Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Infrastructures Bâtiment et Travaux Publics (IBTP) a demandé au Tribunal administratif de Paris de condamner la Ville de Paris à lui verser la somme de 13 905,92 euros (TTC) euros au titre du marché de travaux conclu le 3 septembre 2009.
Par un jugement n° 1303015/7-2 du 20 février 2015, le Tribunal administratif de Paris a condamné la Ville de Paris à verser à la société IBTP la somme de 3 121,44 euros et a rejeté le surplus de ses conclusions.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 20 avril 2015 et 29 septembre 2016, la société IBTP, représentée par MeA..., demande à la Cour :
1°) de réformer le jugement du Tribunal administratif de Paris n° 1303015 du 20 février 2015 en tant que, par ce jugement, celui-ci a limité à la somme de 3 121,44 euros l'indemnité au versement de laquelle il a condamné la Ville de Paris ;
2°) de condamner la Ville de Paris à lui verser la somme totale de 13 905,92 euros ;
3°) de mettre à la charge de la Ville de Paris le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la Ville de Paris ne peut lui appliquer des pénalités de retard à compter du 18 juin 2010, dès lors que cette dernière lui a commandé tardivement des travaux supplémentaires pour lesquels le maître d'oeuvre avait proposé une prolongation du délai d'exécution ;
- elle a justifié d'intempéries pour lesquelles le maître d'oeuvre lui a accordé une prolongation du délai d'exécution de 15 jours ;
- elle a émis une facture au titre des intérêts moratoires dus sur le paiement de sa facture n° 120101, en application de l'article 3.6.4 du cahier des clauses administratives particulières.
Par un mémoire en défense et un mémoire complémentaire, enregistrés les 5 juillet et
20 octobre 2016, la Ville de Paris, représentée par la SCP Didier et Pinet, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la société IBTP sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les conclusions de la requête relatives aux intérêts moratoires sont irrecevables, faute de réclamation préalable accomplie dans les formes prévues par les articles 13.44 et 50.31 du cahier des clauses administratives générales applicables, et sont en tout état de cause non fondées ;
- il n'est pas établi que les travaux supplémentaires commandés le 14 juin 2010 auraient justifié une prolongation du délai d'exécution ;
- en l'absence de mémoire justificatif préalable, puis d'un ordre de service, aucune prolongation du délai d'exécution pour intempéries n'a été accordée à la requérante.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le décret n° 76-87 du 21 janvier 1976 modifié approuvant le cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés de travaux ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Hamon,
- et les conclusions de Mme Oriol, rapporteur public.
1. Considérant qu'à la suite de la défaillance de l'entreprise chargée des travaux de construction d'une crèche collective, la Ville de Paris a, par un acte d'engagement du 3 septembre, notifié le 9 septembre 2009, confié à la société Infrastructures Bâtiment et Travaux Publics (IBTP) la reprise de ces travaux ; que ceux-ci ont été réceptionnés le 8 octobre 2010, avec effet au 30 juin 2010 ; qu'à la suite de l'établissement par la société IBTP, le 13 février 2012, de son projet de décompte final, la Ville de Paris lui a notifié le décompte général du marché, le 16 avril 2012, lequel comporte des pénalités s'élevant à 9 830,40 euros, correspondant à douze jours de retard d'exécution ; que la société IBTP a adressé un mémoire en réclamation le 4 mai 2012 ; que celui-ci ayant fait l'objet d'une décision implicite de rejet, la société IBTP a saisi le Tribunal administratif de Paris en demandant la condamnation de la Ville de Paris à lui verser une somme totale de 13 905,92 euros ; qu'elle relève appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Paris n'a fait droit à ses conclusions qu'à hauteur de 3 121,44 euros et a rejeté le surplus de celles-ci ;
Sur les conclusions indemnitaires :
En ce qui concerne les pénalités de retard :
2. Considérant qu'aux termes des stipulations de l'article 19-21 du cahier des clauses administratives générales (CCAG) applicable aux marchés de travaux susvisé : " Lorsqu'un changement de la masse des travaux ou une modification de l'importance de certaines natures d'ouvrages, une substitution à des ouvrages initialement prévus d'ouvrages différents, une rencontre de difficultés imprévues au cours du chantier, un ajournement de travaux décidé par la personne responsable du marché ou encore un retard dans l'exécution d'opérations préliminaires qui sont à la charge du maître de l'ouvrage ou de travaux préalables qui font l'objet d'un autre marché, justifie soit une prolongation du délai d'exécution de l'ensemble des travaux ou d'une ou plusieurs tranches de travaux, soit le report du début des travaux, l'importance de la prolongation ou du report est débattue par le maître d'oeuvre avec l'entrepreneur, puis elle est soumise à l'approbation de la personne responsable du marché, et la décision prise par celle-ci est notifiée à l'entrepreneur par ordre de service " ; qu'aux termes de l'article 2. 51 du même cahier : " Les ordres de service sont écrits ; ils sont signés par le maître d'oeuvre, datés et numérotés. / Ils sont adressés en deux exemplaires à l'entrepreneur ; celui-ci renvoie immédiatement au maître d'oeuvre l'un des deux exemplaires après l'avoir signé et y avoir porté la date à laquelle il l'a reçu " ; qu'aux termes des stipulations de l'article 19-22 du cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés de travaux susvisé : " Dans le cas d'intempéries au sens des dispositions législatives ou réglementaires en vigueur, entraînant un arrêt de travail sur les chantiers, les délais d'exécution des travaux sont prolongés. Cette prolongation est notifiée à l'entrepreneur par un ordre de service qui en précise la durée, laquelle est égale au nombre de journées réellement constaté au cours desquelles le travail a été arrêté du fait des intempéries conformément auxdites dispositions, en
défalquant, s'il y a lieu, le nombre de journées d'intempéries prévisibles indiqué au C.C.A.P. / Dans le cas d'intempéries non visées par une disposition légale ou réglementaire ainsi que dans le cas d'autres phénomènes naturels entravant l'exécution des travaux, si le C.C.A.P. prévoit la prolongation du délai d'exécution en fonction de critères qu'il définit, cette prolongation de délai est notifiée à l'entrepreneur par un ordre de service récapitulant les constatations faites. " ; qu'aux termes des stipulations de l'article 4.2 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) au marché conclu entre la Ville de Paris et la société IBTP : " En vue de l'application éventuelle du premier alinéa du 22 de l'article 19 du CCAG, le nombre de journées d'intempéries réputées prévisibles est fixé à 10. / En vue de l'application éventuelle du deuxième alinéa du 22 de l'article 19 du CCAG le délai contractuel du marché ou de chaque tranche sera prolongé d'un jour égal à celui pendant lequel les conditions de gel, de précipitations ou de force et de vitesse du vent dépasseront les plafonds retenus par l'organisme public ou parapublic situé le plus près des travaux et habilité à fixer les caractéristiques des jours d'intempéries. / L'entrepreneur fournira à l'appui de sa demande de délais supplémentaires pour intempéries la ou les déclarations à sa caisse d'intempéries (CBTP ou autres) ainsi qu'un mémoire justifiant de la gêne apportée au déroulement du chantier par ces intempéries " ;
3. Considérant qu'il est constant que les travaux objets du présent marché ont été réceptionnés avec effet au 30 juin 2010, soit avec un retard de 12 jours par rapport à la date contractuelle d'achèvement fixée au 18 juin 2010 ;
4. Considérant, en premier lieu, que, pas plus en appel qu'en première instance, la société IBTP, qui se borne à faire état des réserves qu'elle avait émises quant aux délais d'approvisionnement, n'établit pas que les travaux supplémentaires de mise en conformité d'un conduit de cheminée, d'application d'un film d'intimité sur les vitrages des sanitaires du premier étage et d'habillage sur les cornières, qui lui ont été commandés par la Ville de Paris les 10 et 11 juin 2010, auraient justifié une prolongation du délai contractuel d'exécution ; que la circonstance que le maître d'oeuvre ait, dans un procès-verbal de réunion de chantier du 1er juin 2010, évoqué la possibilité d'une telle prolongation à hauteur d'un mois ne suffit pas, en l'absence de toute décision de la part du maître d'ouvrage, à établir que la requérante a bénéficié d'une prolongation de ses délais contractuels d'exécution faisant obstacle à la mise en oeuvre de pénalités de retard ;
5. Considérant, en second lieu, que si la société IBTP invoque également, pour s'opposer à la mise en oeuvre de ces pénalités de retard, les intempéries qu'elle aurait subies sur le chantier aux mois de décembre 2009 et janvier 2010, il est constant qu'elle n'a pas respecté la procédure d'ordre de service imposée par les stipulations précitées de l'article 4.2 du cahier des clauses administratives particulières et n'a pas obtenu de la part de la Ville de Paris l'ordre de service de prolongation prévu par les stipulations de l'article 19.22 du cahier des clauses administratives générales applicable ; que la mention par le maître d'oeuvre, dans un procès-verbal de réunion de chantier, d'un accord du maître d'ouvrage pour lui accorder une prolongation du délai d'exécution de 15 jours à ce titre ne peut tenir lieu de cet ordre de service ; qu'enfin, pas plus en appel qu'en première instance, la requérante n'établit, par les pièces qu'elle produit, que les intempéries dont elle se prévaut présentaient les caractéristiques ouvrant droit à une prolongation du délai contractuel d'exécution ;
En ce qui concerne les intérêts moratoires :
6. Considérant qu'aux termes de l'article 3-6-4 du cahier des clauses administratives particulières du marché, relatif aux intérêts moratoires : " Le défaut de paiement dans les délais prévus fait courir de plein droit, et sans autre formalité des intérêts moratoires au bénéfice du titulaire ou du sous-traitant payé directement. Le taux des intérêts moratoires est celui de l'intérêt légal en vigueur à la date à laquelle les intérêts ont commencé à courir, augmenté de deux points. Les intérêts moratoires appliqués aux acomptes ou au solde sont calculés sur le montant total de l'acompte ou du solde toutes taxes comprises, après application des clauses d'actualisation, de révision et de pénalisation prévues au marché. Les intérêts moratoires ne sont pas assujettis à la TVA. Lorsque le dépassement du délai n'est imputable ni à la personne publique contractante, ni à l'un des prestataires, ni au comptable de l'Etat, aucun intérêt moratoire n'est exigible.(...) " ;
7. Considérant qu'en se bornant à faire état de l'émission de deux factures, datées du
10 janvier 2012, pour réclamer le paiement d'intérêts moratoires sur une situation de travaux du mois de décembre 2010, pour des sommes de 1 013,55 euros TTC et 517,29 euros TTC, et à mentionner qu'elles ont été émises " en application des stipulations de l'article 3-6-4 du cahier des clauses administratives particulières " précitées, la requérante n'établit pas plus en appel qu'en première instance que ces intérêts moratoires, qui au surplus n'ont pas été inclus dans sa réclamation, lui seraient contractuellement dus ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société IBTP n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté le surplus des conclusions de sa demande ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la Ville de Paris, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la société IBTP demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu en revanche de mettre à la charge de la société IBTP une somme de 1 500 euros à verser à la Ville de Paris sur le fondement des mêmes dispositions ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la société Infrastructures Bâtiment et Travaux Publics est rejetée.
Article 2 : La société Infrastructures Bâtiment et Travaux Publics versera à la Ville de Paris une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Infrastructures Bâtiment et Travaux Publics et à la Ville de Paris.
Délibéré après l'audience du 2 novembre 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Even, président de chambre,
- Mme Hamon, président assesseur,
- M. Dellevedove, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 15 novembre 2016.
Le rapporteur,
P. HAMONLe président,
B. EVEN
Le greffier,
S. GASPARLa République mande et ordonne au préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15PA01634