Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B...D...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du
19 novembre 2014 par laquelle le président de l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture a prononcé sa révocation, et de condamner l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture à lui verser la somme totale de 146 786,41 euros en réparation des divers préjudices imputables à cette décision.
Par un jugement n° 1501696/2-1 du 12 juillet 2016, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 12 septembre 2016, M.D..., représenté par MeA..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Paris n° 1501696/2-1 du 12 juillet 2016 ;
2°) d'annuler la décision du 19 novembre 2014 par laquelle le président de l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture a prononcé sa révocation ;
3°) de condamner l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture à lui verser une indemnité totale de 151 257,28 euros ;
4°) de mettre à la charge de l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture le versement de la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il entretenait de bonnes relations avec ses collègues et n'a pas eu de comportement professionnel fautif ;
- il a été victime de harcèlement moral.
Par un mémoire enregistré le 7 février 2017, le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt demande à ce que l'Etat soit mis hors de cause, l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture constituant un établissement public.
Par un mémoire en défense, enregistré le 1er février 2017, l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture, représentée par MeC..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 6 000 euros soit mise à la charge de M. D...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête de M. D...est irrecevable faute de comporter des moyens au soutien de ses conclusions ;
- M. D...est l'auteur de fautes professionnelles, d'actes répréhensibles de harcèlement moral à l'égard de ses collègues, et n'a pas été victime d'un tel harcèlement.
Un mémoire, présenté pour M.D..., a été enregistré le 23 novembre 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code rural et de la pêche maritime ;
- le décret n° 2007-345 relatif aux chambres d'agriculture et à l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Hamon,
- les conclusions de Mme Oriol, rapporteur public,
- et les observations de Me C...pour l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture.
1. Considérant que M.D..., recruté par l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture (APCA) le 21 janvier 2011, puis titularisé le 15 mai 2011 en qualité de conseiller-expert en installation et conseil aux entreprises, a été révoqué par une décision du 19 novembre 2014, après un avis favorable de la commission paritaire de l'APCA ; que M. D...relève appel du jugement du 12 juillet 2016 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision et à la condamnation de l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture à l'indemniser des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de cette décision ;
Sur la légalité de la révocation :
2. Considérant que la décision de révocation de M.D..., qui a été prise après plusieurs rappels à l'ordre de sa hiérarchie, puis un avertissement notifié le 29 mai 2013, est motivée par les " difficultés relationnelles " de celui-ci avec ses collègues, des " initiatives inopportunes et intempestives " et enfin des carences dans la conduite de ses missions ; qu'il résulte des pièces du dossier, et notamment de témoignages précis et concordants émanant de ses collègues, que
M. D...a rencontré, depuis son affectation à l'APCA, des difficultés relationnelles avec sa hiérarchie et avec ses collègues en raison d'un comportement qualifié par les intéressés de méprisant et irrespectueux et d'une absence de transmission des informations nécessaires à la bonne marche du service, plusieurs collaborateurs de M. D...ayant expliqué leur démission par les mauvaises relations entretenues dans le service par l'intéressé ; qu'à supposer que les griefs relatifs à ses initiatives inopportunes et aux carences dans la conduite de la mission ne soient pas établis ainsi que l'a relevé le tribunal, en se bornant à faire état de ses compétences et de son implication et en produisant des attestations qui établiraient ses bonnes relations avec ses collègues lors de sa précédente affectation comme directeur de l'association départementale pour l'aménagement des structures des exploitations agricoles du Loiret, le requérant ne conteste pas utilement les motifs de sa révocation ;
3. Considérant qu'eu égard à leur nature, les faits reprochés à M. D...présentaient le caractère d'une faute de nature à justifier, à eux seuls, une sanction disciplinaire, dont le quantum n'est pas contesté en appel ;
Sur le harcèlement allégué :
4. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 6 quinquies de la loi du
13 juillet 1983 : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. " ; qu'il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement ; qu'il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile ; que pour être qualifiés de harcèlement moral, de tels faits répétés doivent excéder les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique ; que dès lors qu'elle n'excède pas ces limites, une simple diminution des attributions justifiée par l'intérêt du service, en raison d'une manière de servir inadéquate ou de difficultés relationnelles, n'est pas constitutive de harcèlement moral ;
5. Considérant que, pour soutenir qu'il a fait l'objet d'un harcèlement, M. D...se borne à faire état des reproches exprimés par sa hiérarchie, du refus de modifier son positionnement hiérarchique, d'une surcharge de travail et de sa mise à l'écart de certaines réunions ; qu'il résulte de ce qui a été dit au point 2 que les reproches exprimés au sujet de ses relations avec ses collègues étaient fondés ; que ni le refus de modifier l'organisation hiérarchique du service, ni les critiques qui lui ont été formulées au sujet de sa conduite de certains projets, n'excèdent les limites de l'exercice du pouvoir hiérarchique et ne sont de nature à faire présumer un comportement de harcèlement ; qu'enfin, la surcharge de travail et la mise à l'écart de certaines réunions alléguées ne sont pas établies par les pièces du dossier ;
Sur les conclusions indemnitaires :
6. Considérant qu'en l'absence de tout harcèlement moral de nature à engager la responsabilité de l'APCA, les conclusions indemnitaires y afférentes de M. D...ne peuvent qu'être rejetées ;
7. Considérant, enfin, qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, de rejeter les conclusions de M.D..., qui ne sont assorties en appel d'aucun moyen, tendant à la condamnation de l'APCA à lui verser une somme de 49 719,04 euros au titre de l'indemnité statutaire qui lui resterait due ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête, que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que
M. D...demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de M. D...le versement de la somme que l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture demande sur le fondement des mêmes dispositions ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...D...et à l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture.
Délibéré après l'audience du 28 novembre 2017, à laquelle siégeaient :
- M. Even, président de chambre,
- Mme Hamon, président assesseur,
- Mme d'Argenlieu, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 12 décembre 2017.
Le rapporteur,
P. HAMONLe président,
B. EVENLe greffier,
I. BEDRLa République mande et ordonne au ministre chargé de l'agriculture en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 16PA02895