La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/03/2022 | FRANCE | N°21PA01423

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 21 mars 2022, 21PA01423


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... E... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 29 octobre 2020 par lequel le préfet de police a prononcé une obligation de quitter le territoire français à son encontre, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire et a fixé le pays de destination d'une mesure d'éloignement.

Par jugement n° 2017956/8 du 2 novembre 2020, le Tribunal administratif de Paris a annulé la décision refusant à M. E... un délai de départ volontaire et a rejeté le surplus d

e sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, un mémoire et des pièces, e...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... E... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 29 octobre 2020 par lequel le préfet de police a prononcé une obligation de quitter le territoire français à son encontre, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire et a fixé le pays de destination d'une mesure d'éloignement.

Par jugement n° 2017956/8 du 2 novembre 2020, le Tribunal administratif de Paris a annulé la décision refusant à M. E... un délai de départ volontaire et a rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, un mémoire et des pièces, enregistrés les 18 et 24 mars 2021 et 17 septembre 2021, M. E..., représenté par Me Meriau, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2017956/8 du 2 novembre 2020 du Tribunal administratif de Paris en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français et de la décision fixant le pays de destination prononcées à son encontre par l'arrêté du 29 octobre 2020 du préfet de police ;

2°) d'annuler l'arrêté du 29 octobre 2020 en tant que le préfet de police a prononcé une obligation de quitter le territoire français à son encontre et a fixé le pays de destination d'une mesure d'éloignement ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de lui délivrer pendant ce réexamen une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil Me Meriau d'une somme de 2 000 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle a été prise par une autorité incompétente ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen réel et sérieux de sa situation personnelle ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle.

S'agissant de la décision fixant le pays de destination :

- elle est illégale dès lors qu'elle est fondée sur la décision d'obligation de quitter le territoire français elle-même illégale ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen réel et sérieux de sa situation personnelle.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 2 juillet et 1er octobre 2021, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. E... ne sont pas fondés.

M. E... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris du 26 janvier 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n°2020-1717 du 28 décembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Collet a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. E..., ressortissant de la République démocratique du Congo né le 3 septembre 1986, est entré en France en juillet 2016 selon ses déclarations. Par un arrêté

du 29 octobre 2020, le préfet de police a prononcé à son encontre une obligation de quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire et a fixé le pays de destination d'une mesure d'éloignement. M. E... relève appel du jugement n° 2017956/8 du

2 novembre 2020 en tant que le Tribunal administratif de Paris a annulé uniquement la décision lui refusant un délai de départ volontaire et a rejeté le surplus de sa requête tendant à l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français prononcée à son encontre ainsi que la décision fixant le pays de destination d'une mesure d'éloignement.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête d'appel de M. E... :

2. Aux termes des stipulations de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent utilement être invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

3. Il ressort des pièces du dossier que M. E... est entré en France au cours de l'année 2016, établit être présent sur le territoire français depuis le 24 octobre 2016 et être le père d'Ana Kimbanda, née le 7 mars 2008 en République démocratique du Congo quand bien même il n'a reconnu son enfant que le 25 juin 2016. Par ailleurs, par jugement du tribunal judiciaire de Créteil du 30 janvier 2020, il s'est vu reconnaître l'exercice commun avec Mme B... C... titulaire d'une carte de résident, la mère de son enfant dont il est séparé, de l'autorité parentale sur sa fille dont le lieu de résidence a été fixé au domicile de sa mère ainsi qu'un droit de visite et d'hébergement un week-end sur deux et la moitié des vacances scolaires. En outre, il a été mis à sa charge une contribution mensuelle de 50 euros à l'entretien de son enfant. Il établit également être destinataire des messages du collège dans lequel sa fille est scolarisée et la mère d'Ana atteste de son implication dans son éducation et de sa participation à l'entretien de leur fille. Par suite, dans les circonstances particulières de l'espèce, l'arrêté attaqué du 29 octobre 2020 portant obligation de quitter le territoire français a méconnu l'intérêt supérieur de son enfant A... protégé par les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990.

4. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... est fondé à demander l'annulation du jugement n° 2017956/8 du 2 novembre 2020 du Tribunal administratif de Paris en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français et de la décision fixant le pays de destination prononcées à son encontre par l'arrêté du

29 octobre 2020 du préfet de police ainsi que de cet arrêté en tant que le préfet de police a prononcé à son encontre une obligation de quitter le territoire français et, par voie de conséquence, a fixé le pays de destination d'une mesure d'éloignement.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. A la suite de l'annulation d'une obligation de quitter le territoire français, il incombe au préfet, non seulement de munir l'intéressé d'une autorisation provisoire de séjour mais aussi, qu'il ait été ou non saisi d'une demande en ce sens, de se prononcer sur son droit à un titre de séjour. Il y a, par suite, lieu de prescrire au préfet de police de se prononcer sur la situation de M. E... dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et, dans cette attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour.

Sur les frais liés à l'instance :

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de condamner l'État à verser à Me Meriau, conseil de M. E... qui a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale, la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens sous réserve de sa renonciation au bénéfice de la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2017956/8 du 2 novembre 2020 du Tribunal administratif de Paris en tant qu'il a rejeté la demande de M. E... tendant à l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français et de la décision fixant le pays de destination prononcées à son encontre par l'arrêté du 29 octobre 2020 du préfet de police ainsi que l'arrêté du 29 octobre 2020 du préfet de police dans la même mesure sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de se prononcer sur la situation de M. E... dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et, dans cette attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour.

Article 3 : L'État versera à Me Meriau, conseil de M. E..., la somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve de sa renonciation au bénéfice de la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... E... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 7 mars 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Ho Si Fat, président de la formation de jugement,

- Mme Collet, première conseillère,

- Mme Larsonnier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 mars 2022.

La rapporteure,

A. COLLETLe président,

F. HO SI FAT

La greffière,

N. COUTY

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA01423


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA01423
Date de la décision : 21/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. HO SI FAT
Rapporteur ?: Mme Aude COLLET
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : MERIAU

Origine de la décision
Date de l'import : 29/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-03-21;21pa01423 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award