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18/12/2020 | FRANCE | N°20NT02297

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 18 décembre 2020, 20NT02297


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A..., M. H... F... et M. B... G... ont demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 26 juin 2020 par lequel le préfet du Calvados les a mis en demeure de quitter le terrain qu'ils occupent sur la commune de Saint-André-sur-Orne, avec un groupe de onze familles de gens du voyage.

Par un jugement n° 2001136 du 1er juillet 2020, le président du tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enreg

istrés les 29 juillet et 2 novembre 2020, MM. A..., F... et G..., représentés par Me E..., ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A..., M. H... F... et M. B... G... ont demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 26 juin 2020 par lequel le préfet du Calvados les a mis en demeure de quitter le terrain qu'ils occupent sur la commune de Saint-André-sur-Orne, avec un groupe de onze familles de gens du voyage.

Par un jugement n° 2001136 du 1er juillet 2020, le président du tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 29 juillet et 2 novembre 2020, MM. A..., F... et G..., représentés par Me E..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 1er juillet 2020 du tribunal administratif de Caen ;

2°) d'annuler l'arrêté du 26 juin 2020 par lequel le préfet du Calvados les a mis en demeure de quitter le terrain qu'ils occupent sur la commune de Saint-André-sur-Orne ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- l'article 9-1 de la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 ne trouvait pas à s'appliquer en l'espèce dès lors que la commune de Saint-André-sur-Orne est membre d'un EPCI compétent en matière d'aires d'accueil des gens du voyage ; le I de l'article 9 de la même loi a été méconnu dès lors que l'autorité compétente n'a pas pris d'arrêté interdisant le stationnement des gens du voyage en dehors des aires aménagées à cet effet préalablement à la mise en demeure préfectorale ;

- l'atteinte à la salubrité, la tranquillité et l'ordre publics n'est pas établie ; le jugement ajoute sur ce point aux motifs énoncés dans l'arrêté pour écarter leur requête.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 septembre 2020, le préfet du Calvados conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 20 octobre 2020, la clôture d'instruction a été fixée au 4 novembre 2020.

Un mémoire présenté par le préfet du Calvados a été enregistré le 16 novembre 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D...,

- et les conclusions de M. Besse, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Environ quinze caravanes et vingt-cinq véhicules de gens du voyage se sont installées le 25 juin 2020 sur un terrain intercommunal appartenant au syndicat du Coisel, chemin des chênes, à Saint-André-sur-Orne (Calvados). Par un arrêté du 26 juin 2020, à la demande du maire de cette commune, et sur le fondement de l'article 9-1 de la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 modifiée relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage, le préfet du Calvados a mis en demeure leurs occupants de quitter les lieux dans un délai de 48 heures à compter de la notification de l'arrêté avec mention qu'à défaut d'exécution de cette mesure dans le délai imparti il serait procédé à l'évacuation forcée des personnes, véhicules et résidences mobiles alors présents. Par un jugement du 1er juillet 2020, dont MM. A..., F... et G... relèvent appel, le président du tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. D'une part, aux termes du I de l'article 1er de la loi du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage : " Les communes participent à l'accueil des personnes dites gens du voyage et dont l'habitat traditionnel est constitué de résidences mobiles installées sur des aires d'accueil ou des terrains prévus à cet effet.(...) " et le II du même article impose l'élaboration dans chaque département d'un schéma départemental, auquel figurent obligatoirement les communes de plus de 5 000 habitants, qui doit prévoir " les secteurs géographiques d'implantation et les communes où doivent être réalisés : 1° des aires permanentes d'accueil, ainsi que leur capacité (...)". D'autre part, aux termes de l'article 9 de la même loi : " I. -Le maire d'une commune membre d'un établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de création, d'aménagement, d'entretien et de gestion des aires d'accueil des gens du voyage et des terrains familiaux locatifs définis aux 1° à 3° du II de l'article 1er peut, par arrêté, interdire en dehors de ces aires et terrains le stationnement sur le territoire de la commune des résidences mobiles mentionnées au même article 1er, dès lors que l'une des conditions suivantes est remplie : / 1° L'établissement public de coopération intercommunale a satisfait aux obligations qui lui incombent en application de l'article 2 ; (...) II.-En cas de stationnement effectué en violation de l'arrêté prévu au I ou au I bis, le maire, le propriétaire ou le titulaire du droit d'usage du terrain occupé peut demander au préfet de mettre en demeure les occupants de quitter les lieux. / La mise en demeure ne peut intervenir que si le stationnement est de nature à porter atteinte à la salubrité, la sécurité ou la tranquillité publiques. / La mise en demeure est assortie d'un délai d'exécution qui ne peut être inférieur à vingt-quatre heures. Elle est notifiée aux occupants et publiée sous forme d'affichage en mairie et sur les lieux. Le cas échéant, elle est notifiée au propriétaire ou titulaire du droit d'usage du terrain. / (...) Lorsque la mise en demeure de quitter les lieux n'a pas été suivie d'effets dans le délai fixé et n'a pas fait l'objet d'un recours dans les conditions fixées au II bis, le préfet peut procéder à l'évacuation forcée des résidences mobiles, sauf opposition du propriétaire ou du titulaire du droit d'usage du terrain dans le délai fixé pour l'exécution de la mise en demeure. (...) II bis. - Les personnes destinataires de la décision de mise en demeure prévue au II, ainsi que le propriétaire ou le titulaire du droit d'usage du terrain peuvent, dans le délai fixé par celle-ci, demander son annulation au tribunal administratif. Le recours suspend l'exécution de la décision du préfet à leur égard. Le président du tribunal ou son délégué statue dans un délai de quarante-huit heures à compter de sa saisine. (...) ". Enfin, aux termes de l'article 9-1 de la même loi : " Dans les communes non inscrites au schéma départemental et non mentionnées à l'article 9, le préfet peut mettre en oeuvre la procédure de mise en demeure et d'évacuation prévue au II du même article, à la demande du maire, du propriétaire ou du titulaire du droit d'usage du terrain, en vue de mettre fin au stationnement non autorisé de résidences mobiles de nature à porter atteinte à la salubrité, la sécurité ou la tranquillité publiques. (...)".

3. En premier lieu, il résulte de la lecture combinée de ces dispositions législatives que si les dispositions de l'article 9-1 renvoient pour certains aspects procéduraux à celles du paragraphe II de l'article 9, d'une part, elles ont vocation à s'appliquer aux communes non inscrites à un schéma départemental et qui ne remplissent pas l'une des conditions alternatives prévues au I de l'article 9 et, d'autre part, elles organisent un régime de mise en demeure et d'évacuation forcée des lieux partiellement distinct de celui issu de l'article 9.

4. Au cas d'espèce, il ressort des pièces du dossier que la commune de Saint-André-sur-Orne, dont la population est inférieure à 5 000 habitants, appartient à la communauté d'agglomération Caen-la-Mer mais que cette dernière ne remplit aucune des conditions prévues aux 1° à 5° du paragraphe I de l'article 9 de la loi du 5 juillet 2000. Par suite, la commune de Saint-André-sur-Orne, qui n'est pas inscrite au schéma départemental d'accueil des gens du voyage, entre dans le champ de l'article 9-1 de la même loi. Or ces dispositions ne prévoient pas que la mise en demeure de quitter les lieux alors adressée par le préfet devrait être précédée d'un arrêté d'interdiction, du maire ou du président de l'agglomération, de stationnement hors des aires d'accueil des gens du voyage et des terrains familiaux locatifs définis aux 1° à 3° du II de l'article 1er de la même loi, alors surtout qu'en pareille hypothèse la commune ne remplit pas ses obligations à cet égard. Par suite, MM. A..., F... et G... ne sont pas fondés à soutenir que l'arrêté contesté serait intervenu en méconnaissance des articles 9 et 9-1 de la loi du 5 juillet 2000 en l'absence d'arrêté interdisant préalablement le stationnement général des gens du voyage hors des aires d'accueil dédiées et de certains terrains familiaux sur le territoire communal.

5. En second lieu, à l'appui de la mise en demeure de quitter les lieux, et ainsi que le relève à bon droit le premier juge, le préfet du Calvados retient que 15 caravanes et 25 véhicules stationnent irrégulièrement sur un terrain, sur lequel leurs occupants ont pénétré au prix de dégradations de sa clôture, et que ce terrain est dépourvu de sanitaires, d'équipements pour recueillir les eaux usées et d'alimentations électriques sécurisées et autorisées. Ces constats sont étayés par un rapport de gendarmerie qui établit notamment les dégradations commises pour pénétrer sur le site, le branchement irrégulier d'eau sur une borne d'incendie et les risques électriques nés de branchements illégaux sur des dispositifs existants, tant pour les occupants de ces caravanes que pour les personnes circulant habituellement aux abords eu égard à la présence à proximité d'habitations, d'une salle communale ou d'un gymnase et s'agissant d'un lieu de promenade très fréquenté des habitants de la commune. Les occupants de ces caravanes ne se prévalent par ailleurs, pour expliquer leur choix de s'installer sur ce site, que du fait, non établi, qu'il n'existait alors aucun terrain d'accueil susceptible de les accueillir. Par suite, alors même que les caravanes comporteraient des toilettes autonomes et des dispositifs de recueil des eaux usées et que les intéressés s'engagent à payer leurs diverses consommations d'eau et d'électricité, c'est sans commettre d'erreur d'appréciation que le préfet du Calvados a mis en demeure les occupants de quitter les lieux eu égard aux risques d'atteintes à la salubrité, la sécurité ou la tranquillité publiques.

6. Il résulte de tout ce qui précède que MM. A..., F... et G... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le président du tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande.

Sur les frais d'instance :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à l'octroi d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens à la partie perdante. Il y a lieu, dès lors, de rejeter les conclusions présentées à ce titre par MM. A..., F... et G....

D E C I D E :

Article 1er : La requête de MM. A..., F... et G... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A..., représentant unique désigné par Me E..., mandataire et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera adressée, pour information, au préfet du Calvados.

Délibéré après l'audience du 1er décembre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- M. D..., président assesseur,

- M. Jouno, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 décembre 2020.

Le rapporteur,

C. D...

Le président,

L. Lainé

La greffière,

V. Desbouillons

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20NT02297


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT02297
Date de la décision : 18/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: M. Christian RIVAS
Rapporteur public ?: M. BESSE
Avocat(s) : CANDON

Origine de la décision
Date de l'import : 08/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-12-18;20nt02297 ?
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