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13/02/2020 | FRANCE | N°19PA00606

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 13 février 2020, 19PA00606


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 17 juin 2018 par lequel le préfet du Val-de-Marne l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office.

Par un jugement n° 1805120 du 26 juillet 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Melun a rejeté la demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 5 février 2019,

M. A..., représenté par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1805120 du 26 jui...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 17 juin 2018 par lequel le préfet du Val-de-Marne l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office.

Par un jugement n° 1805120 du 26 juillet 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Melun a rejeté la demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 5 février 2019, M. A..., représenté par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1805120 du 26 juillet 2018 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler l'arrêté du 17 juin 2018 du préfet du Val-de-Marne ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Essonne, ou tout préfet territorialement compétent, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois suivant l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le même délai et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

M. A... soutient que :

- en ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français, sa situation personnelle n'a pas été examinée ;

- la décision est insuffisamment motivée ;

- l'avis du collège de médecins de l'OFII n'est pas visé et n'est pas produit ;

- le signataire était incompétent ;

- la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- le préfet a méconnu le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- en ce qui concerne le refus de délai de départ volontaire, la décision est entachée d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation ;

- cette décision est illégale par voie d'exception ;

- en ce qui concerne la décision fixant le pays de destination, le préfet a méconnu l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête a été communiquée au préfet du Val-de-Marne qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Par une décision du 18 décembre 2018, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Paris a admis M. A... à l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. F... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., de nationalité malienne et entré sur le territoire français en 2012 selon ses déclarations, a fait l'objet d'un arrêté du 17 juin 2018 par lequel le préfet du Val-de-Marne l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office. Placé en rétention administrative, il a saisi le tribunal administratif de Melun d'une demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Par un jugement du 26 juillet 2018, le magistrat désigné par le président de ce tribunal a rejeté sa demande. M. A... fait appel de ce jugement.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...) ".

3. Pour prendre l'arrêté contesté, le préfet du Val-de-Marne s'est fondé sur les circonstances que M. A... ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français et " s'est vu refuser l'admission au séjour par une décision notifiée le 21 janvier 2017 par la sous-préfecture de l'Haÿ-les-Roses " et " s'est vu refuser la délivrance de son titre de séjour au motif que sa demande était manifestement infondée ". Toutefois, M. A... soutient que, postérieurement à la date mentionnée par le préfet, il a déposé une demande de régularisation sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ce dont il justifie par une attestation de dépôt d'une demande de régularisation à la sous-préfecture de l'Haÿ-les-Roses le 2 mai 2017, ainsi qu'une demande de titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du même code, ce dont il justifie également par la production d'une convocation médicale pour un examen clinique par l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) du 29 juin 2017 et par un courrier du 22 août 2017 par lequel l'OFII lui a retourné son dossier après émission d'un avis médical. Le préfet du Val-de-Marne, qui n'a pas produit de défense en première instance ni en appel et qui n'a pas été en mesure de communiquer au requérant son dossier administratif malgré sa demande, ne conteste pas l'existence des demandes de titres de séjour dont se prévaut M. A.... Dans ces conditions, en se bornant à mentionner un refus de titre qui aurait été notifié le 21 janvier 2017 par la sous-préfecture de l'Haÿ-les-Roses pour justifier l'obligation de quitter le territoire français, le préfet du Val-de-Marne ne saurait être regardé comme ayant procédé à un examen particulier de la situation de M. A.... Par suite, le moyen tiré du défaut d'examen de la situation personnelle doit être accueilli.

4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Ce jugement et l'arrêté du 17 juin 2018 du préfet du Val-de-Marne doivent dès lors être annulés.

Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :

5. Compte tenu du motif d'annulation retenu au point 3, le présent arrêt n'implique pas nécessairement qu'il soit enjoint au préfet territorialement compétent de délivrer à M. A... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", mais seulement de réexaminer sa situation. Il y a lieu de lui enjoindre de procéder à ce réexamen dans le délai de deux mois et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour, sans qu'il soit besoin de prononcer une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, qui est la partie perdante dans la présente instance, la somme de 1 000 euros à verser à Me D..., avocat de M. A..., sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1805120 du 26 juillet 2018 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Melun et l'arrêté du 17 juin 2018 par lequel le préfet du Val-de-Marne a obligé M. A... à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet territorialement compétent eu égard au lieu de résidence de M. A... de réexaminer sa situation dans le délai de deux mois et de délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour.

Article 3 : L'Etat versera à Me D..., avocat de M. A..., la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Val-de-Marne.

Délibéré après l'audience du 23 janvier 2020, à laquelle siégeaient :

- Mme E..., présidente de chambre,

- M. Legeai, premier conseiller,

- M. F..., premier conseiller,

Lu en audience publique, le 13 février 2020.

Le rapporteur,

F. F...La présidente,

S. E... Le greffier,

M. B...La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19PA00606


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19PA00606
Date de la décision : 13/02/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: M. Fabien PLATILLERO
Rapporteur public ?: Mme GUILLOTEAU
Avocat(s) : TISSERANT

Origine de la décision
Date de l'import : 25/02/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-02-13;19pa00606 ?
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