Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 26 novembre 2021 par lequel le préfet du Calvados lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné.
Par un jugement n °2102848 du 18 mars 2022, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 12 avril 2022 et un mémoire, enregistré le 30 juin 2022, M. C... B..., représenté par Me Le Blanc, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 18 mars 2022 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 26 novembre 2021 par lequel le préfet du Calvados lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné ;
3°) d'enjoindre au préfet du Calvados, à titre principal, de délivrer un titre de séjour, ou, à titre subsidiaire, une autorisation provisoire de séjour, dans un délai de quarante-huit heures à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard et, à défaut, de réexaminer sa situation administrative dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir en lui délivrant une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les décisions contestées sont entachées d'une incompétence de l'auteur de l'acte ;
- la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour méconnaît les articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; elle méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la décision fixant le pays de destination doit être annulée par voie de conséquence ; elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 16 mai 2022, le préfet du Calvados conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par M. C... B... n'est fondé.
M. C... B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 2 juin 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Chollet, première conseillère.
Considérant ce qui suit :
1. M. C... B..., ressortissant soudanais né le 1er mai 1981 à Ghibaish (Soudan), déclare être entré irrégulièrement en France en 2015. Sa demande de reconnaissance du statut de réfugié a été rejetée le 31 janvier 2017 par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), décision confirmée le 7 mars 2019 par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA). Sa demande de réexamen a été rejetée par l'OFPRA en procédure accélérée le 9 juillet 2019. Le préfet du Calvados a pris le 26 mars 2019 un arrêté lui notifiant une obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours. Le requérant s'est toutefois maintenu sur le territoire français et a sollicité le 4 août 2021 la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ". Par un arrêté du 26 novembre 2021, le préfet du Calvados a refusé son admission au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné. Le requérant relève appel du jugement du 18 mars 2022 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.
Sur le moyen commun aux décisions contestées :
2. Les moyens tirés de l'incompétence de l'auteur des décisions contestées et du vice de procédure, que le requérant reprend en appel sans apporter aucun élément de fait ou de droit nouveau, doivent être écartés par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.
Sur la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour :
3. En premier lieu, le requérant est entré en France, selon ses déclarations, en 2015. S'il soutient résider à Biéville-Beuville depuis 2016 avec une compatriote, titulaire d'un titre de séjour en qualité de réfugiée, avec laquelle il s'est marié le 13 juin 2020, il ne le justifie pas. En effet, les justificatifs produits, à savoir un ordre de livraison du 14 février 2017, une facture d'électroménager du 22 septembre 2020 et, en appel, une déclaration de ressources pour demandeur d'asile datée du 25 mai 2016 dans laquelle il déclarait les ressources d'un conjoint, des photos ainsi que les attestations de tiers, ne sont pas de nature à établir de manière probante la stabilité et l'ancienneté de cette relation avant 2020, alors au demeurant que le requérant produit également deux factures de vente de ferraille à son nom d'octobre 2019 libellées à sa propre adresse à Caen ainsi qu'une attestation d'une éducatrice spécialisée du 7 avril 2022 faisant état seulement d'une rencontre hebdomadaire entre le requérant et sa future conjointe de juin 2016 à juin 2017. En outre, les avis d'échéance de loyer pour un logement à Biéville-Beuville et le décompte de régularisation des charges au nom des époux, qu'il produit, n'ont été établis qu'en 2021. Dès lors, la vie commune du couple était récente à la date de la décision contestée. Par ailleurs, le requérant ne démontre pas être dépourvu d'attaches familiales au Soudan, où résident, selon ses propres déclarations, sa mère, deux frères et une sœur. Dans ces conditions, la décision de refus de titre de séjour n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts qu'elle a poursuivis et n'a ainsi pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, elle ne méconnaît pas davantage les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle.
4. En second lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. (...) ".
5. Les éléments de la vie personnelle du requérant, tels que décrits au point 3 du présent arrêt, ne caractérisent pas des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels au sens de l'article L.435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par ailleurs, il ne justifie pas non plus de l'existence de motifs exceptionnels lui permettant de prétendre à la délivrance d'un titre de séjour " salarié " ou " travailleur temporaire " sur le fondement des dispositions de cet article. Par suite, le préfet n'a pas méconnu les dispositions de cet article.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
6. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 3 du présent arrêt, la décision portant obligation de quitter le territoire français ne méconnaît pas l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Sur la décision fixant le pays de destination :
7. En premier lieu, il résulte du point 6 que le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français doit être écarté.
8. En second lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
9. Si le requérant soutient qu'il encourt un risque de traitements inhumains ou dégradants en cas de retour au Soudan, où une rébellion armée sévit depuis 2012, en sa qualité de frère d'un ancien ministre, ces allégations ne sont pas corroborées par les pièces du dossier. Au surplus, sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides, décision confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 7 mars 2019. Par suite, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. C... B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... B..., à Me Le Blanc et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Une copie en sera transmise pour information au préfet du Calvados.
Délibéré après l'audience du 27 septembre 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- M. Derlange, président-assesseur,
- Mme Chollet, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 octobre 2022.
La rapporteure,
L. CHOLLET
Le président,
L. LAINÉ
La greffière,
S. LEVANT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 22NT01117