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15/02/2022 | FRANCE | N°20NT03411

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 15 février 2022, 20NT03411


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... a demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2010 et 2011.

Par un jugement n° 1804084 du 2 septembre 2020, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 2 novembre 2020 et 4 juin 2021 M. B..., représenté pa

r Me Le Friant, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge so...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... a demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2010 et 2011.

Par un jugement n° 1804084 du 2 septembre 2020, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 2 novembre 2020 et 4 juin 2021 M. B..., représenté par Me Le Friant, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il y a eu une prise de position formelle de l'administration sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales dès lors que, dans ses propositions de rectification du

13 novembre 2012, elle a indiqué que les revenus tirés de la location de trois logements à Quimperlé devaient être imposés dans la catégorie des revenus fonciers et non dans celle des bénéfices industriels et commerciaux ; la vérification de comptabilité réalisée en 2014, portant sur les mêmes années 2010 et 2011, a donc à tort conduit à l'imposition de ces mêmes revenus dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux ;

- la modification de l'analyse de l'administration fiscale est contraire aux principes de confiance légitime et de sécurité juridique ;

- subsidiairement, la déduction des charges supplémentaires correspondant à des factures payées, des intérêts supplémentaires de prêts octroyés par le Crédit Industriel de l'Ouest (CIO) et le Crédit agricole, des condamnations à verser des dommages-intérêts et des frais de justice doit être prise en compte pour la détermination des bénéfices imposables des années 2010 et 2011.

Par un mémoire en défense enregistré le 6 mai 2021 et un mémoire enregistré le

19 janvier 2022, qui n'a pas été communiqué, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au non-lieu à statuer partiel et au rejet du surplus des conclusions de la requête.

Il soutient que :

- les conclusions dirigées contre les prélèvements sociaux ne sont pas recevables dès lors que M. B... n'a pas été assujetti à de tels prélèvements ;

- un dégrèvement de 1 094 euros a été accordé le 12 avril 2021 sur l'impôt sur le revenu de l'année 2010 ;

- les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Geffray,

- et les conclusions de Mme Chollet, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., qui avait déjà fait l'objet de plusieurs contrôles ayant, en particulier révélé une activité occulte de marchand de biens exercée au cours des années 2004 à 2007, a fait l'objet en 2013 et 2014 d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2011, à l'issue de laquelle l'administration a estimé que l'intéressé, en vendant une maison d'habitation en 2010 et une autre en 2011 au lieu-dit Kerviglouze à Clohars-Carnoët, exerçait de manière occulte une activité de marchand de biens et que les profits issus de ces ventes ainsi que la perception de loyers se rapportant à des biens inclus dans le stock de son activité devaient être imposés selon la procédure de l'évaluation d'office dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux. Après avoir formulé une réclamation préalable qui n'a abouti qu'à une admission partielle, M. B... a demandé au tribunal administratif la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des contributions sociales mises à sa charge au titre des années 2010 et 2011. Par un jugement du

2 septembre 2020, dont M. B... relève appel, le tribunal a rejeté sa demande.

Sur l'étendue du litige :

2. Par une décision du 12 avril 2021, postérieure à l'introduction de la requête, l'administration a prononcé un dégrèvement, en droits et pénalités, d'un montant global de

1 094 euros au titre de l'année 2010. Les conclusions de la requête de M. B... sont, dans cette mesure, devenues sans objet. Il n'y a, par suite, pas lieu d'y statuer.

Sur la recevabilité des conclusions tendant à la décharge de prélèvements sociaux :

3. Il résulte de l'instruction que M. B... n'a pas été assujetti à des prélèvements sociaux au titre des années 2010 et 2011. Dès lors, il y a lieu d'accueillir la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance par le ministre de l'économie, des finances et de la relance à ces conclusions et tirée de l'absence d'objet des conclusions à fin de décharge de ces contributions.

Sur le bien-fondé des impositions restant en litige :

En ce qui concerne le principe de l'imposition dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux :

Quant à l'application de la loi fiscale :

4. Aux termes de l'article 35 du code général des impôts : " I. Présentent (...) le caractère de bénéfices industriels et commerciaux, pour l'application de l'impôt sur le revenu, les bénéfices réalisés par les personnes physiques désignées ci-après : / 1° Personnes qui, habituellement, achètent en leur nom, en vue de les revendre, des immeubles, des fonds de commerce, des actions ou parts de sociétés immobilières ou qui, habituellement, souscrivent, en vue de les revendre, des actions ou parts créées ou émises par les mêmes sociétés (...) ". L'application de ces dispositions est subordonnée à la double condition que les opérations procèdent d'une intention spéculative et présentent un caractère habituel. La condition d'habitude s'apprécie en principe en fonction du nombre d'opérations réalisées et de leur fréquence.

5. Il est constant que M. B... a exercé une activité de marchand de biens de 2004 à 2007 selon les conclusions de la précédente vérification de comptabilité dont il a fait l'objet en 2008. Après avoir déclaré la cessation de son activité en 2008, il s'est inscrit sur le registre du commerce et des sociétés le 6 mars 2008 et s'est fait radier le 8 avril 2009. Il n'est pas contesté que les revenus résultant des ventes en 2010 et 2011 de deux maisons situées au lieu-dit Kerviglouze à Clohars-Carnoët bâties sur un terrain acquis en 2003 doivent être imposés dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux.

6. En application des dispositions du 1 de l'article 35 et 38 du code général des impôts, le bénéfice de la location d'un immeuble destiné à être revendu par une personne physique constituant un revenu accessoire à son activité de marchand de biens est également imposable dans la catégorie des bénéfice industriels et commerciaux. C'est donc à bon droit que, sur le terrain de la loi fiscale, l'administration fiscale a requalifié les revenus résultant de la location des biens immobiliers inclus dans les stocks se rapportant à l'activité de marchand de biens de M. B..., initialement imposés en tant que revenus fonciers, et les a imposés dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux.

Quant à l'interprétation de la loi fiscale :

7. M. B... soutient qu'il y a eu prise de position formelle de l'administration sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales dès lors que, dans ses propositions de rectification du 13 novembre 2012, le service avait estimé que les loyers tirés de trois logements situés à Quimperlé devaient être imposés dans la catégorie des revenus fonciers. Ainsi, la vérification de comptabilité réalisée en 2014, portant sur les mêmes revenus des mêmes années 2010 et 2011, aurait à tort imposé ces revenus dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux.

8. Eu égard aux règles qui régissent l'invocabilité des appréciations de l'administration en vertu de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, qui lui-même renvoie au premier alinéa de l'article L. 80 A du même livre, les contribuables ne sont en droit de contester, sur le fondement de l'un ou l'autre de ces articles, que les rehaussements d'impositions antérieures. Les opinions émises par les agents des services fiscaux lors d'une procédure d'imposition conduisant à une imposition primitive assignée à un contribuable qui, n'ayant pas souscrit de déclaration, n'a pas été assujetti à l'impôt ne peuvent, en tout état de cause, être invoquées dès lors que ces opinions ne se rapportent pas à un rehaussement d'imposition antérieure.

9. Pour l'année 2010, il n'y a pas eu d'imposition primitive antérieurement au contrôle sur pièces qui a donné lieu à la proposition de rectification du 13 novembre 2012, en l'absence de dépôt par le contribuable d'une déclaration d'ensemble de ses revenus.

10. Pour l'année 2011, des impositions primitives, puis des rehaussements de ces impositions ont été établis à l'occasion du même contrôle sur pièces. Toutefois, les contribuables ne sont en droit d'invoquer, sur le fondement du premier alinéa de l'article L. 80 A ou de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, lorsque l'administration procède à un rehaussement d'impositions antérieures, que des interprétations ou des appréciations antérieures à l'imposition primitive. En l'espèce, la proposition de rectification du 13 novembre 2012 comportant l'analyse dont se prévaut le requérant étant postérieure à l'avis de mise en recouvrement du 31 juillet 2012 relatif à l'année 2011 et donc également à la mise en recouvrement de l'imposition primitive, les dispositions de l'article L.80 B du livre des procédures fiscales ne peuvent pas davantage être invoquées par celui-ci.

Quant à la méconnaissance des principes de confiance légitime et de sécurité juridique :

11. M. B... soutient enfin que la requalification des revenus issus de trois locations de logements situés à Quimperlé serait contraire aux principes de confiance légitime et de sécurité juridique. Toutefois, d'une part, le principe de confiance légitime, qui fait partie des principes généraux du droit de l'Union européenne, ne trouve à s'appliquer dans l'ordre juridique national que dans le cas où la situation juridique dont a à connaître le juge administratif français est régie par le droit communautaire, ce qui n'est pas le cas en l'espèce. D'autre part, il n'est pas contesté que M. B... n'avait pas déclaré les revenus issus de ces locations de 2009 à 2011. Dans ces conditions, le contribuable n'est pas davantage fondé à invoquer le principe de sécurité juridique.

En ce qui concerne la détermination de la base imposable :

12. M. B... reprend en appel, sans apporter aucun élément de fait ou de droit nouveau les moyens tirés par lui de ce que la facture d'électricité du 29 juillet 2010, celle de la société Espace Piscine Loisirs du 2 août 2020, celle de la société Brico-Dépôt du 7 mars 2011, celle de l'Entreprise Gillard du 7 novembre 2011 ainsi que les condamnations et frais de justice sont des charges supplémentaires déductibles. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs précis et détaillés retenus à bon droit par le tribunal administratif.

13. Par ailleurs, tous les frais figurant dans le procès-verbal de saisie attribution sont postérieurs à 2010 et 2011. Dès lors, ils ne constituent pas des charges supplémentaires déductibles des revenus imposés au titre des années en litige.

14. Enfin, les documents relatifs aux quatre prêts du Crédit industriel de l'Ouest (CIO) ne contiennent aucune précision sur les biens immobiliers sur lesquels portent ces prêts. M. B... précise dans sa requête d'appel que les quatre prêts du Crédit Agricole sont relatifs à une maison d'habitation donnée en location à Moëlan-sur-mer et à trois autres données en location à Quimperlé. Dans ces conditions, il n'établit pas que l'ensemble des charges de prêts qu'il invoque présenterait, avec les deux maisons vendues en 2010 et 2011 à Clohars-Carnoët, un lien de nature à les rendre déductibles.

15. Il résulte de ce qui précède que, sous réserve du dégrèvement mentionné au point 2, M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions relatives aux frais liés au litige doivent être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. B... à hauteur de la somme de 1 094 euros concernant les impositions établies au titre de l'année 2010.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré après l'audience du 27 janvier 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, présidente de chambre,

- M. Geffray, président-assesseur,

- Mme Picquet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 février 2022.

Le rapporteur

J.E. GeffrayLa présidente

I. PerrotLa greffière

A. Marchais

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20NT03411


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20NT03411
Date de la décision : 15/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme la Pdte. PERROT
Rapporteur ?: M. Jean-Eric GEFFRAY
Rapporteur public ?: Mme CHOLLET
Avocat(s) : LE FRIANT AVOCAT CONSEIL et FISCALITE

Origine de la décision
Date de l'import : 22/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-02-15;20nt03411 ?
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