Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... C...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 7 mars 2017 par lequel le préfet de police a prononcé son expulsion du territoire français.
Par un jugement n° 1705879/4-1 du 13 septembre 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 13 novembre 2018, M. C..., représenté par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1705879/4-1 du 13 septembre 2018 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 mars 2017 prononçant son expulsion du territoire français ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté attaqué méconnaît les dispositions de l'article L. 521-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il porte atteinte à l'intérêt supérieur de l'enfant garanti par les stipulations de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense enregistré le 22 mars 2019, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Hamon,
- et les conclusions de Mme Oriol, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M.C..., ressortissant gabonais, né le 7 février 1982, est entré en France le 5 décembre 2004 et s'y est maintenu depuis cette date, selon ses déclarations. Il a fait l'objet, le 7 mars 2017, d'un arrêté prononçant son expulsion du territoire français. M. C...relève appel du jugement n° 1705879/4-1 du 13 septembre 2018 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la légalité de l'arrêté attaqué :
2. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve des dispositions des articles L. 521-2, L. 521-3 et L. 521-4, l'expulsion peut être prononcée si la présence en France d'un étranger constitue une menace grave pour l'ordre public ".
3. Les infractions pénales commises par un étranger ne sauraient, à elles seules, justifier légalement une mesure d'expulsion et ne dispensent pas l'autorité compétente d'examiner, d'après l'ensemble des circonstances de l'affaire, si la présence de l'intéressé sur le territoire français est de nature à constituer une menace grave pour l'ordre public. Lorsque l'administration se fonde sur l'existence d'une telle menace pour prononcer l'expulsion d'un étranger, il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi d'un moyen en ce sens, de rechercher si les faits qu'elle invoque sont de nature à justifier légalement sa décision.
4. En premier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. C...aurait commis d'autres faits délictueux depuis les condamnations pénales prononcées à son encontre, dont la première remontait à neuf ans à la date de la décision attaquée et la seconde à deux ans, pour des faits de tentative d'escroquerie et d'escroquerie en bande organisée.
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale. 2. Il ne peut y avoir d'ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
6. Il ressort des pièces du dossier que M. C...était père d'un enfant âgé de deux ans à la date de la décision attaquée, dont la mère, ressortissante camerounaise, est titulaire d'une carte de résident, et qui bénéficie d'une prise en charge par un centre d'action médico-sociale précoce à raison de son état de santé. M. C...a par ailleurs conclu en août 2016 un pacte civil de solidarité avec la mère de l'enfant et réside avec eux. Pour ces motifs, qui ont au demeurant conduit la commission d'expulsion à émettre un avis défavorable à l'expulsion de l'intéressé, M. C...est fondé à soutenir que la décision de l'expulser, qui aurait pour conséquence de le séparer de son enfant, qui ne pourrait le suivre au Gabon dès lors que sa mère n'en est pas une ressortissante, porte atteinte à l'intérêt supérieur de cet enfant, ainsi qu'à son droit à une vie privée et familiale.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 mars 2017.
Sur les frais de justice :
8. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. C...et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Paris n° 1705879/4-1 du 13 septembre 2018 et l'arrêté du préfet de police du 7 mars 2017 sont annulés.
Article 2 : L'Etat versera à M. C...une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M.A... C..., au préfet de police et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 1er avril 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Even, président de chambre,
- Mme Hamon, président assesseur,
- Mme d'Argenlieu, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 23 avril 2019.
Le rapporteur,
P. HAMONLe président,
B. EVENLe greffier,
S. GASPAR
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18PA03557