Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme D... C... ont demandé au tribunal administratif de Rennes de condamner la commune de Montreuil-sous-Pérouse et le département d'Ille-et-Vilaine à leur verser les sommes de 4 936,90 euros et de 10 000 euros en réparation des préjudices résultant d'une emprise irrégulière ainsi que de 71 652 euros afin de surélever le mur de clôture de leur propriété.
Par un jugement n° 1801562 du 2 novembre 2020, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 4 avril 2021, M. C..., représenté par Me Brouillet, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 2 novembre 2020 ;
2°) de mettre à la charge de la commune de Montreuil-sous-Pérouse et du département d'Ille-et-Vilaine le versement des sommes de 4 936,90 euros, de 71 652 euros et de 10 000 euros en réparation respectivement des préjudices foncier, matériel et financier qui résulteraient de l'emprise irrégulière commise ;
3) de mettre à la charge de la commune de Montreuil-sous-Pérouse et du département d'Ille-et-Vilaine le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il n'a pas reçu notification du jugement attaqué ;
- une emprise irrégulière sur sa propriété a été commise par la commune de Montreuil-sous-Pérouse et le département d'Ille-et-Vilaine à l'occasion de travaux de voirie effectués en 2014-2015 ; la limite de sa propriété se situe au droit de la route départementale ; le muret édifié en retrait de quelques mètres de la voie ne matérialise pas la limite de propriété ;
- il est fondé à demander réparation du préjudice résultant des travaux réalisés sans son accord sur sa propriété correspondant à la valeur du terrain dont il est dépossédé, au coût des travaux de la reprise du mur d'enceinte et à son préjudice moral.
Par des mémoires enregistrés les 26 avril et 27 octobre 2021, le département
d'Ille-et-Vilaine, représenté par la Selarl Cabinet Coudray puis Me Thomé, demande à la cour de rejeter la requête et de mettre à la charge de M. C... le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- à titre principal, la requête est irrecevable en ce qu'elle n'est pas motivée et ne comporte pas de moyens d'appel en méconnaissance de l'article R. 411-1 du code de justice administrative ;
- à titre subsidiaire, aucun moyen de la requête n'est fondé.
Par un mémoire enregistré le 3 septembre 2021, la commune de
Montreuil-sous-Perouse, représentée par Me Lahalle, conclut au rejet de la requête et à la condamnation de M. C... à lui verser la somme de 6 000 euros au titre de l'article
L 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- à titre principal, la requête est irrecevable faute de satisfaire aux obligations de l'article R. 411-1 du code de justice administrative ;
- à titre subsidiaire, aucun moyen n'est fondé.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la voirie routière
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Brisson, rapporteure,
- les conclusions de M. Berthon rapporteur public,
- et les observations de Me Cazo représentant la commune de Montreuil-sous-Pérouse et de Me Peramo représentant le département d'Ille-et-Vilaine.
Considérant ce qui suit :
1. M. C... est propriétaire, depuis 1981, à Montreuil-sous-Pérouse d'un immeuble E... situé A... route B..., qui constitue une route départementale. Au cours de l'année 2014, la commune a engagé des travaux afin d'aménager, sur cette voie départementale, un arrêt de bus accessible aux personnes à mobilité réduite ; la localisation de cet équipement se situant au droit de la propriété du requérant. Estimant que ces opérations ont conduit à empiéter sur son bien, M. C... a tout d'abord saisi le juge judiciaire mais par un arrêt du 15 novembre 2016, la cour d'appel de Rennes a décliné sa compétence. Le 9 juin 2017, l'intéressé a saisi le département d'Ille-et-Vilaine d'une réclamation indemnitaire préalable et, par un jugement du 2 novembre 2020, le tribunal administratif de Rennes a rejeté les conclusions indemnitaires présentées par le requérant à l'encontre du département
d'Ille-et-Vilaine et de la commune de Montreuil-sous-Pérouse aux fins de réparation des préjudices qui découleraient d'une emprise irrégulière. M. C... relève appel de ce jugement.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Aux termes du dernier alinéa de l'article R. 751-3 du code de justice administrative : " (...) Lorsqu'une requête (...) a été présenté(e) par un mandataire pour le compte de plusieurs personnes physiques ou morales, la décision est notifiée à celle des personnes désignée à cette fin par le mandataire avant la clôture de l'instruction ou, à défaut, au premier dénommé. Cette notification est opposable aux autres auteurs de la requête, du mémoire en défense ou du mémoire en intervention. ".
3. Les conditions de notification d'un jugement sont sans incidence sur sa régularité. Au demeurant, le tribunal administratif, ayant été saisi par Mme et M. C..., a pu, sans méconnaître les dispositions rappelées ci-dessus, ne notifier qu'à l'épouse du requérant en sa qualité de personne première dénommée, le jugement rendu le 2 novembre 2020. Il s'ensuit que le requérant ne peut utilement soutenir que, faute d'avoir été destinataire d'une notification du jugement qu'il attaque, ce dernier serait irrégulier.
Sur l'emprise irrégulière et la responsabilité de la commune de
Montreuil-sous-Pérouse et du département d'Ille-et-Vilaine :
4. En premier lieu, M. C... se prévaut des termes d'un acte de donation-partage du 13 mai 1981 qui indique, sans autre précision, que, outre une maison d'habitation, diverses parcelles de terrain, des dépendances et un jardin lui ont été attribués ainsi que des extraits de plans cadastraux annexés à cet acte de propriété qui, s'ils conduisent à constater que la propriété de l'intéressé jouxte la route départementale, laquelle se compose non seulement de la chaussée mais également de ses accessoires, ne sauraient suffire, en l'absence notamment de bornage, à permettre de constater précisément la limite de propriété de l'intéressé et en particulier que celle-ci s'étendrait au-delà du muret de clôture existant.
5. En deuxième lieu, si l'état des lieux, qui ne revêt pas la nature d'un titre de propriété, établi lors du départ d'un locataire en 1895, fait état autour de l'habitation d'un jardin sur le bord de la route et de la présence d'une " pierre noire sur le ruisseau pour accéder à la route ", ce document ne saurait, en tout état de cause, être regardé comme fixant les limites de la propriété de M. C.... En outre, et à supposer même qu'un ruisseau aurait ultérieurement été transformé en fossé d'évacuation des eaux avant que la commune ne procède, lors de travaux d'assainissement en 1997, au comblement de ce fossé, ces circonstances ne sont pas de nature à établir que ces travaux auraient été réalisés sur la propriété de M. C....
6. En troisième lieu, comme l'a relevé à juste titre le premier juge, les travaux de création d'un arrêt de transport en commun effectués en 2014 ont été réalisés sur la base d'un arrêté individuel d'alignement, qui en vertu des dispositions du 3ème alinéa de l'article
L. 112-1 du code de la voirie routière n'a pour objet, en l'absence de plan d'alignement, que de constater la limite d'une voie publique au droit d'une propriété riveraine. D'ailleurs, le recours formé par M. C... à l'encontre de cet arrêté individuel d'alignement a été rejeté par un jugement du tribunal administratif de Rennes du 24 février 2017. Par ailleurs, s'il est constant que ces travaux ont conduit à une surélévation d'environ 20 cm du trottoir situé entre la chaussée et le muret appartenant à M. C..., cette circonstance ne saurait en elle-même, ni caractériser une emprise irrégulière, ni même excéder les sujétions que les riverains des voies publiques peuvent être amenés à supporter dans l'intérêt général.
7. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées par la commune de Montreuil-sous-Pérouse et le département
d'Ille-et-Vilaine tirées du défaut de motivation de la requête, qu'en l'absence d'emprise irrégulière, les conclusions indemnitaires présentées par M. C... ne peuvent qu'être rejetées. Il s'ensuit que le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
8. Les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Montreuil-sous-Pérouse et du département d'Ille-et-Vilaine, qui ne sont pas en l'espèce, des parties perdantes, le versement d'une somme au titre des frais exposés par M. C... et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. C... la somme de 500 euros, qui sera versée, pour chacun, au titre des frais exposés par la commune de Montreuil-sous-Pérouse et le département d'Ille-et-Vilaine.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : M. C... versera d'une part à la commune de Montreuil-sous-Pérouse et d'autre part au département d'Ille-et-Vilaine, la somme de 500 euros pour chacun, au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C..., à la commune de Montreuil-sous-Pérouse et au département d'Ille-et-Vilaine.
Délibéré après l'audience du 32 février 2023, à laquelle siégeaient :
- M. Salvi président de chambre,
- Mme Brisson présidente-assesseure,
- Mme Lellouch, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 février 2023.
Le rapporteur,
C. BRISSON
Le président,
D. SALVI
Le greffier,
R. MAGEAU
La République mande et ordonne au préfet d'Ille-et-Vilaine en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21NT0007