Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 2 janvier 2023 par lequel le préfet de police a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2302529/8 du 20 septembre 2023, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 24 octobre 2023 et 29 mai 2024, M. B..., représenté par Me Mériau, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris du 20 septembre 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 2 janvier 2023 ;
3°) d'enjoindre au préfet de police, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour lui permettant de travailler, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour lui permettant de travailler ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté préfectoral du 2 janvier 2023 méconnaît les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- la décision l'obligeant à quitter le territoire français méconnaît les dispositions de l'article L. 611-3 9° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 611-1 3° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que sa situation n'a pas fait l'objet d'un examen réel et sérieux ;
- la décision fixant à trente jours le délai de départ volontaire est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire enregistré le 29 mars 2024, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant malien né le 31 décembre 1983, déclare être entré en France en janvier 2019. Il a d'abord présenté une demande d'asile, puis a sollicité, en juin 2021, la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade. Une carte de séjour temporaire lui a été délivrée à ce titre, valable du 15 octobre 2021 au 14 octobre 2022. Par un arrêté du 2 janvier 2023, le préfet de police a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. B... demande à la cour d'annuler le jugement du 20 septembre 2023 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ".
3. D'une part, il résulte des dispositions précitées que lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'étranger, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine. Pour déterminer si un étranger peut bénéficier effectivement dans le pays dont il est originaire d'un traitement médical approprié, au sens des dispositions précitées, il convient de s'assurer, eu égard à la pathologie de l'intéressé, de l'existence d'un traitement approprié et de sa disponibilité dans des conditions permettant d'y avoir accès, et non de rechercher si les soins dans le pays d'origine sont équivalents à ceux offerts en France ou en Europe.
4. D'autre part, la partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'accès effectif ou non à un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.
5. M. B... soutient qu'il souffre depuis plusieurs années d'une hépatite virale chronique B dont le traitement n'est pas accessible au Mali, son pays d'origine. Il produit des ordonnances médicales indiquant que lui est prescrit du tenofovir disoproxil, et fait valoir qu'il doit subir chaque année des examens de suivi. Il produit également un certificat médical daté du 14 août 2020, qui se borne à indiquer que la prise en charge de la maladie de M. B... ne peut être assurée dans son pays d'origine, des documents présentant de manière générale le système de santé malien, ainsi qu'un courriel du laboratoire Gilead précisant qu'il ne délivre pas le médicament Viread au Mali. Toutefois, ces documents ne sont pas de nature à établir, comme l'ont relevé les premiers juges, que l'intéressé ne pourra avoir accès à un traitement adapté à son état de santé dans son pays d'origine, ainsi que l'a estimé le préfet de police au vu notamment de l'avis émis le 12 décembre 2022 par le collège de médecins de l'OFII, qui a considéré que si l'état de santé de M. B... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, un traitement approprié existait dans son pays d'origine, le Mali. Le préfet a en outre produit, en première instance, des éléments relatifs à la prise en charge de l'hépatite B par le centre d'infectiologie Charles Mérieux de Bamako, ainsi que la liste, datée d'août 2021, des médicaments à usage humain et vétérinaire autorisés au Mali, parmi lesquels figure le tenofovir disoproxil, commercialisé par le laboratoire Gilead sous l'appellation Viread et disposant d'une autorisation valable jusqu'au 8 juin 2025, enfin un document mentionnant la disponibilité du tenofovir disoproxil au Mali " à un prix abordable ". Dans ces conditions, le préfet de police n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
6. En deuxième lieu, M. B... soutient que sa prise en charge médicale ne doit pas être interrompue et qu'il a fourni des efforts d'insertion professionnelle en qualité d'agent de service. Toutefois, eu égard notamment à ce qui vient d'être dit, ces éléments ne permettent pas de regarder la décision du préfet de police refusant la délivrance d'un titre de séjour à l'intéressé comme entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de ce dernier.
7. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable au litige : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : / (...) 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) ". Il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 5 du présent arrêt que le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions ne peut qu'être écarté.
8. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : / (...) 3° L'étranger s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour, le renouvellement du titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de l'autorisation provisoire de séjour qui lui avait été délivré ou s'est vu retirer un de ces documents ; (...) ". Si M. B... soutient que ces dispositions auraient été méconnues dès lors que sa situation n'aurait pas fait l'objet d'un examen réel et sérieux, il résulte de ce qui vient d'être dit que la décision du préfet de police refusant le renouvellement de son titre de séjour, dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle n'aurait pas été prise après un examen approfondi de son dossier, n'est pas entachée d'illégalité. Le moyen doit donc être écarté.
9. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger faisant l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de cette décision. / L'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. / (...). ".
10. M. B... soutient que le délai de trente jours qui lui est octroyé pour quitter le territoire français est insuffisant pour organiser son retour au Mali, compte tenu du suivi médical dont il a besoin. Toutefois, alors qu'il ressort des pièces du dossier que ce suivi doit être annuel, cette seule circonstance n'est pas de nature à établir que le préfet de police aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en ne lui accordant pas, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 2 janvier 2023. Ses conclusions à fin d'annulation ainsi, par voie de conséquence, que ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doivent donc être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 6 juin 2024 à laquelle siégeaient :
- Mme Marianne Julliard, présidente,
- Mme Marie-Isabelle Labetoulle, première conseillère,
- Mme Gaëlle Mornet, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 juillet 2024.
La rapporteure,
G. C...La présidente,
M. D...Le greffier,
É. MOULIN
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 23PA04446 2