Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. F... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 12 février 2019 par lequel le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office et la décision du même jour par laquelle le préfet de police lui a interdit de retourner sur le territoire français pendant une durée de douze mois.
Par un jugement n° 1903057/1-2 du 29 mars 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté la demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 2 mai 2019, M. A..., représenté par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1903057/1-2 du 29 mars 2019 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler l'arrêté et la décision du 12 février 2019 ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le même délai et sous la même astreinte, après mise en possession d'une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros à verser à son conseil sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
M. A... soutient que :
- l'obligation de quitter le territoire français n'est pas suffisamment motivée et n'a pas été précédée d'un examen sérieux ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le pays de destination et l'interdiction de retour sur le territoire français sont insuffisamment motivées et méconnaissent les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense enregistré le 13 janvier 2020, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Le préfet de police soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Par une décision du 9 septembre 2019, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Paris a admis M. A... à l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. E... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant égyptien né en octobre 1990 et entré en France en 2013 selon ses déclarations, a, à la suite d'un contrôle d'identité, fait l'objet le 12 février 2019 d'un arrêté par lequel le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office et d'une décision par laquelle le préfet de police lui a interdit de retourner sur le territoire français pendant une durée de douze mois. M. A... fait appel du jugement du 29 mars 2019 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté et de cette décision.
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
2. En premier lieu, l'arrêté du 12 février 2019 vise les textes dont le préfet de police a fait application, notamment le 1° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui fonde l'obligation de quitter le territoire français. Cet arrêté mentionne également que M. A... ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français et est dépourvu de titre de séjour en cours de validité, qu'il n'est pas porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale, dès lors qu'il est célibataire et sans enfant, et que l'intéressé n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine, sa demande d'asile ayant été rejetée à deux reprises. L'obligation de quitter le territoire français, dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle n'aurait pas été précédée d'un examen sérieux de la situation personnelle du requérant, est ainsi suffisamment motivée.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) ".
4. M. A... fait valoir qu'il avait transmis une demande de titre de séjour au préfet de police avant que soit prise l'obligation de quitter le territoire français. Il ressort des pièces du dossier que, au cours de sa retenue administrative, l'avocat du requérant a transmis aux services de police un courrier du 8 février 2019 par lequel il sollicitait du préfet de police une admission exceptionnelle au séjour par le travail pour son client. Toutefois, dès lors qu'il est constant que M. A... ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français et n'était pas titulaire d'un titre de séjour en cours de validité, ni même d'une autorisation provisoire de séjour qui lui aurait été accordée pendant l'examen de la demande de titre dont il se prévaut, le préfet de police a légalement pu se fonder sur les dispositions précitées de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour prononcer une obligation de quitter le territoire français à l'encontre de M. A....
5. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
6. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., copte d'Egypte, est entré en France, selon ses déclarations résultant du procès-verbal d'audition sur sa situation administrative, en octobre 2013, et s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français, en dépit du rejet de ses demandes d'asile par décisions de la Cour nationale du droit d'asile des 13 février 2015 et 20 juin 2016. Il est célibataire et sans charge de famille en France, n'allègue pas être dépourvu d'attaches familiales en Egypte et ne justifie d'aucun lien social et privé d'une intensité particulière en France. Dans ces conditions, compte tenu de la durée et des conditions du séjour en France de M. A..., même s'il soutient travailler, être hébergé et avoir été sur le point de déposer une demande d'admission exceptionnelle au séjour au titre du travail, le préfet de police n'a pas porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels l'obligation de quitter le territoire français a été prise. Pour les mêmes motifs, le préfet de police n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur la situation personnelle de M. A....
En ce qui concerne la décision de refus de délai de départ volontaire :
7. D'une part, outre les éléments mentionnés au point 2, l'arrêté du 12 février 2019 vise les textes dont le préfet de police a fait application, notamment le II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile applicable au refus de délai de départ volontaire. Cet arrêté mentionne également qu'il existe un risque que M. A... se soustraie à l'obligation de quitter le territoire français, dès lors qu'il s'est soustrait à une précédente mesure d'éloignement, ne présente pas de garanties de représentation suffisantes en l'absence de documents d'identité ou de voyage en cours de validité et a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à l'obligation de quitter le territoire français. La décision portant refus de délai de départ volontaire est ainsi suffisamment motivée.
8. D'autre part, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) II. L'étranger auquel il est fait obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de l'obligation de quitter le territoire français (...) Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement (...) f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité (...) h) Si l'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français (...) ".
9. Dès lors que M. A... ne conteste pas qu'il s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement, ne pouvait présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité et a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à l'obligation de quitter le territoire français, il ne peut utilement soutenir pour contester la décision lui refusant un délai de départ volontaire qu'il disposait d'un logement certain et s'apprêtait à déposer un dossier de régularisation par le travail, la simple référence à la situation générale des coptes en Egypte étant en tout état de cause sans incidence sur la légalité de cette décision, qui n'a pas pour effet de renvoyer l'intéressé dans son pays d'origine.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
10. La décision fixant le pays de renvoi est suffisamment motivée en droit par le visa, dans l'article 3 de l'arrêté qui l'énonce, de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et, en fait, par la mention que l'intéressé n'établit pas être exposé dans son pays d'origine à des traitement contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, sa demande d'asile ayant été rejetée à deux reprises par l'OFPRA et la CNDA.
11. D'autre part, aux termes du dernier alinéa de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
12. M. A... soutient que, postérieurement au rejet de sa demande d'asile par la Cour nationale du droit d'asile le 13 février 2015, des faits nouveaux sont intervenus justifiant l'octroi de l'asile. Toutefois, outre que le réexamen de sa demande a fait l'objet d'un nouveau refus de la Cour le 20 juin 2016 et qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les faits nouveaux dont se prévaut M. A... n'auraient alors pas été examinés, le requérant n'apporte aucun élément à l'appui de ses allégations selon lesquels il serait personnellement exposé à des risques de traitements inhumains ou dégradants en cas de retour en Egypte du fait de son appartenance à la communauté copte. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit ainsi être écarté. Par ailleurs, pour les mêmes motifs que ceux mentionnés au point 6, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de cette convention doit également être écarté.
En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire français :
13. D'une part, la décision du 12 février 2019 vise les dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont le préfet de police a fait application. Elle mentionne également que M. A... allègue être entré sur le territoire en octobre 2013, qu'il ne peut être regardé comme se prévalant de liens suffisamment anciens, forts et caractérisés avec la France et qu'il n'est pas porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale. Le préfet de police n'étant par ailleurs pas tenu de se prononcer sur chacun des critères mentionnés au III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mais seulement sur ceux qu'il entendait retenir, la décision prononçant une interdiction de retour pour une durée de douze mois est ainsi suffisamment motivée.
14. D'autre part, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) III. L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".
15. M. A... n'allègue pas que le préfet de police aurait commis une erreur d'appréciation en prononçant une interdiction de retour de douze mois en se fondant sur sa durée de présence sur le territoire français et sur la nature et l'ancienneté de ses liens avec la France. Compte tenu de ce qui a été dit précédemment, les moyens qu'il invoque, tirés de la méconnaissance des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doivent être écartés.
16. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Sa requête, y compris ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, doit ainsi être rejetée.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 23 janvier 2020, à laquelle siégeaient :
- Mme D..., présidente de chambre,
- M. Legeai, premier conseiller,
- M. E..., premier conseiller,
Lu en audience publique, le 13 février 2020.
Le rapporteur,
F. E...La présidente,
S. D... Le greffier,
M. B...La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19PA01488