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23/04/2019 | FRANCE | N°18NT02425

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 23 avril 2019, 18NT02425


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Lèves a demandé au juge des référés du tribunal administratif d'Orléans, sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, de condamner solidairement la SARL Guy Leblanc, la SA AXA France Iard, la SA MAF ès qualités d'assureur responsabilité de la SARL L'Atelier d'Architecture J.M. C...- H. D'Arbigny - J.N. Pichot, société liquidée, et la SA Bureau Véritas à lui verser la somme provisionnelle de 130 051,56 euros en réparation des désordres affectant l'installati

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Lèves a demandé au juge des référés du tribunal administratif d'Orléans, sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, de condamner solidairement la SARL Guy Leblanc, la SA AXA France Iard, la SA MAF ès qualités d'assureur responsabilité de la SARL L'Atelier d'Architecture J.M. C...- H. D'Arbigny - J.N. Pichot, société liquidée, et la SA Bureau Véritas à lui verser la somme provisionnelle de 130 051,56 euros en réparation des désordres affectant l'installation de chauffage du bâtiment de restauration scolaire sis 1 bis, rue Antoine de Saint-Exupéry.

Par une ordonnance n° 1704534 du 12 juin 2018, le juge des référés du tribunal administratif d'Orléans a condamné la société Guy Leblanc SARL à verser à la commune de Lèves la somme provisionnelle de 113 400 euros TTC en réparation des désordres affectant l'installation de chauffage du bâtiment de restauration scolaire sis 1 bis, rue Antoine de Saint-Exupéry et la somme provisionnelle de 9 451 euros TTC au titre des dépens.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 25 juin 2018, la société Guy Leblanc, représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) à titre principal, d'annuler l'ordonnance n° 1704534 du 12 juin 2018 par laquelle le magistrat désigné, statuant en référé, a, à la demande de la commune de Lèves, condamné la société Guy Leblanc à lui verser une provision d'un montant de 113 400 euros TTC, une somme de 9 451 euros TTC au titre des dépens, ainsi qu'une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) statuant en référé, de rejeter la demande ;

3°) à titre subsidiaire, de réduire le montant provisionnel à verser à la commune de Lèves à 30 % conformément au rapport d'expertise, soit pour la responsabilité des désordres 37 800 euros et pour les dépens 3 150,52 euros et de condamner la société Axa France Iard à la garantir des condamnations provisionnelles mises à sa charge ;

4°) de mettre à la charge des défendeurs la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que le juge des référés a rejeté l'appel en garantie formé contre la société Axa France IARD au motif qu'elles sont portées devant une juridiction incompétente ; le débat sur la compétence de la juridiction administrative ou judiciaire est une question de fond qui n'a pas à être discutée devant le juge des référés ;

- les opérations d'expertise ne sont pas achevées ;

- le juge des référés a retenu que la responsabilité contractuelle de la société est engagée à hauteur de 90 %, ce qui n'est pas conforme aux conclusions de l'expert.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 août 2018, la société Axa France Iard, représentée par MeD..., conclut à titre principal au rejet de la requête, à titre subsidiaire à ce que les sociétés MAF et Bureau Véritas la garantissent à hauteur de 50 % et de 10 % de toutes les condamnations prononcées à son encontre et à ce que la société Guy Leblanc lui verse la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense et d'appel provoqué, enregistré le 2 novembre 2018, la société Bureau Véritas Construction, qui vient aux droits de la société Bureau Véritas, représentée par MeE..., conclut au rejet de la requête, à la condamnation solidaire de la société Guy Leblanc et son assureur Axa France, de la MAF et de la commune de Lèves à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre et à ce que ce que la société Guy Leblanc ou tous succombants lui versent la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par ordonnance du 9 janvier 2019, prise en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative, la clôture d'instruction a été fixée avec effet immédiat.

Le 20 mars 2019, la mutuelle des architectes français (MAF) a produit un mémoire qui n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des assurances ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Tiger-Winterhalter,

- et les conclusions de M. Bréchot, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La commune de Lèves a décidé, en 2008, de faire édifier un bâtiment de restauration scolaire. La maîtrise d'oeuvre des travaux a été confiée à la société L'Atelier d'Architecture J.M. C...- H. D'Arbigny - J.N. Pichot par acte d'engagement du 28 octobre 2008, tandis que les travaux du lot n°10 - Chauffage gaz et VMC - ont été confiés à la société Guy Leblanc et que la société Bureau Véritas a été chargée du contrôle technique. La réception des travaux de la société Guy Leblanc a été prononcée le 10 juillet 2012 avec des réserves concernant notamment le système de climatisation et de ventilation du bâtiment. Une expertise a été ordonnée par le juge des référés du tribunal administratif d'Orléans le 22 mai 2014. Après que l'expert a déposé son rapport le 19 novembre 2015, la commune de Lèves a demandé, sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, au juge des référés du tribunal administratif d'Orléans de condamner solidairement la SARL Guy Leblanc, la société AXA France Iard, la société MAF en sa qualité d'assureur responsabilité de la société L'Atelier d'Architecture J.M. C...- H. D'Arbigny - J.N. Pichot, société liquidée, et la société Bureau Véritas à lui verser la somme provisionnelle de 130 051,56 euros en réparation des désordres affectant l'installation de chauffage du bâtiment de restauration scolaire. La société Guy Leblanc relève appel de l'ordonnance du 12 juin 2018 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif d'Orléans l'a condamnée à verser à la commune de Lèves une somme provisionnelle de 113 400 euros TTC au titre du coût de la reprise des désordres ainsi que la somme de 9 451 euros TTC au titre des dépens.

2. Selon l'article R. 541-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable.". Il résulte de ces dispositions que pour regarder une obligation comme non sérieusement contestable, il appartient au juge des référés de s'assurer que les éléments qui lui sont soumis par les parties sont de nature à en établir l'existence avec un degré suffisant de certitude. Dans ce cas, le montant de la provision que peut allouer le juge des référés n'a d'autre limite que celle résultant du caractère non sérieusement contestable de l'obligation dont les parties font état.

Sur les conclusions d'appel principal :

3. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise remis le 19 décembre 2015, lequel a un caractère définitif et ne nécessite plus de compléments, que le système de chauffage et de ventilation du bâtiment de restauration scolaire, sous-dimensionné, présente de nombreuses insuffisances et génère des conditions de température inconfortables. Ces désordres sont imputables à la société L'Atelier d'Architecture J.M. C...- H. D'Arbigny - J.N. Pichot qui, alors qu'elle était chargée d'une mission complète de maitrise d'oeuvre, a commis des erreurs de conception, n'a pas prévu la réalisation d'une étude thermique par l'entreprise titulaire du lot n°10 - chauffage gaz - VMC, alors pourtant qu'une telle étude est obligatoire, a élaboré un cahier des charges insuffisamment précis, n'a pas validé les études d'exécution et n'a pas assuré un suivi régulier du chantier. Ces désordres sont également imputables à la société Guy Leblanc qui a accepté d'installer le système de chauffage en l'absence d'étude thermique et n'a pas réalisé les études d'exécution des travaux qui étaient pourtant à sa charge. Enfin, la propre négligence du maître d'ouvrage, qui a insuffisamment précisé ses besoins, a également contribué à la survenance des désordres. En revanche, l'obligation de la société Bureau Véritas à l'égard de la commune de Lèves ne présente pas de caractère non sérieusement contestable dès lors en particulier qu'elle a mentionné, dans ses différents rapports, et notamment dans son rapport final, que l'étude thermique réglementaire n'avait pas été fournie.

4. Ainsi qu'il a été dit au point précédent, en acceptant d'installer le système de chauffage et de ventilation sans disposer de l'étude thermique réglementaire, alors pourtant que celle-ci était indispensable pour réaliser les études d'exécution et en réalisant des notes de calcul entachées de nombreuses lacunes, la société Guy Leblanc a directement contribué, par ses manquements, à la survenance de la totalité des désordres affectant le système de chauffage et de ventilation. Dès lors cette société est débitrice, avec le maitre d'oeuvre, d'une obligation solidaire envers la commune de Lèves. Cette dernière pouvait donc, ainsi qu'elle l'a fait, demander la condamnation de la seule société Guy Leblanc à lui verser une somme provisionnelle au titre des travaux réparatoires nécessaires pour mettre fin aux dommages constatés.

5. Il résulte de ce qui précède que la société Guy Leblanc n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif d'Orléans l'a condamnée à verser à la commune de Lèves la somme provisionnelle de 113 400 euros TTC, correspondant à 90 % du coût des travaux nécessaires à la réparation des désordres affectant l'installation de chauffage du bâtiment de restauration ainsi que la somme provisionnelle de 9 451 euros TTC correspondant à 90 % du montant des dépens, compte tenu de la faute propre du maître d'ouvrage rappelée au point 3.

Sur les conclusions d'appel en garantie présentées par la société Guy Leblanc :

6. Il n'appartient qu'aux juridictions de l'ordre judiciaire de connaître des actions tendant au paiement des sommes dues par un assureur au titre de ses obligations de droit privé, alors même que l'appréciation de la responsabilité de son assuré dans la réalisation du fait dommageable relèverait de la compétence de la juridiction administrative. Il suit de là que les conclusions présentées par la société Guy Leblanc tendant à ce que son assureur, la société Axa France Iard, la garantisse des condamnations prononcées à son encontre doivent être rejetées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître. Contrairement à ce que soutient la requérante, rien ne s'oppose à ce qu'une telle question puisse être tranchée par le juge des référés.

Sur les conclusions d'appel provoqué présentées par la société Axa France Iard :

7. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6, doivent être rejetées les conclusions de la société AXA France Iard tendant à ce que la MAF la garantisse des condamnations prononcées à son encontre.

Sur les conclusions rendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par les parties au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Guy Leblanc est rejetée.

Article 2 : Les conclusions des autres parties sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Guy Leblanc, à la commune de Lèves, à la société Axa France Iiard, à la Mutuelle des Architectes Français et à la société Bureau Véritas Construction.

Délibéré après l'audience du 26 mars 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- Mme Tiger-Winterhalter, présidente assesseure,

- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 23 avril 2019.

La rapporteure,

N. Tiger-WinterhalterLe président,

L. LainéLe greffier,

M B...

La République mande et ordonne au préfet de l'Eure-et-Loir en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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18NT02425


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NT02425
Date de la décision : 23/04/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: Mme Nathalie TIGER-WINTERHALTER
Rapporteur public ?: M. BRECHOT
Avocat(s) : LESNE PASCAL

Origine de la décision
Date de l'import : 30/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2019-04-23;18nt02425 ?
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