Vu la requête, enregistrée par télécopie le 23 janvier 2012, régularisée le 31 janvier 2012 par la production de l'original, présentée pour M. Joao A demeurant 12..., par Me Afoua Geay, avocat ; M. A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1107954/9 du 27 octobre 2011 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du 24 octobre 2011 par lequel le préfet du Val-de-Marne l'a obligé à quitter le territoire français, sans lui accorder un délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination et l'a placé en rétention administrative ;
2°) d'annuler ces arrêtés pour excès de pouvoir ;
3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer dans cette attente une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la convention internationale relative aux droit de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
Vu le Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;
Vu la directive n° 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience, en application de l'article R. 732-1-1 du code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 septembre 2012 :
- le rapport de M. Niollet, rapporteur,
- et les observations de Me Afoua-Geay, avocat de M. A ;
1. Considérant que, par deux arrêtés du 24 octobre 2011, le préfet du Val-de-Marne a, d'une part, fait obligation à M. Joao A, qui est de nationalité capverdienne, est né le 15 novembre 1978 à Praia Santiago (Cap Vert), et a déclaré être entré en France en octobre 2000, de quitter le territoire français, sans lui accorder un délai de départ volontaire, en fixant le pays de destination, et, d'autre part, décidé de le placer en rétention administrative ; que M. A relève appel du jugement du 27 octobre 2011 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Melun qui a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de ces deux arrêtés ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 20 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne : " 1. Il est institué une citoyenneté de l'Union. Est citoyen de l'Union toute personne ayant la nationalité d'un État membre. La citoyenneté de l'Union s'ajoute à la citoyenneté nationale et ne la remplace pas. 2. Les citoyens de l'Union jouissent des droits et sont soumis aux devoirs prévus par les traités. Ils ont, entre autres : a) le droit de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres (...) " ; qu'aux termes de l'article 21 du même traité : " 1. Tout citoyen de l'Union a le droit de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, sous réserve des limitations et conditions prévues par les traités et par les dispositions prises pour leur application (...) " ; que les stipulations de l'article 20 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne doivent être interprétées en ce sens qu'elles s'opposent à ce qu'un État membre refuse à un ressortissant d'un État tiers, qui assume la charge de ses enfants en bas âge, citoyens de l'Union, le séjour dans l'État membre de résidence de ces derniers et dont ils ont la nationalité ;
3. Considérant que le moyen que M. A avait tiré devant le tribunal administratif, d'une violation de ces stipulations, en faisant état de la présence en France de son enfant de nationalité portugaise, était inopérant ; que le tribunal administratif n'était donc pas tenu d'y répondre expressément ;
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
4. Considérant qu'aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° (...) " ;
5. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que M. A n'établit pas être entré régulièrement sur le territoire français et ne conteste pas s'être vu refuser la délivrance d'un titre de séjour par un arrêté du préfet du Val-de-Marne du 20 janvier 2011 ; qu'ainsi, il entrait dans les cas prévus par les dispositions citées ci-dessus du 1°) et du 3°) du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut obliger un étranger à quitter le territoire français ;
6. Considérant, en deuxième lieu, que l'obligation de quitter le territoire français comporte l'exposé de l'ensemble des circonstances de droit et de fait qui en constituent le fondement ; qu'ainsi, elle est suffisamment motivée ;
7. Considérant, en troisième lieu, qu'il ne ressort pas de la motivation de l'obligation de quitter le territoire français que le préfet du Val-de-Marne ne serait pas livré à un examen complet de la situation de M. A ;
8. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
9. Considérant que M. A fait état de la durée de sa présence en France, des liens privés qu'il y a tissés, et de la présence en France de ses deux frères dont l'un bénéficie d'une carte de résident et l'autre est de nationalité française, ainsi que de la présence de son fils, de nationalité portugaise, né le 20 décembre 2005, qui vit avec sa mère et est scolarisé ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que M. A n'apporte pas la preuve d'une présence habituelle et continue en France avant le mois de janvier 2009, en se bornant à produire des témoignages de proches, une facture en date du 8 mai 2004, et deux reçus consulaires, qu'il est célibataire et qu'il n'établit pas qu'il participerait effectivement à l'entretien et l'éducation de son enfant, en produisant une liste manuscrite de reçus de versements de pensions et une attestation de la mère de cet enfant, ainsi qu'un récépissé de demande de virement en date du 5 mars 2011 et diverses autres pièces bancaires relatives à des opérations postérieures à l'arrêté attaqué ; qu'il ne démontre par ailleurs pas être dépourvu de toute attache privée et familiale dans son pays d'origine où il a vécu au moins jusqu'à ses vingt-deux ans ; que, dans ces conditions, la décision attaquée ne peut être regardée comme portant une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale, en méconnaissance des stipulations citées ci-dessus, ni comme reposant sur une appréciation manifestement erronée de sa situation ;
10. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ;
11. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, M. A n'établit pas qu'il participerait effectivement à l'entretien et l'éducation de son enfant qui vit avec sa mère ; qu'il n'est donc pas fondé à soutenir que la décision attaquée, en ce qu'elle aura pour conséquence de séparer son enfant de l'un de ses deux parents, porterait atteinte à l'intérêt de cet enfant en méconnaissance des stipulations citées ci-dessus ;
Sur la décision refusant d'accorder un délai de départ volontaire :
12. Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : 1° Si le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public 2° Si l'étranger s'est vu refuser la délivrance ou le renouvellement de son titre de séjour, de son récépissé de demande de carte de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour au motif que sa demande était ou manifestement infondée ou frauduleuse ; 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; (...) f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente, ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues par les articles L. 513-4, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2 (...) " ;
13. Considérant, en premier lieu, que, pour refuser à M. A un délai de départ volontaire, le préfet a, dans son arrêté portant obligation de quitter le territoire français, estimé qu'il s'était vu refuser la délivrance d'un titre de séjour au motif que sa demande était manifestement infondée, et qu'il existait un risque qu'il se soustraie à l'obligation de quitter le territoire français dont il faisait l'objet, dans la mesure où il s'était soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement et ne présentait pas de garanties de représentation suffisantes ; qu'ainsi, la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire est suffisamment motivée ;
14. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort pas de la motivation de l'arrêté portant obligation de quitter le territoire français que la décision refusant d'accorder à M. A un délai de départ volontaire n'aurait pas donné lieu à un examen complet de sa situation ;
15. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la directive 2008/115/CE susvisée : " Aux fins de la présente directive, on entend par : (...) 7) " risque de fuite " : le fait qu'il existe des raisons, dans un cas particulier et sur la base de critères objectifs définis par la loi, de penser qu'un ressortissant d'un pays tiers faisant l'objet de procédures de retour peut prendre la fuite (...) " ; qu'aux termes de l'article 7 de ladite directive : " 1. La décision de retour prévoit un délai approprié allant de sept à trente jours pour le départ volontaire, sans préjudice des exceptions visées aux paragraphes 2 à 4. (...) / 4. S'il existe un risque de fuite, (...) les Etats membres peuvent s'abstenir d'accorder un délai de départ volontaire ou peuvent accorder un délai inférieur à sept jours " ; qu'il résulte des dispositions précitées du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que l'existence d'un risque que l'étranger se soustraie à l'obligation qui lui est faite de quitter le territoire français résulte d'un ensemble de critères objectifs et doit être appréciée par l'autorité compétente en fonction des circonstances particulières de l'espèce ; que ces dispositions ne méconnaissent pas les objectifs de la directive 2008/115/CE susvisée et notamment ceux qui résultent des stipulations précitées ; qu'il s'ensuit que doit être écarté le moyen tiré par M. A de ce que la décision attaquée aurait été prise sur le fondement de dispositions législatives contraires aux objectifs de cette directive ;
16. Considérant, en quatrième lieu, que le préfet n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation en considérant qu'il ne ressortait ni des allégations de M. A, ni de l'examen de sa situation l'existence d'une circonstance particulière, au sens des dispositions citées ci-dessus du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de nature à établir qu'il n'y avait pas de risque qu'il se soustraie à l'obligation qui lui avait été faite de quitter le territoire ;
Sur la décision de placement en rétention administrative :
17. Considérant, d'une part, que, compte tenu de ce qui a été dit ci-dessus, M. A n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français et de la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire ;
18. Considérant, d'autre part, qu'aux termes du paragraphe 4 de l'article 8 de la directive 2008/115/CE susvisée : " Lorsque les États membres utilisent - en dernier ressort -des mesures coercitives pour procéder à l'éloignement d'un ressortissant d'un pays tiers qui s'oppose à son éloignement, ces mesures sont proportionnées et ne comportent pas d'usage de la force allant au-delà du raisonnable. Ces mesures sont mises en oeuvre comme il est prévu par la législation nationale, conformément aux droits fondamentaux et dans le respect de la dignité et de l'intégrité physique du ressortissant concerné d'un pays tiers " et qu'aux termes de l'article 15 de ladite directive : " 1. À moins que d'autres mesures suffisantes, mais moins coercitives, puissent être appliquées efficacement dans un cas particulier, les États membres peuvent uniquement placer en rétention le ressortissant d'un pays tiers qui fait l'objet de procédures de retour afin de préparer le retour et/ou de procéder à l'éloignement, en particulier lorsque : a) il existe un risque de fuite, ou b) le ressortissant concerné d' un pays tiers évite ou empêche la préparation du retour ou de la procédure d'éloignement. / Toute rétention est aussi brève que possible et n'est maintenue qu'aussi longtemps que le dispositif d'éloignement est en cours et exécuté avec toute la diligence requise " ; qu'en vertu des stipulations précitées, le placement en rétention d'un étranger qui fait l'objet d'une procédure de retour n'est possible, en l'absence de départ volontaire, que si son assignation à résidence n'est pas suffisante pour éviter le risque qu'il ne se soustraie à l'exécution de la décision de retour dont il fait l'objet ; qu'en vertu de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la rétention administrative de l'étranger ayant fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant n'est possible que lorsque le délai pour quitter le territoire français qui lui avait été accordé est expiré ou si ce délai n'a pas été accordé, à la condition qu'il ne puisse quitter immédiatement le territoire français, à moins qu'il ne fasse l'objet d'une décision d'assignation à résidence en application de l'article L. 561-2 de ce code ; qu'une telle décision d'assignation est prise lorsque l'étranger pour lequel l'exécution de l'obligation de quitter le territoire demeure une perspective raisonnable présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque qu'il se soustraie à l'obligation de quitter le territoire français ; que l'autorité administrative est tenue d'effectuer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, un examen de la situation de chaque étranger afin de vérifier notamment si les conditions légales permettant son placement en rétention sont réunies et si l'étranger bénéficie de garanties de représentation effectives ; que, dans ces conditions, contrairement à ce que soutient M. A, les dispositions susmentionnées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sur lesquelles le préfet s'est fondé, ne méconnaissent pas les objectifs de la directive 2008/115/CE susvisée et notamment ceux qui résultent des stipulations précitées ;
19. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A, qui ne fait valoir aucun moyen à l'encontre de la décision fixant le pays de destination, n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions attaquées ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
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N° 12PA00441