Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme G... et Mme E... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 19 juillet 2017, confirmé sur recours gracieux le 24 octobre 2017, par lequel le maire de Quiberon a délivré à la société Quiberon Kermorvan un permis de construire deux immeubles collectifs de trente logements.
Par un jugement n° 1705722 du 14 juin 2019, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, des mémoires et un mémoire récapitulatif, enregistrés les 7 août 2019, 31 janvier 2020, 13 mars 2020 et 17 avril 2020, M. et Mme D... G... et Mme H... E..., représentés par Me B..., demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes ;
2°) d'annuler l'arrêté du 19 juillet 2017, confirmé sur recours gracieux le 24 octobre 2017, par lequel le maire de Quiberon a délivré à la société Quiberon Kermorvan un permis de construire deux immeubles collectifs de trente logements ;
3°) de mettre à la charge solidairement de la commune de Quiberon et de la société Quiberon Kermorvan le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le jugement attaqué est irrégulier ; le principe du contradictoire rappelé à l'article L. 5 du code de justice administrative n'a pas été respecté, dans la mesure où les mémoires en défense, produits par la société Quiberon Kermorvan et la commune de Quiberon, respectivement le 2 mai 2019 et le 3 mai 2019, en réponse à l'information communiquée par le tribunal le 19 avril 2019 selon laquelle il était susceptible de surseoir à statuer, en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article Ub11 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU), ne leur ont pas été communiqués ; l'instruction n'a pas été rouverte suite à la note en délibéré produite par la société Quiberon Kermorvan le 20 mai 2019, laquelle au demeurant ne leur a pas été communiquée ;
- ils justifient d'un intérêt à agir contre l'arrêté du 19 juillet 2017 dès lors qu'ils sont propriétaires des parcelles faisant face au terrain d'assiette du projet, séparées seulement par la rue de Kermorvan ;
- le dossier de permis de construire est incomplet au regard des exigences des articles R. 431-4, R. 431-8 et R. 431-10 du code de l'urbanisme ; la notice architecturale est insuffisante compte tenu de la valeur patrimoniale des maisons environnantes et ne permet pas d'apprécier l'insertion du projet dans son environnement ; la notice est par ailleurs erronée en ce qu'elle énonce que le projet se situe en centre-ville alors qu'il se situe dans un quartier périphérique du centre-ville ;
- l'arrêté du 19 juillet 2017 attaqué a été pris en méconnaissance de l'article R. 431-24 du code de l'urbanisme ;
- il a été pris en violation de l'article Ub 2 du règlement du PLU ;
- il ne respecte pas l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme et l'article Ub 3 du règlement du PLU ;
- il a été pris en méconnaissance de l'article Ub 6 du règlement du PLU ;
- il ne respecte pas l'article Ub 7 du règlement du PLU ;
- il a été pris en violation de l'article Ub 11 du PLU ;
- il ne respecte pas l'article Ub 12 du règlement du PLU.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 29 novembre 2019, 27 février 2020, 12 mars 2020, 28 avril 2020, la société Quiberon Kermorvan, représentée par Me C..., conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge des requérants la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- le jugement du tribunal administratif est irrégulier dès lors qu'il n'a pas rejeté la requête pour défaut d'intérêt à agir ;
- le principe du contradictoire a été respecté par le tribunal administratif ;
- les moyens invoqués par les requérants ne sont pas fondés.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 2 décembre 2019, 27 février 2020, 18 mars 2020, la commune de Quiberon, représentée par Me I..., conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge solidaire des requérants la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- le principe du contradictoire a été respecté par le tribunal administratif ;
- les requérants ne justifient pas d'un intérêt à agir contre le permis de construire ;
- les moyens tirés de la méconnaissance des articles R. 424-7 et L. 332-8 du code de l'urbanisme et de la violation de l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme sont inopérants à l'appui des conclusions à fin d'annulation du permis de construire ;
- les moyens invoqués par les requérants ne sont pas fondés.
Par un courrier du 12 août 2020, les parties ont été informées, en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, que la cour était susceptible de surseoir à statuer pour permettre la régularisation des vices tirés du caractère incomplet du dossier de demande de permis de construire et de la méconnaissance des articles Ub 7 et Ub 11 du règlement du PLU de Quiberon.
Par un mémoire, enregistré le 20 août 2020, la commune de Quiberon conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures par les mêmes moyens.
Par un mémoire, enregistré le 11 septembre 2020, la société Quiberon Kermorvan conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures par les mêmes moyens. Elle fait également valoir que les vices sur le fondement desquels la cour est susceptible de surseoir à statuer sont régularisables compte tenu de la modification du PLU approuvée le 27 septembre 2018.
Par un mémoire, enregistré le 11 septembre 2020, M. et Mme G... et Mme E... concluent aux mêmes fins que leurs précédentes écritures par les mêmes moyens. Ils soutiennent également qu'une modification du projet entraînerait une remise en cause de son économie générale et de sa conception d'ensemble, rendant impossible toute régularisation.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A...,
- les conclusions de M. Mas, rapporteur public,
- les observations de M. et Mme G... et de Mme E..., représentés par Me F... substituant Me B..., celles de la commune de Quiberon, représentée par Me I... et celles de la société Quiberon Kermorvan, représentée par Me C....
Considérant ce qui suit :
1. Par un jugement du 14 juin 2019, le tribunal administratif de Rennes a rejeté la demande de M. et Mme G... et de Mme E... tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 juillet 2017, confirmé sur recours gracieux le 24 octobre 2017, par lequel le maire de Quiberon a délivré à la société Quiberon Kermorvan un permis de construire deux immeubles collectifs de trente logements. M. et Mme G... et Mme E... relèvent appel de ce jugement.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article L. 5 du code de justice administrative : " L'instruction des affaires est contradictoire ".
3. En premier lieu, il ressort des pièces de la procédure de première instance qu'en réponse à un courrier du 19 avril 2019 informant les parties de la possibilité d'un sursis à statuer au regard de l'article Ub 11 du règlement du plan local d'urbanisme, s'agissant de la longueur de la façade sans décrochement, la société Quiberon Kermorvan et la commune de Quiberon ont produit des mémoires respectivement les 2 et 3 mai 2019. Toutefois, dès lors qu'ils ne contenaient aucun élément déterminant dont les requérants n'avaient eu déjà connaissance par les mémoires antérieurs qui avaient été communiqués, la circonstance que les mémoires des 2 et 3 mai 2019 n'aient pas été communiqués n'a pas eu pour effet de porter atteinte au caractère contradictoire de la procédure.
4. En second lieu, lorsqu'il est saisi, postérieurement à la clôture de l'instruction et à l'audience, d'une note en délibéré émanant d'une des parties à l'instance, il appartient au juge administratif d'en prendre connaissance. S'il a toujours la faculté, dans l'intérêt d'une bonne justice, de rouvrir l'instruction et de soumettre au débat contradictoire les éléments contenus dans la note en délibéré, il n'est tenu de le faire à peine d'irrégularité de sa décision que si cette note contient l'exposé soit d'une circonstance de fait dont la partie qui l'invoque n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction et que le juge ne pourrait ignorer sans fonder sa décision sur des faits matériellement inexacts, soit d'une circonstance de droit nouvelle ou que le juge devrait relever d'office.
5. Il ressort des pièces de la procédure de première instance que la note en délibéré du 20 mai 2019 produite par la société Quiberon Kermorvan ne contenait ni une circonstance de fait dont la partie qui l'invoque n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction et que le juge ne pourrait ignorer sans fonder sa décision sur des faits matériellement inexacts, ni une circonstance de droit nouvelle ou que le juge devrait relever d'office. Il suit de là que le tribunal administratif a pu décider de ne pas la communiquer ni de rouvrir l'instruction, sans entacher son jugement d'une irrégularité.
6. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de la méconnaissance du caractère contradictoire de la procédure juridictionnelle suivie devant le tribunal administratif de Rennes doit être écarté.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
7. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : "Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation".
8. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction.
9. Il ressort des pièces du dossier que M. et Mme G... et Mme E..., qui justifient être propriétaires des parcelles situées aux numéros 15 et 17 de la rue de Kermorvan, en face du terrain d'assiette du projet litigieux, en sont les voisins immédiats. Eu égard aux caractéristiques du projet, notamment à ses dimensions et à son implantation en limite séparative côté rue, à moins de dix mètres des parcelles des requérants, la construction aura des conséquences sur leur vue et leur cadre de vie. Il est dès lors établi que la construction est de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de leurs biens. Par suite, la fin de non-recevoir tirée de l'absence d'intérêt à agir des demandeurs doit être écartée.
10. En premier lieu, aux termes de l'article R. 431-4 du code de l'urbanisme : " La demande de permis de construire comprend : / a) Les informations mentionnées aux articles R. 431-5 à R. 431-12 (...) ". Aux termes de l'article R. 431-8 du même code : " Le projet architectural comprend une notice précisant : / 1° L'état initial du terrain et de ses abords indiquant, s'il y a lieu, les constructions, la végétation et les éléments paysagers existants ; / 2° Les partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement et la prise en compte des paysages, faisant apparaître, en fonction des caractéristiques du projet : / a) L'aménagement du terrain, en indiquant ce qui est modifié ou supprimé ; / b) L'implantation, l'organisation, la composition et le volume des constructions nouvelles, notamment par rapport aux constructions ou paysages avoisinants ; / c) Le traitement des constructions, clôtures, végétations ou aménagements situés en limite de terrain ; / d) Les matériaux et les couleurs des constructions ; / e) Le traitement des espaces libres, notamment les plantations à conserver ou à créer ; / f) L'organisation et l'aménagement des accès au terrain, aux constructions et aux aires de stationnement. ". Aux termes, enfin, de l'article R. 431-10 du même code : " Le projet architectural comprend également : / (...) c) Un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain ; / d) Deux documents photographiques permettant de situer le terrain respectivement dans l'environnement proche et, sauf si le demandeur justifie qu'aucune photographie de loin n'est possible, dans le paysage lointain. Les points et les angles des prises de vue sont reportés sur le plan de situation et le plan de masse. ".
11. La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.
12. D'une part, il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet se situe à proximité de la gare, de l'église Notre-Dame-de-Locmaria de Quiberon et de La Poste. Par suite, la notice du dossier de demande de permis de construire n'est pas erronée lorsqu'elle mentionne que le terrain possède un emplacement stratégique en centre-ville, alors même que la zone Uba, à laquelle appartient le terrain d'assiette, est définie par le PLU comme correspondant aux quartiers périphériques du centre-ville.
13. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que le dossier de demande de permis de construire comprend une notice architecturale mentionnant que " l'environnement est constitué de maisons individuelles de type R + combles à R + 2 + combles et au sud par une école et une chapelle " et que " ce secteur possède un emplacement stratégique en centre-ville et est caractérisée par des maisons environnantes à forte valeur patrimoniale ". Il ressort également des pièces du dossier, notamment du règlement graphique du plan local d'urbanisme (PLU) de Quiberon, que la rue de Kermorvan compte trois villas répertoriées comme " bâtiments à forte valeur patrimoniale " dont font partie les deux propriétés des requérants situées en face du terrain d'assiette du projet. Si le dossier de demande de permis de construire comprend huit photographies, deux d'entre elles sont prises dans une rue perpendiculaire, sans lien direct avec le projet de construction et les six autres montrent la chaussée et les trottoirs de la rue de Kermorvan, dans les deux sens de circulation et à plus ou moins de distance du terrain d'assiette. Il s'en suit qu'aucun document ou photographie ne permet de voir les constructions avoisinantes, notamment les trois bâtiments à forte valeur patrimoniale pourtant situées dans la rue et en face de la future construction. Une telle insuffisance est de nature à avoir faussé l'appréciation de l'autorité administrative quant à l'insertion du projet par rapport à son environnement et aux constructions avoisinantes. Dans ces conditions, les requérants sont fondés à invoquer le caractère incomplet du dossier de demande de permis de construire.
14. En deuxième lieu, l'article R. 431-24 du code de l'urbanisme : " Lorsque les travaux projetés portent sur la construction, sur une unité foncière ou sur plusieurs unités foncières contiguës, de plusieurs bâtiments dont le terrain d'assiette comprenant une ou plusieurs unités foncières contiguës, doit faire l'objet d'une division en propriété ou en jouissance avant l'achèvement de l'ensemble du projet, le dossier présenté à l'appui de la demande est complété par un plan de division et, lorsque des voies ou espaces communs sont prévus, le projet de constitution d'une association syndicale des acquéreurs à laquelle seront dévolus la propriété, la gestion et l'entretien de ces voies et espaces communs à moins que l'ensemble soit soumis au statut de la copropriété ou que le demandeur justifie de la conclusion avec la commune ou l'établissement public de coopération intercommunale compétent d'une convention prévoyant le transfert dans leur domaine de la totalité des voies et espaces communs une fois les travaux achevés. ".
15. Il ressort des pièces du dossier, notamment du plan de division annexé au dossier de demande de permis de construire, que le pétitionnaire a demandé un permis valant division au sens de l'article R. 431-24 du code de l'urbanisme. Si le projet est ainsi composé de trois lots dont deux lots non bâtis, il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier que des voies ou espaces communs à ces trois lots sont prévus. Il suit de là que les requérants ne peuvent utilement soutenir que le dossier devait comporter le projet de constitution d'une association syndicale des acquéreurs à laquelle seront dévolus la propriété, la gestion et l'entretien de ces voies et espaces communs ou la convention prévoyant le transfert dans le domaine de la commune de Quiberon de la totalité des voies et espaces communs une fois les travaux achevés.
16. En troisième lieu, aux termes de l'article Ub 2 du règlement du PLU : " En tous secteurs UbbD, UbaD et UbcD : Les constructions nouvelles et extensions sont autorisées sous réserve d'une isolation acoustique et de l'information des futurs occupants. ".
17. L'arrêté du 19 juillet 2017 prévoit dans son article 2 que " toutes dispositions utiles seront prises pour que l'isolation acoustique de la construction réponde aux prescriptions de l'arrêté du 30 mai 1996 relatif à l'isolement acoustique des bâtiments d'habitation contre les bruits ". Il suit de là que le projet a été autorisé sous réserve d'une isolation acoustique conforme à l'arrêté du 30 mai 1996. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article Ub 2 manque en fait et doit dès lors être écarté.
18. En quatrième lieu, aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. ". Aux termes de l'article Ub 3 du règlement du PLU : " Les accès doivent être adaptés à l'opération et aménagés de façon à apporter la moindre gêne à la circulation publique. (...) / Le positionnement des accès doit assurer la sécurité des usagers et leurs abords doivent être dégagés de façon à assurer la visibilité. ".
19. Il ressort des pièces du dossier, notamment des photographies du dossier de demande de permis de construire, que la rue de Kermorvan est une rue à double sens, d'environ huit mètres de largeur, sans virage ni déclivité, permettant ainsi une bonne visibilité en sortie de parcelle. Il en ressort également que cette rue, qui se situe à proximité immédiate du centre-ville, connaît déjà une circulation importante, laquelle n'augmentera pas significativement par la seule réalisation du projet prévoyant trente-deux places de stationnement. Par ailleurs, les requérants ne sauraient utilement soutenir que l'accès au projet se fera en traversant un cheminement piéton prévu par la commune au droit de la construction projetée, dès lors que cet aménagement ne relève pas du permis de construire litigieux. Il suit de là que le projet n'apparaît pas de nature à porter atteinte à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation.
20. En cinquième lieu, aux termes de l'article R. 151-21 du code de l'urbanisme " Dans les zones U et AU, le règlement peut, à l'intérieur d'une même zone, délimiter des secteurs dans lesquels les projets de constructions situés sur plusieurs unités foncières contiguës qui font l'objet d'une demande de permis de construire ou d'aménager conjointe sont appréciés comme un projet d'ensemble et auxquels il est fait application de règles alternatives édictées à leur bénéfice par le plan local d'urbanisme. (...) / Dans le cas d'un lotissement ou dans celui de la construction, sur une unité foncière ou sur plusieurs unités foncières contiguës, de plusieurs bâtiments dont le terrain d'assiette doit faire l'objet d'une division en propriété ou en jouissance, l'ensemble du projet est apprécié au regard de la totalité des règles édictées par le plan local d'urbanisme, sauf si le règlement de ce plan s'y oppose. ". Aux termes de l'article Ub 6 du règlement du PLU : " En tous secteurs / Sauf indications contraires portées aux documents graphiques du présent PLU, les constructions doivent être implantées en retrait d'au moins 3,00 mètres des voies (publiques ou privées) et emprises publiques. / Toutefois, l'implantation de la construction à une distance inférieure ou supérieure peut être imposée pour des motifs d'ordre architectural, d'unité d'aspect et de sécurité (circulation automobile), ou en fonction des dispositions d'un plan d'ensemble. ".
21. Il ressort des pièces du dossier que le permis de construire valant division litigieux prévoit la cession du lot 1 à la commune de Quiberon pour y implanter un parking sur le côté ouest de la parcelle et un cheminement piéton dans la rue de Kermorvan aux droits des futurs immeubles. Il résulte toutefois de l'article R. 151-21 du code de l'urbanisme et en l'absence de dispositions dérogatoires dans le règlement du PLU que le projet doit s'apprécier, pour l'application des règles d'implantation des constructions par rapport aux voies et emprises publiques du règlement du PLU, sans tenir compte de cette cession future. Dans ces conditions, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le retrait de 3 mètres devait être compté à partir du futur cheminement piéton, lequel constituera une voie publique au sens de l'article Ub 6, et non à compter de la rue. De plus, outre que les requérants n'établissent pas que les constructions voisines sont implantées à un retrait en moyenne supérieure à 10 mètres de la rue de Kermorvan, l'implantation de la construction à une distance supérieure à 3 mètres pour des motifs d'ordre architectural, d'unité d'aspect et de sécurité est une faculté prévue par l'article Ub 6 et non une obligation. Il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article Ub 6 du règlement du PLU doit être écarté.
22. En sixième lieu, aux termes de l'article Ub 7 du règlement du PLU relatif à l'implantation des constructions par rapport aux limites séparatives : " Dans les secteurs Uba, Ubb et Ubc : / 1 - A l'intérieur d'une bande de 20 m, comptés à partir de la limite de la voie (ou de la limite du retrait imposé qui s'y substitue), les constructions, lorsqu'elles ne jouxtent pas les limites séparatives, doivent être implantées à une distance de ces limites au moins égale à la moitié de leur hauteur, mesurée à l'égout de toiture, sans pouvoir être inférieure à 3 m. / (...) Dans les opérations d'aménagement d'ensemble, ces dispositions s'appliquent à chaque lot. ". Le lexique du PLU définit l'opération d'aménagement d'ensemble comme toute opération soumise à permis d'aménager, permis groupé ou menée dans le cadre d'une ZAC. Il s'ensuit que le projet litigieux constitue une opération d'aménagement d'ensemble au sens du PLU. En outre, le dernier alinéa de l'article Ub 7 s'oppose à l'application de l'article R. 151-21 du code de l'urbanisme cité au point 20.
23. Il ressort des pièces du dossier, notamment des différents plans du dossier de demande de permis de construire, que le bâtiment A, sur son côté ouest, présente une hauteur de 7 mètres à l'égout du toit. En application de l'article Ub 7 cité au point 22, le bâtiment devait dès lors être implanté à une distance minimale de 3,50 mètres de la limite séparative que constitue la ligne de séparation entre le lot 1 et le lot 2. Il ressort des pièces du dossier que le bâtiment A est implanté à une distance de seulement 3 mètres. Il suit de là que la règle d'implantation des constructions par rapport aux limites séparatives n'est pas respectée, sans que les défendeurs puissent utilement se prévaloir de la cession future et de l'aménagement d'un parking public sur le lot 1.
24. En septième lieu, aux termes de l'article Ub 11 du règlement du PLU relatif à l'aspect extérieur des constructions et aménagement de leurs abords ainsi qu'à la protection des éléments de paysage et du patrimoine naturel et urbain : " En secteur Uba, Ubb, Ubc et Ubd : / 1 - constructions / Les constructions doivent s'intégrer à l'environnement afin de maintenir une unité architecturale et paysagère d'ensemble. / Les différents types d'occupation ou d'utilisation du sol autorisés peuvent être refusés ou n'être accordés que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions ou les aménagements prévus, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou leur aspect extérieur sont de nature à porter atteinte au caractère des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains, ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales. / (...) / En tous secteurs : / (...) Pour la construction principale : / (...) La longueur des façades ne doit pas excéder 20 m, sans décrochement. (...) ".
25. D'une part, il ressort des pièces du dossier que le projet consiste en deux bâtiments d'une hauteur allant jusqu'à R + 2 + combles, reliés par un volume rectangulaire couvert par une toiture terrasse sous lequel passeront les véhicules pour entrer dans le parc de stationnement. La notice du dossier de demande de permis de construire mentionne que le projet intègre une architecture traditionnelle, reprenant les codes des maisons du quartier pour favoriser son insertion, s'agissant des ouvertures traitées de façon verticale, avec des petits bois et de la typologie des balcons. Pour soutenir que le projet porte atteinte au caractère des liens avoisinants, les requérants se prévalent de la présence dans la rue de Kermorvan de trois villas répertoriées comme " bâtiments à forte valeur patrimoniale " par le règlement graphique du PLU de la commune de Quiberon, dont leurs deux propriétés qui se situent en face du projet, lesquelles présentent un style architectural différent de celui du projet. Toutefois, le projet contesté, qui présente des hauteurs différentes correspondant à la hauteur des villas répertoriées, des éléments en retrait et en saillie ayant pour effet d'atténuer son caractère massif et un style architectural reprenant les codes de l'habitat traditionnel, ne peut être regardé comme portant atteinte au caractère des lieux avoisinants, du seul fait de la présence dans la même rue de trois villas plus atypiques répertoriées comme " bâtiments à forte valeur patrimoniale ".
26. D'autre part, s'il existe en architecture deux types de décrochement de façade, l'un en plan, c'est-à-dire une discontinuité dans un plan vertical, l'autre en élévation, c'est-à-dire une discontinuité dans un plan horizontal, les termes employés à l'article Ub 11 du règlement du PLU qui prévoit que " la longueur des façades ne doit pas excéder 20 m sans décrochement " font nécessairement référence à un décrochement en plan. Si cet article laisse la possibilité d'un décrochement en élévation également, elle impose toutefois une discontinuité dans un plan vertical au moins tous les 20 mètres. Il ressort des pièces du dossier et il n'est pas contesté que le projet prévoit, sur la rue de Kermorvan, une longueur de façade sans décrochement en plan de 20,54 mètres, alors même que cette façade comprend des hauteurs différentes. Il suit de là que les requérants sont fondés à soutenir que le projet ne respecte pas la longueur maximale de façade sans décrochement imposée par l'article Ub 11 du règlement du PLU.
27. En huitième lieu, aux termes de l'article Ub 12 : " Le stationnement des véhicules automobiles et des deux roues, correspondant aux besoins des constructions et installations, doit être assuré en dehors des voies publiques. / L'annexe n° 1 du présent règlement fixe les normes applicables. (...) ". Cette annexe prévoit que " Les aires de stationnement doivent être plantées à raison d'un arbre de haute tige pour 8 places de stationnement. ".
28. Il ressort des pièces du dossier que sur les trente-deux places de stationnement prévues, dont dix-neuf sont en sous-sol, sept sont couvertes par le volume rectangulaire et la toiture-terrasse qui relient les deux bâtiments et six se situent en extérieur. Dès lors que le nombre de places de stationnement en extérieur n'atteint pas le seuil de huit, les requérants ne sont pas fondés à soutenir qu'il y avait lieu de prévoir la plantation d'arbres de haute tige. Il suit de là que le moyen tiré de la violation de l'article Ub 12 doit être écarté.
29. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme G... et Mme E... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.
Sur l'application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme :
30. Aux termes de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en oeuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. Le refus par le juge de faire droit à une demande de sursis à statuer est motivé. ".
31. Ces dispositions permettent au juge, lorsqu'il constate qu'un vice entachant la légalité du permis de construire peut être régularisé par un permis modificatif, de rendre un jugement avant dire droit par lequel il fixe un délai pour cette régularisation et sursoit à statuer sur le recours dont il est saisi. Le juge peut préciser, par son jugement avant dire droit, les modalités de cette régularisation. Un vice de procédure, dont l'existence et la consistance sont appréciées au regard des règles applicables à la date de la décision litigieuse, doit en principe être réparé selon les modalités prévues à cette même date. S'agissant des vices entachant le bienfondé du permis de construire, le juge doit se prononcer sur leur caractère régularisable au regard des dispositions en vigueur à la date à laquelle il statue et constater, le cas échéant, qu'au regard de ces dispositions le permis ne présente plus les vices dont il était entaché à la date de son édiction.
32. Les vices dont le présent arrêt reconnaît, aux points 13, 23 et 26, qu'ils entachent d'illégalité le permis en litige, apparaissent susceptibles de faire l'objet d'un permis de régularisation au regard des nouvelles dispositions du PLU approuvé le 27 septembre 2018. Dans ces conditions, il y a lieu de surseoir à statuer, en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, et de fixer à la société Quiberon Kermorvan et à la commune de Quiberon un délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt aux fins de produire la mesure de régularisation nécessaire.
D E C I D E :
Article 1er : Il est sursis à statuer sur la requête, présentée par M. et Mme G... et Mme E..., jusqu'à l'expiration d'un délai de quatre mois, à compter de la notification du présent arrêt, imparti à la société Quiberon Kermorvan et à la commune de Quiberon pour notifier à la cour un permis de construire modificatif régularisant les vices tirés du caractère incomplet du dossier de demande de permis et de la méconnaissance des articles Ub 7 et Ub 11 du règlement du plan local d'urbanisme de Quiberon.
Article 2 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.
Article 3 : Le présent jugement sera notifié à M. et Mme D... G..., à Mme H... E..., à la société Quiberon Kermorvan et à la commune de Quiberon.
Délibéré après l'audience du 18 septembre 2020, à laquelle siégeaient :
- M. Célérier, président de chambre,
- Mme Buffet, président assesseur,
- Mme A..., premier conseiller.
Lu en audience publique le 6 octobre 2020.
Le rapporteur,
C. A...
Le président,
T. CELERIER
Le greffier,
C. GOY
La République mande et ordonne au préfet du Morbihan en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19NT03321