Vu la procédure suivante :
M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 23 janvier 2014 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour.
Par un jugement n° 1409208/3-2 du 4 mars 2015, le Tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté attaqué et enjoint au préfet de police de délivrer un titre de séjour à M.A.Pakistan
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 11 mai 2015, le préfet de police demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Paris n° 1409208/3-2 du 4 mars 2015 ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. A...devant le Tribunal administratif de Paris.
Il soutient que :
- il n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation de la situation de M. A...;
- les autres moyens soulevés par l'intéressé dans sa demande présentée au Tribunal administratif de Paris ne sont pas fondés.
Par un mémoire enregistré le 6 novembre 2015, M.A..., représenté par Me Boamah, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mis à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il est intégré en France et n'a plus d'attaches dans son pays d'origine ;
- la décision du 23 janvier 2014 est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, ainsi que l'a jugé le Tribunal administratif de Paris ;
- l'arrêté a été pris sans examen détaillé de sa situation personnelle ;
- le préfet de police n'a pas examiné sa demande au regard de la circulaire du 28 novembre 2012 ;
- le préfet de police a méconnu l'étendue de sa compétence en ne faisant pas usage de son pouvoir de régularisation ;
- la décision méconnaît l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, compte tenu des conditions de son séjour qui lui donnent vocation à la délivrance d'un titre de séjour en qualité de salarié ;
- la décision méconnaît le 7° de l'article L. 313-11 et l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par une ordonnance du 6 novembre 2015, la clôture de l'instruction a été fixée au 20 novembre 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Hamon,
- et les observations de Me Boamah, avocat de M.A.Pakistan
Une note en délibéré, enregistrée le 9 décembre 2015, a été présentée par Me Boamah pour M.A.Pakistan
1. Considérant que M. A..., né le 25 juillet 1994, de nationalité pakistanaise, est entré en France au plus tard le 2 juillet 2010, à l'âge de quinze ans ; qu'en tant que mineur isolé, il a d'abord été pris en charge par une association, puis admis à l'aide sociale à l'enfance à compter du 20 janvier 2011, avant de conclure un contrat " jeune majeur " avec le département de Paris, le 25 juillet 2012, lequel a été prorogé jusqu'au 20 septembre 2013 ; que devenu majeur il a sollicité un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ; que, par un arrêté du 23 janvier 2014, le préfet de police a opposé un refus à sa demande ; que le préfet de police relève appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Paris, saisi par M.A..., a annulé cet arrêté et lui a fait injonction de délivrer à l'intéressé un titre de séjour ;
2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la promesse d'embauche produite par l'intéressé est postérieure à la décision attaquée ; que M.A..., dont le père a sollicité pour lui au mois d'août 2010 un extrait d'acte de naissance qu'il lui a fait parvenir en France, n'allègue pas être isolé au Pakistan ; qu'enfin, à la suite de l'obtention de son diplôme en juin 2012, il n'a ni poursuivi ses études, ni occupé un emploi en rapport avec ses qualifications ; que, dans ces conditions, le préfet de police est fondé à soutenir qu'il n'a pas fait une appréciation manifestement erronée de la situation de l'intéressé en rejetant sa demande de titre de séjour, et que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé pour ce motif son arrêté du 23 janvier 2014 ;
3. Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur les autres moyens soulevés par M. A...devant le Tribunal administratif de Paris et devant la Cour ;
4. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des termes de la décision attaquée, que le préfet de police a procédé à l'examen particulier de la situation de M. A...et ne s'est pas estimé tenu de lui refuser la délivrance du titre de séjour sollicité ;
5. Considérant, en deuxième lieu, que les énonciations de la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dans le cadre des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne constituent pas des lignes directrices dont M. A...pourrait utilement se prévaloir ;
6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A titre exceptionnel et sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire prévue au 1° de l'article L. 313-10 portant la mention "salarié" ou la mention "travailleur temporaire" peut être délivrée, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, à l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française (...) " ; que ces dispositions ne prévoient pas la délivrance d'un titre de plein droit, mais instaurent un régime d'admission exceptionnelle au séjour ;
7. Considérant qu'il est constant qu'à la date de dépôt de sa demande, et à celle de la décision attaquée, M. A...ne suivait plus aucune formation et ne faisait pas preuve d'une intégration particulière dans la société française ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, compte tenu de ce qui a été dit au point 2, qu'il serait dépourvu de liens avec ses parents et son frère demeurant au... ; que, par suite, il n'est pas fondé à soutenir que le préfet de police aurait méconnu les dispositions précitées de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
8. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " ; qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 2 et 7, que M.A..., qui est célibataire sans enfant, et qui n'allègue pas être isolé au Pakistan où il a vécu jusqu'à l'âge de 15 ans, n'est pas fondé à soutenir que le refus de séjour qui lui a été opposé porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et, par suite, méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
9. Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7.(...) " ; qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 2, 7 et 8 que M. A...ne justifiant d'aucune situation humanitaire ou circonstance exceptionnelle, la décision attaquée n'a pas méconnu ces dispositions ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 23 janvier 2014 ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Paris n° 1409208 du 4 mars 2015 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. A...devant le Tribunal administratif de Paris est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. B...A.Pakistan
Copie en sera adressée au préfet de police
Délibéré après l'audience du 8 décembre 2015, à laquelle siégeaient :
- M. Even, président de chambre,
- Mme Hamon, président assesseur,
- M. Dellevedove, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 31 décembre 2015.
Le rapporteur,
P. HAMONLe président,
B. EVEN
Le greffier,
A-L. CALVAIRE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15PA01880