Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Maintenance industrie a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 4 mai 2018 par laquelle l'inspectrice du travail a autorisé le transfert du contrat de travail de M. G... D... de la société Vega vers la société Maintenance industrie en tant qu'elle autorise ce transfert à concurrence d'une quotité de travail de plus de 48 %, ensemble les décisions implicites de rejet de ses recours gracieux et hiérarchique, et d'autoriser le transfert du contrat de travail de ce salarié à hauteur d'une quotité de travail de 48 %.
Par jugement n° 1906321/3-1 du 28 janvier 2020, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 31 mars 2020, la société Maintenance industrie, représentée par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n°1906321/3-1 du 28 janvier 2020 du tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler la décision du 4 mai 2018 par laquelle l'inspectrice du travail a autorisé le transfert du contrat de travail de M. D... de la société Vega vers la société Maintenance industrie en tant qu'elle autorise ce transfert à concurrence d'une quotité de travail de plus de 48 %, ensemble les décisions implicites de rejet de ses recours gracieux et hiérarchique ;
3°) d'autoriser le transfert du contrat de travail de ce salarié à hauteur d'une quotité de travail de 48 % ;
4°) à titre subsidiaire, de désigner un expert judiciaire avec la mission de se faire communiquer par la société Vega conseil sécurité les éléments permettant de définir précisément le périmètre des fonctions de M. D... au jour de la décision d'autorisation de transfert de son contrat de travail du 4 mai 2018, et plus précisément les secteurs du marché de la Ville de Paris sur lesquels il intervenait, d'interroger toute personne pouvant contribuer à l'accomplissement de cette mission et se faire communiquer tout document détenu par des tiers, les comparer avec le périmètre du marché attribué à la société Maintenance industrie, et donner son avis sur la question de savoir si les conditions du transfert de M. D... à la société Maintenance industrie en application des dispositions de l'article 7 de la convention collective nationale des entreprises de propreté sont réunies, et dans l'affirmative, de donner son avis sur la quotité de travail de M. D... pouvant être transférée à la société Maintenance industrie ;
5°) à titre encore plus subsidiaire, de déclarer la décision de l'inspectrice du travail du
4 mai 2018 qui a autorisé le transfert de M. D... inopposable à la société Maintenance industrie, sur le fondement des dispositions des articles L. 221-8 du code des relations entre le public et l'administration et R. 421-1 et R. 421-5 du code de justice administrative précités, ainsi qu'en application de la jurisprudence du Conseil d'Etat du 19 décembre 1952, n°7133.
Elle soutient que :
- contrairement à qu'ont considéré les premiers juges, sa requête de première instance n'est pas tardive ;
- à titre subsidiaire, si la Cour retenait que sa requête de première instance est tardive, de juger que la décision du 4 mai 2018 par laquelle l'inspectrice du travail lui est inopposable puisqu'elle ne lui a pas été notifiée ;
- le transfert du contrat de travail du salarié concerné à hauteur de 100 % de sa quotité de travail n'est pas justifié dans la mesure où il n'était pas affecté exclusivement au marché de prestations de nettoyage précédemment attribué à la société Vega par la ville de Paris et il n'est pas établi qu'il remplit les conditions posées par l'article 7 de la convention collective des entreprises de propreté pour être transféré ;
- le transfert du contrat de travail du salarié concerné à la société requérante est justifié à hauteur de 48 % de sa quotité de travail compte tenu de la localisation des sites géographiques qui lui étaient dévolus antérieurement à l'attribution du marché en cause à la société requérante.
Par un mémoire en défense, enregistré le 6 novembre 2020, la ministre du travail demande à la Cour de rejeter la requête d'appel de la société Maintenance industrie.
Elle soutient reprendre les moyens soulevés dans son mémoire de première instance qu'elle joint à son mémoire d'appel.
Par un mémoire, enregistré le 13 novembre 2020, la société Vega conseil sécurité, représentée par Me E..., demande à la Cour :
1°) de rejeter la requête d'appel de la société Maintenance industrie ;
2°) de mettre à la charge de la société Maintenance industrie la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête de première instance est tardive ;
- les moyens soulevés par la société Maintenance industrie ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention collective nationale des entreprises de propreté et services associés du 26-juillet 2011 ;
- le code du travail ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme C...,
- les conclusions de Mme Bernard, rapporteur public,
- les observations de Me B..., représentant la société Maintenance industrie,
- et les observations de M. D....
Considérant ce qui suit :
1. La société Vega a demandé l'autorisation de transférer le contrat de travail de
M. D..., salarié protégé exerçant les fonctions d'inspecteur, vers la société Maintenance industrie, titulaire de plusieurs lots du nouveau marché public de prestations de nettoyage de la ville et du département de Paris dont la société Vega était auparavant titulaire. Par une décision du 4 mai 2018, l'inspectrice du travail a autorisé ce transfert. La société Maintenance industrie a formé un recours gracieux contre cette décision en tant qu'elle autorisait le transfert du contrat de travail de
M. D... à concurrence d'une quotité de travail de plus de 48 %, reçu le 12 juin 2018 par l'inspectrice du travail qui en a accusé réception en donnant à la requérante des indications sur les conditions de la naissance d'une décision implicite de rejet de ce recours et celles de la contestation d'une décision de rejet, et n'a ensuite pas répondu à ce recours gracieux. La société Maintenance industrie a présenté un recours hiérarchique, reçu le 12 octobre 2018 par la ministre du travail qui en a accusé réception en donnant à la requérante des indications sur les conditions de la naissance d'une décision implicite de rejet de ce recours et celles de la contestation d'une décision de rejet, et n'a ensuite pas répondu à ce recours hiérarchique. La société Maintenance industrie a demandé au tribunal administratif de Paris, par une requête enregistrée le 2 avril 2019, l'annulation de la décision du 4 mai 2018 de l'inspectrice du travail ainsi que des décisions implicites de rejet de ses recours gracieux et hiérarchique. Sa demande a été rejetée par jugement n°1906321/3-1 du 28 janvier 2020, au motif de sa tardiveté. La société Maintenance industrie relève appel de ce jugement.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2 D'une part, en vertu des dispositions du code du travail, les salariés protégés bénéficient d'une protection exceptionnelle instituée dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, afin d'éviter que ces salariés ne fassent l'objet de mesures discriminatoires dans le cadre d'une procédure de licenciement ou de transfert partiel d'entreprise. Le transfert d'un salarié protégé doit ainsi être autorisé par l'inspecteur du travail, notamment, lorsque le transfert partiel résulte, en cas de perte d'un marché, des stipulations d'une convention collective ou d'un accord collectif. En vertu de l'article R. 2421-17 du code du travail, la procédure applicable en cas de demande d'autorisation de transfert d'un salarié protégé est régie, notamment, aux articles R. 2421-11 et R. 2421-12 de ce code, également applicables à des procédures de demande d'autorisation de licenciement d'un salarié protégé. Selon ces dispositions, l'inspecteur du travail procède à une enquête contradictoire avant de rendre sa décision qui est notifiée à l'employeur, au salarié et, le cas échéant, à l'organisation syndicale intéressée s'il s'agit d'un représentant syndical.
3. Il résulte de ces dispositions que cette procédure administrative, qui est instituée aux seules fins de s'assurer que le salarié protégé dont le transfert est demandé ne fait pas l'objet d'une mesure discriminatoire, concerne l'employeur qui demande l'autorisation et le salarié intéressé. En particulier, s'il est loisible à l'inspecteur du travail de recueillir, au cours de son enquête, les observations de l'entreprise destinée à devenir l'employeur du salarié protégé en cas d'autorisation du transfert, aucune disposition réglementaire ni aucun principe ne lui impose de recueillir de telles observations avant de rendre sa décision. Ainsi, l'entreprise destinée à devenir l'employeur du salarié protégé en cas d'autorisation du transfert a la qualité de tiers par rapport à la décision de transfert.
4. D'autre part, aux termes de l'article L. 110-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Sont considérées comme des demandes au sens du présent chapitre les demandes et les réclamations, y compris les recours gracieux ou hiérarchiques, adressées aux autorités administratives. / (...) ". Aux termes des articles L. 112-3 et L. 112-6 de ce code : " Toute demande adressée à une autorité administrative fait l'objet d'un accusé de réception délivré dans les conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) / (...) / Les délais de recours ne sont pas opposables à l'auteur d'une demande lorsque l'accusé de réception ne lui a pas été transmis ou ne comporte pas les indications prévues par le décret mentionné au premier alinéa. / (...) ". Aux termes de l'article L. 231-4 du même code : " Sauf dans les cas où un régime de décision implicite d'acceptation est institué dans les conditions prévues à l'article 22, le silence gardé pendant plus de deux mois par l'autorité administrative sur une demande vaut décision de rejet. / (...) ". Aux termes de l'article R. 421-2 du code de justice administrative : " Sauf disposition législative ou réglementaire contraire, dans les cas où le silence gardé par l'autorité administrative sur une demande vaut décision de rejet, l'intéressé dispose, pour former un recours, d'un délai de deux mois à compter de la date à laquelle est née une décision implicite de rejet. (...) ".
5. Il ressort de l'avis du Conseil d'Etat du 15 juillet 2004 n° 266479 qu'en prescrivant aux autorités administratives d'accuser réception de toute demande dans des conditions dont le non-respect entraîne l'inopposabilité des délais de recours, le législateur a entendu viser, conformément à sa volonté de protéger les droits des citoyens dans leurs relations avec les autorités administratives, les recours formés par les personnes contestant une décision prise à leur égard par une autorité administrative. Il n'a, en revanche, pas entendu porter atteinte à la stabilité de la situation s'attachant, pour le bénéficiaire d'une autorisation administrative, à l'expiration du délai de recours normalement applicable à cette autorisation. Il en résulte que l'intervention de ces dispositions législatives demeure sans incidence sur les règles applicables aux recours administratifs, gracieux ou hiérarchiques, formés par des tiers à l'encontre d'autorisations individuelles créant des droits au profit de leurs bénéficiaires. Il ressort du même avis que les dispositions de l'article R. 421-5 du code de justice administrative, selon lesquelles " les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ", ne sont pas non plus applicables à la détermination du délai imparti aux tiers pour saisir la juridiction compétente à la suite d'une décision rejetant un recours gracieux ou hiérarchique formé par eux à l'encontre de décisions individuelles créant des droits au profit de leurs bénéficiaires.
6. Et en vertu de la jurisprudence issue de la décision du Conseil d'Etat du
27 février 1935, n°s 28348 28557, un recours hiérarchique formé postérieurement au rejet d'un recours gracieux ne peut conserver une nouvelle fois le délai de recours contentieux.
7. Cependant, lorsque l'administration prend l'initiative d'accuser réception d'un recours gracieux ou d'un recours hiérarchique présenté par un tiers contre une décision créant des droits au profit de ses bénéficiaires, et qu'elle lui donne à cette occasion des indications de nature à l'induire en erreur sur le délai qui lui est imparti pour saisir la juridiction compétente, ces indications sont opposables à l'administration, ainsi qu'aux bénéficiaires de la décision, sous réserve que le délai de recours résultant de leur application soit raisonnable, en particulier, au regard des droits créés par la décision au profit des bénéficiaires.
8. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que la société Maintenance industrie a formé un recours gracieux le 11 juin 2018 contre la décision du 4 mai 2018 de l'inspectrice du travail en tant qu'elle a autorisé le transfert du contrat de travail de M. D... de la société Vega, à concurrence d'une quotité de travail de plus de 48%. La direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) de l'Essonne a accusé réception le 22 juin 2018 de ce recours gracieux, en précisant qu'elle disposait d'un délai de deux mois pour statuer et qu'à défaut de réponse le 12 août 2018 la demande serait réputée avoir été implicitement rejetée, et que, dans le cas d'une décision défavorable, implicite ou expresse, la société Maintenance industrie disposerait d'un délai de deux mois à compter de la naissance d'une telle décision soit pour la contester devant le tribunal administratif compétent soit pour déposer un recours hiérarchique devant le ministre chargé de l'emploi.
9. Cet accusé de réception, qui comporte des indications contraires aux règles, rappelées aux points 5 et 6, relatives aux recours administratifs, gracieux ou hiérarchiques, formés par des tiers à l'encontre d'autorisations individuelles créant des droits au profit de leurs bénéficiaires, était ainsi de nature à induire la société Maintenance industrie en erreur sur ses possibilités de recours contentieux, en particulier, sur le délai qui lui était imparti pour saisir la juridiction compétente.
10. Constatant qu'une décision de rejet de son recours gracieux était née le 12 août 2018 du silence gardé par l'inspectrice du travail sur ce recours, la société Maintenance industrie, se conformant aux indications énoncées par l'inspectrice du travail, a, par courrier daté du
8 octobre 2018 reçu le 12 octobre 2018, soit dans le délai fixé par l'accusé de réception de son recours gracieux, exercé auprès de la ministre du travail un recours hiérarchique contre le rejet implicite de son recours gracieux. Le ministre a accusé réception de ce recours hiérarchique par courrier du 12 octobre 2018, en précisant qu'il disposait d'un délai de quatre mois pour statuer, de sorte qu'à défaut de réponse le 13 février 2019 le recours serait réputé implicitement rejeté, et que, dans le cas d'une décision défavorable, la société Maintenance industrie disposerait d'un délai de deux mois pour la contester devant le tribunal administratif.
11. Cet accusé de réception, qui comporte lui aussi des indications contraires aux règles, rappelées aux points 5 et 6, relatives aux recours administratifs, gracieux ou hiérarchiques, formés par des tiers à l'encontre d'autorisations individuelles créant des droits au profit de leurs bénéficiaires, était également de nature à induire la société Maintenance industrie en erreur sur ses possibilités de recours contentieux, en particulier, sur le délai qui lui était imparti pour saisir la juridiction compétente.
12. Constatant qu'une décision de rejet de son recours hiérarchique était née le 12 février 2019 du silence gardé par la ministre du travail sur ce recours, la société Maintenance industrie, se conformant aux indications énoncées par la ministre, a, par une requête enregistrée au tribunal le 2 avril 2019, soit dans le délai fixé par l'accusé de réception de son recours hiérarchique, demandé l'annulation de la décision du 4 mai 2018 par laquelle l'inspectrice du travail a autorisé le transfert du contrat de travail de M. D... à concurrence d'une quotité de travail de plus de
48 %, ensemble les décisions implicites de rejet de ses recours gracieux et hiérarchique.
13. Ainsi dans les circonstances de l'espèce, en application du principe énoncé au point 7, le recours hiérarchique présenté par la société Maintenance industrie doit être regardé comme ayant conservé à nouveau le délai de recours contentieux, compte tenu, d'une part, des mentions erronées des accusés de réception notifiés, respectivement, par l'inspectrice du travail puis par le ministre du travail et, d'autre part, du caractère raisonnable du délai de recours ayant résulté de l'application de ces mentions erronées au regard des droits créés par la décision litigieuse au profit de la société Vega et de M. D..., bénéficiaires de cette décision, le rendant dès lors opposable à l'administration comme à ces bénéficiaires.
14. Il résulte de tout ce qui précède que, contrairement à ce qu'ont considéré les premiers juges, la requête de la société Maintenance industrie, enregistrée le 2 avril 2019 au tribunal administratif de Paris, n'était pas tardive. Par suite, il y a lieu de faire droit aux conclusions de la société Maintenance industrie tendant à l'annulation du jugement n°1906321/3-1 du 28 janvier 2020 du tribunal administratif de Paris.
15. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la société Maintenance industrie devant le tribunal administratif de Paris.
Sur la légalité des décisions en litige :
16. D'une part, aux termes des dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail, " Lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise ". L'article L. 2414-1 du même code prévoit que " Le transfert d'un salarié compris dans un transfert partiel d'entreprise ou d'établissement par application de l'article L. 1224-1 ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail lorsqu'il est investi de l'un des mandats suivants : 1° Délégué syndical et ancien délégué syndical ; (...) ".
17. D'autre part, aux termes de l'article 7 de la convention collective nationale des entreprises de propreté et services associés du 26 juillet 2011, qui porte sur les conditions de garantie de l'emploi et continuité du contrat de travail du personnel en cas de changement de prestataire : " Article 7.2 Obligations à la charge du nouveau prestataire (entreprise entrante) : (...) I.'-'Conditions d'un maintien de l'emploi : Le nouveau prestataire s'engage à garantir l'emploi de 100'% du personnel affecté au marché faisant l'objet de la reprise qui remplit les conditions suivantes: A.-Appartenir expressément : (...) - soit à l'un des 2 premiers échelons du niveau agent de maîtrise exploitation de la classification nationale des emplois (MP1 et MP2) et être affecté exclusivement sur le marché concerné. (...) / Lorsque le marché initial est redistribué en plusieurs lots, la (ou les) entreprise(s) entrante(s) a (ont) l'obligation d'assurer la continuité des contrats de travail des personnes affectées sur le (ou les) lot(s) qu'elle(s) reprend (reprennent) dès lors que les conditions définies ci-dessus, appréciées alors à l'égard du marché initial détenu par l'entreprise sortante, sont remplies ".
18. En premier lieu, la société Maintenance industrie soutient que le transfert du contrat de travail de M. D... à hauteur de 100 % de sa quotité de travail n'est pas justifié dès lors que ce dernier, agent de maîtrise exploitation de la classification nationale des emplois (MP1 et MP2) ainsi qu'il ressort des pièces du dossier, n'était pas affecté exclusivement au marché de prestations de nettoyage précédemment attribué à la société Vega par la ville de Paris, de sorte que les conditions posées par l'article 7 de la convention collective des entreprises de propreté relatives au transfert de 100% de son emploi n'étaient pas réunies. Elle ajoute que le transfert du contrat de travail de M. D... auprès d'elle n'est justifié qu'à hauteur de 48 % de la quotité de travail de ce dernier, compte tenu de la localisation des sites géographiques qui lui étaient dévolus antérieurement à l'attribution partielle du marché en cause dont elle a fait l'objet. A l'appui de ces allégations, la requérante fait valoir qu'elle a été attributaire de 3 lots, concernant en particuliers le 11ème et le 12ème arrondissements de Paris et que M. D... exerçait ses fonctions au sein de la société Vega pour partie sur les sites situés dans les 11ème et 12ème arrondissements de Paris qu'elle a repris dans le cadre de la réaffectation du marché de prestations de nettoyage, mais aussi pour partie sur d'autres sites et notamment sur les sites, situés dans le 13ème arrondissement qui dépendent de lots ayant été repris non par elle-même mais par les sociétés Nickel et Challancins, et qu'en outre elle n'a pas repris tous les sites situés dans les 11ème et 12ème arrondissements de Paris auparavant attribués à la société Vega.
19. Si la société Vega se prévaut, pour contester ces allégations, de l'avant-dernier avenant au contrat de travail de M. D... qui a pris effet le 20 février 2017 qui précise qu'à compter de cette date l'intéressé sera affecté sur le lot n°5 du marché qu'elle détenait alors et qui correspondrait aux bâtiments de la ville et du département de Paris situés dans le 12ème arrondissement, le descriptif de ce lot n°5, qu'elle produit, comporte également des bâtiments qui sont situés dans le
13ème arrondissement. Il ressort en outre du listing des sites attribués à M. D..., et que ce dernier a signé le 20 octobre 2017, qu'il n'avait à compter de cette date dans son champ de compétence géographique que 43 bâtiments situés dans les 11ème et 12ème arrondissements de Paris, et que la société Vega a confié les fonctions d'inspecteur dans le 13ème arrondissement d'abord à Mme F... à compter du 13 février 2017, comme cela ressort du contrat de travail de l'intéressée, puis à compter du 14 décembre 2017 à M. A.... La société Maintenance industrie soutient ainsi que le périmètre des fonctions de M. D... à la date du transfert de son contrat, tel qu'allégué par la société Vega, n'est pas démontré, et que si ce dernier a obtenu une augmentation de salaire de 27,77 % à compter du 13 décembre 2017, quelques mois seulement avant la décision de transfert, lui permettant de percevoir ainsi 2 500 euros bruts, ce salaire apparaît trop élevé par rapport au nombre de sites relevant effectivement de son champ de compétence relevant des sites situés dans les 11ème et 12ème arrondissements de Paris.
20. De plus, la société Maintenance industrie démontre suffisamment, par les pièces qu'elle produit, qu'elle n'a pas repris l'ensemble des bâtiments situés dans les 11ème et
12ème arrondissements de Paris mais seulement les sites sociaux et d'accueil, les sites administratifs et les sites techniques alors que les sites culturels ont, quant à eux, été attribués à la société Nickel, la Ville de Paris ayant opté pour un système d'allotissement par typologie de locaux à nettoyer. Dès lors, elle est fondée à soutenir qu'elle n'a pas repris l'ensemble des chantiers qui étaient auparavant supervisés par M. D... pour le compte de la société Vega.
21. Il résulte de ce qui précède que la société Maintenance industrie est fondée à soutenir que la condition posée par l'article 7 de la convention collective des entreprises de propreté, selon laquelle le nouveau prestataire doit s'engager à garantir l'emploi de 100 % d'un salarié relevant de la classification nationale des emplois (MP1 et MP2) lorsqu'il était affecté " exclusivement sur le marché concerné " n'était pas satisfaite, de sorte que l'inspectrice du travail n'était pas fondée à lui transférer totalement le contrat de travail de M. D....
22. En second lieu, la société Maintenance industrie fait valoir que, dans un souci de conciliation à l'égard de M. D..., et malgré la circonstance que le périmètre des fonctions qu'il exerçait pour la société Vega au moment du transfert partiel du marché de prestations de nettoyage à son bénéfice ne satisfait pas aux conditions fixées par l'article 7 de la convention collective des entreprises de propreté, elle est prête à admettre un transfert du contrat de travail de M. D... à concurrence de 48 % de sa quotité de travail. Ni la société Vega ni la ministre du travail n'opposent de contestation sérieuse à cette demande.
23. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de désigner un expert, que la décision du 4 mai 2018 de l'inspectrice du travail et les décisions implicites de rejet de ses recours gracieux et hiérarchique doivent être annulées en tant qu'elles autorisent le transfert du contrat de travail de M. D... de la société Vega vers la société Maintenance industrie à hauteur de plus de 48 % de sa quotité de travail.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
24. Compte tenu du motif d'annulation des décisions attaquées, les conclusions de la société Maintenance industrie tendant à ce que la Cour autorise le transfert du contrat de travail de ce salarié à hauteur d'une quotité de travail de 48 % sont dépourvues d'objet, et ne peuvent dès lors qu'être rejetées.
Sur les frais liés à l'instance :
25. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que le versement d'une somme à la société Vega conseil sécurité soit mise à la charge de la société Maintenance industrie, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, au titre des frais liés à l'instance.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1906321/3-1 du 28 janvier 2020 du tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : La décision du 4 mai 2018 de l'inspectrice du travail ayant autorisé le transfert du contrat de travail de M. D... de la société Vega vers la société Maintenance industrie, ensemble les décisions implicites de rejet de ses recours gracieux et hiérarchique, sont annulées en tant qu'elles autorisent le transfert de plus de 48 % du contrat de travail de M. D... vers la société Maintenance industrie.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de première instance et de la requête d'appel de la société Maintenance industrie est rejeté.
Article 4 : Les conclusions de la société Vega conseil sécurité, présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à La société Maintenance industrie, à la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion, à la société Vega conseil sécurité et à M. G... D....
Copie en sera adressée à la directrice régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Ile-de-France.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 avril 2021.
La présidente de la 8ème chambre,
H. VINOT
La République mande et ordonne à la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20PA01137