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07/03/2025 | FRANCE | N°23NT00951

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 2ème chambre, 07 mars 2025, 23NT00951


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. D... C... et Mme A... C... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la délibération du 18 décembre 2019 par laquelle le conseil communautaire de la communauté de communes d'Erdre et Gesvres a approuvé le plan local d'urbanisme intercommunal, ainsi que la décision implicite née le 14 avril 2020 par laquelle le président de la communauté de communes a rejeté leur recours gracieux, réceptionné le 14 février 2020, formé contre cette délibération.

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Par un jugement n° 2008085 du 31 janvier 2023, le tribunal Administratif de Nantes a rejet...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... et Mme A... C... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la délibération du 18 décembre 2019 par laquelle le conseil communautaire de la communauté de communes d'Erdre et Gesvres a approuvé le plan local d'urbanisme intercommunal, ainsi que la décision implicite née le 14 avril 2020 par laquelle le président de la communauté de communes a rejeté leur recours gracieux, réceptionné le 14 février 2020, formé contre cette délibération.

Par un jugement n° 2008085 du 31 janvier 2023, le tribunal Administratif de Nantes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 31 mars 2023 et 29 juillet 2024, M. et Mme C..., représentés par Me Bardoul, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes ;

2°) d'annuler la délibération du 18 décembre 2019 par laquelle le conseil communautaire de la communauté de communes d'Erdre et Gesvres a approuvé le plan local d'urbanisme intercommunal, ainsi que la décision implicite née le 14 avril 2020 par laquelle le président de la communauté de communes a rejeté leur recours gracieux, réceptionné le 14 février 2020, contre cette délibération ;

3°) de mettre à la charge de la communauté de communes d'Erdre et Gesvres le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le classement en zone agricole de la parcelle cadastrée à la section Y sous le n° 246 à Treillières est entaché d'erreur de fait et d'erreur manifeste d'appréciation ;

- ce classement est incohérent avec le projet d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme intercommunal ;

- la délibération contestée a été prise au terme d'une procédure irrégulière, dès lors que le classement de la parcelle cadastrée à la section YB sous le n° 79 à Treillières a été irrégulièrement modifié après l'enquête publique ;

- le classement de cette parcelle est entaché d'un détournement de pouvoir.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 11 juillet 2024 et 4 septembre 2024, la communauté de communes d'Erdre et Gesvres, représentée par Me Rouhaud, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de M. et Mme C... le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens invoqués par les requérants ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Mas,

- les conclusions de M. Le Brun, rapporteur public,

- et les observations de Me Bardoul, représentant M. et Mme C..., et E..., substituant Me Rouhaud, représentant la communauté de communes d'Erdre et Gesvres.

Considérant ce qui suit :

1. Par un jugement du 31 janvier 2023, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande de M. et Mme C... tendant à l'annulation de la délibération du 18 décembre 2019 par laquelle le conseil communautaire de la communauté de communes d'Erdre et Gesvres a approuvé le plan local d'urbanisme intercommunal ainsi que de la décision implicite née le 14 avril 2020 par laquelle le président de la communauté de communes a rejeté leur recours gracieux réceptionné le 14 février 2020 contre cette délibération. M. et Mme C... relèvent appel de ce jugement.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 153-21 du code de l'urbanisme : " A l'issue de l'enquête, le plan local d'urbanisme, éventuellement modifié pour tenir compte des avis qui ont été joints au dossier, des observations du public et du rapport du commissaire ou de la commission d'enquête, est approuvé par : / 1° L'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale (...) ". Il résulte de ces dispositions que le projet de plan ne peut subir de modifications, entre la date de sa soumission à l'enquête publique et celle de son approbation, qu'à la double condition que ces modifications ne remettent pas en cause l'économie générale du projet et qu'elles procèdent de l'enquête. Doivent être regardées comme procédant de l'enquête les modifications destinées à tenir compte des réserves et recommandations du commissaire enquêteur ou de la commission d'enquête, des observations du public et des avis émis par les autorités, collectivités et instances consultées et joints au dossier de l'enquête.

3. Il ressort du rapport de la commission d'enquête qu'ayant constaté que 45 % des observations formulées pendant l'enquête publique avaient trait au zonage des parcelles et révélaient une incompréhension du public sur, notamment, la définition de l'enveloppe urbaine des bourgs et hameaux, la commission d'enquête a recommandé aux auteurs du document d'urbanisme de reconsidérer l'identification de certains hameaux à partir de critères détaillés, appliqués le plus rigoureusement possible, afin de ne pas créer de situation d'iniquité entre les habitants. Il ressort des pièces du dossier que la modification du zonage d'une partie de la parcelle cadastrée à la section YB sous le n° 79, à Treillières, résulte de l'application d'une règle, définie pour tenir compte de cette recommandation, consistant à classer en zone urbaine une " zone tampon " de 25 mètres autour des constructions situées dans l'enveloppe urbaine, à l'exception des constructions légères. Il en résulte que la modification d'une partie du zonage de cette parcelle, qui ne remet pas en cause l'économie générale du plan local d'urbanisme intercommunal, procédait de l'enquête publique, quand bien même cette modification n'aurait pas été expressément sollicitée par le propriétaire de cette parcelle, ainsi que l'allèguent M. et Mme C.... Le moyen tiré de ce que le projet de plan local d'urbanisme intercommunal aurait été irrégulièrement modifié après l'enquête publique doit, dès lors, être écarté.

4. En deuxième lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 151-2 du code de l'urbanisme : " Le plan local d'urbanisme comprend : / 1° Un rapport de présentation ; / 2° Un projet d'aménagement et de développement durables ; / 3° Des orientations d'aménagement et de programmation ; / 4° Un règlement ; / 5° Des annexes ". L'article L. 151-5 du même code dispose, dans sa rédaction applicable au litige : " Le projet d'aménagement et de développement durables définit : / 1° Les orientations générales des politiques d'aménagement, d'équipement, d'urbanisme, de paysage, de protection des espaces naturels, agricoles et forestiers, et de préservation ou de remise en bon état des continuités écologiques ; / 2° Les orientations générales concernant l'habitat, les transports et les déplacements, les réseaux d'énergie, le développement des communications numériques, l'équipement commercial, le développement économique et les loisirs, retenues pour l'ensemble de l'établissement public de coopération intercommunale ou de la commune. / Il fixe des objectifs chiffrés de modération de la consommation de l'espace et de lutte contre l'étalement urbain. / Il peut prendre en compte les spécificités des anciennes communes, notamment paysagères, architecturales, patrimoniales et environnementales, lorsqu'il existe une ou plusieurs communes nouvelles. ". Aux termes de l'article L. 151-8 de ce code : " Le règlement fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés aux articles L. 101-1 à L. 101-3. ". Pour apprécier la cohérence ainsi exigée au sein du plan local d'urbanisme entre le règlement et le projet d'aménagement et de développement durables, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle du territoire couvert par le document d'urbanisme, si le règlement ne contrarie pas les orientations générales et objectifs que les auteurs du document ont définis dans le projet d'aménagement et de développement durables, compte tenu de leur degré de précision. Par suite, l'inadéquation d'une disposition du règlement du plan local d'urbanisme à une orientation ou un objectif du projet d'aménagement et de développement durables ne suffit pas nécessairement, compte tenu de l'existence d'autres orientations ou objectifs au sein de ce projet, à caractériser une incohérence entre ce règlement et ce projet.

5. D'autre part, aux termes du projet d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme intercommunal : " Axe 1 : ménager un socle agricole et naturel en forte évolution, en adoptant un modèle de développement respectueux de l'environnement. / (...). 4. Encadrer l'évolution des hameaux, écarts et sites d'activités isolés en définissant des marges d'évolution adaptées aux besoins et au contexte. / 4.1 Distinguer à l'échelle d'Erdre et Gesvres les hameaux constitués, pouvant accueillir un développement endogène, des écarts à limiter à une évolution du bâti existant. / ) En dehors des bourgs et des deux villages identifiés au SCoT (la Paquelais à Vigneux-de-Bretagne et la Ménardais à Treillières), limiter le développement aux espaces compris à l'intérieur des enveloppes urbaines. / ) Permettre une densification adaptée des hameaux constitués les plus importants, dans le respect des sensibilités environnementales et agricoles (risques, nuisances sonores, etc.) (...). ".

6. Il ressort des pièces du dossier que la parcelle cadastrée à la section YB sous le n° 246 à Treillières, propriété de M. et Mme C..., présente une superficie de 1 888 mètres carrés et s'ouvre à l'ouest sur un vaste espace naturel et agricole. Si elle se situe à proximité de parcelles bâties appartenant à un hameau, elle en est séparée par deux parcelles non bâties au sud et par une route à l'est. Au regard de ces éléments, et alors même que cette parcelle supporte une maison d'habitation, le classement en zone agricole de cette parcelle, qui ne se situe pas à l'intérieur de l'enveloppe urbaine, n'est pas incohérent avec l'orientation du projet d'aménagement et de développement durables tendant à permettre une densification adaptée des hameaux constitués les plus importants, compte tenu du degré de précision de cet objectif et, au surplus, des autres orientations et objectifs du projet d'aménagement et de développement durables, tenant notamment à la préservation des espaces agricoles par la réduction de 35 % de la consommation d'espaces agricoles, naturels et forestiers par rapport à la consommation d'espace constatée sur la période précédente. Le moyen tiré de l'incohérence du classement contesté de la parcelle avec les orientations et objectifs du projet d'aménagement et de développement durables en méconnaissance des dispositions de l'article L. 151-8 du code de l'urbanisme doit, par suite, être écarté.

7. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 151-17 du code de l'urbanisme : " Le règlement délimite, sur le ou les documents graphiques, les zones urbaines, les zones à urbaniser, les zones agricoles, les zones naturelles et forestières. / Il fixe les règles applicables à l'intérieur de chacune de ces zones dans les conditions prévues par la présente section. ". L'article

R. 151-22 du même code dispose que : " Les zones agricoles sont dites "zones A". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. ". Il résulte de ces dispositions qu'une zone agricole, dite " zone A ", du plan local d'urbanisme a vocation à couvrir, en cohérence avec les orientations générales et les objectifs du projet d'aménagement et de développement durables, un secteur, équipé ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. Si, pour apprécier la légalité du classement d'une parcelle en zone A, le juge n'a pas à vérifier que la parcelle en cause présente, par elle-même, le caractère d'une terre agricole et peut se fonder sur la vocation du secteur auquel cette parcelle peut être rattachée, en tenant compte du parti urbanistique retenu ainsi que, le cas échéant, de la nature et de l'ampleur des aménagements ou constructions qu'elle supporte, ce classement doit cependant être justifié par la préservation du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles de la collectivité concernée, à plus forte raison lorsque les parcelles en cause comportent des habitations voire présentent un caractère urbanisé.

8. D'une part, ainsi qu'il a été dit au point 6, la maison d'habitation implantée sur la parcelle cadastrée à la section YB sous le n° 246 à Treillières est séparée du hameau, à proximité duquel elle se trouve, par des parcelles non bâties au sud et une route à l'est. Elle ne peut, dès lors être regardée comme s'insérant au sein de l'enveloppe urbaine de ce hameau. Il en résulte que M. et Mme C... ne peuvent se prévaloir de l'orientation, formulée dans le rapport de présentation, consistant à classer en zone urbaine une " zone tampon " de 25 mètres autour des constructions situées dans l'enveloppe urbaine, à l'exception des constructions légères. D'autre part, cette parcelle s'insère dans un vaste espace à vocation agricole sur lequel elle s'ouvre à l'ouest. La circonstance alléguée qu'elle ne présente, par elle-même, aucun potentiel agricole du fait de l'implantation d'une maison d'habitation et de son raccordement aux réseaux, est sans incidence sur le caractère agricole du secteur dans lequel elle s'insère. Enfin, la circonstance que cette parcelle était anciennement classée en zone urbaine est sans incidence sur la légalité du classement litigieux en zone agricole. Au regard de l'ensemble de ces éléments et des objectifs du projet d'aménagement et de développement durables tendant notamment à " modérer la consommation des terres agricoles à travers un urbanisme raisonné et économe en espace dans le respect des lois et documents supra-communaux en vigueur, et notamment (...) réduire la consommation des espaces agricoles, naturels et forestiers d'environ 35% par rapport à la consommation d'espace constatée sur la période précédente " et, afin d'" encadrer l'évolution des hameaux, écarts et sites d'activités isolés en définissant des marges d'évolution adaptées aux besoins et au contexte ", à limiter, " en dehors des bourgs et des deux villages identifiés au schéma de cohérence territoriale (la Paquelais à Vigneux-de-Bretagne et la Ménardais à Treillières), le développement aux espaces compris à l'intérieur des enveloppes urbaines ", le moyen tiré de ce que le classement litigieux serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.

9. En dernier lieu, le détournement de pouvoir qui entacherait le classement en zone urbaine d'une partie de la parcelle cadastrée à la section YB sous le n° 79 à Treillières n'est pas établi.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la communauté de communes d'Erdre et Gesvres, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme demandée par M. et Mme C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de M. et Mme C... le versement à la communauté de communes d'Erdre et Gesvres d'une somme de 1 000 euros sur le fondement des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme C... est rejetée.

Article 2 : M. et Mme C... verseront à la communauté de communes d'Erdre et Gesvres une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C..., à Mme A... C... et à la communauté de communes d'Erdre et Gesvres.

Délibéré après l'audience du 11 février 2025, à laquelle siégeaient :

- Mme Montes-Derouet, présidente,

- M. Dias, premier conseiller,

- M. Mas, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 mars 2025.

Le rapporteur,

B. MASLa présidente,

I. MONTES-DEROUET

La greffière,

M. B...

La République mande et ordonne au préfet de la Loire-Atlantique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23NT00951


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NT00951
Date de la décision : 07/03/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MONTES-DEROUET
Rapporteur ?: M. Benoît MAS
Rapporteur public ?: M. LE BRUN
Avocat(s) : BARDOUL

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-03-07;23nt00951 ?
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