l'admission provisoire au séjour au titre de l'asile de Mme B... ;

2°) de mettre à la charge de Mme B... le versement de la somme de 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

il soutient que :

- la demande d

'asile de Mme B... relevait des dispositions du 4° de l'article L. 741-4 du code de l'en...

Vu la requête, enregistrée le 3 avril 2013, présentée pour le préfet du Loiret par Me Moulet, avocat au barreau d'Orléans ; le préfet du Loiret demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1203559 du 14 février 2013 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a annulé sa décision du 9 mai 2012 refusant l'admission provisoire au séjour au titre de l'asile de Mme B... ;

2°) de mettre à la charge de Mme B... le versement de la somme de 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

il soutient que :

- la demande d'asile de Mme B... relevait des dispositions du 4° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'elle a attendu plusieurs mois avant de présenter une demande alors que l'étranger est tenu de présenter sa demande dans les plus brefs délais, en particulier s'il est démuni de visa ; sa demande d'asile doit être regardée comme destinée à faire échec à une mesure d'éloignement imminente ;

- les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne sont pas utilement invoquées ; au demeurant, Mme B... n'est pas dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine et ne justifie pas de son intégration à la société française ;

- la demande d'asile de Mme B... a été rejetée par une décision de l'OFPRA du 25 septembre 2012 ;

- Mme B... ne peut utilement invoquer sa situation médicale ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 12 juin 2013, présenté pour Mme B..., par Me Alquier, avocat au barreau de Tours ; Mme B... demande à la cour :

1°) de rejeter la requête ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

elle soutient que :

- le seul fait de n'avoir pas présenté immédiatement une demande d'asile ne permet pas de regarder cette demande comme présentant un caractère abusif ;

- elle est âgée de 66 ans, ne sait ni lire ni écrire ; elle est profondément perturbée par son parcours ;

- le préfet n'était pas tenu de refuser de l'admettre au séjour au titre de l'asile ; son refus est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- contrairement à ce que soutient le préfet, elle a saisi la Cour nationale du droit d'asile d'un recours dirigé contre la décision de rejet de sa demande d'asile par l'office français de protection des réfugiés et apatrides ;

Vu la décision du président de la section administrative du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes du 17 juin 2013 admettant Mme B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 décembre 2014 :

- le rapport de Mme Tiger-Winterhalter, premier conseiller ;

1. Considérant que le préfet du Loiret relève appel du jugement du 14 février 2013 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a annulé sa décision du 9 mai 2012 refusant à Mme B..., de nationalité tchadienne, la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si : (...) 4° La demande d'asile repose sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures d'asile ou n'est présentée qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement prononcée ou imminente. Constitue, en particulier, un recours abusif aux procédures d'asile la présentation frauduleuse de plusieurs demandes d'admission au séjour au titre de l'asile sous des identités différentes. Constitue également un recours abusif aux procédures d'asile la demande d'asile présentée dans une collectivité d'outre-mer s'il apparaît qu'une même demande est en cours d'instruction dans un autre Etat membre de l'Union européenne. Les dispositions du présent article ne font pas obstacle au droit souverain de l'Etat d'accorder l'asile à toute personne qui se trouverait néanmoins dans l'un des cas mentionnés aux 1° à 4°. " ;

3. Considérant que la seule circonstance que Mme B..., entrée en France le 12 janvier 2012 à l'âge de soixante-six ans accompagnée de ses deux petites-filles, n'a entrepris des démarches en vue d'obtenir le bénéfice de l'asile qu'en mai 2012, et non dès son entrée sur le territoire français, ne caractérise pas, en l'absence de circonstances particulières, l'existence d'un recours abusif aux procédures d'asile ; que le préfet ne se prévaut pas utilement du rejet de la demande d'asile de l'intéressée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides par une décision du 25 septembre 2012, postérieure à la décision contestée ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet du Loiret n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a annulé sa décision du 9 mai 2012 refusant de délivrer à Mme B... une autorisation provisoire de séjour ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

5. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge Mme B..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme demandée par le préfet du Loiret au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement, par application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, à l'avocat de Mme B... d'une somme de 1 200 euros au titre des mêmes frais sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive versée par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du préfet du Loiret est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera une somme de 1 200 euros à l'avocat de Mme B..., en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 et sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive versée par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à Mme D...B....

Copie en sera adressée, pour information, au préfet du Loiret

Délibéré après l'audience du 2 décembre 2014, à laquelle siégeaient :

- Mme Aubert, président de chambre,

- M. C..., faisant fonction de premier conseiller,

- Mme Tiger-Winterhalter, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 décembre 2014.

Le rapporteur,

N. TIGER-WINTERHALTER Le président,

S. AUBERT

Le greffier,

M. A...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 13NT00967


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 13NT00967
Date de la décision : 19/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme AUBERT
Rapporteur ?: Mme Nathalie TIGER-WINTERHALTER
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : MOULET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-12-19;13nt00967 ?
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