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03/10/2019 | FRANCE | N°19PA00046

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 03 octobre 2019, 19PA00046


Vu la procédure contentieuse suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... C... a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 7 juin 2017 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français sous un délai de trente jours, en fixant le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1705723 du 6 décembre 2018, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 5 janvier 201

9, M. C..., représenté par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'an...

Vu la procédure contentieuse suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... C... a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 7 juin 2017 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français sous un délai de trente jours, en fixant le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1705723 du 6 décembre 2018, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 5 janvier 2019, M. C..., représenté par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer, sous astreinte, un titre de séjour " salarié " ou " vie privée et familiale " ou, à défaut, de réexaminer sa demande et lui délivrer un récépissé de demande de titre de séjour.

Il soutient que :

- il justifie de motifs exceptionnels au sens de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté méconnaît l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté méconnaît l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête a été communiquée au préfet du Val-de-Marne qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République sénégalaise relatif à la gestion concertée des flux migratoires signé le 23 septembre 2006 et l'avenant à cet accord signé le 28 février 2008, entrés en vigueur le 1er août 2009 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Monsieur C..., ressortissant sénégalais né le 5 septembre 1972 à Diembering (Sénégal), est entré en France le 8 juin 2008 selon ses déclarations. Il a sollicité, le 30 septembre 2016, son admission au séjour auprès du préfet du Val-de-Marne sur le fondement des articles

L. 313-14 et L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté en date du 7 juin 2017, le préfet du Val-de-Marne a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a fixé le pays de renvoi.

M. C... relève appel du jugement du 6 décembre 2018 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. Les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives aux titres de séjour qui peuvent être délivrés aux étrangers et aux conditions de délivrance de ces titres s'appliquent, ainsi que le rappelle l'article L. 111-2 du même code, " sous réserve des conventions internationales ". En ce qui concerne les ressortissants sénégalais, le paragraphe 3.2.1 de l'article 3 de l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006, modifié par l'avenant signé le 25 février 2008, stipule que : " La carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", d'une durée de douze mois renouvelable, ou celle portant la mention " travailleur temporaire " sont délivrées, sans que soit prise en compte la situation de l'emploi, au ressortissant sénégalais titulaire d'un contrat de travail visé par l'Autorité française compétente, pour exercer une activité salariée dans l'un des métiers énumérés à l'annexe IV. / Lorsque le travailleur dispose d'un contrat à durée déterminée, la durée de la carte de séjour est équivalente à celle du contrat. / Lorsque le travailleur dispose d'un contrat à durée indéterminée, la carte de séjour portant la mention " salarié " devient, selon les modalités prévues par la législation française, une carte de résident d'une durée de dix ans renouvelable. / Les ressortissants sénégalais peuvent travailler dans tous les secteurs d'activité s'ils bénéficient d'un contrat de travail (...) ". Ces stipulations, qui prévoient les conditions de l'admission au séjour, en qualité de salarié, des ressortissants sénégalais titulaires d'un contrat de travail, font dès lors obstacle à ce que soient appliquées aux ressortissants sénégalais les dispositions du 1° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives à la délivrance de la carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle à l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article

R. 5221-11 du code du travail, qui ont le même objet.

3. Ainsi qu'il a été dit au point 2, M. C... ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui ne lui sont pas applicables. Le moyen tiré de la violation de cet article doit, dès lors, être regardé comme tiré de la violation des stipulations précitées de l'article 3, paragraphe 32,

sous-paragraphe 321 de l'accord franco-sénégalais susvisé. Il ressort toutefois des pièces du dossier que M. C... n'est pas titulaire d'un contrat de travail visé par les services du ministère du travail. Par suite, le moyen doit être écarté.

4. Aux termes du paragraphe 42 de l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006 modifié : " (...) Un ressortissant sénégalais en situation irrégulière en France peut bénéficier, en application de la législation française, d'une admission exceptionnelle au séjour se traduisant par la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant : soit la mention " salarié " s'il exerce l'un des métiers mentionnés dans la liste figurant en annexe IV de l'Accord et dispose d'une proposition de contrat de travail. / Soit la mention " vie privée et familiale " s'il justifie de motifs humanitaires ou exceptionnels ". Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-3. ".

5. Les stipulations du paragraphe 42 précité renvoyant à la législation française en matière d'admission exceptionnelle au séjour des ressortissants sénégalais en situation irrégulière, rendent applicables à ces ressortissants les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors, le préfet, saisi d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour par un ressortissant sénégalais en situation irrégulière, est conduit, par l'effet de l'accord du 23 septembre 2006 modifié, à faire application des dispositions de l'article L. 313-14 de ce code. Toutefois, pour l'examen des demandes déposées par des ressortissants sénégalais en qualité de salarié, l'autorité administrative doit également prendre en compte la liste des métiers figurant en annexe IV de l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006.

6. Il résulte de ce qui a été dit au point 5 qu'un ressortissant sénégalais en situation irrégulière en France qui justifie d'une promesse d'embauche ou d'un contrat lui permettant d'exercer une activité figurant à l'annexe IV de l'accord, ne peut bénéficier d'une admission exceptionnelle au séjour se traduisant par la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " que s'il justifie de motifs exceptionnels, en application des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il appartient à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner si cette promesse d'embauche ou ce contrat de travail, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer des motifs exceptionnels d'admission au séjour.

7. En l'espèce, M. C... a sollicité son admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié en se prévalant d'une promesse d'embauche de la SARL Anyweb, en date du 28 juin 2016, pour un poste de préparateur de commandes, métier qui ne figure pas sur la liste portée à l'annexe IV de l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006, auquel renvoie l'article 42 de ce même accord. En outre, l'intéressé n'atteste, par les documents produits, de revenus déclarés que pour certaines années et pour des montants toujours inférieurs aux seuils d'imposition depuis 2011. De plus, l'intéressé ne fait état d'aucune vie familiale en France, alors que son épouse et ses cinq enfants résident au Sénégal. Il résulte de ce qui précède que le requérant, à supposer même établie sa résidence continue en France depuis 2009, ne justifie pas de l'existence de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels au sens des dispositions de l'article

L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le préfet du Val-de-Marne n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en refusant l'admission exceptionnelle au séjour du requérant sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

8. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

9. Si M. C... invoque les stipulations qui précèdent, il ne fait valoir aucune vie familiale en France, alors en outre que ses cinq enfants résident au Sénégal, pays où il a vécu au demeurant jusque l'âge de 36 ans au moins. S'il soutient que la mère de ses enfants détient l'autorité parentale exclusive sur ses enfants, il ne l'établit par aucun document. L'insertion en France par le travail de M. C... n'est au surplus pas établie. Dans ces conditions, et alors même que la résidence continue de l'intéressé en France depuis 2009 serait établie, l'arrêté litigieux n'a pas, en l'espèce, porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris. Dès lors, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être également écarté.

10. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Val-de-Marne du 7 juin 2017. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent être qu'également rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. F... C... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera transmise au préfet du Val-de-Marne.

Délibéré après l'audience du 23 septembre 2019, à laquelle siégeaient :

- Mme A..., président de chambre,

- Mme E..., présidente-assesseure,

- M. B..., premier conseiller.

Lu en audience publique le 3 octobre 2019.

Le rapporteur,

M. B...La présidente,

Mme. A...Le greffier,

I. BEDR

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 19PA00046 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA00046
Date de la décision : 03/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: M. Pascal MANTZ
Rapporteur public ?: M. BARONNET
Avocat(s) : POMBIA

Origine de la décision
Date de l'import : 24/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-10-03;19pa00046 ?
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