Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Le Comité social et économique de la société Aerobag, l'union locale CGT de Roissy et
M. G... H... ont demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler la décision du 21 octobre 2020 par laquelle le Directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de l'unité départementale de Seine-et-Marne a homologué le document unilatéral relatif au plan de sauvegarde de l'emploi de la société Aerobag.
Par un jugement n° 2010419 du 12 mars 2021, le tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 10 mai et le 11 juin 2021 sous le n° 21PA02533, le Comité social et économique de la société Aerobag, l'union locale CGT de Roissy et M. G... H..., représentés par Me M..., demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2010419 du 12 mars 2021 du tribunal administratif de Melun ;
2°) d'annuler la décision du 21 octobre 2020 par laquelle le Directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de l'unité départementale (DIRECCTE) de Seine-et-Marne a homologué le document unilatéral relatif au plan de sauvegarde de l'emploi de la société Aerobag ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le versement de la somme de 5 000 euros au Comité social et économique de la société Aerobag, de la somme de 5 000 euros à l'union locale de la CGT de Roissy et de la somme de 1 000 euros à M. H....
Ils soutiennent que :
- le juge administratif est compétent pour connaître du litige ;
- la procédure d'information et de consultation du Comité économique et social a été irrégulière au regard des articles L. 1233-30 et L. 1233-31 du code du travail, en ce que les représentants du personnel n'ont pas reçu l'information utile sur les moyens dont dispose le groupe auquel appartient la société, ne leur permettant pas de rendre un avis en toute connaissance de cause; la motivation du jugement est erronée en fait et en droit, dès lors qu'elle résulte d'une confusion entre les notions de groupe de moyens et groupe de reclassement ;
- la DIRECCTE n'a pas procédé au contrôle des moyens du groupe, en violation de l'article L. 1233-57-3 du code du travail ; la motivation du jugement est erronée en ce que le tribunal a estimé que les informations qui ont été remises par l'employeur uniquement à l'administration, le
5 octobre 2020, étaient suffisantes pour permettre à la DIRECCTE d'exercer son contrôle sur les moyens, notamment financiers, dont dispose le groupe SNCF ;
- les moyens prévus par le plan de sauvegarde de l'emploi sont insuffisants au regard des moyens, en particulier financiers, dont dispose le groupe SNCF ;
- l'effectif de la société Aerobag est de 50,1 salariés en équivalent temps plein, soit plus que cinquante salariés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 31 mai 2021, la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion conclut au rejet de la requête.
Elle fait valoir que les moyens soulevés par la requête ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense enregistré le 31 mai 2021, la société Aerobag, représentée par Me I..., conclut :
1°) à titre principal, à l'incompétence du juge administratif pour connaître du litige, à ce que la décision d'homologation du Directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de l'unité départementale (DIRECCTE) de Seine-et-Marne soit déclarée non avenue et au rejet des conclusions de la requête tendant à l'annulation de la décision d'homologation prise le 21 octobre 2020 par le DIRECCTE de Seine-et-Marne.
2°) à titre subsidiaire, au rejet au fond de la requête.
Elle fait valoir à titre principal que la juridiction administrative est incompétente pour connaître du litige, et à titre subsidiaire que les moyens soulevés par la requête ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 2 juin 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 17 juin 2021 à 12 heures.
Par un courrier du 3 juin 2021, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la décision à intervenir était susceptible d'être fondée sur le moyen, soulevé d'office, tiré de ce que ni les dispositions de l'article L. 1233-57-3 du code du travail, ni aucune autre disposition législative, ne donne compétence à l'autorité administrative pour homologuer un document portant plan de sauvegarde de l'emploi élaboré par une entreprise dont les effectifs sont de moins de cinquante salariés.
Des pièces, enregistrées le 18 juin 2021, après la clôture de l'instruction, ont été produites pour la société Aerobag.
Par un mémoire en réponse au courrier du 3 juin 2021, enregistré le 23 juin 2021, la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion demande à la Cour d'écarter le moyen d'ordre public mentionné dans ce courrier.
Par un mémoire en réponse au courrier du 3 juin 2021, enregistré le 23 juin 2021, la société Aerobag, représentée par Me I..., fait valoir, en particulier, que le DIRECCTE de Seine-et-Marne aurait dû se déclarer incompétente pour statuer sur le plan de sauvegarde de l'emploi.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du travail ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D...,
- les conclusions de Mme Bernard, rapporteur public,
- les observations de Me M..., représentant le Comité social et économique de la société Aerobag et autres,
- et les observations de Me E..., substituant Me I..., représentant la société Aerobag.
Considérant ce qui suit :
1. La société Aerobag, dont la totalité du capital est détenue par la société Keolis SA, exerce une activité de manutention de bagages dans les cars assurant la liaison entre Paris et les aéroports de Paris, en qualité de sous-traitant de son unique client, la société Aerolis, qui est une société soeur de la société Keolis SA. Par courrier du 28 mai 2020, la société Aerolis a informé la société Aerobag qu'en raison de la crise liée à la Covid 19 elle ne reconduirait pas le contrat de prestations de services dont le terme arrivait à échéance le 3 septembre 2020. Le 2 juin 2020, la société Aerobag a informé le comité social et économique du projet de cessation de son activité en raison de la résiliation du contrat par Aerolis. Le 12 juin 2020, lors d'une réunion extraordinaire, le comité social et économique a été informé de la suppression de 48 postes et a chargé le cabinet Syncéa d'une mission d'expertise. Le 17 juin 2020, la société Aerobag a présenté au Directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de l'unité départementale (DIRECCTE) de Seine-et-Marne un projet de plan de sauvegarde de l'emploi en précisant qu'elle effectuait ainsi une démarche volontaire non exigée par les dispositions législatives et réglementaires applicables. L'inspecteur du travail a cependant estimé qu'il convenait de réévaluer le nombre de postes de la société à 50,1 emplois à temps plein, et a indiqué à la société que, dans ces conditions, le plan de sauvegarde de l'emploi devait nécessairement faire l'objet d'une décision prise par la DIRECCTE. La société Aerobag a ainsi présenté de nouveau le projet de plan de sauvegarde de l'emploi au comité social et économique, réuni à cette fin, à nouveau, successivement le 30 juillet 2020, le 10 septembre 2020, le 15 septembre 2020 et le 30 septembre 2020. A l'issue de la réunion du 30 septembre 2020 le comité social et économique a rendu un avis défavorable au plan de sauvegarde pour l'emploi. Le 21 octobre 2020, le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Seine-et-Marne, saisi par la société Aerobag, a homologué le document portant plan de sauvegarde de l'emploi de cette société. Le Comité social et économique de la société Aerobag et autres relèvent appel du jugement du 12 mars 2021 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cette décision.
Sur la régularité du jugement :
2. La société Aerobag soutient qu'à la date d'engagement de la procédure de licenciement son effectif était, en équivalent de travail à plein temps, non pas de 50,1 salariés ainsi que l'a estimé le tribunal mais de 48 salariés, et en déduit que la juridiction administrative n'était pas compétente pour connaître de la demande d'annulation de la décision du 21 octobre 2020 par laquelle le Direccte de Seine-et-Marne a homologué le document unilatéral relatif au plan de sauvegarde de l'emploi de la société Aerobag.
3. Cependant, d'une part, aux termes de l'article L. 1235-7-1 du code du travail : " L'accord collectif mentionné à l'article L. 1233-24-1, le document élaboré par l'employeur mentionné à l'article L. 1233-24-4, le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi, les décisions prises par l'administration au titre de l'article L. 1233-57-5 et la régularité de la procédure de licenciement collectif ne peuvent faire l'objet d'un litige distinct de celui relatif à la décision de validation ou d'homologation mentionnée à l'article L. 1233-57-4. / Ces litiges relèvent de la compétence, en premier ressort, du tribunal administratif, à l'exclusion de tout autre recours administratif ou contentieux. (...) ". Aux termes de l'article L. 1233-57-4 de ce code : " L'autorité administrative notifie à l'employeur la décision de validation dans un délai de quinze jours à compter de la réception de l'accord collectif mentionné à l'article L. 1233-24-1 et la décision d'homologation dans un délai de vingt et un jours à compter de la réception du document complet élaboré par l'employeur mentionné à l'article L. 1233-24-4. (...) ".
4. D'autre part, aux termes de l'article L. 1233-21 du code du travail : " Un accord d'entreprise, de groupe ou de branche peut fixer (...) les modalités d'information et de consultation du comité social et économique et, le cas échéant, le cadre de recours à une expertise par ce comité lorsque l'employeur envisage de prononcer le licenciement économique d'au moins dix salariés dans une même période de trente jours. ". Aux termes de l'article L. 1233-24-1 du même code : " Dans les entreprises de cinquante salariés et plus, un accord collectif peut déterminer le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi mentionné aux articles L. 1233-61 à L. 1233-63 ainsi que les modalités de consultation du comité social et économique et de mise en oeuvre des licenciements. Cet accord est signé par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives (...) ou par le conseil d'entreprise (...). L'administration est informée sans délai de l'ouverture d'une négociation en vue de l'accord précité ". Et aux termes de l'article L. 1233-24-4 de ce code : " A défaut d'accord mentionné à l'article L. 1233-24-1, un document élaboré par l'employeur après la dernière réunion du comité social et économique fixe le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi et précise les éléments prévus aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2, dans le cadre des dispositions légales et conventionnelles en vigueur ".
5. Il résulte de ces dispositions, ainsi que cela ressort notamment de la jurisprudence issue de la décision du Conseil d'Etat du 24 janvier 2014 n° 374163, que les décisions, qui n'ont pas un caractère réglementaire, par lesquelles l'autorité administrative valide ou homologue l'accord collectif ou le document de l'employeur, portant notamment sur le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi, prévu par les articles L. 1233-24-1 à L. 1233-24-4 du code du travail en cas de licenciement économique d'au moins dix salariés pendant une même période de trente jours dans une entreprise d'au moins cinquante salariés, sont relatives à la réglementation du travail et doivent dès lors être contestées devant le tribunal administratif compétent déterminé conformément à la règle édictée par l'article R. 312-10 du code de justice administrative.
6. Cette règle, relative notamment à la détermination du juge compétent pour connaître de la contestation d'une décision prise par l'autorité administrative sur une demande d'homologation d'un document portant plan de sauvegarde de l'emploi, trouve à s'appliquer également lorsque, le cas échéant, l'autorité administrative homologue un accord collectif ou un document élaboré par l'employeur d'une entreprise dont l'effectif est inférieur au nombre de cinquante, mentionné au point précédent, ou portant sur un licenciement économique concernant un nombre de salariés inférieur à celui de dix, également mentionné au point précédent.
7. Il suit de là que la société Aerobag n'est pas fondée à soutenir que le tribunal administratif de Melun aurait retenu à tort la compétence du juge administratif pour connaître du litige qui lui était soumis.
Sur la légalité de la décision du 21 octobre 2020 du DIRECCTE de Seine-et-Marne :
S'agissant des dispositions appliquées par le DIRECCTE de Seine-et-Marne :
8. Il ressort des pièces du dossier, notamment des textes visés par la décision du 21 octobre 2020 du Direccte de Seine-et-Marne ainsi que des motifs de cette décision, que celle-ci est fondée sur les dispositions du code du travail, en particulier celles de l'article L. 1233-57-3 de ce code selon lesquelles : " En l'absence d'accord collectif ou en cas d'accord ne portant pas sur l'ensemble des points mentionnés aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2, l'autorité administrative homologue le document élaboré par l'employeur mentionné à l'article L. 1233-24-4, après avoir vérifié la conformité de son contenu aux dispositions législatives et aux stipulations conventionnelles relatives aux éléments mentionnés aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2, la régularité de la procédure d'information et de consultation du comité social et économique, le respect, le cas échéant, des obligations prévues aux articles L. 1233-57-9 à L. 1233-57-16, L. 1233-57-19 et L. 1233-57-20 et le respect par le plan de sauvegarde de l'emploi des articles L. 1233-61 à L. 1233-63 en fonction des critères suivants : 1° Les moyens dont disposent l'entreprise, l'unité économique et sociale et le groupe ; 2° Les mesures d'accompagnement prévues au regard de l'importance du projet de licenciement ; 3° Les efforts de formation et d'adaptation tels que mentionnés aux articles L. 1233-4 et L. 6321 1. ".
9. Le document dont les dispositions de l'article L. 1233-57-3 du code du travail fixent les conditions de l'homologation est, selon les termes de cet article, celui élaboré par l'employeur mentionné à l'article L. 1233-24-4 du code du travail, aux termes duquel : " A défaut d'accord mentionné à l'article L. 1233-24-1, un document élaboré par l'employeur après la dernière réunion du comité social et économique fixe le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi et précise les éléments prévus aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2, dans le cadre des dispositions légales et conventionnelles en vigueur ". Aux termes de l'article L. 1233-24-1 du même code : " Dans les entreprises de cinquante salariés et plus, un accord collectif peut déterminer le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi mentionné aux articles L. 1233-61 à L. 1233-63 ainsi que les modalités de consultation du comité social et économique et de mise en oeuvre des licenciements. Cet accord est signé par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives (...) ou par le conseil d'entreprise (...). L'administration est informée sans délai de l'ouverture d'une négociation en vue de l'accord précité ". Et aux termes de l'article L. 1233-61 de ce code, auquel renvoie l'article L. 1233-24-1 : " Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, lorsque le projet de licenciement concerne au moins dix salariés dans une même période de trente jours, l'employeur établit et met en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre. (...) ".
S'agissant de l'effectif du personnel de la société Aerobag :
10. Pour l'application de l'article L. 1233-24-1 du code du travail, les effectifs de l'entreprise ou de l'établissement doivent être appréciés selon les modalités prévues à l'article
L. 1111-2 de ce code.
11. Aux termes de l'article L. 1111-2 du code du travail : " Pour la mise en oeuvre des dispositions du présent code, les effectifs de l'entreprise sont calculés conformément aux dispositions suivantes :1° Les salariés titulaires d'un contrat de travail à durée indéterminée à temps plein et les travailleurs à domicile sont pris intégralement en compte dans l'effectif de l'entreprise ; 2° (...) les salariés mis à la disposition de l'entreprise par une entreprise extérieure qui sont présents dans les locaux de l'entreprise utilisatrice et y travaillent depuis au moins un an (...) sont pris en compte dans l'effectif de l'entreprise à due proportion de leur temps de présence au cours des douze mois précédents. ".
12. Il ressort des pièces du dossier que, pour fixer à 50,1 équivalent temps plein l'effectif de la société Aerobag, l'inspecteur du travail a pris en compte l'effectif de 48 salariés figurant au
30 juin 2020 sur le registre du personnel de la société, auquel il a ajouté un effectif de 2,1 salariés correspondant à la quotité de travail effectuée par 3 salariés qui étaient, selon lui, mis à disposition de la société Aerobag, c'est-à-dire M. J..., Mme L..., et Mme A... C... (Mme B...), dont l'inspecteur a ainsi estimé qu'elle devait également être prise en compte en application des dispositions du 2° de l'article L. 1111-2 du code du travail.
13. Cependant, d'une part, il ressort des pièces du dossier que M. J... a conclu le
24 juillet 2017 avec la société Keolis SA un contrat à durée indéterminée par lequel, notamment, il s'est engagé formellement à ne pas divulguer à qui que ce soit, et ce en aucune façon, les documents ou renseignements dont il aurait connaissance dans le cadre de ses fonctions, portant sur l'entreprise, le groupe ou ses partenaires. Il en ressort également que M. J... a été détaché par la société Keolis SA auprès de sa filiale la société Aerobag à compter du 1er février 2019, puis qu'il a signé avec la société Keolis SA un avenant à son contrat de travail prenant effet au 1er février 2020, stipulant qu'il assurera à compter de cette date les fonctions de directeur d'Unité et sera détaché auprès de deux filiales de cette société, Keolis Roissy Aeroport et Aerobag, tout en étant salarié de la société Keolis SA et payé par elle. Cet avenant à son contrat de travail stipule notamment que " cette relation contractuelle s'inscrit dans le cadre du statut collectif et conventionnel de la société Keolis SA ", que " L'exercice de vos responsabilités vous oblige à réserver l'exclusivité de vos services à notre société, sauf accord préalable de la Direction Générale ", et que " Cette relation contractuelle demeure quelles que soient dans l'avenir vos affectations et missions successives dans le Groupe ".
14. Il ressort ainsi des pièces du dossier que M. J..., salarié de la société Keolis, qui était mis en détachement auprès de la société Aerobag par la société Keolis en qualité de directeur d'unités, et qui représentait à ce titre la direction de la société Aerobag lors des réunions de consultation et d'information du comité social et économique, dont celle du 30 septembre 2020 à l'issue de laquelle ce comité a rendu un avis défavorable au projet, exerçait ainsi ses fonctions au sein de la société Aerobag en qualité de cadre dirigeant de la société Keolis SA, société mère de la société Aerobag qui détenait la totalité de son capital, comme il a été dit au point 1. Il en ressort également, compte tenu notamment des termes de son contrat de travail l'obligeant expressément à réserver ses services à la société Keolis SA, que M. J... a été détaché par cette société auprès de sa filiale, la société Aerobag, pour servir les intérêts de la société Keolis SA. Dans ces conditions, et comme le fait valoir la société Aerobag, M. J..., qui n'était pas soumis à un quelconque lien de subordination à l'égard de cette société, ne devait pas être comptabilisé dans ses effectifs en tant que salarié mis à sa disposition au sens et pour l'application de l'article L. 1111-2 du code du travail, la circonstance que la charge de sa rémunération aurait été supportée par la société Aerobag étant sans incidence à cet égard, compte tenu des éléments analysés ci-dessus dont, en particulier, des stipulations de l'avenant à son contrat de travail signé avec la société Keolis SA. Il suit de là que M. J... ne doit pas être compté dans les effectifs de la société Aerobag devant être pris en compte pour l'application de L. 1233-61 du code du travail.
15. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que Mme L... a conclu le 22 février 2019 avec la société Keolis SA un contrat à durée indéterminée " dans le cadre du statut collectif et conventionnel de la société Keolis SA ", en qualité de " responsable ressources humaines de la branche Ile-de-France ". Son contrat de travail précise notamment, que " L'exercice de vos responsabilités vous oblige à réserver l'exclusivité de vos services à notre société, sauf accord préalable de la Direction Générale ", que " Vous vous engagez formellement à ne divulguer à qui que ce soit, et ce en aucune façon, les documents ou renseignements dont vous aurez connaissance dans le cadre de vos fonctions, portant sur l'entreprise, le Groupe ou ses partenaires ", et que " Cette relation contractuelle demeure quelles que soient dans l'avenir vos affectations et missions successives dans le Groupe ".
16. Il ressort ainsi des pièces du dossier que Mme L..., salariée de la société Keolis SA, qui était affectée aux fonctions de responsable des ressources humaines de la branche Ile de France de la société Keolis SA et représentait à ce titre la direction de la société Aerobag lors des réunions de consultation et d'information du comité social et économique, dont celle du
30 septembre 2020 à l'issue de laquelle ce comité a rendu un avis défavorable au projet, exerçait ses fonctions au sein de la société Aerobag en qualité de cadre dirigeant de la société Keolis SA, société mère de la société Aerobag qui détenait la totalité de son capital, comme il a été dit. Dans ces conditions, et comme le fait valoir la société Aerobag, alors qu'il ne ressort ni du contrat de travail de Mme L... signé avec la société Keolis SA, ni d'aucune autre pièce du dossier, qu'elle aurait été soumise à un quelconque lien de subordination à l'égard de la société Aerobag, elle ne devait pas être comptabilisé dans ses effectifs en tant que salariée mise à sa disposition au sens et pour l'application de l'article L. 1111-2 du code du travail, la circonstance que la charge de sa rémunération aurait été supportée par la société Aerobag étant en tout état de cause sans incidence à cet égard, compte tenu des éléments analysés ci-dessus dont, en particulier, les stipulations de son contrat de travail signé avec la société Keolis SA. Il suit de là que Mme L... ne doit pas être comptée dans les effectifs de de la société Aerobag devant être pris en compte pour l'application de L. 1233-61 du code du travail.
17. Il résulte de ce qui précède qu'à supposer même que Mme A... C... (Mme B...), engagée en qualité d'assistante de direction par la société Aeroligne, puis transférée au sein de la société Aerolis et qui réalisait des tâches relatives à la gestion administrative de la société Aerobag, devrait être comptée dans l'effectif de cette dernière société en application de l'article L. 1111-2 du code du travail, cet effectif ne serait pas supérieur à quarante-neuf salariés. Dès lors, à la date de l'engagement de la procédure de licenciement l'effectif de la société Aerobag était inférieur à cinquante salariés, ainsi d'ailleurs que cette dernière le fait valoir.
S'agissant de la compétence du DIRECCTE de Seine-et-Marne pour prendre la décision d'homologation en litige :
18. Ni l'article L. 1233-57-3 du code du travail, ni aucune autre disposition législative, ne donne compétence à l'autorité administrative pour homologuer un document portant plan de sauvegarde de l'emploi élaboré par une entreprise dont les effectifs sont de moins de cinquante salariés. Dans ces conditions, et compte tenu de l'effectif de la société Aerobag, inférieur à cinquante salariés ainsi qu'il vient d'être dit, le DIRECCTE de Seine-et-Marne n'était pas compétent pour prendre la décision d'homologation en litige.
19. Par suite, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les moyens de la requête, le jugement du 12 mars 2021 du tribunal administratif de Melun ainsi que la décision du 21 octobre 2020 du Direccte de Seine-et-Marne doivent être annulés.
Sur les frais liés à l'instance :
20. En application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme totale de 3 000 euros au comité social et économique de la société Aerobag, à l'union locale CGT de Roissy et à M. H....
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du 12 mars 2021 du tribunal administratif de Melun et la décision du 21 octobre 2020 du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Seine-et-Marne sont annulés.
Article 2 : L'Etat versera la somme totale de 3 000 euros au comité social et économique de la société Aerobag, à l'union locale CGT de Roissy et à M. H....
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au comité social et économique de la société Aerobag, à l'union locale CGT de Roissy, à M. G... H..., à la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion et à la société Aerobag.
Copie en sera adressée au Directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de l'unité départementale de Seine-et-Marne
Délibéré après l'audience publique du 24 juin 2021, à laquelle siégeaient :
- Mme D..., présidente de chambre,
- Mme F..., première conseillère,
- Mme K..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 juillet 2021.
L'assesseure la plus ancienne,
A. F...La présidente - rapporteur,
H. D...
La greffière,
C. POVSELa République mande et ordonne à la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21PA02533