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22/11/2024 | FRANCE | N°19NT00807

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 2ème chambre, 22 novembre 2024, 19NT00807


Vu la procédure suivante :



L'association Vent du Don, représentante unique désignée, M. O... Q..., M. et Mme N... R..., M. et Mme D... L..., M. X... S..., M. et Mme A... Y..., M. J... E..., Mme K... V..., M. et Mme H... T..., M. C... Z..., M. M... F..., Mme I... G..., Mme B... W... et M. AA... P..., représentés par Me Monamy, ont demandé à la cour d'annuler l'arrêté du 25 octobre 2018 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a délivré à la société Engie Green Champ Ricous une autorisation unique portant sur la construction et l'exploitation d'un parc é

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Vu la procédure suivante :

L'association Vent du Don, représentante unique désignée, M. O... Q..., M. et Mme N... R..., M. et Mme D... L..., M. X... S..., M. et Mme A... Y..., M. J... E..., Mme K... V..., M. et Mme H... T..., M. C... Z..., M. M... F..., Mme I... G..., Mme B... W... et M. AA... P..., représentés par Me Monamy, ont demandé à la cour d'annuler l'arrêté du 25 octobre 2018 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a délivré à la société Engie Green Champ Ricous une autorisation unique portant sur la construction et l'exploitation d'un parc éolien composé de quatre aérogénérateurs et deux postes de livraison sur le territoire de la commune de Moisdon-la-Rivière.

Par un arrêt n° 19NT00807 du 20 avril 2021, la cour administrative d'appel de Nantes a sursis à statuer, en application de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, jusqu'à l'expiration d'un délai d'un an à compter de la notification de l'arrêt rendu sur la requête de l'association Vent du Don et autres tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 octobre 2018, afin de permettre au préfet de la Loire-Atlantique de produire devant la cour une autorisation environnementale régularisant les vices affectant cet arrêté.

Par un mémoire, enregistré le 6 février 2023, la société Engie Green Champ Ricous, représentée par Me Enckell, soutient que le dossier de demande de dérogation " espèces protégées " a été déposé.

Par un mémoire enregistré le 19 août 2024, la société Engie Green Champ Ricous, représentée par Me Enckell, demande à la cour :

1°) d'annuler l'arrêté préfectoral rejetant la demande de régularisation, si le préfet devait confirmer son intention de ne pas régulariser l'arrêté du 25 octobre 2018 ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique de conclure la procédure de régularisation de l'autorisation environnementale dans un délai déterminé, en procédant notamment à l'ouverture d'une enquête publique ;

3°) de surseoir à statuer jusqu'à ce que le préfet de la Loire-Atlantique ait procédé à la transmission d'un arrêté de régularisation ; subsidiairement, de prononcer un nouveau sursis à statuer pour permettre, le cas échéant, de régulariser l'arrêté de régularisation ;

4°) de mettre solidairement à la charge de l'association " Vent du Don " et autres, une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le 14 août 2024, le préfet de la Loire-Atlantique lui a transmis un projet d'arrêté rejetant la demande de régularisation ;

- en exigeant une demande de dérogation sur l'ensemble des espèces protégées et pas seulement sur le Héron cendré, le préfet a mal interprété l'arrêt avant dire-droit de la cour et a outrepassé ses compétences ;

- le préfet n'a pas tenu compte des observations qu'elle a adressées en réponse à l'avis émis par la MRAe ;

- le préfet a omis de mettre à la disposition du public le dossier de régularisation dans le cadre de l'enquête publique mentionnée au point 65 de l'arrêt avant dire-droit de la cour.

Le 29 août 2024, le préfet de la Loire-Atlantique a transmis à la cour un arrêté du 27 août 2024 portant refus de régularisation de l'autorisation environnementale délivrée à la société Engie Green Champ Ricous le 25 octobre 2018.

Par une ordonnance du 16 septembre 2024, la clôture de l'instruction a été prononcée avec effet immédiat, à 13 heures 48.

Un mémoire, présenté pour la société Engie Green Champ Ricous, a été enregistré le 16 septembre 2024 à 14 heures 11 postérieurement à la clôture d'instruction, qui n'a pas été communiqué.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions présentées par la société Engie Green Champ Ricous tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 août 2024 portant refus de lui accorder une dérogation " espèces protégées " et refusant de régulariser les vices entachant l'autorisation environnementale délivrée le 25 octobre 2018, dès lors qu'une telle contestation ne peut intervenir que dans le cadre d'une nouvelle instance.

Des observations en réponse à ce courrier ont été présentées le 25 octobre 2024, respectivement pour la société Engie Green Champ Ricous et pour l'association Vent du Don et autres.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Dias,

- les conclusions de M. Le Brun, rapporteur public,

- et les observations de Me Monamy, représentant l'association Vent du Don et autres, et de Me Toret, substituant Me Enckell, représentant la société Engie Green Champ Ricous.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 25 octobre 2018 le préfet de la Loire-Atlantique a délivré à la société Engie Green Champ Ricous une autorisation environnementale pour la construction et l'exploitation d'un parc éolien composé de quatre aérogénérateurs et de deux postes de livraison, sur le territoire de la commune de Moisdon-la-Rivière. L'association Vent du Don et autres ont demandé à la cour administrative d'appel de Nantes d'annuler cet arrêté. Par un arrêt avant dire-droit n°19NT00807 du 20 avril 2021, la cour a jugé que l'arrêté du 25 octobre 2018 était entaché de plusieurs vices tirés, premièrement, de ce que cette autorisation environnementale n'avait pas été précédée d'un avis régulièrement émis par l'autorité environnementale, deuxièmement, de ce que la demande d'autorisation n'était pas suffisamment précise et étayée quant aux capacités financières de la société pétitionnaire et de ce que l'insuffisance de la demande sur ce point avait été de nature à nuire à l'information complète de la population, troisièmement, de ce que le bridage prévu ne permettait pas de respecter, dans certaines conditions de vent et dans certains secteurs, le plafond d'émergence sonore de 3 décibels, quatrièmement, de ce que le montant des garanties financières de démantèlement et de remise en état du site était insuffisant et cinquièmement, de ce qu'une dérogation " espèces protégées " était nécessaire en ce qui concerne le Héron cendré. La cour a, en application de l'article

L. 181-18 du code de l'environnement, sursis à statuer jusqu'à l'expiration d'un délai d'un an, courant à compter de la notification de l'arrêt rendu sur la requête de l'association Vent du Don et autres, afin de permettre au préfet de la Loire-Atlantique de transmettre à la cour un arrêté de régularisation de l'arrêté du 25 octobre 2018 sur ces différents points. Par un arrêté du 27 août 2024, transmis à la cour le 29 août 2024, le préfet de la Loire-Atlantique, suivant en cela les avis défavorables des 26 janvier et 29 juillet 2024 émis, respectivement, par le Conseil scientifique régional du patrimoine naturel (CSRPN) et par la Mission régionale d'autorité environnementale (MRAe) Pays de la Loire, a refusé de délivrer à la société Engie Green Champ Ricous une dérogation " espèces protégées " et a, par voie de conséquence, rejeté la demande de régularisation de l'arrêté du 25 octobre 2018.

Sur l'arrêté du 25 octobre 2018 :

2. Aux termes de l'article L. 181-18 du code de l'environnement : " I. - Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre une autorisation environnementale, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés : / 1° Qu'un vice n'affecte qu'une phase de l'instruction de la demande d'autorisation environnementale, ou une partie de cette autorisation, peut limiter à cette phase ou à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et demander à l'autorité administrative compétente de reprendre l'instruction à la phase ou sur la partie qui a été entachée d'irrégularité ; / 2° Qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé par une autorisation modificative peut, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, surseoir à statuer jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation. Si une telle autorisation modificative est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. / II. - En cas d'annulation ou de sursis à statuer affectant une partie seulement de l'autorisation environnementale, le juge détermine s'il y a lieu de suspendre l'exécution des parties de l'autorisation non viciées. ".

3. Si, après que le juge administratif a sursis à statuer afin de permettre la régularisation d'une autorisation, aucune mesure de régularisation ne lui est notifiée, il lui appartient de prononcer l'annulation de cette autorisation, sans que puisse être contestée devant lui la légalité du refus opposé, le cas échéant, à la demande de régularisation présentée par le bénéficiaire de l'autorisation. Une telle contestation ne peut intervenir que dans le cadre d'une nouvelle instance, qui doit être regardée comme dirigée contre le refus d'autoriser le projet dans son ensemble, y compris les modifications qu'il était envisagé d'y apporter.

4. En premier lieu, par un arrêté du 27 août 2024, le préfet de la Loire-Atlantique a refusé, dans la suite des avis défavorables émis par le CSRPN et la MRAe Pays de la Loire, sans mettre en œuvre la procédure d'enquête publique, de délivrer à la société Engie Green Champ Ricous une dérogation à l'interdiction de destruction de spécimens d'espèces protégées prévue par l'article L. 411-2 du code de l'environnement s'agissant de l'espèce protégée du Héron cendré et a rejeté, par voie de conséquence, la demande de cette société tendant à la délivrance d'un arrêté de régularisation des vices entachant l'autorisation environnementale délivrée par l'arrêté du 25 octobre 2018. Il y a lieu, par suite, conformément aux principes énoncés au point 3, d'annuler cette autorisation environnementale.

5. En second lieu, compte de ce qui a été dit au point 4, les conclusions présentées par la société Engie Green Champ Ricous tendant, d'une part, à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Loire-Atlantique de poursuivre la procédure de régularisation de l'autorisation environnementale dans un délai déterminé, en procédant notamment à l'ouverture d'une enquête publique, d'autre part, à ce qu'il soit sursis à statuer jusqu'à ce que le préfet de la

Loire-Atlantique ait procédé à la transmission d'un arrêté de régularisation, ne peuvent qu'être rejetées.

Sur l'arrêté du 27 août 2024 :

6. Conformément aux principes énoncés au point 3, la légalité de l'arrêté du 27 août 2024 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de délivrer à la société Engie Green Champ Ricous une dérogation " espèces protégées " au titre du Héron cendré et a rejeté, par voie conséquence, la demande de régularisation de l'arrêté du 25 octobre 2018 présentée par cette société, ne peut être contestée que dans le cadre d'une nouvelle instance. Par suite, dans le cadre de la présente instance, engagée par l'association Vent du Don et autres contre l'arrêté du 25 octobre 2018 délivrant à la société Engie Green Champ Ricous une autorisation environnementale, les conclusions présentées par cette société contre l'arrêté du 27 août 2024 du préfet de la Loire-Atlantique refusant de régulariser les vices affectant cette autorisation environnementale sont irrecevables et doivent, pour ce motif, être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

7. En premier lieu, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'association Vent du Don et autres, qui n'ont pas la qualité de partie perdante, versent à la société Engie Green Champ Ricous la somme que celle-ci réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

8. En deuxième lieu, Mme G... n'établissant pas avoir exposé d'autres frais que ceux pris en charge par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle totale qui lui a été accordée par décision du 24 juillet 2019, sa demande tendant à ce que l'Etat lui verse une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens doit être rejetée.

9. En troisième lieu, par une décision du 22 juillet 2019, M. L... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle au taux de 55 %. Dans ces conditions, il y a lieu de mettre à la charge de la société Engie Green Champ Ricous et de l'Etat la part des frais exposés par M. L... non compris dans les dépens et laissés à sa charge par le bureau d'aide juridictionnelle.

10. En dernier lieu, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Engie Green Champ Ricous et de l'Etat, des sommes de 1 000 euros chacun, au titre des frais exposés par l'association Vent du Don, M. Q..., M. et Mme R..., M. S..., M. et Mme Y..., M. E..., Mme V..., M. et Mme T...,

M. Z..., M. F..., Mme W... et M. P..., et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : L'arrêté du 25 octobre 2018 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a délivré à la société Engie Green Champ Ricous une autorisation environnementale pour la construction et l'exploitation d'un parc éolien, sur le territoire de la commune de Moisdon-la-Rivière, est annulé.

Article 2 : Les conclusions aux fins d'annulation et d'injonction présentées par la société Engie Green Champ Ricous, les conclusions présentées par cette même société tendant à ce qu'il soit sursis à statuer sur la requête de l'association Vent du Don et autres ainsi que ses conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La société Engie Green Champ Ricous et l'Etat verseront à M. L... la part des frais exposés par lui et non compris dans les dépens qui sont restés à sa charge au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La société Engie Green Champ Ricous et l'Etat verseront chacun une somme globale de 1000 euros à l'association Vent du Don, à M. Q..., à M. et Mme R..., à M. S..., à M. et Mme Y..., à M. E..., à Mme V..., à M. et Mme T..., à M. Z..., à M. F..., à Mme W... et à M. P... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Les conclusions présentées par Mme G... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié l'association Vent du Don, représentant unique désigné par Me Monamy, mandataire, à la société Engie Green Champ Ricous et au ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques.

Copie en sera adressée, pour information, au préfet de la Loire-Atlantique.

Délibéré après l'audience du 5 novembre 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Montes-Derouet, présidente,

- M. Dias, premier conseiller,

- M. Mas, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 novembre 2024.

Le rapporteur,

R. DIASLa présidente,

I. MONTES-DEROUET

La greffière,

M. LE REOUR

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19NT00807


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT00807
Date de la décision : 22/11/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: Mme Karima BOUGRINE
Rapporteur public ?: M. LE BRUN
Avocat(s) : MONAMY

Origine de la décision
Date de l'import : 01/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-11-22;19nt00807 ?
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