Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société par actions simplifiée (SAS) Essor Construction a demandé au Tribunal administratif de Paris, par deux demandes distinctes, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2011 et 2012 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période comprise entre le 1er janvier 2011 et le 30 novembre 2013, ainsi que des pénalités correspondantes.
Par des ordonnances n° 1717815/1-2 et n° 1717816/1-2 du 9 mars 2018, le vice-président de la première section du Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes.
Par un arrêt n° 18PA01598 du 13 juin 2019, la Cour administrative d'appel de Paris a annulé l'ordonnance 1717815/1-2 du 9 mars 2018 du vice-président de la 1ère section du Tribunal administratif de Paris et a renvoyé la société devant le Tribunal administratif de Paris pour qu'il soit statué sur sa demande.
Par un arrêt n° 18PA01599 du 13 juin 2019, la Cour administrative d'appel de Paris a annulé l'ordonnance 1717816/1-2 du 9 mars 2018 du vice-président de la 1ère section du Tribunal administratif de Paris et a renvoyé la société devant le Tribunal administratif de Paris pour qu'il soit statué sur sa demande.
Par un jugement nos 1717815/1-2, 1717816/1-2 du 12 novembre 2019, le Tribunal administratif de Paris, après les avoir jointes, a rejeté les demandes de la société Essor Construction.
Procédure devant la Cour :
I - Par une requête et un mémoire, enregistrés le 8 janvier 2020 et le 17 juin 2020 sous le n° 20PA00057, Me B..., mandataire liquidateur de la société Essor Construction, représenté par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement nos 1717815/1-2, 1717816/1-2 du 12 novembre 2019 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est irrégulier dès lors qu'il ne répond pas suffisamment aux moyens soulevés concernant le défaut de motivation de la proposition de rectification, le fait générateur de la taxe sur la valeur ajoutée, la prise en compte partielle des opérations comptables, l'impossibilité de reconstituer les recettes en l'absence de rejet de la comptabilité et l'absence de justification de la pénalité pour manquement délibéré ;
- l'administration fiscale, qui n'a pas suffisamment motivé sa proposition de rectification sur ce point, ne pouvait reconstituer les recettes de la société dès lors qu'elle n'avait pas rejeté sa comptabilité ;
- l'administration n'a pas tenu compte des chèques sans provision, des acomptes sur devis annulés, des réductions de factures, des remises, des remboursements pour garantie ;
- la méthode de l'administration a conduit à des erreurs quant à l'exigibilité de la taxe sur la valeur ajoutée ;
- la conversion de l'écart entre les encaissements effectués et les déclarations en écart hors taxe est incertaine ;
- l'analyse des données chiffrées contenues dans la proposition de rectification montre des écarts négatifs ou nuls de taxe sur la valeur ajoutée brute collectée ;
- l'administration fiscale a méconnu l'instruction référencée BOI-CF-IOR-10-20, en ses paragraphes 40 et 50 ;
- s'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée déductible, le service n'a pas pris en compte la régularisation intervenue lors de la souscription de déclarations de taxe sur la valeur ajoutée ultérieures ;
- ce chef de rehaussement résulte de l'application trop stricte des règles de liquidation de la taxe sur la valeur ajoutée qui sont très complexes ;
- dès lors que le rappel de taxe sur la valeur ajoutée n'est pas fondé, le profit sur le Trésor est dépourvu de base légale ;
- le passif imputé au titre de l'exercice clos en 2011 est justifié dès lors qu'il pouvait comporter des impôts exigibles au cours de l'exercice en cause ;
- la majoration pour manquement délibéré n'est pas justifiée ;
- l'administration a méconnu la présomption d'innocence ainsi que les stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 10 mars 2020 et le 11 août 2020, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.
II - Par une requête et un mémoire, enregistrés le 8 janvier 2020 et le 17 juin 2020 sous le n° 20PA00058, la société Essor Construction, représentée par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement nos 1717815/1-2, 1717816/1-2 du 12 novembre 2019 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est irrégulier dès lors qu'il ne répond pas suffisamment aux moyens soulevés concernant le défaut de motivation de la proposition de rectification, le fait générateur de la taxe sur la valeur ajoutée, la prise en compte partielle des opérations comptables, l'impossibilité de reconstituer les recettes en l'absence de rejet de la comptabilité et l'absence de justification de la pénalité pour manquement délibéré ;
- l'administration fiscale, qui n'a pas suffisamment motivé sa proposition de rectification sur ce point, ne pouvait reconstituer les recettes de la société dès lors qu'elle n'avait pas rejeté sa comptabilité ;
- l'administration n'a pas tenu compte des chèques sans provision, des acomptes sur devis annulés, des réductions de factures, des remises, des remboursements pour garantie ;
- la doctrine référencée BOI-CF-IOR-10-20, en ses paragraphes n° 40 et 50 est opposable en l'espèce ;
- la méthode de l'administration a conduit à des erreurs quant à l'exigibilité de la taxe sur la valeur ajoutée ;
- la conversion de l'écart entre les encaissements effectués et les déclarations en écart hors taxe est incertaine ;
- l'analyse des données chiffrées contenues dans la proposition de rectification montre des écarts négatifs ou nuls de taxe sur la valeur ajoutée brute collectée ;
- l'administration fiscale a méconnu l'instruction référencée BOI-CF-IOR-10-20, en ses paragraphes 40 et 50 ;
- s'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée déductible, le service n'a pas pris en compte la régularisation intervenue lors de la souscription de déclarations de taxe sur la valeur ajoutée ultérieures ;
- ce chef de rehaussement résulte de l'application trop stricte des règles de liquidation de la taxe sur la valeur ajoutée qui sont très complexes ;
- dès lors que le rappel de taxe sur la valeur ajoutée n'est pas fondé, le profit sur le Trésor est dépourvu de base légale ;
- le passif imputé au titre de l'exercice clos en 2011 est justifié dès lors qu'il pouvait comporter des impôts exigibles au cours de l'exercice en cause ;
- la majoration pour manquement délibéré n'est pas justifiée ;
- l'administration a méconnu la présomption d'innocence ainsi que les stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 10 mars 2020 et le 11 août 2020, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales,
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. C...,
- et les conclusions de Mme Stoltz-Valette, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. La société Essor Construction, qui exerce une activité d'étude et d'exécution de travaux dans le bâtiment et dans le génie civil, d'achat, d'exploitation, de location et de vente de biens immobiliers, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration fiscale a mis à sa charge des rappels de de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période comprise entre le 1er janvier 2011 et le 30 novembre 2013 et des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos le 31 décembre 2011 et le 31 décembre 2012. Par une décision du 30 août 2017, l'administration fiscale a procédé à un dégrèvement des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à la charge de la société au titre de la période comprise entre le 1er janvier 2011 et le 30 novembre 2013 à concurrence de 278 662 euros. Par deux ordonnances du 9 mars 2018, le vice-président de la première section du Tribunal administratif de Paris a rejeté les demandes de la société Essor Construction tendant à la décharge des impositions supplémentaires restant à sa charge. Toutefois, par des arrêts du 13 juin 2019, la Cour a annulé ces deux ordonnances du 9 mars 2018 et a renvoyé la société devant le Tribunal administratif de Paris pour qu'il soit statué sur ses demandes. Par un jugement du 12 novembre 2019, le Tribunal administratif de Paris, après les avoir jointes, a rejeté les demandes de la société Essor Construction tendant à la décharge des impositions supplémentaires restant à sa charge. La société Essor Construction et Me B..., mandataire liquidateur de cette société, relèvent appel de ce jugement.
Sur la jonction :
2. Les requêtes enregistrées sous les n° 20PA00057 et 20PA00058 concernant le même jugement du Tribunal administratif de Paris, il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt.
Sur la régularité du jugement :
3. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". A cet égard, si le juge est tenu de répondre aux moyens des parties, il n'est pas dans l'obligation de répondre à l'ensemble des arguments soulevés à l'appui de ces moyens. En l'espèce, les premiers juges doivent être regardés comme ayant suffisamment répondu, au point 4 de leur jugement, au moyen tiré de ce que la proposition de rectification serait insuffisamment motivée. Par ailleurs, ils doivent être regardés comme ayant suffisamment répondu, au point 9 de leur jugement, au moyen par lequel la société requérante critiquait la méthode de calcul de la taxe sur la valeur ajoutée collectée due par elle, en soutenant que certains encaissements se rapportaient à des ventes et non à des prestations de services, que les taux de taxe sur la valeur ajoutée retenus n'étaient pas justifiés, que le service avait omis de prendre en compte certaines écritures comptables et que le rejet de la comptabilité faisait obstacle à une reconstitution de recettes. Enfin, les premiers juges ont suffisamment répondu, au point 15 de leur jugement, au moyen tiré de ce que la pénalité pour manquement délibéré n'était pas justifiée en l'absence d'élément intentionnel de la part de la société. La requérante n'est dès lors pas fondée à soutenir qu'il serait insuffisamment motivé et, par suite, irrégulier.
Sur le bien-fondé des impositions en litige :
En ce qui concerne les rappels de taxe sur la valeur ajoutée :
S'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée collectée :
Quant à l'application de la loi fiscale :
4. Aux termes de l'article 256 du code général des impôts : " I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel ". Aux termes de l'article 269 du même code : " 1 Le fait générateur de la taxe se produit : / a) Au moment où la livraison, l'acquisition intracommunautaire du bien ou la prestation de services est effectué ; / [...] 2 La taxe est exigible : a) pour les livraisons et les achats visés au a) du 1 [...], lors de la réalisation du fait générateur ; / [...] c) Pour les prestations de services [...], lors de l'encaissement des acomptes, du prix, de la rémunération ou, sur option du redevable, d'après les débits. [...] ".
5. En premier lieu, en l'absence de remise en cause du caractère régulier, sincère et probant de la comptabilité, l'administration fiscale ne peut, pour apporter la preuve qui lui incombe de ce que la société n'aurait pas déclaré la taxe sur la valeur ajoutée grevant l'ensemble des recettes encaissées, recourir à une méthode d'évaluation moins précise que les écritures comptabilisées. Il lui est en revanche loisible de procéder à des tests de cohérence des déclarations de taxe sur la valeur ajoutée en les rapprochant d'autres éléments tirés de la comptabilité de la société, tels les soldes des comptes de produits et ceux des comptes des clients, corrigés de leurs variations entre l'ouverture et la clôture de la période considérée.
6. Si les requérants soutiennent que, en l'absence de rejet de sa comptabilité, le service ne pouvait pas procéder à la reconstitution des recettes de la société, il résulte de l'instruction que l'administration fiscale s'est bornée à comparer les données figurant au crédit du compte " 411-clients ", correspondant à des encaissements bancaires effectivement réalisés, avec les factures réellement encaissées et les déclarations de taxe sur la valeur ajoutée souscrites par la société. Ainsi, l'administration fiscale, qui a suffisamment motivé la proposition de rectification quant à ce chef de redressement, s'est fondée uniquement sur un pointage des encaissements effectifs de la société Essor Construction et non sur une reconstitution théorique à partir des données de sa comptabilité. Dès lors, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la méthode de détermination du chiffre d'affaires devant être soumis à la taxe sur la valeur ajoutée serait irrégulière. Le moyen doit donc être écarté.
7. En deuxième lieu, si les requérants soutiennent que la société Essor Construction exerce une double activité de prestation de services et de livraison de biens, et que le service n'aurait pas tenu compte de cette dernière pour déterminer l'exigibilité de la taxe sur la valeur ajoutée, en méconnaissance de l'article 269 du code général des impôts, ils n'identifient aucune opération de livraison de biens qui aurait dû être retirée du solde du compte " 411-clients ". Par suite, le moyen doit être écarté.
8. En troisième lieu, si les requérants soutiennent que différents taux de taxe sur la valeur ajoutée étaient applicables selon le type de prestation effectuée, en l'occurrence le taux normal de 19,6 % et les taux réduits de 7 % et de 5,5 %, et que le calcul de la taxe sur la valeur ajoutée sur la base des montants toutes taxes comprises (TTC) effectivement encaissés serait " incertain ", il résulte de l'instruction que le service a affecté aux différentes prestations en cause un taux spécifique de taxe sur la valeur ajoutée en s'appuyant sur les indications données par la société elle-même. Les requérants n'apportant aucune précision permettant de démontrer que des erreurs auraient été commises par le service quant aux taux applicables, le moyen doit donc être écarté.
9. En quatrième lieu, si les requérants font valoir que des droits de taxe sur la valeur ajoutée ont été, au titre de certains mois, reversés par la société Essor Construction à tort, les montants dont ils se prévalent correspondent exactement aux montants identifiés par l'administration elle-même, qui ont fait l'objet d'un dégrèvement par une décision du 30 août 2017. Par suite, le moyen doit être écarté.
10. Enfin, si les requérants soutiennent que le service aurait dû tenir compte d'autres écritures comptables susceptibles de minorer la taxe sur la valeur ajoutée collectée, ils ne précisent pas quelle écriture de décaissement n'aurait pas été prise en compte par le service, alors qu'il résulte de l'instruction qu'il a tenu compte des opérations annulées telles que notamment les chèques sans provision. Par suite, le moyen doit être écarté.
Quant à l'interprétation de la loi fiscale :
11. Les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'administration fiscale aurait méconnu l'instruction référencée BOI-CF-IOR-10-20, en ses paragraphes 40 et 50, dès lors que cette instruction ne comporte aucune interprétation différente de celle dont il a été fait application.
S'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée déductible :
12. Aux termes de l'article 271 du code général des impôts : " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. / 2. Le droit à déduction prend naissance lorsque la taxe déductible devient exigible chez le redevable. / 3. La déduction de la taxe ayant grevé les biens et les services est opérée par imputation sur la taxe due par le redevable au titre du mois pendant lequel le droit à déduction a pris naissance. / II. 1. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de leurs opérations imposables, et à la condition que ces opérations ouvrent droit à déduction, la taxe dont les redevables peuvent opérer la déduction est, selon le cas : / a) Celle qui figure sur les factures établies conformément aux dispositions de l'article 289 et si la taxe pouvait légalement figurer sur lesdites factures [...] ".
13. Le service vérificateur a relevé que le montant des factures des prestataires de services non encore réglées au 30 novembre 2013 s'élevait à la somme non contestée de 1 103 770,51 euros et qu'ainsi la taxe sur la valeur ajoutée correspondante, d'un montant de 180 885,47 euros, n'était pas déductible. Les circonstances, dont se prévalent les requérants, que la comptabilité de la société Essor Construction est tenue par un professionnel et que la loi fiscale est particulièrement complexe sur ce point sont sans incidence sur le bien-fondé du rehaussement. La circonstance qu'un dégrèvement partiel des rappels de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 278 662 euros au titre de la période comprise entre le 1er janvier 2013 et le 30 novembre 2013 a été accordé à la société par une décision du 30 août 2017 est par ailleurs sans incidence sur le bien-fondé des impositions restant en litige. Enfin, si les requérants font valoir que la société a procédé à une régularisation lors de la souscription de déclarations de taxe sur la valeur ajoutée ultérieures, ils n'apportent en tout état de cause aucun élément de preuve au soutien de leurs allégations. C'est donc à bon droit que l'administration a refusé la déduction de ce montant.
En ce qui concerne les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés :
S'agissant du passif non justifié :
14. Aux termes de l'article 38 du code général des impôts, applicable à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " [...] 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt, diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs de l'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés [...] ". Il résulte de ces dispositions qu'il appartient au contribuable, quelle que soit la procédure d'imposition, de justifier tant du montant des créances de tiers, amortissements, provisions et charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité.
15. Il résulte de l'instruction que la société Essor Construction a, sur ses déclarations de résultats de l'exercice clos le 31 décembre 2011, inscrit une dette de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 1 426 694 euros. Toutefois, l'administration fiscale a relevé que la dette de taxe sur la valeur ajoutée effectivement à la charge de la société s'élevait à 195 067 euros, et que par suite la somme de 1 231 627 euros constituait un passif injustifié. Si les requérants soutiennent que cette somme correspondait à des droits de taxe sur la valeur ajoutée issus d'exercices précédents, ils n'apportent aucun élément au soutien de leurs allégations, alors qu'il leur appartient de justifier de l'inscription d'une dette au passif du bilan de la société, et que l'administration fiscale fait valoir que cette dette était éteinte en raison de la prescription du droit de reprise de l'administration. Par suite, le moyen doit être écarté.
S'agissant du profit sur le Trésor :
16. Dès lors que les rappels de taxe sur la valeur ajoutée ont été établis à bon droit, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le service a pris en compte un profit sur le Trésor correspondant à ces rappels de taxe sur la valeur ajoutée.
Sur les pénalités :
17. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré [...] ".
18. En premier lieu, il résulte de l'instruction, et notamment de la proposition de rectification du 5 mai 2014, que, pour appliquer la majoration prévue par les dispositions précitées aux rappels de taxe sur la valeur ajoutée collectée et non déclarée au titre de la période du 1er janvier 2011 au 31 novembre 2013 ainsi qu'aux cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos le 31 décembre 2011 et le 31 décembre 2012, l'administration fiscale s'est fondée sur l'importance des montants concernés ainsi que sur la circonstance que la société Essor Construction avait déjà fait l'objet d'une précédente vérification de comptabilité, à l'issue de laquelle le service, par une proposition de rectification du 30 juin 2008, l'avait assujettie à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée collectée. Si les requérants soutiennent que les rappels qui avaient alors été mis à sa charge avaient fait l'objet, pour l'essentiel, d'un dégrèvement, il n'est pas contesté que les règles applicables en matière de taxe sur la valeur ajoutée collectée avaient été rappelées à la société dans le cadre de la proposition de rectification, de sorte que celle-ci ne pouvait les ignorer. Si les requérants font valoir par ailleurs que le dirigeant de la société ne possédait aucune compétence en matière fiscale, cette circonstance est sans incidence sur le bien-fondé de la pénalité. Dans ces conditions, l'administration fiscale doit être regardée comme apportant la preuve du manquement délibéré de la société Essor Construction et du bien-fondé de l'application de la majoration prévue par les dispositions du a de l'article 1729 du code général des impôts.
19. En second lieu, l'administration fiscale ayant suffisamment apporté la preuve qui lui incombe d'un manquement délibéré de la part de la société Essor Construction, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le principe de la présomption d'innocence garanti par l'article 6§2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales aurait été méconnu.
20. Il résulte de tout ce qui précède que la société Essor Construction et Me B..., mandataire liquidateur de cette société, ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leurs demandes. Par voie de conséquence, leurs conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : Les requêtes de la société Essor Construction et de Me B... sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Essor Construction, à Me B..., mandataire liquidateur de la société Essor Construction et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Ile-de-France (division juridique).
Délibéré après l'audience du 22 juin 2021, à laquelle siégeaient :
- Mme Hamon, présidente,
- M. Segretain, premier conseiller,
- M. C..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 juillet 2021.
Le rapporteur,
K. C...
La présidente,
P. HAMON Le greffier,
C. MONGIS
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Nos 20PA00057, 20PA00058 2