Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... E...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 19 mai 2016 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 1617713 en date du 31 janvier 2017, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 29 mai 2017 et 6 juin 2017, Mme E..., représentée par MeC..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1617713 du 31 janvier 2017 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 19 mai 2016 du préfet de police ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros à verser à Me C...sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- l'arrêté contesté a été signé par une personne incompétente ;
- la décision de refus de séjour méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'une prise en charge médicale adaptée à son état de santé n'est pas disponible en République démocratique du Congo et que le préfet de police n'a produit aucun élément démontrant la possibilité d'une telle prise en charge dans ce pays ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- l'illégalité de la décision de refus de séjour prive de base légale la décision portant obligation de quitter le territoire français et celle fixant le pays de destination ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense, enregistré le 20 février 2018, le préfet de police conclut au non-lieu à statuer sur les conclusions à fin d'annulation des décisions obligeant Mme E... à quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi et au rejet des conclusions à fin d'annulation de la décision de refus de séjour.
Il soutient que :
- postérieurement à la décision attaquée et à l'introduction de la requête de Mme E..., il a décidé, à la demande de la requérante, de lui délivrer un récépissé de demande de titre de séjour valable du 18 décembre 2017 au 17 juin 2018 qui a nécessairement abrogé la décision portant obligation de quitter le territoire français et, par conséquent, celle fixant le pays de destination ;
- les moyens soulevés par la requérante à l'encontre de la décision de refus de séjour ne sont pas fondés.
Mme E... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 28 avril 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Larsonnier a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que Mme E..., de nationalité congolaise (République démocratique du Congo), née en 1951 et entrée en France le 20 septembre 2011, a sollicité la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement des dispositions des 7° et 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 19 mai 2016, le préfet de police a rejeté sa demande, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination ; que Mme E... fait appel du jugement du 31 janvier 2017 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions de non-lieu à statuer présentées par le préfet de police :
2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, le 18 décembre 2017, le préfet de police a délivré à Mme E... un récépissé de demande de carte de séjour valable jusqu'au 17 juin 2018 ; qu'en admettant ainsi provisoirement au séjour Mme E..., le préfet de police a implicitement mais nécessairement abrogé ses décisions du 19 mai 2016 par lesquelles il l'obligeait à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixait le pays à destination duquel elle pouvait être renvoyée d'office si elle n'exécutait pas cette obligation ; que, par suite, les conclusions de la requérante tendant à l'annulation de ces décisions sont devenues sans objet et il n'y a pas lieu d'y statuer ;
Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision de refus de séjour :
3. Considérant que, par un arrêté n° 2016-00100 du 17 février 2016, régulièrement publié au Bulletin municipal officiel de la ville de Paris du 26 février 2016, le préfet de police a donné à Mme D...A..., attachée d'administration à la direction de la police générale à la préfecture de police, délégation pour signer tous les actes dans la limite de ses attributions en cas d'absence ou d'empêchement d'autorités dont il n'est pas établi qu'elles n'étaient pas absentes ou empêchées lors de la signature de l'arrêté attaqué ; qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'obligeait le préfet de police à mentionner les références de cet arrêté de délégation de signature dans la décision contestée du 19 mai 2016 ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision contestée doit être écarté ;
4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction application à la date de la décision contestée : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. (...) " ;
5. Considérant que, pour rejeter la demande de titre de séjour de Mme E..., qui souffre d'un état de stress post-traumatique chronique sévère et d'un trouble anxio-dépressif, le préfet de police s'est notamment fondé sur l'avis du 28 décembre 2015 du médecin, chef du service médical de la préfecture de police, qui précise que l'état de santé de Mme E... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que l'intéressée peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que les différents certificats médicaux émanant de praticiens hospitaliers de l'hôpital Maison Blanche prenant en charge Mme E... depuis 2012, du praticien hospitalier de l'hôpital Simone Veil du 25 mars 2017 et l'expertise médicale de l'intéressée réalisée le 13 mars 2017 par un psychiatre du groupe hospitalier Carnelle Portes de l'Oise, qui, s'ils attestent de la pathologie dont souffre l'intéressée, sont rédigés en des termes très généraux quant à l'indisponibilité d'une prise en charge médicale appropriée en République démocratique du Congo ; qu'il en est de même de l'attestation du 11 octobre 2016 des médecins du service de neuropsychiatrique de la clinique Ngaliema de Kinshasa mentionnant un suivi de l'intéressée en 2011 avant son transfert dans une " institution mieux équipée " ; que, dès lors, ces pièces médicales, ainsi que par ailleurs l'étude du 16 mai 2013 de l'Organisation suisse d'aide aux réfugiés (OSAR) sur la prise en charge des troubles psychologiques en République démocratique du Congo qui énonce des considérations générales, ne sont pas de nature à remettre en cause l'appréciation portée par le médecin, chef du service médical de la préfecture de police et le préfet de police sur la disponibilité dans son pays d'origine des traitements requis par la pathologie de Mme E... ; qu'ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;
6. Considérant que pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point précédent, le préfet de police n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision refusant à Mme E... le titre de séjour qu'elle sollicitait ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme E... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet de police refusant de lui délivrer un titre de séjour ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de Mme E... tendant à l'annulation des décisions lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de son renvoi.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme E... est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... E...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 8 mars 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Formery, président de chambre,
- Mme Poupineau, président assesseur,
- Mme Larsonnier, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 22 mars 2018.
Le rapporteur,
V. LARSONNIERLe président,
S.-L. FORMERYLe greffier,
C. RENE-MINE
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17PA01836