Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 31 décembre 2021 par lequel le préfet du Calvados lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné.
Par un jugement n° 2200536 du 3 juin 2022, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 7 juillet 2022, M. A..., représenté par Me Blache, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 3 juin 2022 du tribunal administratif de Caen ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Calvados du 31 décembre 2021 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Calvados de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans le même délai et sous la même astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- les premiers juges ont mal évalué sa situation dans son pays d'origine sur l'accessibilité des soins ;
- la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour méconnait l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnait le 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; elle méconnait les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le pays de destination est fondée sur une décision illégale portant obligation de quitter le territoire français.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 septembre 2022, le préfet du Calvados conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'il s'en rapporte à ses écritures de première instance.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 16 août 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Chollet a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant marocain né en 1983 à Douar Idmbark (Maroc) déclare être entré en France le 20 décembre 2019 sous couvert d'un visa de type C valable du 9 décembre 2019 au 8 janvier 2020. Il a sollicité le 20 janvier 2021 la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il relève appel du jugement du 3 juin 2022 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 31 décembre 2021 par lequel le préfet du Calvados lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné.
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. / (...) ". Aux termes de l'article L. 611-3 du même code : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : / (...) / 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. / (...) ".
3. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'office français de l'immigration et de l'intégration qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, la possibilité de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.
4. Dans son avis du 10 novembre 2021, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que l'état de santé de M. A... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il pourra y bénéficier effectivement d'un traitement approprié.
5. Contrairement à ce que soutient M. A..., il ne ressort pas des pièces du dossier que le traitement nécessaire à sa pathologie, un diabète de type 1 dont il est atteint depuis l'âge de 17 ans, ne serait pas disponible au Maroc. S'il soutient qu'il ne pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine eu égard à son coût et à son absence d'immatriculation au régime de sécurité sociale marocain au 3 mars 2022, il ne justifie pas de sa situation d'impécuniosité alors qu'il a vécu au Maroc jusqu'à l'âge de 36 ans et y a bénéficié selon ses propres déclarations notamment d'un traitement régulier de sa maladie depuis l'âge de 17 ans ainsi que de 14 séances de laser à 150 euros l'unité pour sa rétinopathie diabétique. Il n'établit pas davantage au surplus qu'une fois revenu et établi au Maroc, il ne remplirait pas les conditions de revenu et de résidence fixées par la réglementation marocaine pour obtenir la carte attestant de sa qualité de démuni non assuré social ouvrant droit à un accès gratuit au soins, identique au panier de soins de l'assurance maladie obligatoire française. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que les décisions refusant la délivrance d'un titre de séjour et portant obligation de quitter le territoire français méconnaitraient les dispositions citées au point 2 doit être écarté.
6. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que le requérant est célibataire et sans enfant à charge et ne justifie pas d'obstacle à ce qu'il retourne au Maroc où il a vécu jusqu'à l'âge de trente-six ans et où il ne justifie pas être dépourvu d'attaches familiales. Dans ces conditions, eu égard au caractère récent de sa présence et aux conditions de son séjour en France, le préfet n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressé, garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels le refus de séjour et l'obligation de quitter le territoire français ont été pris. Pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé.
7. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment de la lettre de liaison du 1er mars 2021, compte-tenu de ce qui a été dit au point 5, qu'en éloignant M. A... vers le Maroc, il serait exposé à un risque réel d'être exposé à un déclin grave et irréversible de son état de santé. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit, par suite, être écarté.
8. Enfin, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant pas annulée, M. A... n'est pas fondé à se prévaloir de cette annulation, par voie de conséquence, pour demander l'annulation de la décision fixant le pays de destination.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, par voie de conséquence, être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Me Blache et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Une copie en sera transmise pour information au préfet du Calvados.
Délibéré après l'audience du 30 mai 2023, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- M. Derlange, président assesseur,
- Mme Chollet, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juin 2023.
La rapporteure,
L. CHOLLET
Le président,
L. LAINÉ
Le greffier,
S. LEVANT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 22NT02134