Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... B... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 25 février 2021 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination pour son éloignement et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire d'une durée de deux ans.
Par un jugement n° 2104532 du 20 septembre 2021, le Tribunal administratif de Montreuil, après avoir constaté son placement en rétention administrative en cours d'instance et renvoyé devant la formation collégiale le jugement de ses conclusions dirigées contre le refus de séjour, a rejeté sa demande en tant qu'elle porte sur les décisions portant obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, fixation du pays de destination pour son éloignement et interdiction de retour sur le territoire d'une durée de deux ans.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 23 octobre 2021, M. B..., représenté par Me Hamzi, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2104532 du 20 septembre 2021 du Tribunal administratif de Montreuil ;
2°) d'annuler l'arrêté du 25 février 2021 du préfet de la Seine-Saint-Denis ;
3°) d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision lui refusant un titre de séjour est entachée d'insuffisance de motivation et de défaut d'examen sérieux de sa situation personnelle ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et celles de l'article L. 313-14 du même code ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les dispositions de l'article L. 511-4 du même code ;
- la décision fixant le pays de destination est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français est insuffisamment motivée.
La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis, qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Par un courrier du 5 avril 2022, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la Cour était susceptible de relever d'office le moyen d'ordre public tiré de ce que les conclusions de la demande dirigées contre la décision de refus de titre de séjour étaient irrecevables.
Par un mémoire, enregistré le 10 avril 2022, M. B... soutient que ses conclusions dirigées contre la décision de refus de séjour sont recevables.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A...,
- et les observations de Me Hamzi, avocate de M. B....
Une note en délibéré, enregistrée le 26 avril 2022, a été présentée pour M. B....
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant marocain, né le 15 janvier 1993, a sollicité son admission au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 25 février 2021, le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination et a pris à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans. M. B... fait appel du jugement du 20 septembre 2021 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Montreuil, après avoir constaté son placement en rétention administrative en cours d'instance et renvoyé devant la formation collégiale le jugement de ses conclusions dirigées contre le refus de séjour, a rejeté ses conclusions dirigées contre les décisions portant obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, fixant le pays de destination pour son éloignement et prononçant à son encontre une interdiction de retour sur le territoire d'une durée de deux ans.
Sur la recevabilité des conclusions de la requête :
2. Par un jugement distinct en date du 8 novembre 2021, qui n'est pas joint à la requête d'appel, le Tribunal administratif de Montreuil, en formation collégiale, a rejeté les conclusions de M. B... relatives à la décision, contenue dans l'arrêté du 25 février 2021, rejetant sa demande de titre de séjour. Les conclusions du requérant tendant à l'annulation de cette décision, sur lesquelles le jugement attaqué dans la présente affaire ne s'est pas prononcé, sont irrecevables devant le juge d'appel. Il n'y a donc lieu de statuer, par le présent arrêt, que sur les conclusions de M. B... tendant à l'annulation de l'article 2 du jugement du 20 septembre 2021 par lequel ont été rejetées ses conclusions tendant à l'annulation des décisions du préfet de la Seine-Saint-Denis du 25 février 2021 portant obligation de quitter le territoire français, fixant le pays de destination pour son éloignement et lui faisant interdiction de retourner sur le territoire français pour une durée de deux ans.
Sur la légalité des décisions en litige :
3. Aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) / 2° L'étranger qui justifie par tous moyens résider habituellement en France depuis qu'il a atteint au plus l'âge de treize ans (...) ".
4. M. B..., né le 15 janvier 1993, justifie par les pièces qu'il produit pour la première fois en appel être arrivé en France durant l'année 2001 au moins, notamment par la production de son carnet de santé et les dates y figurant, ainsi que par les certificats de scolarité établis le 15 octobre 2001 et le 19 décembre 2002. Il justifie en outre par la production d'un entretien de situation établi en 2010 avoir par la suite été scolarisé en France entre 2005 et 2009. Dès lors qu'il justifie résider habituellement sur le territoire français depuis l'âge au plus de treize ans, M. B... est fondé à soutenir que la décision du préfet du 25 février 2021 lui faisant obligation de quitter le territoire français méconnaît les dispositions précitées de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. L'illégalité de cette décision entraîne, par voie de conséquence, celle de la décision fixant le pays de destination pour son éloignement ainsi que de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans, qui en procèdent.
5. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 25 février 2021 du préfet de la Seine-Saint-Denis portant obligation de quitter le territoire, fixant le pays de destination pour son éloignement et lui faisant interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans.
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
6. Aux termes de l'article L. 911-2 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. / La juridiction peut également prescrire d'office l'intervention de cette nouvelle décision. ".
7. Compte tenu de ses motifs, l'exécution du présent arrêt implique nécessairement que le préfet de la Seine-Saint-Denis réexamine la situation de M. B.... Il y a lieu de lui enjoindre d'y procéder dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et de délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour à M. B....
Sur les frais liés à l'instance :
8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. B... d'une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : L'article 2 du jugement n° 2104532 du 20 septembre 2021 du Tribunal administratif de Montreuil et les décisions du préfet de la Seine-Saint-Denis du 25 février 2021 portant obligation de quitter le territoire français, fixant le pays de destination et portant interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de réexaminer la situation de M. B... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour.
Article 3 : L'Etat versera à M. B... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B..., au préfet de la Seine-Saint-Denis et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 12 avril 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Jardin, président de chambre,
- Mme Hamon, présidente assesseure,
- Mme Jurin, première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 10 mai 2022.
La rapporteure,
P. A...Le président,
C. JARDIN
La greffière,
C. BUOTLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21PA05512