Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... B... a demandé au Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie d'annuler sa notation arrêtée le 23 février 2018 pour l'année 2017.
Par un jugement n° 1800110 du 13 septembre 2018, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 6 décembre 2018, M. B..., représenté par la Selarl Jean-Jacques Deswarte, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler cette notation ainsi que la décision implicite de rejet de son recours hiérarchique ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 500 000 francs CFP en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- sa notation au titre de 2017 est entachée d'un vice de procédure en ce qu'elle a été prise en méconnaissance de l'article 2 du décret n° 2010-888 du 28 juillet 2010 ;
- les circonstances tenant à ce qu'il était informé de l'ouverture de la campagne de notation dès le 16 février 2018 et qu'il a accepté la tenue d'un entretien alors même que celui-ci ne respectait pas le délai prévu à l'article 2 du décret ne sont pas de nature à régulariser la procédure ;
- il n'a pas été en mesure de préparer utilement son entretien d'évaluation ;
- la décision implicite de rejet de son recours hiérarchique est irrégulière dès lors qu'elle n'est pas motivée ;
- l'argument invoqué par le haut-commissaire de la République en première instance selon lequel son activité serait moindre que celle de certains de ses collègues agents de police judiciaire n'est pas pertinent, dès lors qu'il ne pouvait faire l'objet d'une telle comparaison qu'avec des officiers relevant du même corps et du même grade que lui ;
- la baisse de notation au titre de 2017 est entachée d'erreur manifeste d'appréciation, ainsi qu'en attestent les divergences importantes entre les appréciations relatives à ses aptitudes et compétences pour les années 2014 à 2016 et celles concernant 2017 ;
- les qualificatifs de "dilettantisme" et de "négligence" qui lui sont appliqués sont en contradiction avec ses notations précédentes ;
- les faits allégués par l'administration au soutien de sa baisse de notation ne sont pas établis.
La requête a été communiquée au ministre de l'intérieur qui n'a pas produit de mémoire en dépit d'une mise en demeure en date du 10 mai 2019.
Les parties ont été informées, le 24 septembre 2020, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la décision de la Cour était susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi organique n° 99-209 et la loi n° 99-210 du 19 mars 1999 ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 95-654 du 9 mai 1995 ;
- le décret n° 2010-888 du 28 juillet 2010 ;
- le décret n° 2020-1404 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l'ordre administratif ;
- le code de justice administrative dans sa rédaction applicable en Nouvelle-Calédonie ;
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...,
- et les observations de M. Baronnet, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., promu capitaine de police depuis le 1er mars 2016, adjoint à la cheffe de groupe de l'unité de police administrative et des délégations judiciaires, a contesté sa notation au titre de l'année 2017, évaluée à 5, telle qu'elle résulte de son compte-rendu d'entretien professionnel du 23 février 2018. Il relève appel du jugement du 13 septembre 2018 par lequel le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette notation.
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
En ce qui concerne l'entretien professionnel arrêtant la notation de M. B... pour 2017 :
2. La notation d'un fonctionnaire, qui comprend, en vertu de l'article 17 de la loi du 13 juillet 1983, une note chiffrée et des appréciations générales, a un caractère indivisible. Par suite, les conclusions de M. B... tendant à l'annulation de sa note chiffrée pour l'année 2017 doivent être regardées comme dirigées également contre les appréciations générales de son compte-rendu d'entretien professionnel.
3. Aux termes des dispositions de l'article 16 du décret du 9 mai 1995 fixant les dispositions communes applicables aux fonctionnaires actifs des services de la police nationale : " La notation des fonctionnaires actifs des services de la police nationale fait l'objet d'un ou plusieurs entretiens d'évaluation. Elle est établie annuellement sur une notice qui comporte : 1. Une liste d'éléments d'appréciation non chiffrée permettant d'évaluer les qualités personnelles, professionnelles et les aptitudes manifestées dans l'exercice des fonctions ; 2. Une grille de notation par niveau de 1 à 7 qui rend compte de la situation du fonctionnaire ; 3. Une appréciation non chiffrée qui rend compte de l'évolution de la valeur du fonctionnaire. ". Et aux termes des dispositions de l'article 2 du décret du 28 juillet 2010 relatif aux conditions générales de l'appréciation de la valeur professionnelle des fonctionnaires de l'Etat : " Le fonctionnaire bénéficie chaque année d'un entretien professionnel qui donne lieu à compte rendu. / Cet entretien est conduit par le supérieur hiérarchique direct. / La date de cet entretien est fixée par le supérieur hiérarchique direct et communiquée au fonctionnaire au moins huit jours à l'avance ".
4. Si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie.
5. Il ressort des pièces du dossier que, le 23 juillet 2018 dans l'après-midi, M. B... s'est vu proposer verbalement par sa hiérarchie d'effectuer son entretien professionnel le jour même. Il est constant que l'intéressé, qui avait fait retour de son formulaire de notation le 16 février 2018 et savait depuis cette date que la période de notation concernant le corps de commandement auquel il appartient était ouverte, a accepté cette proposition. Il fait valoir toutefois qu'il n'a pu préparer utilement cet entretien du fait des circonstances précitées. Le délai minimal prévu par les dispositions qui précèdent de l'article 2 du décret du 28 juillet 2010 de communication de la date de l'entretien professionnel constitue une garantie reconnue aux agents publics. En l'espèce, alors même que M. B... aurait accepté sans réserves la proposition d'effectuer son entretien professionnel le jour même où il a été sollicité à cette fin et qu'un délai de sept jours se serait écoulé entre la remise par ses soins de son formulaire de notation et la tenue de cet entretien, ce vice de procédure est susceptible d'avoir eu une influence sur le contenu de ce compte-rendu. M. B... est par suite fondé à soutenir que l'entretien professionnel du 23 février 2018 est entaché d'un vice de procédure, de nature à justifier son annulation.
En ce qui concerne la décision implicite de rejet du recours hiérarchique de M. B... :
6. Il ressort des pièces du dossier que, par lettre du 5 mars 2018, M. B... a formé une demande de révision de sa notation au titre de l'année 2017, dont l'autorité administrative a eu connaissance acquise au plus tard le 27 mars 2018, date non contestée du rapport du supérieur hiérarchique de M. B... qui fait référence à ce recours, cité par le haut-commissaire de la République dans son mémoire de première instance. Cette demande doit être regardée comme valant recours hiérarchique de M. B... contre les éléments de son entretien professionnel. La demande de M. B... devant le tribunal administratif ne comportait toutefois pas de conclusions aux fins d'annulation de la décision implicite de rejet née du silence gardé par l'autorité administrative sur ce recours. En conséquence, les conclusions de M. B... dirigées contre cette décision, présentées pour la première fois devant la Cour, sont, pour ce motif, irrecevables et doivent être rejetées.
7. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, M. B... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande tendant à l'annulation de sa notation pour l'année 2017.
Sur les frais liés au litige :
8. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".
9. En application de ces dispositions, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. B... et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1800110 du 13 septembre 2018 du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie et l'entretien professionnel du 23 février 2018 arrêtant la notation de M. B... pour l'année 2017 sont annulés.
Article 2 : L'Etat versera à M. B... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête d'appel de M. B... est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie.
Délibéré après l'audience du 13 novembre 2020 à laquelle siégeaient :
- Mme D..., présidente,
- M. A..., premier conseiller,
- Mme Portes, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 novembre 2020.
Le rapporteur,
P. A...
La présidente,
M. D... Le greffier,
S. GASPAR
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18PA03803