Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... D... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 17 juillet 2017 par laquelle le recteur de l'académie de Paris a annulé sa mutation en date du 30 mars 2017 vers l'académie de Versailles et d'annuler l'arrêté du 25 septembre 2017 par lequel le ministre de l'éducation nationale a procédé à son licenciement et a rapporté les dispositions de l'arrêté du 30 mars 2017 en ce qui concerne son affectation en qualité de conseiller principal d'éducation dans l'académie de Versailles.
Par un jugement n° 1714095 et 1718896/5-2 du 24 janvier 2019, le Tribunal administratif de Paris a rejeté les demandes de M. D....
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 16 mars 2019, M. D..., représenté par Me E..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1714095 et 1718896/5-2 du 24 janvier 2019 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes ;
2°) d'annuler la décision du 17 juillet 2017 par laquelle le recteur de l'académie de Paris a annulé sa mutation en date du 30 mars 2017 vers l'académie de Versailles ;
3°) d'annuler l'arrêté du 25 septembre 2017 par lequel le ministre de l'éducation nationale a procédé à son licenciement et a rapporté les dispositions de l'arrêté du 30 mars 2017 en ce qui concerne son affectation en qualité de conseiller principal d'éducation dans l'académie de Versailles ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le courrier du 17 juillet 2017 qui annule sa mutation constitue une décision faisant grief susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir ;
- la décision du 17 juillet 2017 a été prise par une autorité incompétente ;
- elle a pour effet de le placer en dehors de tout cadre prévu par les dispositions de l'article 4 de la loi du 13 juillet 1983 et de l'article 2 du décret du 7 octobre 1994 ;
- elle ne repose sur un aucun motif ;
- la décision du 25 septembre 2017 portant licenciement ne pouvait intervenir en l'absence de décision expresse de refus de titularisation en application de l'article 8 du décret du
12 août 1970 ;
- les rapports d'inspection ne lui ont pas été communiqués avant la décision contestée ;
- il a subi l'hostilité de son tuteur académique ;
- les griefs ne sont pas établis ;
- l'avis du jury est entaché d'erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 15 janvier 2020, le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 15 janvier 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au 17 février 2020 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- le décret n° 70-738 du 12 août 1970 ;
- l'arrêté du 22 août 2014 fixant les modalités de stage, d'évaluation et de titularisation de certains personnels enseignants et d'éducation de l'enseignement du second degré stagiaires ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Mach, premier conseiller,
- les conclusions de M. Baronnet, rapporteur public,
- et les observations de Me E..., avocat de M. D....
Considérant ce qui suit :
1. M. D... a été admis à la session 2015 du concours externe de recrutement de conseiller principal d'éducation et a été nommé en qualité de conseiller principal d'éducation de classe normale stagiaire à compter du 1er septembre 2015. Il a été affecté au collège Bernard Palissy dans le 10ème arrondissement de Paris pour l'année scolaire 2015-2016 pour effectuer son année de stage. A l'issue de son année de stage, le jury académique a, par délibération du 8 juillet 2016, estimé que l'intéressé n'était pas apte à être titularisé et a proposé qu'il effectue une seconde année de stage, durant laquelle il a été affecté au collège Stéphane Mallarmé dans le 17ème arrondissement de Paris pour l'année scolaire 2016-2017. Par arrêté du 30 mars 2017 du ministre de l'éducation nationale, M. D... a été muté vers l'académie de Versailles avec prise d'effet au 1er septembre 2017. Par délibération du 28 juin 2017, le jury académique a donné un avis défavorable à la titularisation de M. D.... Par courrier du 17 juillet 2017, le recteur de l'académie de Paris l'a informé qu'après examen de son dossier, un avis défavorable à sa titularisation allait être transmis au ministre, dont la décision concernant sa titularisation lui sera transmise. Par arrêté du 25 septembre 2017, le ministre de l'éducation nationale a licencié M. D... et a rapporté les dispositions de l'arrêté du 30 mars 2017 en tant qu'elles concernent l'affectation de M. D... dans l'académie de Versailles. M. D... relève appel du jugement du Tribunal administratif de Paris du 24 janvier 2019 rejetant ses demandes tendant à l'annulation du courrier du 17 juillet 2017 et de l'arrêté du 25 septembre 2017.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Il ressort des pièces du dossier que le recteur de l'académie de Paris a, par courrier du 17 juillet 2017, informé M. D... qu'un avis défavorable à sa titularisation allait être transmis au ministre, dont la décision lui serait transmise ultérieurement, et que, par voie de conséquence, sa mutation dans l'académie de Versailles serait annulée. Alors même qu'il comporte la mention des voies et délais de recours, ce courrier ne prononce pas le retrait de sa mutation dans l'académie de Versailles et se borne à l'informer de la nature des décisions qui seront prises ultérieurement par le ministre concernant sa situation administrative. Ce courrier ne présente, dès lors, pas le caractère d'une décision faisant grief susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir. Par suite, M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté comme irrecevables les conclusions à fin d'annulation du courrier du 17 juillet 2017 concernant sa mutation.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. Ainsi qu'il a été dit au point 2, le courrier du 17 juillet 2017 ne prononce pas le retrait de la mutation de M. D... dans l'académie de Versailles et ne présente pas le caractère d'une décision faisant grief. Par suite, les moyens soulevés par M. D... et dirigés contre le courrier du 17 juillet 2017 ne peuvent qu'être écartés.
4. Aux termes de l'article 5 de l'arrêté du 22 août 2014 fixant les modalités de stage, d'évaluation et de titularisation de certains personnels enseignants et d'éducation de l'enseignement du second degré stagiaires : " Le jury se prononce sur le fondement du référentiel de compétences prévu par l'arrêté du 1er juillet 2013 susvisé, après avoir pris connaissance des avis suivants : / I. - Pour les stagiaires qui effectuent leur stage dans les établissements publics d'enseignement du second degré : / 1° L'avis d'un membre des corps d'inspection de la discipline désigné par le recteur, établi sur la base d'une grille d'évaluation et après consultation du rapport du tuteur désigné par le recteur, pour accompagner le fonctionnaire stagiaire pendant sa période de mise en situation professionnelle. L'avis peut également résulter, notamment à la demande du chef d'établissement, d'une inspection ; / 2° L'avis du chef de l'établissement dans lequel le fonctionnaire stagiaire a été affecté pour effectuer son stage établi sur la base d'une grille d'évaluation ; / 3° L'avis de l'autorité en charge de la formation du stagiaire. (...). ". Aux termes de l'article 7 du même arrêté : " Le fonctionnaire stagiaire a accès, à sa demande, à la grille d'évaluation, aux avis et aux rapports mentionnés à l'article 5. ".
5. Un licenciement en fin de stage, lorsqu'il ne revêt pas le caractère d'une mesure disciplinaire ou lorsqu'il n'est pas fondé sur des motifs qui caractérisent des fautes disciplinaires de l'intéressé, n'est pas au nombre des mesures qui ne peuvent légalement intervenir sans que l'intéressé ait été mis à même de faire valoir ses observations ou de prendre connaissance de son dossier, et n'est soumise qu'aux formes et procédures expressément prévues par les lois et les règlements.
6. Il ressort des pièces du dossier que la décision de licenciement en fin de stage de M. D... ne repose pas sur des motifs qui caractérisent des fautes disciplinaires, mais uniquement sur l'insuffisance professionnelle de l'intéressé. Par ailleurs, il n'est pas allégué que M. D... aurait sollicité la communication des rapports d'inspection ou du dossier transmis au jury académique, en application de l'article 7 de l'arrêté du 22 août 2014. Par suite, le moyen tiré du défaut de communication des rapports d'inspection ou de la délibération du jury académique doit être écarté.
7. Aux termes de l'article 8 du décret du 12 août 1970 relatif au statut particulier des conseillers principaux d'éducation : " (...) / Les stagiaires qui n'ont pas été autorisés à effectuer une seconde année de stage ou qui, à l'issue de la seconde année de stage, n'ont pas été titularisés sont soit licenciés par le ministre chargé de l'éducation nationale, soit réintégrés dans leur corps ou cadre d'emplois d'origine s'ils avaient la qualité de fonctionnaire. ". Aux termes de l'article 9 de l'arrêté du 22 août 2014 fixant les modalités de stage, d'évaluation et de titularisation de certains personnels enseignants et d'éducation de l'enseignement du second degré stagiaires : " Le recteur prononce la titularisation des stagiaires estimés aptes par le jury. (...) / Le recteur arrête par ailleurs la liste de ceux qui sont autorisés à accomplir une seconde année de stage. / Il transmet au ministre les dossiers des stagiaires qui n'ont été ni titularisés ni autorisés à accomplir une seconde année de stage et qui sont, selon le cas, licenciés ou réintégrés dans leur corps, cadre d'emplois ou emploi d'origine. "
8. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient au recteur de l'académie d'affectation du stagiaire d'établir la liste des conseillers principaux d'éducation qui, ayant été estimés aptes par le jury, sont titularisés en qualité de conseiller principal d'éducation et ceux, qui ne l'ayant pas été, sont autorisés à effectuer une seconde année de stage, et de transmettre au ministre les dossiers de ceux qui ne figurent ni sur l'une, ni sur l'autre de ces listes pour qu'il prononce leur licenciement ou, lorsqu'ils avaient déjà la qualité de fonctionnaire, leur réintégration dans leur corps ou cadre d'emploi d'origine. En revanche, contrairement à ce que soutient M. D..., ces dispositions n'imposent pas à l'autorité administrative compétente de prendre une décision expresse de refus de titularisation préalablement à l'intervention de la décision licenciant le stagiaire. Il est constant que le jury a, lors de sa délibération du 28 juin 2017, émis un avis défavorable à la titularisation de M. D... et que le recteur de l'académie de Paris a transmis au ministre le dossier de M. D... qui n'avait pas été titularisé. Par suite, M. D... n'est pas fondé à soutenir qu'il ne pouvait faire l'objet d'une décision de licenciement en l'absence de décision expresse refusant sa titularisation.
9. M. D... ne peut par ailleurs utilement invoquer les carences de l'autorité administrative dans le respect de ses obligations de formation au cours de la première année de stage dès lors que l'appréciation du jury sur son aptitude professionnelle ne porte que sur sa seconde année de stage. M. D... soutient qu'au cours de la seconde année de stage, il a été confronté à l'hostilité de son tuteur académique, qui a sollicité de sa part la rédaction d'un nombre conséquent de comptes-rendus sans lui préciser les attentes et qui s'est borné à critiquer son travail sans lui apporter de conseils. Toutefois ni le témoignage des commissaires CPE SNES du 11 décembre 2017, ni l'attestation du psychologue du travail relatant que M. D... a signalé une situation de souffrance au travail à raison de son tuteur, dont le comportement avait déjà fait l'objet d'alertes auprès de la hiérarchie les années précédentes, ne suffisent à démontrer un parti pris défavorable de son tuteur à son égard.
10. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du rapport d'inspection du 28 avril 2017, du rapport du tuteur académique du 9 mai 2017, de l'avis du chef d'établissement au sein duquel s'est déroulé son stage du 12 mai 2017, de l'avis de l'inspecteur du 16 juin 2017 et de l'avis du jury académique du 28 juin 2017, que l'avis défavorable à la titularisation de M. D... repose sur son inaptitude à exercer les fonctions de conseiller principal d'éducation. Si le directeur de l'école supérieure du professorat et de l'éducation a émis un avis favorable à sa titularisation le
17 mai 2017, cet avis non motivé a été rendu alors que la tutrice de l'école supérieure du professorat et de l'éducation chargée du suivi de l'intéressé avait émis un avis défavorable. Il résulte de ces documents circonstanciés et concordants que M. D... ne dispose pas des compétences requises pour exercer ses fonctions de manière autonome et responsable en raison d'une méconnaissance de textes réglementaires relatifs à son métier, d'insuffisances dans les actions mises en oeuvre, de la prise de décisions inadaptées et de difficultés à s'adapter aux situations urgentes ou imprévues, de difficultés à s'inscrire dans le cadre collectif et coopératif, d'un manque de communication ainsi que de connaissances insuffisantes et des réponses inexactes aux questions des élèves. Si les attestations de ses collègues témoignent de sa collaboration avec tous les personnels de l'établissement, elles ne suffisent pas à remettre en cause les appréciations portées par les différentes personnes chargées du suivi et de l'évaluation de sa seconde année de stage. En se bornant à contester les griefs qui lui sont reprochés, et notamment la retranscription des propos qu'il a tenus lors de son entretien avec le jury, et à mettre en cause les carences de sa formation, M. D... ne démontre pas l'inexactitude matérielle des appréciations portées sur son aptitude professionnelle. Par suite, le jury académique n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. D... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D... et au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
Délibéré après l'audience du 26 juin 2020, à laquelle siégeaient :
- Mme B..., présidente,
- Mme Portes, premier conseiller,
- Mme Mach, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 31 juillet 2020.
Le rapporteur,
A-S MACHLa présidente,
M. B...
Le greffier,
S. GASPAR
La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 19PA01073