Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La S.C.I Bligny a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 30 novembre 2012 par lequel le préfet du Val-de-Marne a déclaré cessibles les parcelles nécessaires au projet d'aménagement et de renouvellement urbain de la zone d'aménagement concerté Rouget de Lisle à Vitry-sur-Seine.
Par un jugement n° 1400706 du 4 juin 2014, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 4 août 2014, la S.C.I Bligny, représentée par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1400706 du 4 juin 2014 du tribunal administratif de Melun ;
2°) d'annuler l'arrêté du 30 novembre 2012 par lequel le préfet du Val-de-Marne a déclaré cessibles les parcelles nécessaires au projet d'aménagement et de renouvellement urbain de la zone d'aménagement concerté Rouget de Lisle à Vitry-sur-Seine ;
3°) de mettre à la charge de l'État le versement d'une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est irrégulier pour avoir retenu à tort l'irrecevabilité, pour tardiveté, de sa demande de première instance ; l'arrêt litigieux lui a été notifié dans des conditions irrégulières au regard des dispositions du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ; il n'est pas démontré qu'il lui aurait été notifié le 26 mars 2013, ni qu'il comportait l'état parcellaire requis, qui était en réalité inclus dans l'ordonnance du juge de l'expropriation ;
- l'arrêté litigieux a été signé par une autorité incompétente, dès lors qu'il n'est pas démontré que son signataire justifiait d'une délégation régulière de signature, ni que le préfet aurait été absent ou empêché à la date de la signature ; il ne comporte pas les mentions exigées par l'article 11-28 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ; il est dépourvu de base légale en raison de l'annulation de l'arrêté portant déclaration d'utilité publique de la réalisation de la zone d'aménagement en cause.
Par un mémoire en défense enregistré le 1er février 2016, la société d'aménagement et de développement des villes et du département du Val-de-Marne (SADEV 94), représentée par MeD..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de
S.C.I Bligny le versement d'une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- la demande de première instance de la S.C.I. Bligny étant irrecevable, elle a été rejetée à bon droit par les premiers juges ; l'arrêté de cessibilité a en effet été régulièrement notifié à la requérante dès le 26 mars 2013 et comportait les pièces requises par l'article 11-28 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique.
Par un mémoire en défense enregistré le 15 mars 2016, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête et déclare s'associer aux moyens et arguments présentés pour la société d'aménagement et de développement des villes et du département du Val-de-Marne.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;
- le décret n° 55-22 du 4 janvier 1955 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Diémert,
- les conclusions de M. Romnicianu, rapporteur public,
- et les observations de MeC..., pour la société d'aménagement et de développement des villes et du département du Val-de-Marne (SADEV 94).
1. Considérant que, par un arrêté du 30 novembre 2012, le préfet du Val-de-Marne a déclaré cessibles les parcelles nécessaires au projet d'aménagement et de renouvellement urbain de la zone d'aménagement concerté Rouget de Lisle sur le territoire de la commune de
Vitry-sur-Seine ; que l'arrêté du 20 avril 2012 déclarant l'utilité publique la réalisation de cette zone d'aménagement concerté ayant été annulé par un jugement du tribunal administratif de Melun du 13 novembre 2013, la S.C.I. Bligny a saisi le tribunal administratif de Melun, le
24 janvier 2014, d'une demande d'annulation de l'arrêté de cessibilité ; que, par le jugement attaqué, ce tribunal a rejeté cette demande comme irrecevable, car tardive ; que la S.C.I. Bligny relève appel de ce jugement ;
2. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée " ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la SCI Bligny a accusé réception le 26 mars 2013 d'un pli recommandé émanant de la société SEGAT dont l'avis de réception porte les mentions " NC- RN 305/ Vitry-sur-Seine ZAC Rouget de Lisle Notif AC/OE PP
29-30 parcelle(s) BY 174 etc. " ; que la SADEV 94 soutient que ce pli comportait son courrier du 22 mars 2013, adressé à la société requérante, qui mentionne en en-tête " envoi sous pli recommandé avec accusé de réception / opération : commune de Vitry-sur-Seine ZAC Rouget de Lisle / objet : notification de l'arrêté préfectoral emportant cessibilité et de l'ordonnance d'expropriation (...) Parcelles : section BY n° 174, 176 ", courrier qui comporte les voies et délais de recours et mentionne trois pièces jointes : arrêté de cessibilité, ordonnance d'expropriation, état parcellaire ;
4. Considérant, en premier lieu, que la S.C.I. Bligny soutient que dès lors que le pli qu'elle a réceptionné le 26 mars 2013 provenait de la société SEGAT et non de la société SADEV 94, rien ne prouve qu'il contenait le courrier du 22 mars 2013 et les pièces qui l'accompagnaient ; que cependant la société SADEV 94 fait valoir que la société SEGAT est la société qu'elle avait chargée d'une mission d'assistance technique lors de l'expropriation ; qu'en l'absence de toute précision de la SCI Bligny sur le contenu du courrier émanant de la société SEGAT qu'elle a reçu le 26 mars 2013 et compte-tenu de la similitude entre l'objet mentionné sur l'avis de réception qu'elle a signé et celui du courrier du 22 mars 2013, il est suffisamment établi par les pièces du dossier que cette société a bien reçu, dès le 26 mars 2013, le courrier du 22 mars 2013 émanant de la société SADEV 94 notifiant l'arrêté de cessibilité ;
5. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte des dispositions de l'article R. 11-28 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique alors en vigueur que l'arrêté de cessibilité des propriétés dont la cession est nécessaire à la réalisation de l'opération déclarée d'utilité publique doit désigner les parcelles concernées conformément aux dispositions de l'article 7 du décret du 4 janvier 1955 portant réforme de la publicité foncière, lequel dispose en son premier alinéa : " Tout acte ou décision judiciaire sujet à publicité dans un service chargé de la publicité foncière doit indiquer, pour chacun des immeubles qu'il concerne, la nature, la situation, la contenance et la désignation cadastrale (section, numéro du plan et lieu-dit) (...). Le lieu-dit est remplacé par l'indication de la rue et du numéro pour les immeubles situés dans les parties agglomérées des communes urbaines " ; que la notification faite à un propriétaire d'un arrêté de cessibilité doit comporter pour désigner la parcelle concernée lui appartenant suffisamment de précisions pour lui permettre de connaitre la portée de la décision notifiée ; qu'en l'absence de ces précisions, la notification ne peut être regardée comme régulière et ne fait pas courir le délai de recours ;
6. Considérant que la SCI Bligny soutient que les délais de recours à l'encontre de l'arrêté attaqué n'ont pas commencé à courir à son égard, dès lors que l'arrêté de cessibilité litigieux du 30 novembre 2012 ne respectait pas les règles de forme prescrites par l'article
R. 11-28 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ; que, toutefois, si l'article 1er de cet arrêté se borne à déclarer cessibles " les parcelles nécessaires au projet d'aménagement et de renouvellement urbain de la zone d'aménagement concerté Rouget de Lisle sur la commune de Vitry-sur-Seine, désignées sur le plan annexé à cet arrêté ", il n'est pas sérieusement contesté que l'arrêté de cessibilité était, comme en témoigne la mention : " lu et rattaché à mon arrêté en date du 30 novembre 2012 " apposée sur ce document par le préfet du Val-de-Marne, complété de " l'état parcellaire " établi par la société SADEV 94 lequel comporte p 23, face aux " numéros du plan " 29 et 30, une description précise des parcelles section BY n° 174 et n° 176, situées 61 rue Rouget de Lisle et appartenant à la SCI Bligny, avec tous les détails requis par les dispositions précitées du code de l'expropriation ; que, comme il a été dit au point 3, cet état parcellaire était joint au courrier du 22 mars 2013 notifiant l'arrêté de cessibilité et l'ordonnance d'expropriation du 28 janvier 2013 et permettait donc à la SCI Bligny de comprendre sans ambigüité l'objet et la portée de ces actes, alors en outre que le courrier de notification lui-même rappelait, en objet, les numéros des deux parcelles concernées ; que, dans ces conditions et quand bien même l'arrêté de cessibilité contesté ne comportait pas de renvoi explicite à l'état parcellaire, sa notification contenait les informations permettant à son destinataire de connaître la portée dudit arrêté ;
7. Considérant, dès lors, que la SCI Bligny n'est pas fondée à soutenir que les délais de recours ouverts contre l'arrêté du 30 novembre 2012 ne lui étaient pas opposables ; qu'il ressort des pièces du dossier, ainsi qu'il a déjà été dit, que l'arrêté du 30 novembre 2012 et l'état parcellaire y afférent ont été notifiés à la SCI Bligny le 26 mars 2013 et que tant ledit arrêté que la lettre de notification mentionnaient les voies et délais de recours ; que la requête présentée par la SCI Bligny n'a été enregistrée au greffe du tribunal administratif de Melun que le 24 janvier 2014, soit après l'expiration du délai de recours contentieux fixé à deux mois par les dispositions précitées de l'article R. 421-1 du code de justice administrative ; qu'il suit de là que cette requête était tardive et, dès lors, irrecevable ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SCI Bligny n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la S.C.I. Bligny, partie perdante dans la présente instance, puisse en invoquer le bénéfice ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à sa charge une somme de 1 500 euros à verser à la société d'aménagement et de développement des villes et du département du Val-de-Marne (SADEV 94) sur le fondement des mêmes dispositions ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la S.C.I Bligny est rejetée.
Article 2 : La S.C.I Bligny versera une somme de 1 500 euros à la société d'aménagement et de développement des villes et du département du Val-de-Marne (SADEV 94) en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la S.C.I Bligny, au ministre de l'intérieur et à la société d'aménagement et de développement des villes et du département du Val-de-Marne
(SADEV 94).
Copie en sera adressée au préfet du Val-de-Marne.
Délibéré après l'audience du 29 septembre 2016, à laquelle siégeaient :
- Mme Pellissier, présidente de chambre,
- M. Diémert, président-assesseur,
- M. Gouès, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 13 octobre 2016.
Le rapporteur,
S. DIÉMERTLa présidente,
S. PELLISSIER Le greffier,
M. B...
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 14PA03474