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27/02/2020 | FRANCE | N°19PA00507

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 27 février 2020, 19PA00507


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association le Planning familial a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 20 juin 2017 par laquelle le ministre de l'intérieur l'a informée, d'une part, que serait mis à sa charge le reversement d'une somme de 75 000 euros au titre d'un trop-perçu de subvention du " Fonds européen d'intégration " (FEI) accordée dans le cadre d'une convention Présage n° 31230 signée avec le ministère de l'intérieur et, d'autre part, que ses dépenses n'étaient pas éligibles à la subve

ntion FEI.

Par un jugement n° 1713283 du 29 novembre 2018, le tribunal administ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association le Planning familial a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 20 juin 2017 par laquelle le ministre de l'intérieur l'a informée, d'une part, que serait mis à sa charge le reversement d'une somme de 75 000 euros au titre d'un trop-perçu de subvention du " Fonds européen d'intégration " (FEI) accordée dans le cadre d'une convention Présage n° 31230 signée avec le ministère de l'intérieur et, d'autre part, que ses dépenses n'étaient pas éligibles à la subvention FEI.

Par un jugement n° 1713283 du 29 novembre 2018, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des pièces, enregistrées les 28 janvier et 8 novembre 2019, l'association le Planning familial, représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris n° 1713283 du 29 novembre 2018 ;

2) d'annuler la décision du 20 juin 2017 par laquelle le ministre de l'intérieur l'a informée, d'une part, que serait mis à sa charge le reversement d'une somme de 75 000 euros au titre d'un trop-perçu de subvention du " Fonds européen d'intégration " (FEI) accordée dans le cadre d'une convention Présage n° 31230 signée avec le ministère de l'intérieur et, d'autre part, que ses dépenses n'étaient pas éligibles à la subvention FEI ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est entaché d'irrégularité dès lors qu'elle n'a été destinataire d'aucun mémoire en défense ni d'aucune pièce adverse ;

- la décision du ministre de l'intérieur du 20 juin 2017 est insuffisamment motivée ;

- la décision n'a pas été précédée d'un examen particulier des circonstances de l'espèce ;

- la subvention n'ayant pas été obtenue par fraude, l'administration ne pouvait procéder à son retrait ;

- la convention FEI sur le fondement de laquelle la décision attaquée a été prise méconnaît l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et la loi " informatique et libertés " du 6 janvier 1978 ;

- il n'est pas démontré en quoi elle n'aurait pas respecté l'article 2 de la décision n° 2007/435/CE du Conseil du 25 juin 2007 en ne mentionnant pas la régularité du séjour des bénéficiaires ;

- la décision n'est pas justifiée par une nécessité de sécurité et de tranquillité publiques ;

- la décision constitue un détournement de pouvoir, le ministre ne cherchant qu'à contrôler la régularité du séjour des personnes destinataires de son action ;

- une mesure de police doit être proportionnée au but recherché.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 juillet 2019, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- et les conclusions de Mme Bernard, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. L'association du mouvement français pour le planning familial a été sélectionnée dans le cadre de la procédure d'appels à projets du Fonds Européen d'Intégration (FEI) lancé par le ministère de l'intérieur en 2013 pour le projet intitulé " Migration, rapports sociaux de sexe, violences et intégration ", action favorisant l'accès à l'autonomie et à l'insertion sociale et citoyenne des femmes migrantes ressortissantes de pays tiers. Elle a conclu le 29 juillet 2013 avec l'Etat une convention en vue de l'octroi d'une subvention au titre de cette action. Aux termes de l'article 3 de cette convention, modifié par avenant du 4 novembre 2013, le coût total éligible du projet a été évalué à 201 493,39 euros avec un cofinancement par le FEI d'un montant prévisionnel de 150 000 euros en contrepartie de l'engagement de l'association de justifier des dépenses effectivement réalisées pour le suivi d'environ 500 femmes étrangères originaires de pays tiers à l'UE. En application de l'article 5 de cette convention, une première avance de 75 000 euros a été versée à l'association dès la signature de la convention avec un versement du solde conditionné par la production d'un rapport d'activité final et des pièces comptables permettant de justifier le rattachement des crédits au FEI, à défaut duquel un ordre de reversement sera établi. L'article 4 de la même convention stipule ainsi que le bénéficiaire s'engage à n'inclure dans l'assiette de la subvention que des dépenses conformes aux dispositions de la décision n° 457/2008/CE et de l'annexe III jointe à la convention fixant les règles d'éligibilité des dépenses. A la suite du contrôle de service fait, les dépenses déclarées par l'association ont été rejetées en raison de leur inéligibilité, les éléments transmis par l'association requérante ne permettant pas de justifier que l'action avait bien été conduite auprès de femmes ressortissantes de pays tiers en situation régulière, le ministre de l'intérieur a, alors, par une décision du 20 juin 2017, informé le planning familial du refus du versement du solde de la subvention du FEI et de ce que, compte tenu du rejet de l'ensemble des dépenses exposées, l'avance d'un montant de 75 000 euros devait être reversée. Le planning familial relève appel du jugement n° 1713283 du 29 novembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision précitée du 20 juin 2017 du ministre de l'intérieur.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article R. 613-1 du code de justice administrative : " Le président de la formation de jugement peut, par une ordonnance, fixer la date à partir de laquelle l'instruction sera close. Cette ordonnance n'est pas motivée et ne peut faire l'objet d'aucun recours. (...) ". Aux termes de l'article R. 613-3 de ce code : " Les mémoires produits après la clôture de l'instruction ne donnent pas lieu à communication, sauf réouverture de l'instruction ".

3. Il ressort des mentions du jugement attaqué que le ministre de l'intérieur a produit un mémoire enregistré le 31 octobre 2018, soit le lendemain de la clôture de l'instruction fixée par une ordonnance du 18 septembre 2018. Or, il ne ressort pas du raisonnement adopté par les premiers juges qui, en application des dispositions précitées de l'article R. 613-3 du code de justice administrative, n'avait pas à communiquer le mémoire précité du ministre de l'intérieur enregistré après la clôture de l'instruction, que le jugement serait fondé sur des éléments autres que ceux qui ont été soumis au débat contradictoire, notamment sur des éléments qui auraient figuré dans le mémoire du ministre enregistré le 31 octobre 2018. Par suite, l'association requérante n'est pas fondée à soutenir que le jugement serait entaché d'irrégularité du fait qu'elle n'a été destinataire d'aucun mémoire en défense ni d'aucune pièce produite par la partie adverse.

Sur le bien-fondé du jugement :

4. En premier lieu, dès lors que l'association le Planning familial n'apporte en cause d'appel aucun élément nouveau ou déterminant au soutien des moyens tirés de l'insuffisante motivation de la décision attaquée du ministre de l'intérieur du 20 juin 2017 et du défaut d'examen préalable particulier des circonstances de l'espèce, il y a lieu d'écarter ces deux moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.

5. En deuxième lieu, aux termes des stipulations de l'article 11 de la convention conclue le 29 juillet 2013 entre l'association requérante et l'Etat mentionnée au point 1 du présent arrêt : " Dans le cas où tout ou partie de la subvention ne serait pas utilisée ou en cas d'utilisation de ces fonds publics non conforme à sa destination, un ordre de reversement au Trésor public interviendrait conformément à la réglementation en vigueur ".

6. Dès lors qu'il ressort des stipulations précitées qu'un ordre de reversement peut être émis en cas d'absence d'utilisation de la subvention ou en cas d'une utilisation des fonds non conforme à sa destination, le moyen selon lequel le bénéfice de la subvention allouée à l'association le Planning familial n'ayant pas été obtenu par fraude, l'administration ne pouvait procéder à son retrait par la décision attaquée doit être écarté comme inopérant.

7. En troisième lieu, l'association le Planning familial n'apporte en cause d'appel aucun élément nouveau ou déterminant au soutien du moyen tiré de la méconnaissance de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales par la décision attaquée du ministre de l'intérieur du 20 juin 2017, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.

8. En quatrième lieu, dès lors qu'il est constant qu'aucune information nominative relative aux bénéficiaires de l'action menée par l'association requérante n'a à être recueillie, le moyen selon lequel la convention FEI, sur le fondement de laquelle la décision attaquée a été prise, méconnaît la loi " informatique et libertés " du 6 janvier 1978 en ce qu'elle interdit de collecter ou de traiter des données à caractère personnel qui font apparaître, directement ou indirectement, les origines raciales ou ethniques, doit être écarté.

9. En cinquième lieu, l'association requérante ne peut utilement soutenir qu'il n'est pas démontré en quoi elle n'aurait pas respecté l'article 2 de la décision n° 2007/435/CE du Conseil du 25 juin 2007 en ne mentionnant pas la régularité du séjour des bénéficiaires alors que la décision attaquée du ministre de l'intérieur du 20 juin 2017 ne lui oppose pas l'absence de respect de cet article 2 de la décision n° 2007/435/CE du Conseil du 25 juin 2007. En conséquence ce moyen doit être écarté.

10. En sixième lieu, dès lors que la décision attaquée qui concerne l'exécution d'une convention en vue de l'octroi d'une subvention ne constitue pas une mesure de police prise en vue notamment d'assurer la sécurité et la tranquillité publiques, les moyens selon lesquels la décision attaquée n'est pas justifiée par une nécessité de sécurité et de tranquillité publiques et qu'une mesure de police doit être proportionnée au but recherché doivent être écartés comme inopérants.

11. En dernier lieu, l'association requérante soutient que la décision attaquée constitue un détournement de pouvoir, le ministre ne cherchant qu'à contrôler la régularité du séjour du public visé. Toutefois, dès lors que l'association requérante n'a pas à recueillir les données nominatives des femmes se présentant pour bénéficier de l'action qu'elle mène, le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi.

12. Par suite, il résulte de tout ce qui précède que l'association le Planning familial n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par l'association le Planning familial au titre des frais liés à l'instance.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de l'association le Planning familial est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'association le Planning familial et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 30 janvier 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- M. Luben, président assesseur,

- Mme A..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 27 février 2020.

Le rapporteur,

A. A...Le président,

J. LAPOUZADE

Le greffier,

Y. HERBERLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 19PA00507


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA00507
Date de la décision : 27/02/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

15-08 Communautés européennes et Union européenne. Litiges relatifs au versement d`aides de l'Union européenne.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: Mme Aude COLLET
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : AZOUGACH

Origine de la décision
Date de l'import : 04/03/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-02-27;19pa00507 ?
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