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11/12/2018 | FRANCE | N°17PA00318

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 11 décembre 2018, 17PA00318


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris de condamner l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) à lui verser la somme 504 000 euros, assortie des intérêts de droit à compter de sa réclamation préalable et de leur capitalisation, en réparation de l'ensemble des préjudices qu'il a subis.

Par un jugement n° 1517640/2-2 du 7 décembre 2016, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires enregistr

és le 23 janvier 2017, le 1er février 2017 et le 10 janvier 2018, M.A..., représenté par Me Para...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris de condamner l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) à lui verser la somme 504 000 euros, assortie des intérêts de droit à compter de sa réclamation préalable et de leur capitalisation, en réparation de l'ensemble des préjudices qu'il a subis.

Par un jugement n° 1517640/2-2 du 7 décembre 2016, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés le 23 janvier 2017, le 1er février 2017 et le 10 janvier 2018, M.A..., représenté par Me Paragyios, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Paris n° 1517640/2-2

du 7 décembre 2016 ;

2°) de condamner l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris à lui verser la somme 504 000 euros, assortie des intérêts de droit à compter de sa réclamation préalable et de leur capitalisation ;

3°) de mettre à la charge de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'accident de travail subi le 23 novembre 2011 est imputable à l'absence fautive d'adaptation de ses conditions de travail à son état de santé ;

- cet accident, et l'absence d'adaptation de ses conditions de travail après celui-ci, sont la cause directe de l'aggravation de son état de santé ;

- l'AP-HP a également commis une faute de nature à engager sa responsabilité en ne procédant pas à son évaluation annuelle depuis 2011 et en pratiquant un harcèlement moral à son encontre ;

- l'aggravation de son état de santé et le préjudice financier, présent et futur, ainsi que les préjudices moral et d'agrément qui en ont découlé doivent être réparés à hauteur de 504 000 euros.

Par un mémoire en défense et un mémoire complémentaire, enregistrés les

11 octobre 2017 et 6 novembre 2018, l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris, représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 440 euros soit mise à la charge de M. A...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par M. A...ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Hamon ;

- les conclusions de Mme Oriol, rapporteur public ;

- les observations de MeD..., substituant Me Paragyios, avocat de M. A...;

- et les observations de Me Neven, avocat de l'Assistance publique- Hôpitaux de Paris.

Considérant ce qui suit :

1. M.A..., infirmier diplômé d'Etat, affecté à l'hôpital de la Pitié-Salpétrière de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), est atteint d'une sclérose en plaques qui s'est aggravée depuis 2011. Il a, le 23 novembre 2011, été victime sur son lieu de travail d'une chute de sa hauteur, ayant entrainé deux fractures du coude et du sacrum, laquelle a été reconnue comme constituant un accident de service par une décision du 3 février 2012. Il a demandé au Tribunal administratif de Paris de condamner l'AP-HP à lui verser la somme de 504 000 euros, assortie des intérêts capitalisés, en réparation des différents préjudices qu'il estime avoir subis du fait de l'inertie fautive de l'administration quant à l'adaptation de son poste de travail, avant et après cet accident de service, et du harcèlement moral dont il aurait fait l'objet.

Sur la responsabilité de l'AP-HP :

En ce qui concerne l'aménagement du poste de travail :

2. Aux termes de l'article 71 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière : " Lorsque les fonctionnaires sont reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions, le poste de travail auquel ils sont affectés est adapté à leur état physique. Lorsque l'adaptation du poste de travail n'est pas possible, ces fonctionnaires peuvent être reclassés dans des emplois d'un autre corps, s'ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes. / Le reclassement est subordonné à la présentation d'une demande par l'intéressé. "

3. En premier lieu, il résulte de l'instruction que la maladie dont est atteint M. A...ne l'a pas empêché d'occuper normalement son emploi avant les premières restrictions médicales à l'exercice de sa profession préconisant l'absence de port de charges lourdes et la limitation des déplacements, qui ont été portées à la connaissance de l'AP-HP par les services de la médecine du travail les 3 et 10 novembre 2011. Il ressort des termes du courrier électronique du

8 septembre 2011, par lequel M. A...informait sa hiérarchie des difficultés rencontrées dans l'exercice de ses fonctions du fait de la rotation rapide des personnels, et mentionnait par ailleurs qu'il avait " des limites physiques ", que ce courrier ne saurait être considéré comme une demande d'aménagement de son poste de travail. Il est également constant que M. A...était en congés ordinaires du 12 au 20 novembre 2011, et que son accident, survenu le 23 novembre suivant, alors qu'il attendait un ascenseur et s'est retourné pour répondre à une interpellation, est intervenu en dehors de tout port de charges lourdes ou déplacement entre les différents sites de l'hôpital. Dans ces circonstances, eu égard à la brièveté du délai séparant la date à laquelle la médecine du travail a formulé ses restrictions et celle de l'accident, survenu deux jours après le retour de congé de M.A..., l'AP-HP ne peut être regardée comme ayant commis une faute en n'ayant pas procédé à l'aménagement du poste du requérant avant la survenue de l'accident de service dont il a été victime.

4. En second lieu, il résulte également de l'instruction, et notamment des rapports des médecins experts ayant examiné M. A...dans le cadre de sa demande d'allocation temporaire d'invalidité, ainsi que des compte rendus d'examens d'imagerie médicale produits par le requérant, lesquels ne sont pas sérieusement contredits par le certificat établi par son médecin traitant, que l'aggravation de son état de santé neurologique, sous forme de l'apparition d'un phénomène dit de " steppage " limitant sa mobilité, même s'il est survenu à l'issue des deux opérations chirurgicales subies pour le traitement de ses fractures, ne présente néanmoins pas de lien de causalité direct et certain avec l'accident du 23 novembre 2011. Il ne résulte pas plus de l'instruction, en l'absence notamment de toute pièce de nature médicale produite sur ce point, que les conditions dans lesquelles M. A...a repris son emploi, à mi-temps thérapeutique à compter de janvier 2012 et jusqu'en février 2013, présenteraient un lien de causalité direct et certain avec les préjudices financier, physique, moral, et d'agrément dont il demande réparation, en raison de l'aggravation de son état de santé neurologique, qui ne serait pas réparé par l'allocation temporaire d'invalidité qui lui a été allouée.

En ce qui concerne le harcèlement moral allégué :

5. Aux termes de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la formation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération : / 1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ; / 2° Le fait qu'il ait exercé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements ; / 3° Ou bien le fait qu'il ait témoigné de tels agissements ou qu'il les ait relatés. / Est passible d'une sanction disciplinaire tout agent ayant procédé ou ayant enjoint de procéder aux agissements définis ci-dessus. (...) ".

6. Il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile. D'autre part, pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral.

7. Pour soutenir qu'il a fait l'objet d'un harcèlement moral, après son retour sur son poste de travail à la suite de son accident de service du 23 novembre 2011, et avant l'aménagement de ce poste de travail intervenu en février 2013, sous la forme d'une éviction progressive du service, M. A...soutient qu'il a été privé de son outil de travail informatique, qu'il a été exclu des réunions auxquelles il aurait dû participer, qu'il n'a fait l'objet d'aucune notation au titre des années 2011 à 2014 et qu'il ne s'est vu confier aucune tâche effective en adéquation avec ses compétences. Il résulte toutefois des éléments produits par l'AP-HP, que les difficultés passagères rencontrées par M. A...pour l'utilisation d'un logiciel ont touché l'ensemble des utilisateurs de celui-ci, qu'il n'a jamais été privé des autres outils informatiques nécessaires à l'exercice de ses fonctions, qu'à l'exception d'une réunion dont il est établi qu'elle s'est tenue lors de ses périodes d'activité, ses absences lors des autres réunions qu'il mentionne sont liées à ses horaires à temps partiel et ses congés de maladie, que ses notations, retardées en raison du faible nombre de ses jours de présence au cours de la période en cause, ont été finalement régularisées, et font apparaitre des notes en progression régulière, et qu'enfin l'intéressé s'était vu confier une mission effective d'établissement de statistiques professionnelles, qu'il a au demeurant demandé à exercer en télétravail, laquelle n'est pas en inadéquation avec son grade et ses compétences. Dans ces conditions, l'AP-HP doit être regardée comme établissant que les agissements dénoncés par M. A...sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Sur les conclusions présentées au titre des frais de justice :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. A...demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens . Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A...le versement de la somme que l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris demande sur le fondement des mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A...et à l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris.

Délibéré après l'audience du 19 novembre 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Even, président de chambre,

- Mme Hamon, président assesseur,

- Mme d'Argenlieu, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 11 décembre 2018.

Le rapporteur,

P. HAMONLe président,

B. EVENLe greffier,

S. GASPAR

La République mande et ordonne à la ministre des solidarités et de la santé en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

5

N° 17PA00318


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA00318
Date de la décision : 11/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-01-03 Responsabilité de la puissance publique. Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité. Agissements administratifs susceptibles d'engager la responsabilité de la puissance publique.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: Mme Perrine HAMON
Rapporteur public ?: Mme ORIOL
Avocat(s) : PARAGYIOS

Origine de la décision
Date de l'import : 18/12/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-12-11;17pa00318 ?
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