Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
L'association nationale des élus d'opposition a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'avis du 5 juillet 2018 par lequel la Chambre régionale des comptes
d'Île-de-France a rejeté sa demande tendant à ce qu'elle constate que la commune de
Lagny-sur-Marne n'a pas inscrit à son budget une dépense obligatoire de 2 400 euros au titre de la formation dispensée à des élus de la commune.
Par un jugement n° 1807490 du 3 juillet 2020, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 16 septembre 2020, l'association nationale des élus locaux d'opposition, représentée par Me Bonnet, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Melun du 3 juillet 2020 ;
2°) d'annuler l'avis de la Chambre régionale des comptes d'Île-de-France du
5 juillet 2018, mentionné ci-dessus ;
3°) d'enjoindre à la commune de Lagny-sur-Marne de procéder à l'inscription au budget communal de la somme de 2 400 euros, et à son maire de la mandater, dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 50 euros par jours de retard ;
4°) subsidiairement, d'enjoindre à la Chambre régionale des comptes d'Île-de-France de procéder à un nouvel examen de sa demande, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
5°) de mettre à la charge de la commune de Lagny-sur-Marne une somme de
3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement du tribunal administratif est entaché d'erreur de droit en ce qu'il considère que seul le remboursement de la dépense de formation à l'élu qui en a bénéficié, constitue une dépense obligatoire pour la commune ;
- il ne pouvait se fonder sur l'absence d'un contrat ;
- l'avis de la Chambre régionale des comptes d'Île-de-France est également entaché d'erreur de droit en ce qu'il se fonde sur l'absence d'un contrat ;
- il est intervenu en méconnaissance des articles L. 2321-2 et L. 2123-14 du code général des collectivités territoriales ;
- la dépense en litige répondait aux conditions de l'article L. 2123-12 de ce code.
Par un mémoire en défense enregistré le 30 octobre 2020, le président de la Chambre régionale des comptes d'Île-de-France conclut au rejet de la requête, et à ce qu'une somme de
250 euros soit mise à la charge de l'association nationale des élus locaux d'opposition sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens soulevés par l'association nationale des élus locaux d'opposition ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 novembre 2020, la commune de
Lagny-sur-Marne, représentée par Me Lebreton, conclut au rejet de la requête, et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de l'association nationale des élus locaux d'opposition sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par l'association nationale des élus locaux d'opposition ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 4 octobre 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au
29 octobre 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...,
- les conclusions de Mme Mach, rapporteure publique,
- et les observations de Me Narly substituant Me Bonnet pour l'association nationale des élus locaux d'opposition.
Considérant ce qui suit :
1. L'association nationale des élus locaux d'opposition a, le 8 octobre 2016, dispensé une formation à plusieurs élus de la commune de Lagny-sur-Marne. Elle a adressé à la commune une facture d'un montant de 2 400 euros. Celle-ci n'ayant pas été acquittée, l'association a, par un courrier du 28 mars 2018, saisi la Chambre régionale des comptes d'Île-de-France d'une demande tendant à ce que la commune soit mise en demeure d'inscrire cette dépense à son budget au titre de l'année 2018. Par un avis du 5 juillet 2018, la Chambre régionale des comptes d'Île-de-France a considéré que cette dépense n'avait pas le caractère d'une dépense obligatoire, et a refusé de mettre la commune en demeure de l'inscrire à son budget. L'association fait appel du jugement du 3 juillet 2020 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet avis.
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 1612-15 du code général des collectivités territoriales : " Ne sont obligatoires pour les collectivités territoriales, que les dépenses nécessaires à l'acquittement des dettes exigibles et les dépenses pour lesquelles la loi l'a expressément décidé. / La chambre régionale des comptes saisie, soit par le représentant de l'Etat dans le département, soit par le comptable public concerné, soit par toute personne y ayant intérêt, constate qu'une dépense obligatoire n'a pas été inscrite au budget ou l'a été pour une somme insuffisante. Elle opère cette constatation dans le délai d'un mois à partir de sa saisine et adresse une mise en demeure à la collectivité territoriale concernée. / Si, dans un délai d'un mois, cette mise en demeure n'est pas suivie d'effet, la chambre régionale des comptes demande au représentant de l'Etat d'inscrire cette dépense au budget et propose, s'il y a lieu, la création de ressources ou la diminution de dépenses facultatives destinées à couvrir la dépense obligatoire. Le représentant de l'Etat dans le département règle et rend exécutoire le budget rectifié en conséquence. / S'il s'écarte des propositions formulées par la chambre régionale des comptes, il assortit sa décision d'une motivation explicite ". Il résulte de ces dispositions que la chambre régionale des comptes ne peut constater qu'une dépense est obligatoire pour une commune et mettre celle-ci en demeure de l'inscrire à son budget qu'en ce qui concerne les dettes échues, certaines, liquides, non sérieusement contestées dans leur principe et dans leur montant, découlant de la loi, d'un contrat, d'un délit, d'un quasi-délit ou de toute autre source d'obligations.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 2321-2 du code général des collectivités territoriales : " Les dépenses obligatoires comprennent notamment : (...) 3° (...) les frais de formation des élus mentionnés à l'article L. 2123-14 (...) ".
4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 2123-12 du code général des collectivités territoriales : " Les membres d'un conseil municipal ont droit à une formation adaptée à leurs fonctions (...) ". Aux termes de l'article L. 2123-14 de ce code : " les frais de déplacement, de séjour et d'enseignement donnent droit à remboursement (...) ". L'article L. 2123-16 de ce code, dans sa rédaction applicable en l'espèce, précise que ces dispositions " (...) ne s'appliquent que si l'organisme qui dispense la formation a fait l'objet d'un agrément délivré par le ministre de l'intérieur dans les conditions fixées à l'article L. 1221-1 ". Il résulte de ces dispositions que les élus ont droit au remboursement des frais de formation qu'ils ont exposés, sous conditions que la formation soit dispensée par un organisme bénéficiant d'un agrément de la part du ministre de l'intérieur, qu'elle soit adaptée, qu'elle ne soit pas trop coûteuse, et n'entraîne pas le dépassement du plafond visé à l'article L. 2123-14 du code général des collectivités territoriales, ni de la somme votée au budget au titre de la formation.
5. S'il est constant que l'association nationale des élus locaux d'opposition est agréée par le ministère de l'intérieur, et a bien dispensé une formation aux élus de la commune de
Lagny-sur-Marne, le 8 octobre 2016, sur le thème " Communiquer avec efficacité ", il est également constant qu'elle a présenté directement sa facture à la commune de Lagny-sur-Marne alors qu'il appartenait à chaque élu concerné d'en demander le remboursement. Elle n'est donc pas fondée à invoquer les dispositions citées ci-dessus du 3°) de l'article L. 2321-2 et de l'article L. 2123-14 du code général des collectivités territoriales, applicables au remboursement aux élus des frais de formation qu'ils ont exposés, pour soutenir que la dette de la commune découlerait d'une loi et présenterait de ce fait le caractère d'une dépense obligatoire.
6. L'association nationale des élus locaux d'opposition ne fait par ailleurs état d'aucun contrat conclu avec la commune, non plus que d'aucune autre obligation juridique, dont découlerait la dette litigieuse. Elle n'est donc pas fondée à soutenir que cette dette présenterait le caractère d'une dépense obligatoire au sens de l'article L. 1612-15 du code général des collectivités territoriales, cité ci-dessus.
7. Il résulte de ce qui précède que l'association nationale des élus locaux d'opposition n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.
Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Lagny-sur-Marne, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance la somme que l'association nationale des élus locaux d'opposition demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la commune de Lagny-sur-Marne et par la Chambre régionale des comptes d'Île-de-France sur le fondement des mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de l'association nationale des élus locaux d'opposition est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la commune de Lagny-sur-Marne et de la Chambre régionale des comptes d'Île-de-France, présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association nationale des élus locaux d'opposition, au ministre délégué chargé des collectivités territoriales et à la commune de Lagny-sur-Marne.
Copie en sera adressée à la chambre régionale des comptes d'Île-de-France.
Délibéré après l'audience du10 mai 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Célérier, président de chambre,
- M. Niollet, président-assesseur,
- M. Pagès, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 24 mai 2022.
Le rapporteur,
J-C. A...Le président,
T. CELERIER
La greffière,
K. PETIT
La République mande et ordonne au ministre délégué chargé des collectivités territoriales en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20PA02722