Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... D... A... a demandé au Tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 6 décembre 2021 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui a interdit de retourner sur le territoire français pour une durée de deux ans.
Par une ordonnance du 15 décembre 2021, la présidente du Tribunal administratif de Nice a transmis au Tribunal administratif de Paris, en application de l'article R. 351-3 du code de justice administrative le dossier de la requête de M. B... D... A....
Par un jugement n° 2128254/1-3 du 1er mars 2022, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a admis M. A..., à titre provisoire, au bénéfice de l'aide juridictionnelle et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 31 mars 2022, M. A..., représenté par Me Raissi-Fernandez, demande à la Cour :
1°) de l'admettre à l'aide juridictionnelle provisoire ;
2°) d'annuler le jugement n° 2128254/1-3 du 1er mars 2022 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris ;
3°) d'annuler l'arrêté du 6 décembre 2021 du préfet des Alpes-Maritimes ;
4°) d'enjoindre au préfet territorialement compétent de mettre fin à son signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à Me Raissi-Fernandez au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- la signature électronique apposée sur la décision contestée ne respecte pas les exigences requises par les annexes I et II du règlement (UE) n°910/2014 du parlement européen et du conseil du 23 juillet 2014 relatif à l'identification électronique et les services de confiance pour les transactions électroniques au sein du marché intérieur, les dispositions du décret n° 2017-1416 du 28 septembre 2017 relatif à la signature électronique, les dispositions de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration et de l'article 1367 du code civil ; il appartient à l'administration de produire les éléments permettant d'établir la réalité et l'authenticité de la signature électronique ;
S'agissant de la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire :
- la décision contestée méconnaît les dispositions des articles L. 612-2 et L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il dispose d'un passeport valide, d'une adresse stable à Paris et que sa situation est en cours de régularisation en Italie ;
S'agissant de la décision prononçant une interdiction de retour sur le territoire français :
- la décision contestée méconnaît les dispositions de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il est en situation régulière au regard du droit au séjour en Italie et qu'il justifie de circonstances humanitaires.
La requête a été communiquée au préfet des Alpes-Maritimes qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Larsonnier a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant égyptien né le 14 mai 1973, a fait l'objet, à la suite d'un contrôle de son identité, d'un arrêté du 6 décembre 2021 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans. Par un jugement du 1er mars 2022, dont M. A... relève appel, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Sur l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle :
2. Aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 : " Dans les cas d'urgence (...), l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée (...) par la juridiction compétente ou son président ". Aux termes de l'article 61 du décret du 28 décembre 2020 susvisé : " L'admission provisoire peut être accordée dans une situation d'urgence (...). / L'admission provisoire est accordée par la juridiction compétente ou son président (...), soit sur une demande présentée sans forme par l'intéressé, soit d'office si celui-ci a présenté une demande d'aide juridictionnelle (...) sur laquelle il n'a pas encore été statué ".
3. Il ressort des pièces du dossier que le requérant n'a pas déposé de demande d'aide juridictionnelle depuis l'enregistrement de sa requête. Par suite et en l'absence d'urgence, il n'y a pas lieu de l'admettre à titre provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
4. Aux termes de l'article L. 212-3 du code des relations entre le public et l'administration : " Les décisions de l'administration peuvent faire l'objet d'une signature électronique. Celle-ci n'est valablement apposée que par l'usage d'un procédé, conforme aux règles du référentiel général de sécurité mentionné au I de l'article 9 de l'ordonnance n° 2005-1516 du 8 décembre 2005 relative aux échanges électroniques entre les usagers et les autorités administratives et entre les autorités administratives, qui permette l'identification du signataire, garantisse le lien de la signature avec la décision à laquelle elle s'attache et assure l'intégrité de cette décision ".
5. La décision contestée est revêtue de la signature de M. C..., chef du pôle contentieux de la direction de la réglementation, de l'intégration et des migrations de la préfecture des Alpes-Maritimes, lequel avait délégation de signature à l'effet de signer au nom du préfet des Alpes-Maritimes la décision en litige en vertu d'un arrêté n° 2021-660 du 24 juin 2021 régulièrement publié au recueil des actes administratif spécial n° 157. 2021 du 25 juin 2021. Il ne ressort pas de la décision contestée qu'elle aurait fait l'objet d'une signature électronique, dès lors qu'elle comporte une signature manuscrite, dont l'authenticité n'est pas sérieusement contestée. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 212-3 du code des relations entre le public et l'administration, de l'article 1367 du code civil, du décret du 28 septembre 2017 relatif à la signature électronique et les annexes I et II du règlement (UE) n°910/2014 du parlement européen et du conseil du 23 juillet 2014 relatif à l'identification électronique et les services de confiance pour les transactions électroniques au sein du marché intérieur doit être écarté.
En ce qui concerne la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire :
6. L'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " L'étranger faisant l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de cette décision. (...) ". Aux termes de l'article L. 612-2 du même code : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants (...) ; 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet ". Aux termes de l'article L. 612-3 du même code : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : 1° L'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; (...) ; 5° L'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; (...) ; 8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3° de l'article L. 142-1, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 721-6 à L. 721-8, L. 731-1, L. 731-3, L. 733-1 à L. 733-4, L. 733-6, L. 743-13 à L. 743-15 et L. 751-5. ".
7. M. A... soutient qu'il aurait dû bénéficier d'un délai de départ volontaire afin de quitter le territoire français dès lors qu'il dispose d'un passeport valide, d'une adresse stable à Paris et que sa situation est en cours de régularisation en Italie. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé ne justifie pas être entré régulièrement sur le territoire français et n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour. En outre, il admet s'être soustrait à l'exécution d'une mesure d'éloignement en date du 14 septembre 2019. Enfin, une facture de la société Engie et d'une attestation de titulaire de contrat du 2 décembre 2021 établie par cette même société selon laquelle M. A... dispose d'un contrat depuis le 1er décembre 2021 sont insuffisantes pour justifier d'une résidence effective et permanente en France. Dans ces conditions, et alors même qu'il était en mesure de présenter un passeport en cours de validité, il pouvait être regardé comme présentant un risque de se soustraire à la mesure d'éloignement conformément aux dispositions précitées des articles L. 612-2 et L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le préfet des Alpes-Maritimes pouvait légalement refuser de lui accorder un délai de départ volontaire.
En ce qui concerne la décision d'interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans :
8. Aux termes du III de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. ".
9. La circonstance, à la supposer établie, que M. A... était titulaire d'un titre de séjour italien ne faisait pas obstacle à ce que le préfet prît à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français dès lors qu'une telle décision, même si elle s'accompagne d'un signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen, n'implique pas nécessairement qu'il aurait été empêché d'accéder au territoire italien et qu'il n'aurait pu être admis sur ce territoire. Par ailleurs, M. A... ne justifie pas de l'intensité de sa vie privée et familiale en France et ne fait état d'aucune circonstance humanitaire de nature à faire obstacle à l'édiction de la décision d'interdiction de retour. Dans ces conditions, c'est à juste titre que le premier juge a estimé que le préfet des Alpes-Maritimes avait pu, sans méconnaître les dispositions précitées et sans commettre d'erreur d'appréciation, prononcer à l'encontre de l'intéressé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi qu'en tout état de cause celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : M. A... n'est pas admis, à titre provisoire, au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... D... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.
Délibéré après l'audience du 5 juin 2023, à laquelle siégeaient :
- M. Ho Si Fat, président de la formation de jugement,
- Mme Collet, première conseillère
- Mme Larsonnier, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 juin 2023.
La rapporteure,
V. LARSONNIER Le président,
F. HO SI FAT
La greffière,
N. COUTY
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 22PA01479 2