Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 26 juin 2024 du préfet d'Ille-et-Vilaine portant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixation de son pays de renvoi et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an ainsi que la décision du même jour l'assignant à résidence.
Par un jugement n° 2403565 du 9 juillet 2024, la magistrate déléguée du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 26 novembre 2024, Mme B..., représentée par Me Gonultas, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 9 juillet 2024 ;
2°) d'annuler l'ensemble de ces décisions ;
3°) d'enjoindre, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, au préfet d'Ille-et-Vilaine de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours et dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, qui renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- la décision refusant de lui accorder un délai pour quitter le territoire français est insuffisamment motivée et entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle et familiale ;
- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et entaché son arrêté d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- en ne mettant pas en œuvre la procédure de transfert à destination de l'Italie, le préfet a entaché son arrêté d'une erreur de droit ;
- l'arrêté contesté est contraire aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'arrêté l'assignant à résidence, avec obligation de pointage et interdiction de sortir du périmètre de Rennes est entaché d'un défaut d'examen de sa situation personnelle et familiale ;
- l'obligation de pointage n'est pas motivée
- cet arrêté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation et contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 4 et 28 mars 2025, le préfet d'Ille-et-Vilaine conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés.
Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 novembre 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Gélard a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., ressortissante congolaise (République Démocratique du Congo), relève appel du jugement du 9 juillet 2024 par lequel la magistrate déléguée du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 juin 2024 du préfet d'Ille-et-Vilaine portant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixation de son pays de renvoi et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an et de la décision du même jour l'assignant à résidence.
Sur les conclusions dirigées contre l'arrêté portant obligation de quitter le territoire français, fixation du pays de destination de Mme B... et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger faisant l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de cette décision. ". Aux termes de l'article L. 612-2 du même code : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : (...) 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet. ". Aux termes de l'article L.612-3 de ce code : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) 4° L'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ; 5° L'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; (...) 8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, (...), qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale (...) ".
3. L'arrêté contesté vise la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les articles du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sur lesquels il se fonde. Par ailleurs, il rappelle que Mme B... a fait l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français avec un délai de départ volontaire de 30 jours, prise le 29 mai 2018 par le préfet de Haute-Garonne, que l'intéressée n'est en possession d'aucun document d'identité ou de voyage et que son entrée doit en conséquence être regardée comme irrégulière. Il précise que Mme B... peut ainsi faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sur le fondement des 1° et 4° précités de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Cet arrêté précise en outre que l'intéressée n'a pas sollicité de titre de séjour et se trouve en situation irrégulière, qu'elle ne présente pas de garanties de représentation suffisantes dans la mesure où elle ne justifie pas résider chez un compatriote ainsi qu'elle le soutient, qu'elle ne s'est pas soumise à la précédente obligation de quitter le territoire français prise à son encontre, et que le risque qu'elle se soustrait à cette nouvelle mesure d'éloignement doit être regardé comme établi au regard des dispositions des 4°, 5° et 8° précités de l'article L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. L'arrêté mentionne expressément que Mme B... entre dans les prévisions du 3° de l'article L. 612-2 de ce code, qui autorisent le refus d'octroi d'un délai volontaire pour quitter le territoire français. Cette décision indique par ailleurs que le mari de l'intéressée a également fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français en date du 17 juin 2024 et que le couple a trois enfants. Il s'ensuit que cet arrêté pris dans son ensemble, et en particulier la décision qu'il contient refusant d'accorder à la requérante un délai de départ, est suffisamment motivé. Il ne révèle aucun défaut d'examen de sa situation personnelle et familiale. Par suite, ces deux moyens manquent en fait et ne peuvent qu'être écartés.
4. En deuxième lieu, Mme B... se prévaut de la circonstance que son mari dispose d'un permis de séjour italien de longue durée valable jusqu'au 17 janvier 2032 et d'une carte d'identité émise le 12 mars 2021 par les autorités de ce pays, qui expire le 29 juillet 2031. Elle soutient que le préfet aurait dû mettre en œuvre la procédure de transfert à destination de ce pays. Il n'est toutefois pas établi que l'intéressé aurait sollicité auprès des services préfectoraux son transfert aux autorités italiennes. En outre, la décision fixant son pays de destination précise qu'elle pourra être reconduite d'office à destination du pays dont elle a la nationalité, ou de tout autre pays dans lequel elle est légalement admissible. Par suite, ce moyen ne peut qu'être écarté.
5. En troisième lieu, il convient d'écarter, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, les moyens tirés de ce que l'arrêté contesté serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation et contraire aux stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, que Mme B... réitère en appel sans apporter d'élément nouveau.
Sur les conclusions dirigées contre l'arrêté portant assignation à résidence, obligation de pointage et interdiction de sortir du périmètre de Rennes :
6. En premier lieu, l'arrêté contesté vise la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les articles du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sur lesquelles il se fonde. Il rappelle que Mme B... a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise le même jour, qu'elle n'a pas remis son passeport ou tout autre document de voyage aux services de police, que la mise à exécution de la mesure d'éloignement demeure une perspective raisonnable, que l'intéressée entre ainsi dans les prévisions du 1° de l'article L. 731-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qu'elle ne justifie pas résider chez un compatriote ainsi qu'elle le prétend et ne justifie pas d'une résidence stable, effective et permanente. Il indique qu'il convient d'organiser l'exécution de sa mesure d'éloignement et que, pour ce faire, il convient de l'assigner à résidence à Rennes. Cette décision précise en particulier que Mme B... est astreinte à se présenter les mardis et jeudis non fériés à 16h à la direction zonale de la police aux frontières de Saint-Jacques-de-la-Lande afin de faire constater qu'elle respecte son assignation à résidence, à demeurer à son domicile chaque jour entre 18h et 21h, sauf à justifier d'une difficulté particulière, et à ne pas sortir du périmètre de la commune de Rennes, sans autorisation préfectorale, sauf pour consulter son avocat notamment. Cette décision, dans son ensemble, et en particulier la décision portant obligation de pointage qu'elle contient, est par suite suffisamment motivée et ne révèle aucun défaut d'examen de sa situation personnelle et familiale. Ces deux moyens doivent en conséquence être écartés.
7. En second lieu, en se bornant à faire valoir qu'elle est la mère de trois enfants scolarisés, sans faire justifier des contraintes qui résulteraient de cette situation alors qu'il n'est pas établi que son mari serait dans l'impossibilité de les accompagner à l'école ou à des rendez-vous médicaux, la requérante n'établit pas que les modalités d'application de la mesure d'assignation à résidence, rappelées ci-dessus, seraient contraires aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou seraient entachées d'une erreur manifeste d'appréciation.
8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate déléguée du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Pour les mêmes motifs, ses conclusions à fin d'injonction, sous astreinte, ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Une copie sera transmise pour information au préfet d'Ille-et-Vilaine.
Délibéré après l'audience du 3 avril 2025 à laquelle siégeaient :
- Mme Brisson, présidente de chambre,
- M. Vergne, président-assesseur,
- Mme Gélard, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 25 avril 2025.
Le rapporteur,
V. GELARDLa présidente,
C. BRISSON
Le greffier,
Y. MARQUIS
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 24NT03301