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19/11/2018 | FRANCE | N°17NT03625

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 19 novembre 2018, 17NT03625


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 2 juin 2016 par lequel le maire de Dinard l'a licencié pour insuffisance professionnelle.

Par un jugement n° 1605041 du 5 octobre 2017, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 4 décembre 2017, le 14 juin et le 30 juillet 2018, M. B..., représenté par Me Mlekuz, demande à la cour :

1°) d'annuler le juge

ment du tribunal administratif de Rennes du 5 octobre 2017 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 2 juin 2016 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 2 juin 2016 par lequel le maire de Dinard l'a licencié pour insuffisance professionnelle.

Par un jugement n° 1605041 du 5 octobre 2017, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 4 décembre 2017, le 14 juin et le 30 juillet 2018, M. B..., représenté par Me Mlekuz, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rennes du 5 octobre 2017 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 2 juin 2016 par lequel le maire de Dinard l'a licencié pour insuffisance professionnelle, ainsi que la décision implicite du maire de Dinard rejetant son recours gracieux ;

3°) d'enjoindre au maire de Dinard de le réintégrer et de reconstituer sa carrière depuis la date d'effet de son licenciement, soit le 11 juillet 2016, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Dinard la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté sa demande, dès lors que :

* les faits qui lui sont imputés ne sont pas tous établis, notamment s'agissant des difficultés relationnelles et managériales ;

* les formations dont il a bénéficié étaient notoirement insuffisantes pour lui permettre d'exercer convenablement ses fonctions, ce qui explique que certains rapports n'aient pas pu être remis ; aucune formation ne lui a été dispensée, entre sa prise de poste de chargé de mission et son licenciement, sur les marchés publics, le droit des collectivités locales, les finances publiques, la gestion des ressources humaines, ou la rédaction administrative ;

* le souhait de la commune de l'évincer était déjà ancien et tout a été mis en place pour le voir partir par tout moyen ;

* il n'a pas été destinataire d'une note de " recadrage " du 27 avril 2010, ni d'une note administrative du 4 décembre 2015 sur des absences prétendues injustifiées ; en tout état de causes, ses absences étaient régulières ;

* il n'a pas été muté sur le poste de chargé de mission dans l'intérêt du service afin de mettre un terme à une prétendue situation de souffrance au travail ;

* ses notations et appréciations quant à sa manière de servir étaient très favorables et exemptes de toute critique, il n'a jamais fait l'objet de sanction disciplinaire ;

* il a été muté, en toute connaissance de cause, sur un poste pour lequel il ne disposait ni des connaissances, ni de l'expérience nécessaires ;

* la décision de licenciement contestée est entachée d'une erreur d'appréciation et d'un détournement de pouvoir.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 26 avril 2018 et le 3 juillet 2018, la commune de Dinard conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code du travail ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 89-677 du 7 février 1989 ;

- le décret n° 90-126 du 9 février 1990 ;

- le décret n° 2016-201 du 26 février 2016 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pons,

- les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public,

- les observations de Me Mlekuz, avocat de M.B..., et de MeA..., représentant la commune de Dinard.

Considérant ce qui suit :

1. M.B..., adjoint technique territorial, a été muté à sa demande à compter du 1er janvier 1982 auprès de la commune de Dinard et affecté au service des jardins de cette collectivité. Il a, par la suite, été promu successivement aux grades d'adjoint technique chef, en juin 1985, et d'ingénieur, en janvier 2006, suite à la réussite d'un examen professionnel, puis nommé, en janvier 2009, ingénieur principal. Alors qu'il était chargé de mission auprès du directeur des services techniques depuis juin 2012, il a été licencié pour insuffisance professionnelle par arrêté du 2 juin 2016 du maire de Dinard. Par sa présente requête, M. B...relève appel du jugement du tribunal administratif de Rennes du 5 octobre 2017 ayant rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 2 juin 2016.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Le licenciement de M.B..., ingénieur principal territorial, chargé de mission auprès du directeur des services techniques, pour insuffisance professionnelle, est motivé par le fait que, alors même qu'il avait été mis à même de se former dans d'autres domaines de compétence que ceux qui étaient les siens à l'origine, et ce depuis 2012, cet agent s'est montré incapable de réaliser les diverses missions qui lui avaient été confiées par son supérieur hiérarchique, soit en rendant systématiquement avec retard des notes ou des études inconsistantes, soit en ne donnant aucune suite aux demandes de son directeur, soit, en outre, en refusant purement et simplement de réaliser certaines missions qui lui étaient attribuées. L'autorité locale a aussi relevé que M. B...avait lui-même indiqué, à plusieurs reprises, qu'il n'avait pas les compétences pour réaliser les missions figurant sur sa fiche de poste, " pourtant strictement conformes à ce qui est attendu d'un ingénieur principal ", et qu'il refusait de réaliser des missions qu'il considérait inadaptées à ses compétences. Elle a également relevé qu'aucun élément n'accréditait la thèse que l'intéressé aurait été " mis au placard " et conclu que l'inaptitude de l'agent à exercer ses fonctions d'ingénieur principal était avérée, justifiant la mesure prise à son encontre.

En ce qui concerne l'exactitude matérielle des faits reprochés :

3. En premier lieu, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, M. B...ne conteste pas sérieusement les difficultés relationnelles et managériales à exercer ses fonctions d'encadrement, à l'origine de son affectation à compter de juin 2012 sur le poste de chargé de mission auprès du directeur des services techniques de la commune de Dinard, alors qu'il occupait jusqu'alors les fonctions de chef de service espaces verts-jardinage. Ces difficultés, reconnues par l'intéressé dans un courrier du 16 juin 2011, sont attestées par des courriers du service de santé au travail du Pays de Saint-Malo, d'un agent du service concerné, et du syndicat Force Ouvrière du personnel territorial de la ville de Dinard, ainsi que des constats relevés dans un compte-rendu d'entretien du 21 septembre 2011. Si M. B...peut se prévaloir d'excellentes notations et évaluations professionnelles pour les années 2000, 2001, 2004 et 2009, ainsi qu'en 2012 et 2013, son évaluation 2014 pointe le fait que : " l'adéquation entre le poste et la fonction reste à démontrer ", et l'évaluation 2015 est très négative. A l'exception de ses dénégations, le requérant n'apporte aucun élément probant pour contredire les témoignages produits par la commune de Dinard mettant en évidence les difficultés relationnelles et managériales de l'intéressé. Contrairement à ce qui est allégué, le tribunal, en relevant que le changement d'affectation de M. B... n'était pas à l'origine de la décision contestée, n'a pas retenu que les difficultés managériales de ce dernier n'étaient pas à l'origine de son licenciement. Les circonstances qu'aucune enquête administrative n'ait été diligentée, ou qu'aucune sanction disciplinaire n'ait été prononcée à l'encontre du requérant, ne sont pas de nature à remettre en cause la réalité de ces difficultés.

4. En second lieu, dans le cadre de ses nouvelle fonctions de chargé de mission, telles que définies dans la fiche de poste s'y rapportant, il ressort des pièces du dossier, et notamment des notes de service du directeur des services techniques, supérieur hiérarchique de M.B..., que ce dernier n'a pas rendu différents rapports ou notes qui lui étaient demandés ou les a produits avec retard, ou sans qu'ils puissent alors être exploités de manière opérationnelle par l'autorité locale, compte tenu de leurs lacunes. M. B...a ainsi refusé d'établir un dossier de consultation des entreprises (DCE) pour la fourniture annuelle du fleurissement estival de la commune et il n'a pas rendu les rapports ou notes demandés en septembre et octobre 2014 relatifs à l'implantation de blocs sanisette et à l'élagage. De même, l'étude de faisabilité du transfert des serres municipales (mai 2015) restituée, s'est révélée incomplète et inexploitable. Par ailleurs, alors qu'un inventaire des arbres lui avait été confié en juillet 2015, le requérant n'a fourni aucun document à sa hiérarchie sur cette mission, et ce, malgré diverses relances. Il en est de même d'un rapport commandé en novembre 2015 sur la qualité de l'air dans les écoles maternelles et crèches. De plus, pour ce qui est d'une étude sur la faisabilité de la mise en place d'une plateforme de compostage (novembre 2015), M. B...a rendu un document fin décembre suivant dont la teneur n'a pas permis aux décideurs locaux de se déterminer à bon escient, eu égard à son contenu. Enfin, alors qu'il lui avait été confié l'étude de trois scenarii de fleurissement estival de la commune en décembre 2015, il n'y a pas répondu. M.B..., dans ses observations annexées à son évaluation 2015, mentionne d'ailleurs : " Je ne vous ai transmis aucun rapport, difficile de les évaluer ". Le requérant, qui se borne à soutenir qu'il n'avait pas été informé concrètement de la réalité du travail attendu de lui et qu'il n'avait pas reçu de directives claires, ne contredit pas utilement le constat fait par la commune de l'incapacité de l'intéressé à réaliser les diverses missions qui lui avaient été confiées par son supérieur hiérarchique.

5. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que M.B..., une fois promu au grade d'ingénieur territorial, puis nommé sur l'emploi de chargé de mission auprès du directeur des services techniques, a pu bénéficier de formations en informatique, ainsi que de formations sur les marchés publics, le droit des collectivités locales et des finances publiques, la gestion des ressources humaines ou encore la rédaction administrative, dans le cadre de la formation d'adaptation à l'emploi prodiguée par le centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) ou dans le cadre de la formation continue.

6. En quatrième lieu, M. B...ne peut utilement se prévaloir, pour contester la matérialité des faits à l'origine du licenciement en cause, d'absences de service injustifiées reprochées à tort, dès lors que la décision de licenciement en litige n'est pas fondée sur ces absences.

7. Il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que les faits, relevés au point 2 du présent arrêt, et qui fondent la décision attaquée, sont inexacts ou insuffisamment établis.

En ce qui concerne l'erreur d'appréciation :

8. En vertu des dispositions relatives au cadre d'emploi des ingénieurs territoriaux, fonctionnaires de catégorie A de la filière technique, ces agents exercent leurs fonctions dans tous les domaines à caractère scientifique et technique entrant dans les compétences d'une collectivité territoriale ou d'un établissement public territorial, notamment dans les domaines relatifs à l'ingénierie, la gestion technique, l'architecture, les infrastructures et réseaux, la prévention et la gestion des risques, l'urbanisme, l'aménagement et les paysages, l'informatique et les systèmes d'information, assurent des missions de conception et d'encadrement, et peuvent se voir confier des missions d'expertise, des études ou la conduite de projets. Ils sont chargés, suivant le cas, de la gestion d'un service technique, d'une partie du service ou d'une section à laquelle sont confiées les attributions relevant de plusieurs services techniques. Les fonctionnaires ayant le grade d'ingénieur principal, selon les collectivités où ils exercent leurs fonctions, peuvent être placés à la tête d'un service technique, d'un laboratoire d'analyses ou d'un groupe de services techniques dont ils coordonnent l'activité et assurent le contrôle.

9. Eu égard à ce que l'on peut attendre légitimement d'un ingénieur territorial, et à ce qui a été dit précédemment, même si M. B...a bénéficié d'appréciations et de notations satisfaisantes jusqu'en 2013, ainsi que d'avancements d'échelon à l'ancienneté minimale en juillet 2011 et avril 2014, c'est sans commettre d'erreur d'appréciation que le maire de Dinard a pu légalement estimer que l'intéressé ne présentait pas les aptitudes nécessaires à l'exercice des nouvelles fonctions qui lui avaient été confiées, conformes à celles qu'il pouvait normalement statutairement exercer en tant qu'ingénieur territorial principal. Si M. B...fait valoir qu'il avait prévenu l'autorité locale, dès sa nouvelle affectation, qu'il estimait ne pas avoir les aptitudes requises pour exercer le type de fonction en question, dès lors qu'il se considérait comme un " homme de terrain ", il a néanmoins disposé de plus de quatre ans pour s'adapter à ses nouvelles fonctions, outre les formations reçues.

10. Il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée, qui a été prise après avis favorable du conseil de discipline intercommunal, serait entachée d'une erreur d'appréciation.

En ce qui concerne le détournement de pouvoir :

11. Ainsi qu'il vient d'être dit, le licenciement de M. B...trouve son fondement dans son insuffisance professionnelle à exercer les fonctions d'ingénieur. Aucun élément ne permet d'attester que le maire de Dinard aurait cherché à évincer le requérant du personnel communal, en prononçant sa mutation sur le poste de chargé de mission auprès du directeur des services techniques. Les allégations selon lesquelles M.B... aurait été " mis au placard ", ne sont pas étayées, ce dernier ayant régulièrement été convié et ayant participé aux réunions de service organisées par la direction des services techniques en 2013, 2014 et 2015. A cet égard, la production des répertoires téléphoniques de la ville de Dinard ne sont pas de nature à établir la mise à l'écart alléguée. Dans ces conditions, le moyen tiré du détournement de pouvoir dont serait entachée la décision attaquée doit être écarté.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

13. Le présent jugement, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de la requête, n'implique aucune mesure d'exécution. Dès lors, les conclusions visées ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la commune de Dinard, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme réclamée par M.B... au titre des frais liés au litige.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M.B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B...et à la commune de Dinard.

Délibéré après l'audience du 26 octobre 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Lenoir, président de chambre,

- M. Francfort, président-assesseur,

- M. Pons, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 novembre 2018.

Le rapporteur,

F. PONSLe président,

H. LENOIR

La greffière,

E. HAUBOIS

La République mande et ordonne à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17NT03625


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 17NT03625
Date de la décision : 19/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: M. François PONS
Rapporteur public ?: M. LEMOINE
Avocat(s) : SELARL LARZUL BUFFET LE ROUX et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 11/12/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2018-11-19;17nt03625 ?
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