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15/03/2018 | FRANCE | N°16NT01265

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 15 mars 2018, 16NT01265


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif d'Orléans de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée afférents à la période du 1er janvier 2010 au 20 septembre 2012 et de lui accorder le bénéfice du sursis de paiement prévu par l'article L. 277 du livre des procédures fiscales.

Par le jugement n° 1403055 du 23 février 2016, le tribunal administratif d'Orléans a, à l'article 1er, prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions tendant au b

néfice du sursis de paiement et, à l'article 2, rejeté le surplus de sa demande.

Proc...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif d'Orléans de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée afférents à la période du 1er janvier 2010 au 20 septembre 2012 et de lui accorder le bénéfice du sursis de paiement prévu par l'article L. 277 du livre des procédures fiscales.

Par le jugement n° 1403055 du 23 février 2016, le tribunal administratif d'Orléans a, à l'article 1er, prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions tendant au bénéfice du sursis de paiement et, à l'article 2, rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 19 avril 2016, M.B..., représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler l'article 2 de ce jugement ;

2°) de faire droit à sa demande à fin de décharge.

Il soutient que :

- le service n'a pas communiqué, en méconnaissance de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, les procès-verbaux de gendarmerie sur lesquels il s'est fondé pour établir l'imposition ;

- le service n'a pas démontré qu'il a exercé une activité de commerçant au regard du code de commerce dès lors qu'il n'a pas effectué les actes de commerce prévus par les articles L. 110-1 et L. 110-2 de ce code de manière habituelle pour rechercher un profit régulier ;

- le service n'a pas davantage démontré qu'il a effectué une telle activité au regard des articles 34 et 156 du code général des impôts en réalisant des opérations à caractère commercial de manière habituelle et dans une intention spéculative ;

- le service s'est uniquement fondé sur ses déclarations consignées dans les procès-verbaux de sa garde à vue de quatre-vingt-seize heures, qu'il a signés sans en comprendre les termes compte tenu notamment de son jeune âge et de son état d'anxiété ;

- s'agissant de l'exercice d'une activité occulte de nature commerciale, il ne disposait pas des moyens financiers ni des relations nécessaires et n'a réalisé aucun profit ;

- ses déclarations ou celles de sa mère telles que relevées par le service ne révèlent pas qu'il avait une intention spéculative et lucrative au moment de l'achat des véhicules ;

- l'administration ne démontre ni la période pendant laquelle cette activité aurait été exercée, ni l'achat dans l'intention de la revente, ni sa volonté de réaliser un profit ;

- s'agissant du chiffre d'affaires afférent à la vente de véhicules, encaissé sur son compte bancaire et en espèces, le vérificateur, en dépit d'une demande en ce sens du 18 septembre 2013, n'a fourni aucune indication sur l'encaissement des chèques de 24 000 euros le 4 octobre 2010, 17 500 euros le 11 avril 2011, 1 000 euros le 21 septembre 2011 et 16 000 euros le 19 juin 2012, sur les versements en espèces de 30 000 euros le 30 novembre 2010 et de 17 000 euros le 21 septembre 2011, ou sur les virements bancaires de 10 150 euros le 9 mars 2011, 4 500 euros le 1er avril 2011 et 1 500 euros le 24 février 2012 ;

- s'agissait du chiffre d'affaires relatif à la vente de véhicules encaissé par chèques sur le compte bancaire de sa mère, le service n'établit pas que les encaissements constatés de 41 700 euros en 2011 et 13 100 euros en 2012 représentent un chiffre d'affaires qu'il aurait réalisé ;

- la fréquence et la nature des achats ne démontre aucune volonté spéculative mais seulement la réalisation de sa passion dès lors qu'il a revendu six véhicules en trois ans et n'a jamais constitué de stock ;

- la majoration n'est pas justifiée dès lors que les rappels ne le sont pas, qu'il n'a jamais rencontré de difficultés avec l'administration fiscale et compte tenu de son jeune âge et de son inexpérience.

Par un mémoire en défense enregistré le 2 novembre 2016, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Delesalle,

- et les conclusions de M. Jouno, rapporteur public.

1. Considérant qu'à la suite d'une transmission d'informations, effectuée par les services de gendarmerie en application de l'article L. 135 du livre des procédures fiscales, M. A... B...a fait l'objet d'un examen de sa situation fiscale personnelle et d'une vérification de comptabilité en matière de bénéfices industriels et commerciaux portant sur la période du 1er janvier 2010 au 20 septembre 2012 ; qu'à son issue, l'administration fiscale lui a notifié notamment, selon la procédure de taxation d'office prévue par le 3° de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales, faute de déclaration de chiffre d'affaires ou de s'être fait connaître d'un centre de formalités des entreprises, une proposition de rectification du 20 août 2013 ; que cette proposition de rectification mentionne que l'intéressé a exercé une activité occulte d'achat-revente de véhicules assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée en application de l'article 256 du code général des impôts et met à sa charge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, assortis de la majoration de 80 % de l'article 1728 du code général des impôts ; que M. B...relève appel du jugement du 23 février 2016 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, de ces rappels d'un montant total de 58 999 euros au titre de la période de janvier 2010 à septembre 2012 ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande. " ;

3. Considérant qu'il résulte de la proposition de rectification du 20 août 2013 que, pour établir l'imposition, le service s'est fondé, outre les éléments indiqués par M.B..., sur les informations fournies par les services de gendarmerie et consistant, selon l'annexe 1, dans les procès-verbaux de gendarmerie d'audition de M. B...et de sa mère et d'un tiers acheteur et sur les copies de chèques déposées sur le compte bancaire maternel obtenues auprès d'un établissement bancaire ; qu'il s'est également fondé, en le mentionnant, sur les éléments obtenus dans le cadre de l'exercice de son droit de communication auprès des mêmes services ainsi que de la banque du requérant ; qu'il a ainsi suffisamment informé M. B...de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers ; que la seule circonstance que, dans ses observations du 18 septembre 2013, M. B...ait demandé la communication d'informations sur les éléments retenus pour établir le chiffre d'affaires de son activité est, par elle-même, sans incidence sur le respect de cette obligation ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que ce dernier ait par ailleurs demandé en vain la communication de documents obtenus de tiers, et notamment des procès-verbaux de gendarmerie ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales doit être écarté ;

Sur le bien-fondé des impositions :

4. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 256 du code général des impôts : " I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel. / II. 1° Est considéré comme livraison d'un bien, le transfert du pouvoir de disposer d'un bien corporel comme un propriétaire. / (...). " ; qu'en vertu de l'article 256 A du même code, sont assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée les personnes qui, quels que soient leur statut juridique, leur situation au regard des autres impôts et la forme ou la nature de leur intervention, effectuent de manière indépendante des activités de commerçant notamment ;

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment de la proposition de rectification du 20 août 2013 reprenant notamment les indications fournies par M. B...lors et à la suite de son entretien avec le service le 21 mai 2013, ainsi que ses déclarations devant les services de la gendarmerie à l'occasion de sa garde à vue et consignées dans des procès-verbaux qui font foi jusqu'à preuve du contraire, que le requérant a, au cours des années 2010 à 2012, effectué six opérations d'achat de plusieurs véhicules suivies de reventes, lesquelles ont été effectuées le plus souvent en quelques mois ; que contrairement à ce qu'il soutient, il résulte de l'instruction, et notamment des procès-verbaux de son audition lors de sa garde à vue des 18, 19 et 20 septembre 2012, qu'il a effectué ces opérations d'achat dans l'intention d'une revente et que la plupart des opérations lui ont d'ailleurs permis de réaliser un bénéfice ; qu'il résulte du tableau adressé par l'intéressé le 19 juin 2013 au service et des informations obtenues par ce dernier, que M. B...a encaissé une somme totale de 121 650 euros sur son compte bancaire par chèques, virements ou espèces, au cours de ces trois années, représentant la vente de six véhicules différents ; qu'il a également reconnu avoir encaissé, pour le compte de l'activité de vente de véhicules de son cousin, un montant de 14 192 euros entre avril et août 2011 ; que, par ailleurs, sa mère a indiqué, lors de son audition par la gendarmerie, que son fils se livrait à une activité de " négoce de véhicules " et a reconnu, le 24 mai 2013 dans une déclaration écrite dont la teneur n'est pas contestée, que les sommes de 41 700 euros en 2011 et de 13 100 euros en 2012, créditées sur son compte par divers chèques, résultaient de l'activité de vente de véhicules de son fils, lequel vivait avec elle à Vierzon ; qu'en se bornant à se prévaloir de manière générale de son état de vulnérabilité ou d'anxiété lors de sa garde à vue, le requérant n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause les mentions figurant sur les procès-verbaux de gendarmerie ; que le nombre limité de transactions ne fait pas, par lui-même, obstacle à ce qu'il soit assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée ; qu'enfin, M. B...ne peut utilement se prévaloir de l'absence de moyens, de stock ou d'un réseau de relations commerciales lui permettant l'exercice d'une activité commerciale ; que, dans ces conditions, l'administration fiscale a pu à bon droit estimer que M.B..., du fait d'une activité d'achat et de revente habituelle de véhicules, avait, à ce titre, la qualité d'assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée au sens du I de l'article 256 du code général des impôts et taxer en conséquence son activité ;

6. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition. " ; qu'aux termes de l'article R. 193-1 du même livre : " Dans le cas prévu à l'article L. 193 le contribuable peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition mise à sa charge en démontrant son caractère exagéré. " ;

7. Considérant que pour déterminer le montant du chiffre d'affaires de l'activité non déclarée de M. B...et par suite le montant des impositions en résultant, le service s'est fondé sur les renseignements communiqués par ce dernier en cours de contrôle, sur les documents obtenus dans le cadre du droit de communication auprès d'une banque ainsi que sur les procès-verbaux de sa garde à vue et de celle de sa mère ; que le requérant, qui se borne à faire état de l'absence de communication d'informations de la part du service ou de son absence de qualité d'acheteur revendeur, n'apporte pas la preuve qui lui incombe de l'exagération des rappels mis à sa charge ;

Sur les pénalités :

8. Considérant que pour appliquer la pénalité de 80 % prévue par le c du 1 de l'article 1728 du code général des impôts " en cas de découverte d'une activité occulte ", le service s'est fondé sur la circonstance que M. B...ne s'était pas fait connaître d'un centre de formalités des entreprises ni n'avait déposé " les déclarations de TVA modèle CA3 " ; que le requérant, qui ne conteste pas ces éléments, ne peut utilement se prévaloir de ce qu'il n'a jamais rencontré de difficultés avec l'administration fiscale, de son jeune âge ou de son inexpérience ; que, par suite, il n'est pas fondé à demander la décharge de ces pénalités ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 15 février 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Bataille, président de chambre,

- M. Delesalle, premier conseiller,

- Mme Malingue, premier conseiller.

Lu en audience publique le 15 mars 2018.

Le rapporteur,

H. DelesalleLe président,

F. Bataille

Le greffier,

C. Croiger

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16NT01265


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 16NT01265
Date de la décision : 15/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BATAILLE
Rapporteur ?: M. Hubert DELESALLE
Rapporteur public ?: M. JOUNO
Avocat(s) : WILNER

Origine de la décision
Date de l'import : 20/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2018-03-15;16nt01265 ?
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