Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Par une requête enregistrée sous le n° 1909962, Mme B... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 9 juillet 2019 par lequel le préfet du
Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 1909962 du 23 décembre 2020, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, un mémoire et des pièces nouvelles enregistrés les 30 avril, 18 mai et 22 octobre 2021, Mme B..., représentée par Me Saudemont, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1909962 du 23 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du
Val-de-Marne du 9 juillet 2019, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant son pays de renvoi ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer un titre de séjour temporaire portant mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir ;
4°) à défaut, d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de réexaminer sa situation administrative en saisissant la commission du titre de séjour dans un délai de six mois et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour dès la notification de la décision à intervenir ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
En ce qui concerne la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour :
- elle méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de renouvellement de titre de séjour ;
- elle méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
La requête a été transmise au préfet du Val-de-Marne qui n'a pas produit d'observations.
Par une ordonnance du 11 octobre 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 26 octobre 2021 à 12 heures.
Des pièces ont été enregistrées le 11 mars 2022 pour Mme B..., soit postérieurement à la clôture de l'instruction.
Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 25 mars 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Boizot,
- et les observations de Me Saudemont pour Mme B....
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., ressortissante de la République démocratique du Congo (RDC) née le 16 août 1948, est entrée en France en 2011, selon ses déclarations. Elle a sollicité son admission au séjour pour raisons de santé. Par un arrêté du 9 juillet 2019, dont l'intéressée demande l'annulation, le préfet du Val-de-Marne a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé son pays de renvoi. Mme B... fait appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ". Aux termes de l'article L. 511-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ".
3. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui en fait la demande sur leur fondement, de vérifier, au vu de l'avis émis par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) qu'elles mentionnent, que cette décision ne peut avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans le pays d'origine de l'étranger. Si de telles possibilités existent mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine.
4. Mme B... soutient qu'elle ne peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié aux pathologies dont elle souffre, une arthrose associée à une hypertension artérielle. Si elle produit à l'appui de sa requête diverses ordonnances, dont au demeurant seules deux mentionnent sa pathologie cardiaque, ainsi que des extraits d'un rapport de synthèse sur l'évaluation des prestations des services de soins de santé en République démocratique du Congo 2017-2018 qui révèle les difficultés de prise en charge de l'hypertension artérielle dans cet Etat ainsi que divers articles de presse relatifs à la situation du système de santé en République démocratique du Congo, ces éléments, qui ne se prononcent pas, autrement que de manière générale et non circonstanciée, sur la possibilité pour elle de bénéficier effectivement d'un traitement médical adapté à son état de santé dans son pays d'origine, ne permettent pas de remettre en cause l'avis du 4 juin 2019 émis par le collège de médecins de l'OFII, selon lequel si l'état de santé de l'intéressée nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, elle peut bénéficier effectivement d'un traitement approprié en République démocratique du Congo. Par ailleurs, la requérante n'établit pas que certaines des spécialités pharmaceutiques qui figurent sur les ordonnances communiquées dans le cadre de la présente instance, ou les molécules équivalentes, ne seraient pas disponibles dans son pays d'origine. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-11 11°, alors en vigueur, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être écarté. Par voie de conséquence, le moyen tiré de la méconnaissance du 10° de l'article L. 511-4 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
5. En second lieu, si Mme B... fait valoir qu'elle vit en France depuis l'année 2011 avec sa fille, son gendre, et ses petits-enfants de nationalité française, et qu'un autre de ses fils réside également en France, elle a vécu plus de cinquante-deux ans au Congo, était déjà séparée de sa fille depuis plusieurs années et ne justifie d'aucune intégration particulière en France. Il ne ressort pas des pièces du dossier, en outre, que la présence de sa famille en France soit indispensable à son état de santé, ou qu'elle soit dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine. Dans ces conditions, le préfet ne peut être regardé, en ayant refusé de lui délivrer un titre de séjour et en lui ayant fait obligation de quitter le territoire français, comme ayant porté à son doit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée eu égard aux motifs de ce refus et aux buts poursuivis par la mesure d'éloignement et l'interdiction de retour. Dès lors, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation dont serait entaché l'arrêté contesté doivent être écartés.
6. En troisième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Par ailleurs, aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ". Mme B... fait valoir que ces stipulations et dispositions ont été méconnues dès lors qu'elle ne pourrait bénéficier d'une prise en charge médicale en République démocratique du Congo. Toutefois, il ne ressort d'aucune des pièces du dossier, telles que mentionnées au point 4 du présent arrêt, qu'elle encourrait, à raison du défaut de prise en charge de son état de santé en cas de retour dans son pays d'origine, des risques de traitements contraires aux stipulations et dispositions précitées. Le moyen soulevé ne peut dès lors qu'être écarté.
7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Par suite, sa requête d'appel doit être rejetée en toutes ses conclusions, y compris celles présentées sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Val-de-Marne.
Délibéré après l'audience du 14 mars 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Carrère, président de chambre,
- M. Soyez, président assesseur,
- Mme Boizot, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 28 mars 2022 .
La rapporteure,
S. BOIZOTLe président,
S. CARRERE
La greffière,
C. DABERT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21PA02319