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30/06/2023 | FRANCE | N°22PA05274

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 30 juin 2023, 22PA05274


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... C... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 25 février 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2014380 du 3 décembre 2021, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 13 décembre 2

022, Mme C..., représentée par Me Rasool, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... C... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 25 février 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2014380 du 3 décembre 2021, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 13 décembre 2022, Mme C..., représentée par Me Rasool, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation dans un délai d'un moisà compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

S'agissant de la décision portant refus de renouvellement de titre de séjour :

- elle méconnaît les dispositions, alors en vigueur, de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la commission du titre de séjour n'ayant pas été préalablement saisie de son cas ;

- elle méconnaît les dispositions, alors en vigueur, du 11° de l'article L. 311-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision du refus de titre de séjour.

La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Par une décision du 7 novembre 2022 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris, Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 décembre 1990 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme d'Argenlieu, rapporteure,

- et les observations de Me Rasool, avocate de Mme C....

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., ressortissante malienne, née le 11 février 1978 et entrée en France, selon ses déclarations, en 2009, a sollicité, le 13 mai 2019, le renouvellement de son titre de séjour en qualité d'étranger malade. Par un arrêté du 25 février 2020, le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixé le pays de destination. Mme C... relève appel du jugement du 3 décembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de la décision de refus de renouvellement de titre de séjour :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) 11° À l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé (...) ".

3. Pour refuser à Mme C... le renouvellement de son titre de séjour en qualité d'étranger malade, le préfet de la Seine-Saint-Denis s'est notamment fondé sur l'avis du 18 juillet 2019 du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), lequel a estimé que l'état de santé de Mme C... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut serait susceptible d'entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, mais qu'elle pouvait bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine vers lequel elle pouvait voyager sans risque.

4. Il ressort des pièces du dossier que Mme C... est régulièrement suivie pour un diabète de type 2, qui a évolué en diabète insulinodépendant de type 1. Pour contester l'avis émis par le collège des médecins de l'OFII, la requérante produit un certificat médical établi le 14 mai 2019 par un endocrinologue, mentionnant que " son état de santé nécessite un soin adapté " et qu'" il n'est pas sûr qu'un tel suivi soit possible dans son pays d'origine ", et un certificat médical établi le 20 mai 2019 par un médecin généraliste, indiquant que son état de santé " nécessite un suivi médical très strict dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité " et que " les traitements et la surveillance ne peuvent être faits dans son pays d'origine ". Toutefois, ces documents, trop peu circonstanciés, ne sont pas de nature à infirmer l'avis du collège des médecins de l'OFII en tant qu'il considère que la requérante peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Dans ces conditions, en l'absence de tout autre élément permettant d'établir que la pathologie dont est atteinte Mme C... ne pourrait pas être prise en charge de manière appropriée dans son pays d'origine, le préfet de la Seine-Saint-Denis, en refusant de renouveler son titre de séjour en qualité d'étranger malade, n'a pas méconnu les dispositions précitées du 11° de l'article L. 311-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le moyen, ainsi soulevé, doit être écarté.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable, la commission du titre de séjour " est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 311-11 (...) ".

6. Il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du titre de séjour du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues à l'article L. 311-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions. Dès lors, Mme C... n'étant pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour en application du 11° de l'article L. 311-11 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi qu'il a été dit au point 4, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'était pas tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande. Le moyen, ainsi soulevé, doit être écarté.

7. En troisième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant à l'encontre de la décision portant refus de renouvellement de titre de séjour, décision qui, par elle-même, ne fixe pas le pays à destination duquel l'intéressée peut être éloignée. Le moyen, ainsi soulevé, doit être écarté.

8. En quatrième lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

9. Mme C... se prévaut d'une résidence habituelle en France depuis 2009, de la présence sur le territoire national de quatre de ses six enfants et d'une insertion professionnelle stable et pérenne. Toutefois, s'il ressort des pièces du dossier que Mme C... a travaillé, du 11 janvier 2014 au 11 juillet 2016, en qualité d'agent de propreté auprès de la société " ISOR " et, du 7 avril 2018 au 31 octobre 2018, auprès de la société " Korian ", ces éléments ne peuvent suffire à caractériser une insertion professionnelle suffisamment stable et ancienne, alors qu'à la date de la décision attaquée l'intéressée avait cessé de travailler depuis plus d'un an. En outre, si elle établit avoir eu, avec un compatriote décédé en 2015, cinq enfants dont les quatre aînés sont nés au Mali et le dernier en France, elle ne justifie de la présence sur le territoire national que de trois d'entre eux, Fatouma née en 2000, dont le séjour a été régularisé postérieurement à la décision contestée, A... né en 2002 et B... né en 2010 alors mineurs. Par ailleurs, si elle soutient avoir donné naissance à un sixième enfant en France, le 22 juin 2020, qui est atteint d'un handicap, une telle circonstance, qui est postérieure à la date de la décision attaquée, est sans incidence sur sa légalité qui s'apprécie à la date de son édiction. Enfin, si Mme C... produit plusieurs attestations de membres de sa famille et de proches faisant état de la durée de son séjour et de sa bonne intégration en France, elle ne fait état d'aucune circonstance particulière susceptible, à la date de la décision attaquée, de faire obstacle à ce qu'elle reconstitue sa cellule familiale et se réinsère au Mali, où elle n'établit être dépourvue de toute attache et où elle-même a vécu jusqu'à l'âge de trente-et-un ans. Par suite, les moyens tirés de ce que la décision attaquée méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de la situation de Mme C... doivent être écartés.

10. En dernier lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".

11. Si Mme C... fait valoir que ses enfants A... et B... sont scolarisés en France, elle ne fait toutefois état, ainsi qu'il a été dit au point 9, d'aucune circonstance s'opposant à ce que la cellule familiale se reconstitue dans son pays d'origine et à ce que ses enfants y poursuivent leur scolarité. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

12. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant refus de renouvellement du titre de séjour, doit être écarté.

13. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être également rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.

Délibéré après l'audience du 16 juin 2023, à laquelle siégeaient :

- M. d'Haëm, président,

- M. Mantz, premier conseiller,

- Mme d'Argenlieu, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 juin 2023.

La rapporteure,

L. d'ARGENLIEULe président,

R. d'HAËMLa greffière,

O. BADOUX-GRARE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 22PA05274 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA05274
Date de la décision : 30/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. D’HAEM
Rapporteur ?: Mme Lorraine D'ARGENLIEU
Rapporteur public ?: Mme LIPSOS
Avocat(s) : RASOOL

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-06-30;22pa05274 ?
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