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08/03/2022 | FRANCE | N°21PA06201

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 08 mars 2022, 21PA06201


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du

16 novembre 2020 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination, ainsi que l'arrêté du même jour par lequel il lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de vingt-quatre mois.

Par une ordonnance n°2124250/12-3 du 24 novembre 2021, le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.<

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Procédure devant la Cour :

I. Par une requête, enregistrée sous le N° 21PA06021 le 6 déc...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du

16 novembre 2020 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination, ainsi que l'arrêté du même jour par lequel il lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de vingt-quatre mois.

Par une ordonnance n°2124250/12-3 du 24 novembre 2021, le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

I. Par une requête, enregistrée sous le N° 21PA06021 le 6 décembre 2021, M. A..., représenté par Me de Sa - Pallix, demande à la Cour :

1°) d'annuler cette ordonnance du président du Tribunal administratif de Paris du

24 novembre 2021 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les arrêtés du préfet de police du

16 novembre 2020 mentionnés ci-dessus ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de procéder au réexamen de sa situation dans le délai d'un mois suivant la notification du présent arrêt, et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans le délai d'une semaine à compter de cet arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'ordonnance attaquée est intervenue en méconnaissance du principe du contradictoire et de l'article L. 5 du code de justice administrative ;

- sa demande devant le tribunal administratif ne pouvait être rejetée comme irrecevable ; l'arrêté attaqué lui a en effet été notifié hors la présence d'un interprète ;

- l'obligation de quitter le territoire français a été prise en violation de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et est à tout le moins entachée d'une erreur de droit au regard de cet article ;

- elle a été prise en méconnaissance de l'autorité de la chose jugée qui s'attache au jugement rendu le 23 mars 2020 du juge de l'application des peines du Tribunal judiciaire de Paris, et est pour ce motif entachée d'un défaut de base légale ;

- elle méconnait le champ d'application de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle a été prise en violation des articles 12 et 16 de la directive 2003/109/CE, et est à tout le moins entachée d'une erreur de droit au regard de ces articles ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;

- elle a été prise en violation des articles L. 531-1 et L. 531-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle viole les articles 7 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle repose sur une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle a été prise irrégulièrement au regard de l'article R. 531-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle a été prise irrégulièrement au regard des dispositions du décret n°87-249 du

8 avril 1987 ;

- elle a été prise en violation du droit d'être entendu, consacré par les articles 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et L. 531-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- la décision fixant le pays de destination est illégale en conséquence ;

- elle a été prise en violation des articles L. 513-2 et L. 513-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision lui refusant l'octroi d'un délai de départ est illégale en conséquence de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;

- elle a été prise en violation de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;

- elle repose sur une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- l'interdiction de retour sur le territoire français est illégale en conséquence ;

- elle méconnait l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle repose sur une erreur manifeste d'appréciation et méconnait les articles 7 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

-elle est insuffisamment motivée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 janvier 2022, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

Par un mémoire en réplique, enregistré le 11 février 2022, M. A... conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens.

II. Par une requête, enregistrée sous le N° 21PA06230 le 7 décembre 2021, M. A..., représenté par Me de Sa - Pallix, demande à la Cour :

1°) d'ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de l'ordonnance du président du Tribunal administratif de Paris du 24 novembre 2021 ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient qu'il fait valoir des moyens sérieux et que l'exécution de la décision de première instance attaquée risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 janvier 2022, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

Par un mémoire en réplique, enregistré le 11 février 2022, M. A... conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Niollet,

- et les observations de Me de Sa - Pallix pour M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant chinois né le 4 juin 1969 à Shangai, a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 16 novembre 2020 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination, ainsi que l'arrêté du même jour par lequel il lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de vingt-quatre mois. Il fait appel de l'ordonnance du 24 novembre 2021 par laquelle le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation comme manifestement irrecevable.

Sur la requête N°21PA06230 :

2. La Cour statuant par le présent arrêt sur les conclusions de la requête de M. A... tendant à l'annulation de l'ordonnance attaquée, les conclusions de sa requête tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de cette ordonnance sont privées d'objet. Il n'y a pas lieu, par suite, d'y statuer.

Sur la requête N° 21PA06201 :

3. Aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les présidents de tribunal administratif (...), les présidents de formation de jugement des tribunaux (...) peuvent, par ordonnance : (...) 4° Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n'est pas tenue d'inviter leur auteur à les régulariser (...) ".

4. Aux termes du II de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " L'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire sans délai peut, dans les quarante-huit heures suivant sa notification par voie administrative, demander au président du tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision relative au séjour, de la décision refusant un délai de départ volontaire, de la décision mentionnant le pays de destination et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français ou d'interdiction de circulation sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant (...) ". Aux termes du II de l'article R. 776-2 du code de justice administrative : " Conformément aux dispositions du II de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la notification par voie administrative d'une obligation de quitter sans délai le territoire français fait courir un délai de quarante-huit heures pour contester cette obligation et les décisions relatives au séjour, à la suppression du délai de départ volontaire, au pays de renvoi et à l'interdiction de retour ou à l'interdiction de circulation notifiées simultanément. Cette notification fait courir ce même délai pour demander la suspension de l'exécution de la mesure d'éloignement dans les conditions prévues à l'article L. 743-3 du même code. ". Aux termes du II de l'article R. 776-5 du même code : " II. - Les délais de quarante-huit heures mentionnés aux articles R. 776-2 et R. 776-4 et les délais de quinze jours mentionnés aux articles R. 776-2 et R. 776-3 ne sont susceptibles d'aucune prorogation. ".

5. Enfin, aux termes de l'article L. 512-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " Dès notification de l'obligation de quitter le territoire français, l'étranger auquel aucun délai de départ volontaire n'a été accordé est mis en mesure, dans les meilleurs délais, d'avertir un conseil, son consulat ou une personne de son choix. L'étranger est informé qu'il peut recevoir communication des principaux éléments des décisions qui lui sont notifiées en application de l'article L. 511-1. Ces éléments lui sont alors communiqués dans une langue qu'il comprend ou dont il est raisonnable de supposer qu'il la comprend. ". Aux termes de l'article L. 111-8 du même code : " Lorsqu'il est prévu aux livres II, V et VI et à l'article L. 742-3 du présent code qu'une décision ou qu'une information doit être communiquée à un étranger dans une langue qu'il comprend, cette information peut se faire soit au moyen de formulaires écrits, soit par l'intermédiaire d'un interprète. L'assistance de l'interprète est obligatoire si l'étranger ne parle pas le français et qu'il ne sait pas lire (...) ".

6. Il ressort des pièces du dossier et n'est d'ailleurs pas contesté que les arrêtés attaqués, portant mention des voies et délais de recours, ont été notifiés à M. A... par voie administrative le 2 mars 2021 à 12h15, et que sa demande n'a été enregistrée au greffe du tribunal administratif que le 15 novembre 2021. Pour contester la tardiveté de cette demande, M. A... ne saurait sérieusement soutenir qu'il ne comprend pas le français, alors qu'il ressort des pièces qu'il a lui-même produites, qu'il a obtenu un diplôme de fin d'études supérieures en français à Shangaï en 1991, qu'il s'est, au mois de janvier 1991, inscrit au département d'études françaises pour l'étranger de l'Université de Bordeaux III, qu'il a, toujours en janvier 1991, pris part à un stage intitulé " Connaissance des vins de France ", organisé à Bordeaux, qu'il a été admis en maitrise de lettres modernes à l'Université Paris VIII, Vincennes à Saint-Denis pour l'année universitaire 1992-1993, qu'il a, le 18 décembre 1995, obtenu le certificat de fin d'études supérieures appliquées aux affaires de l'école ESA, installée à Paris, et que, selon l'attestation de la directrice de l'école primaire de la rue Paul Baudry à Paris (8ème arrondissement) datée du 8 novembre 2021, il prend des rendez-vous avec l'enseignante de la classe de son fils pour assurer son suivi scolaire, et alors que, dans sa requête d'appel, il se prévaut notamment de " sa parfaite intégration " et de " l'ancienneté de ses attaches avec la France ". Il n'est donc pas fondé à faire état de l'absence d'un interprète lors de la notification des arrêtés attaqués pour soutenir que le délai de recours de quarante-huit heures, prévu par les dispositions citées ci-dessus, ne lui était pas opposable. Il ne saurait utilement faire valoir qu'il avait bénéficié du concours d'un interprète dans le cadre des poursuites pénales dont il a fait l'objet devant la 33ème Chambre correctionnelle du Tribunal judiciaire de Paris, et qui ont conduit à sa condamnation, le

30 janvier 2020, pour recel en bande organisée de bien provenant d'un vol, et lors de sa convocation devant la Commission départementale d'expulsion. Il ne saurait davantage se plaindre de la rapidité de la notification des deux arrêtés.

7. De plus, M. A..., qui a reçu notification des arrêtés en litige comme il vient d'être dit, n'est pas fondé à soutenir que l'ordonnance attaquée serait intervenue en méconnaissance du principe du contradictoire et de l'article L. 5 du code de justice administrative, ces arrêtés ne lui ayant pas été communiqués dans le cadre de la procédure devant le tribunal administratif.

8. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que, par l'ordonnance attaquée, le président du Tribunal administratif de Paris aurait irrégulièrement rejeté sa demande comme tardive et comme manifestement irrecevable. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin de sursis à exécution de la requête N° 21PA06230.

Article 2 : La requête N° 21PA06201 de M. A... est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 15 février 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Célérier, président de chambre,

- M. Niollet, président-assesseur,

- Mme Labetoulle, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 8 mars 2022.

Le rapporteur,

J-C. NIOLLETLe président,

T. CELERIER

La greffière,

K. PETIT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°S 21PA06201-21PA06230


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA06201
Date de la décision : 08/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CELERIER
Rapporteur ?: M. Jean-Christophe NIOLLET
Rapporteur public ?: Mme MACH
Avocat(s) : DE SA - PALLIX

Origine de la décision
Date de l'import : 15/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-03-08;21pa06201 ?
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