Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Par deux requêtes distinctes, la société anonyme Société Générale a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la restitution, à concurrence des sommes respectives de 1 508 186 euros, 49 770 euros et 161 376 euros, des cotisations d'impôt sur les sociétés, de contribution sociale et de contribution exceptionnelle sur cet impôt qu'elle a acquittées au titre des exercices clos en 2013 et 2014.
Par un jugement n°s 2007937, 2007939 du 28 avril 2022, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté ses demandes, après les avoir jointes.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 28 juin 2022, la Société Générale, représentée par Me Cassan-Meier, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 28 avril 2022 ;
2°) de prononcer, à titre principal, au titre de l'exercice clos en 2013, ou, à titre subsidiaire, au titre de l'exercice clos en 2014, la restitution des cotisations d'impôt sur les sociétés, de contribution sociale et de contribution exceptionnelle sur cet impôt qu'elle a acquittées, à concurrence des sommes respectives de 1 508 186 euros, 49 770 euros et 161 376 euros, ainsi que l'augmentation du stock de ses déficits reportables à hauteur de 4 524 557 euros et le remboursement de la créance de crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi imputée sur l'impôt sur les sociétés ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'existence de pertes définitives au sens de la jurisprudence Marks et Spencer de la Cour de justice de l'Union européenne, qui est applicable en France, ne peut être subordonnée, alors que la liquidation de la filiale étrangère est achevée, à la preuve qu'il était impossible de valoriser ses pertes ;
- elle rapporte la preuve du caractère définitif des pertes subies par sa sous-filiale slovaque ;
- en outre, en l'absence de transposition par la France de l'exception prévue par la jurisprudence Marks et Spencer, le principe de sécurité juridique fait obstacle à ce que l'administration fiscale lui impose de démontrer le caractère définitif des pertes subies par sa sous-filiale slovaque.
Par un mémoire en défense, enregistré le 22 décembre 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- les conclusions relatives à l'exercice clos en 2014 sont sans objet dès lors que le présent litige ne peut se rattacher qu'à l'exercice clos en 2013 ;
- les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés ;
- à titre subsidiaire, seules les pertes subies par la société Essox SK en 2013 peuvent être imputées sur le résultat d'ensemble du groupe fiscalement intégré au titre de la même année ;
- à titre très subsidiaire, les pertes subies par la société Essox SK en 2006 et 2007 ne sont pas imputables.
Par un courrier du 6 mars 2024, les parties ont été informées que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur l'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne C-538/20 du 22 septembre 2022, Finanzamt B c/ W AG, qui a dit pour droit que les articles 49 et 54 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne doivent être interprétés en ce sens qu'ils ne s'opposent pas à un régime fiscal d'un Etat membre en vertu duquel une société résidente de celui-ci ne peut déduire de son bénéfice imposable les pertes définitives subies par son établissement stable situé dans un autre Etat membre dans le cas où l'Etat membre de résidence a renoncé à son pouvoir d'imposer les résultats de cet établissement stable en vertu d'une convention préventive de double imposition.
Par un mémoire, enregistré le 15 mars 2024, la Société Générale, représentée par la société Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, Rameix, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, reprend les conclusions de sa requête et, en outre, demande à la Cour, à titre subsidiaire, de renvoyer à la Cour de justice de l'Union européenne une question préjudicielle, tendant à déterminer si son arrêt C-538/20 du 22 septembre 2022, Finanzamt B c/ W AG peut être mis en œuvre dans le cas de la France, au titre de la déductibilité des pertes définitives d'une filiale située dans l'Union européenne qui remplit les conditions de l'intégration fiscale prévues à l'article 223 A du code général des impôts, ou de surseoir à statuer dans l'attente d'une décision de la part du Conseil d'État dans le cadre du pourvoi n° 466062, dirigé contre l'arrêt n° 19VE03130 de la cour administrative d'appel de Versailles du 9 juin 2022, et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que la jurisprudence W AG ne s'applique pas, à tout le moins en ce qui concerne les pertes subies par des filiales étrangères, dès lors que la France a renoncé à son pouvoir d'imposer par son droit interne et non par une convention internationale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la Constitution, notamment son article 55 ;
- le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;
- la convention signée le 1er juin 1973 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République socialiste tchécoslovaque tendant à éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur les revenus ;
- l'accord sous forme d'échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République slovaque signées les 24 juin et 7 août 1996 relatif à la succession en matière de traités conclus entre la France et la Tchécoslovaquie ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- l'arrêt C-446/03 de la Cour de justice des Communautés européennes du 13 décembre 2005 ;
- l'arrêt C-337/08 de la Cour de justice de l'Union européenne du 25 février 2010 ;
- l'arrêt C-650/16 de la Cour de justice de l'Union européenne du 12 juin 2018 ;
- l'arrêt C-538/20 de la Cour de justice de l'Union européenne du 22 septembre 2022 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Desvigne-Repusseau,
- les conclusions de Mme Jurin, rapporteure publique,
- et les observations de Me Rameix-Séguin, avocate de la Société Générale.
Une note en délibéré, présentée pour la Société Générale, a été enregistrée le 3 avril 2024.
Considérant ce qui suit :
1. La Société Générale est la société mère d'un groupe fiscalement intégré, auquel sa filiale française, la société SG Consumer Finance (ci-après la SGCF), appartient depuis le 1er janvier 2004. Cette filiale a constitué, en 2006, une filiale de droit slovaque, la société Essox SK, dont elle était l'unique associée et qui exerçait une activité de crédit à la consommation. A la suite des opérations de liquidation de la filiale slovaque de la SGCF, qui se sont déroulées du 1er mai au 30 novembre 2013, la Société Générale a demandé à l'administration fiscale, en 2016 et 2017, d'imputer sur le résultat d'ensemble du groupe fiscalement intégré, au titre de l'exercice clos en 2013 ou, à titre subsidiaire, au titre de l'exercice clos en 2014, les pertes d'un montant global de 9 049 114 euros subies par la filiale slovaque de la SGCF entre 2006 et 2013. Après que l'administration fiscale a rejeté implicitement ces réclamations, la Société Générale a porté le litige devant le tribunal administratif de Montreuil qui, par un jugement du 28 avril 2022, a rejeté ses demandes tendant à la restitution, à concurrence des sommes respectives de 1 508 186 euros, 49 770 euros et 161 376 euros, des cotisations d'impôt sur les sociétés, de contribution sociale et de contribution exceptionnelle sur cet impôt qu'elle avait acquittées au titre des exercices clos en 2013 et 2014. La Société Générale fait appel de ce jugement en demandant à la Cour de prononcer, au titre de l'exercice clos en 2013 ou, à titre subsidiaire, au titre de l'exercice clos en 2014, la restitution, à concurrence des mêmes sommes, des cotisations d'impôt sur les sociétés, de contribution sociale et de contribution exceptionnelle à cet impôt qu'elle a acquittées, ainsi que l'augmentation du stock de ses déficits reportables à hauteur de 4 524 557 euros et le remboursement de la créance de crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi imputée sur l'impôt sur les sociétés.
Sur le bien-fondé des impositions :
2. D'une part, aux termes du I de l'article 209 du code général des impôts : " Sous réserve des dispositions de la présente section, les bénéfices passibles de l'impôt sur les sociétés sont déterminés (...) en tenant compte uniquement des bénéfices réalisés dans les entreprises exploitées en France, (...) ainsi que de ceux dont l'imposition est attribuée à la France par une convention internationale relative aux doubles impositions / (...) ". Une société mère dont les résultats sont soumis à l'impôt sur les sociétés en France ne peut, en outre, imputer les pertes subies par une filiale sur le résultat d'ensemble du groupe fiscalement intégré auquel les deux sociétés appartiennent que dans les conditions prévues par les dispositions des articles 223 A et suivants du code général des impôts. Aux termes de l'article 223 A de ce code, dans sa rédaction alors applicable : " Une société peut se constituer seule redevable de l'impôt sur les sociétés dû sur l'ensemble des résultats du groupe formé par elle-même et les sociétés dont elle détient 95 % au moins du capital, de manière continue au cours de l'exercice, directement ou indirectement par l'intermédiaire de sociétés ou d'établissements stables membres du groupe, ci-après désignés par les termes : sociétés du groupe, ou de sociétés ou d'établissements stables, ci-après désignés par les termes : sociétés intermédiaires, détenus à 95 % au moins par la société mère, de manière continue au cours de l'exercice, directement ou indirectement par l'intermédiaire de sociétés du groupe ou de sociétés intermédiaires. (...) ". Aux termes de l'article 223 B du même code : " Le résultat d'ensemble est déterminé par la société mère en faisant la somme algébrique des résultats de chacune des sociétés du groupe, déterminés dans les conditions de droit commun ou selon les modalités prévues à l'article 214. / (...) ".
3. D'autre part, aux termes de l'article 49 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne : " Dans le cadre des dispositions ci-après, les restrictions à la liberté d'établissement des ressortissants d'un État membre dans le territoire d'un autre État membre sont interdites. Cette interdiction s'étend également aux restrictions à la création d'agences, de succursales ou de filiales, par les ressortissants d'un État membre établis sur le territoire d'un État membre. / La liberté d'établissement comporte l'accès aux activités non salariées et leur exercice, ainsi que la constitution et la gestion d'entreprises, et notamment de sociétés au sens de l'article 54, deuxième alinéa, dans les conditions définies par la législation du pays d'établissement pour ses propres ressortissants, sous réserve des dispositions du chapitre relatif aux capitaux ". Aux termes de l'article 54 de ce traité : " Les sociétés constituées en conformité de la législation d'un État membre et ayant leur siège statutaire, leur administration centrale ou leur principal établissement à l'intérieur de l'Union sont assimilées, pour l'application des dispositions du présent chapitre, aux personnes physiques ressortissantes des États membres. / Par sociétés, on entend les sociétés de droit civil ou commercial, y compris les sociétés coopératives, et les autres personnes morales relevant du droit public ou privé, à l'exception des sociétés qui ne poursuivent pas de but lucratif ".
4. Ainsi que l'a jugé la Cour de justice de l'Union européenne, notamment dans ses arrêts Marks et Spencer contre David Halsey (aff. C-446/03) du 13 décembre 2005 et A/S Bevola, Jens W. Trock ApS contre Skatteministeriet (aff. C-650/16) du 12 juin 2018, une disposition permettant la prise en compte des pertes d'une succursale ou d'une filiale membre d'un groupe fiscalement intégré aux fins de la détermination du bénéfice imposable de la société à laquelle appartient cette succursale ou de la société mère de cette filiale constitue un avantage fiscal. Le fait d'accorder un tel avantage lorsque les pertes sont encourues au titre de l'activité d'une succursale ou d'une telle filiale établie dans l'Etat membre de la société résidente, mais non lorsque ces pertes proviennent d'un établissement stable ou d'une telle filiale situé dans un autre Etat membre que celui de cette société résidente, a pour conséquence que la situation fiscale d'une société résidente qui possède un établissement stable ou une telle filiale dans un autre Etat membre est moins favorable que celle qui serait la sienne si cette même activité était exercée au travers d'une succursale ou d'une telle filiale établie dans le même Etat membre qu'elle. Toutefois, une différence de traitement résultant de la législation fiscale d'un Etat membre au détriment des sociétés qui exercent leur liberté d'établissement n'est pas constitutive d'une entrave à cette liberté si elle concerne des situations qui ne sont pas objectivement comparables ou si elle est justifiée par une raison impérieuse d'intérêt général et proportionnée à cet objectif.
5. Enfin, aux termes de l'article 7 de la convention fiscale franco-tchécoslovaque du 1er juin 1973, applicable aux relations entre la France et la Slovaquie en vertu de l'accord conclu sous forme d'échange de lettres relatif à la succession en matière de traités entre la France et la Tchécoslovaquie signées les 24 juin et 7 août 1996 : " 1. Les bénéfices d'une entreprise d'un Etat contractant ne sont imposables que dans cet Etat, à moins que l'entreprise n'exerce son activité dans l'autre Etat contractant par l'intermédiaire d'un établissement stable qui y est situé. Si l'entreprise exerce son activité d'une telle façon, les bénéfices de l'entreprise sont imposables dans l'autre Etat mais uniquement dans la mesure où ils sont imputables audit établissement stable. / (...) ". En vertu du a) du A de l'article 25 de cette convention, les bénéfices visés à l'article 7 sont exonérés en France de l'impôt sur les sociétés lorsque ces revenus sont imposables en Slovaquie en vertu de la convention. Il en résulte que les pertes subies par une entreprise française provenant de l'activité de son établissement stable situé en Slovaquie ne sont imputables que dans cet Etat, selon les règles d'imputation qui y sont applicables, et qu'il en va, dès lors, nécessairement de même s'agissant, comme en l'espèce, d'une filiale non résidente.
6. Tant le principe de territorialité de l'impôt mentionné au I de l'article 209 du code général des impôts que les stipulations de la convention franco-tchécoslovaque, qui, en tout état de cause, s'imposent pour l'application de l'article 223 A du même code, faisaient donc obstacle à ce que la SGCF, filiale française de la Société Générale, pût déduire de son bénéfice imposable en France les pertes d'exploitation subies par sa filiale slovaque, alors même que, dans le cas d'une filiale établie en France, une telle imputation aurait toujours été possible ainsi que, le cas échéant, la prise en compte de tout ou partie de ces pertes pour la détermination du résultat d'ensemble du groupe fiscalement intégré auquel la SGCF appartient, dans les conditions et limites prévues par les dispositions des articles 223 A et suivants du code général des impôts.
7. Une telle différence de traitement ne saurait toutefois, ainsi qu'il résulte d'une jurisprudence constante de la Cour de justice de l'Union européenne, constituer une atteinte à la liberté d'établissement, pour la société privée de la possibilité de prise en compte des pertes subies par son établissement stable non résident pour la détermination de son résultat imposable, si elle ne se trouve pas, à l'égard des mesures prévues par la France afin de prévenir ou d'atténuer la double imposition des bénéfices d'une société résidente et, symétriquement, la double prise en compte de ses pertes, dans une situation objectivement comparable à celle d'une société détenant une succursale implantée en France. A cet égard, la Cour de justice de l'Union européenne a jugé, notamment dans son arrêt A/S Bevola, Jens W. Trock ApS contre Skatteministeriet cité au point 4, qu'en principe, la situation d'un établissement stable non résident et celle d'une succursale résidente ne sont pas comparables au regard d'un tel objectif. S'il en va autrement lorsque la législation fiscale nationale a elle-même assimilé ces catégories d'établissement aux fins de la prise en compte des pertes et des bénéfices réalisés par eux, les situations étant ainsi comparables, tel n'est pas le cas en revanche, ainsi que l'a rappelé la Cour de justice de l'Union européenne par son arrêt rendu le 22 septembre 2022 dans l'affaire Finanzamt B contre W AG (C-538/20), lorsque l'État membre de résidence d'une société a renoncé, en vertu d'une convention préventive de double imposition, à exercer son pouvoir d'imposition sur les résultats de l'établissement stable non résident de cette société, situé dans un autre État membre. Il en va de même s'agissant, comme en l'espèce, d'une filiale non résidente, ainsi qu'il découle nécessairement de ce qu'a jugé la Cour de justice de l'Union européenne, notamment au point 38 de son arrêt rendu le 25 février 2010 dans l'affaire X Holding BV contre Staatssecretaris van Financiën (C-337/08).
8. En l'espèce, la convention fiscale franco-tchécoslovaque du 1er juin 1973 interdisant à la France, en vertu de la méthode de l'exonération retenue au a) du A de son article 25, d'imposer les bénéfices réalisés par un établissement stable ou une filiale slovaque d'une société établie en France, conformément au demeurant à ce que prévoit la loi fiscale, la France n'a pas assimilé à des fins fiscales les succursales ou les filiales résidentes de France et celles établies en Slovaquie. Par ailleurs, la Société Générale ne peut utilement se prévaloir des stipulations de l'article 9 de la convention fiscale franco-tchécoslovaque du 1er juin 1973, qui permettent à l'administration fiscale française de faire application des dispositions de l'article 57 du code général des impôts relatives aux transferts indirects de bénéfices et ne peuvent, en tout état de cause et contrairement à ce que soutient la société requérante, être interprétées comme permettant de regarder l'Etat de résidence de la société mère comme ayant conservé, fût-ce partiellement, son pouvoir d'imposer des bénéfices réalisés à l'étranger et, symétriquement, de prendre en compte des pertes éventuellement subies également à l'étranger. Dans ces conditions, et ainsi qu'il découle nécessairement de ce qu'a jugé la Cour de justice de l'Union européenne dans son arrêt Finanzamt B contre W AG mentionné au point 7 pour le cas d'un Etat membre ayant renoncé par une convention préventive de double imposition au pouvoir d'imposer les résultats des établissements stables non résidents normalement prévu par son droit national, une société résidente de France détenant une succursale ou une filiale en Slovaquie doit être regardée comme ne se trouvant pas dans une situation objectivement comparable à celle d'une société de France détenant une succursale ou une filiale dans ce même Etat, alors même que la filiale slovaque remplirait les conditions pour être membre d'un groupe fiscalement intégré.
9. Par suite, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur le caractère définitif ou non des pertes subies par la filiale slovaque ni sur l'année de leur imputation sur le résultat du groupe fiscalement intégré, aucune restriction à la liberté d'établissement garantie par les articles 49 et 54 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ne saurait être constatée en raison de l'impossibilité pour la SGCF, filiale française de la Société Générale, d'imputer sur ses résultats les pertes subies par sa filiale slovaque, pas plus qu'en raison de l'impossibilité qui en résulte de bénéficier de toute prise en compte de ces pertes pour la détermination du résultat d'ensemble du groupe fiscalement intégré au titre duquel la société requérante est, en sa qualité de tête de groupe, seule redevable de l'impôt sur les sociétés en France.
10. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de saisir la Cour de justice de l'Union européenne à titre préjudiciel, que la Société Générale n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté ses demandes.
Sur les frais liés au litige :
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la Société Générale demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la Société Générale est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société anonyme Société Générale et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie en sera adressée à la directrice chargée de la direction des grandes entreprises.
Délibéré après l'audience du 26 mars 2024, à laquelle siégeaient :
- Mme Fombeur, présidente de la Cour,
- M. Auvray, président de chambre,
- M. Desvigne-Repusseau, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 mai 2024.
Le rapporteur,
M. DESVIGNE-REPUSSEAU
La présidente,
P. FOMBEUR
La greffière,
C. BUOT
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 22PA02967