Vu la requête, enregistrée le 6 juillet 2010, présentée pour Mme Soline A, demeurant ..., par Me Nordmann ; Mme A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0813399/3-2 en date du 16 juin 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 4 juillet 2008 par laquelle l'inspectrice du travail a accordé à la société Almirall l'autorisation de la licencier pour motif disciplinaire ;
2°) d'annuler ladite décision du 4 juillet 2008 de l'inspectrice du travail ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat ou toute autre partie succombante la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs modifiée ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 octobre 2011 :
- le rapport de Mme Folscheid, rapporteur,
- les conclusions de M. Jarrige, rapporteur public,
- et les observations orales de Me Grimshaw, substituant Me Cloarec-Mérendon, pour la société Almirall ;
Considérant que la société Almirall a sollicité le 7 mai 2008 l'autorisation de licencier pour motif disciplinaire Mme A qui avait été engagée par un contrat à durée indéterminée en date du 1er avril 2003 en qualité de déléguée médicale et détenait le mandat de déléguée du personnel suppléante depuis le 18 novembre 2005 ; que, par décision du 4 juillet 2008, l'inspectrice du travail, après avoir écarté comme insuffisamment établi le grief d'agissements malveillants de l'intéressée à l'encontre de sa collègue, a accordé l'autorisation sollicitée en se fondant sur les graves manquements de Mme A à ses obligations contractuelles ; que, par un jugement en date du 16 juin 2010, le Tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de Mme A tendant à l'annulation de la décision du 4 juillet 2008 autorisant son licenciement ; que Mme A relève régulièrement appel de ce jugement ;
Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision de l'inspection du travail :
Considérant, en premier lieu, que les premiers juges ont écarté à bon droit le moyen tiré de l'insuffisance de motivation par des motifs qu'il convient d'adopter ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article de l'article R. 2421-9 du code du travail : L'avis du comité d'entreprise est exprimé au scrutin secret après audition de l'intéressé. [...] ;
Considérant qu'il est constant que Mme A était absente à la réunion du comité d'entreprise qui s'est tenue le 29 avril 2008 à Paris ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que Mme A, qui avait été reçue en entretien préalable le 3 mars 2008 et se trouvait en arrêt maladie du 4 au 16 mars 2008, a été régulièrement convoquée à cette réunion le 17 avril 2008, date à laquelle expirait un deuxième arrêt maladie qui avait débuté le 17 mars 2008 ; qu'à cette convocation, qui mentionnait la possibilité pour Mme A, en cas d'empêchement légitime, de faire connaître ses observations par écrit ou d'intervenir par téléphone lors de la réunion du comité d'entreprise, était joint le dossier la concernant qui allait être diffusé auprès des membres du comité d'entreprise ; que le conseil de la requérante a adressé à la société une lettre datée du 25 avril 2009 l'informant de l'impossibilité pour sa cliente de se rendre à la réunion compte tenu de son état de santé à l'origine d'un nouvel arrêt maladie expirant le 15 mai 2008 ; que cette lettre exposait les observations de Mme A aux différents griefs formulés à son encontre dans le dossier de consultation ; que le conseil de la requérante demandait à la direction de faire procéder, lors de la séance du 29 avril 2008, à la lecture intégrale de la présente, et de procéder à sa diffusion à chaque participant ; qu'il ressort des pièces du dossier que ladite lettre a été portée à la connaissance des membres du comité d'entreprise et lue intégralement lors de la réunion du 29 avril 2008 ; que, dans ces conditions, l'absence d'audition de Mme A, qui n'avait pas manifesté le souhait que la réunion soit reportée, ne peut être regardée comme ayant été de nature à vicier la procédure de consultation du comité d'entreprise ; que Mme A ne saurait sérieusement soutenir qu'il incombait à son employeur de prévoir la réunion, qui devait se tenir à Paris, durant les heures de sortie autorisées par son arrêt de travail (15h à 18h), dès lors que l'intéressée est domiciliée dans les Alpes Maritimes ; que le moyen tiré de l'irrégularité de procédure doit, par suite, être écarté ;
Considérant, en troisième lieu, qu'en vertu des dispositions de l'article L. 2421-3 du code du travail, les délégués du personnel bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, il ne doit être en rapport ni avec les fonctions représentatives normalement exercées, ni avec l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail saisi et, le cas échéant, au ministre compétent de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ;
Considérant qu'il est reproché à Mme A la saisie sur sa fiche d'activité de février 2008 de deux visites à des médecins qu'elle n'avait en réalité pas effectuées, l'absence de comptes rendus pour un certain nombre de visites effectuées, enfin des comptes rendus insuffisants et inexploitables pour d'autres visites ; que, sur le premier point, Mme A soutient n'avoir jamais caché qu'elle n'avait pas vu les deux médecins en cause dès lors qu'elle l'a noté expressément dans les comptes rendus afférents à ces deux visites ; que toutefois, elle ne conteste pas, comme le fait valoir la société, que les contacts entrés sont automatiquement comptabilisés comme des visites effectives, peu important le contenu des comptes rendus ; que, par ailleurs, l'absence ou l'insuffisance de comptes rendus relatifs à des visites réellement effectuées sont attestées par sa fiche d'activité de février 2008 d'où il ressort notamment que quinze visites auprès de médecins n'ont donné lieu à aucun compte rendu ; que Mme A ne saurait utilement faire valoir ni que ces deux derniers griefs pourraient être reprochés à d'autres visiteurs médicaux et notamment sa collègue, Mme B, ni qu'elle n'aurait pas antérieurement fait l'objet de reproches et d'avertissement pour des faits similaires, ni qu'elle aurait perçu des primes dans les mois antérieurs témoignant de la satisfaction de son employeur pour son travail ; que les agissements reprochés à Mme A sont établis et manifestement contraires aux dispositions de la convention collective nationale des industries pharmaceutiques ainsi qu'à ses obligations contractuelles ; que l'inspectrice du travail a pu estimer, sans erreur d'appréciation, que ces faits étaient d'une gravité suffisante pour justifier le licenciement ;
Considérant, en dernier lieu, qu'à supposer comme le soutient Mme A, que le comportement de son employeur ait commencé à se détériorer à partir du moment où elle a tenté d'attirer l'attention de celui-ci sur divers dysfonctionnements de l'entreprise et notamment sur le comportement de sa collègue, cette seule circonstance n'est pas à elle seule de nature à établir un rapport entre la procédure de licenciement engagée à son encontre et l'exercice de son mandat représentatif ; que Mme A n'apporte aucun autre élément de fait permettant de caractériser le lien entre son mandat et la mesure de licenciement ; qu'enfin, l'enquête de l'inspection du travail ne fait état d'aucune discrimination en matière de conditions de travail, de rémunération ou d'évolution de carrière, et encore moins de sanctions disciplinaires répétées ; que, par suite, c'est à bon droit que l'inspectrice du travail et les premiers juges n'ont pas retenu de lien entre le mandat de la requérante et la procédure de licenciement engagée à son encontre ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal, par le jugement attaqué, a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 4 juillet 2008 autorisant son licenciement ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que Mme A demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A une somme de 1 000 euros au profit de la société Almirall au titre des mêmes frais exposés par celle-ci ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.
Article 2 : Mme A versera une somme de 1 000 euros à la société Almirall en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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N° 10PA03855
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N° 10PA03362