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29/07/2024 | FRANCE | N°24PA01674

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 3ème chambre, 29 juillet 2024, 24PA01674


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 19 janvier 2024 par lequel le préfet de police a ordonné son transfert aux autorités roumaines.



Par un jugement n° 2402594/8 du 14 mars 2024, le tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 19 janvier 2024 et a enjoint au préfet de police de réexaminer la situation de M. A... dans le délai de quinze jours à compter de la date de notification du jugement.

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Procédure devant la cour :



Par une requête enregistrée le 12 avril 2024, le préfet de pol...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 19 janvier 2024 par lequel le préfet de police a ordonné son transfert aux autorités roumaines.

Par un jugement n° 2402594/8 du 14 mars 2024, le tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 19 janvier 2024 et a enjoint au préfet de police de réexaminer la situation de M. A... dans le délai de quinze jours à compter de la date de notification du jugement.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 12 avril 2024, le préfet de police demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2402594/8 du 14 mars 2024 du tribunal administratif de Paris ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Paris.

Il soutient que :

- c'est à tort que le tribunal a fait droit au moyen tiré d'une méconnaissance de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;

- les autres moyens soulevés en première instance ne sont pas fondés.

La requête a été communiquée à M. A..., qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Mme B... a présenté son rapport au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... A..., ressortissant bangladais né le 7 juin 1989, est entré irrégulièrement en France et y a sollicité, le 20 décembre 2023, son admission au séjour au titre de l'asile. Par un arrêté du 19 janvier 2024, le préfet de police a ordonné son transfert aux autorités roumaines. Par un jugement du 14 mars 2024, le tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté et a enjoint au préfet de police de procéder au réexamen de la situation de M. A... dans le délai de quinze jours à compter de la date de notification du jugement. Le préfet de police relève appel de ce jugement.

Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal :

2. Aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un Etat membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement, (...) 2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les Etats membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3. / Si c'est nécessaire à la bonne compréhension du demandeur, les informations lui sont également communiquées oralement, par exemple lors de1'entretien individuel visé à l'article 5. / (...) ". Il résulte de ces dispositions que le demandeur d'asile auquel l'administration entend faire application du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit se voir remettre, dès le moment où le préfet est informé de ce qu'il est susceptible d'entrer dans le champ d'application de ce règlement, et, en tout cas, avant la décision par laquelle l'autorité administrative décide de ne pas instruire la demande de l'intéressé au motif que la France n'est pas responsable de sa demande d'asile, une information complète sur ses droits, par écrit ou, si nécessaire pour la bonne compréhension du demandeur, oralement, et dans une langue qu'il comprend. Cette information doit comprendre l'ensemble des éléments prévus au paragraphe 1 de l'article 4 du règlement. Eu égard à la nature de ces informations, leur délivrance complète par l'autorité administrative, notamment par la remise de la brochure prévue par les dispositions précitées, constitue pour le demandeur d'asile une garantie.

3. Pour annuler l'arrêté du 19 janvier 2024, le premier juge a considéré que, s'il ressortait des pièces du dossier que M. A... s'était vu remettre le 20 décembre 2023 les brochures " A " et " B ", le guide du demandeur d'asile ainsi que la brochure Eurodac, seules les informations relatives à cette brochure avaient été portées oralement à sa connaissance, les informations contenues dans les brochures A et B n'ayant, elles, pas été portées oralement à sa connaissance, que M. A... était ainsi fondé à soutenir qu'il n'avait pu prendre connaissance de l'ensemble des informations écrites que ces brochures contenaient, que les dispositions de l'article 4 du règlement (UE) 604/ 2013 avaient ainsi été méconnues et que l'intéressé avait été en conséquence privé d'une garantie préalablement à l'adoption de la décision attaquée.

4. Il ressort toutefois des pièces du dossier que M. A... s'est vu remettre le 20 décembre 2023 les brochures " A " et " B " ainsi que le guide du demandeur d'asile et la brochure " Eurodac ". Les brochures A et B et le guide du demandeur d'asile remis à l'intéressé étaient rédigées en langue bengali, qu'il a déclaré comprendre. Faute de traduction existant en langue bengali de la brochure " Eurodac ", et l'intéressé ne lisant pas la langue anglaise, les informations contenues dans ces documents ont été portées oralement à sa connaissance par un interprète en langue bengali, ainsi qu'en atteste la signature portée par l'intéressé sur la première page de cette brochure. Par ailleurs, contrairement à ce que soutenait M. A... en première instance, les mentions ainsi signées comportent également, en tout état de cause, le nombre de pages de chacune des brochures. Enfin, si M. A... a invoqué son illettrisme pour la première fois dans sa demande de première instance, il ressort des pièces du dossier que les termes de la documentation remise ont été compris par l'intéressé dès lors que celui-ci n'a pas formulé de réserve et en a accusé réception en les signant. M. A... a également signé le résumé de son entretien individuel, durant lequel il était assisté d'un interprète, attestant que l'information sur les règlements communautaires lui avait été remise et qu'il avait compris la procédure engagée à son encontre. Dès lors, les dispositions de l'article 4 du règlement n° 604/2013 n'ont pas été méconnues et le préfet de police est, en conséquence, fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a estimé que M. A... avait été privé d'une garantie et que la décision de transfert du 19 janvier 2024 était intervenue au terme d'une procédure irrégulière.

5. Il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... devant le tribunal administratif de Paris.

Sur les autres moyens invoqués par M. A... :

6. En premier lieu, en application des dispositions de l'article L. 572-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision de transfert dont fait l'objet un ressortissant de pays tiers ou un apatride qui a déposé auprès des autorités françaises une demande d'asile dont l'examen relève d'un autre État membre ayant accepté de le prendre ou de le reprendre en charge doit être motivée, c'est-à-dire qu'elle doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement.

7. L'arrêté du 19 janvier 2024 du préfet de police vise notamment le règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013. Il indique qu'" il ressort de la comparaison des empreintes digitales de M. A... au moyen du système Eurodac, effectuée conformément au règlement n° 603/2013 [...], que l'intéressé a sollicité l'asile auprès des autorités roumaines le 13 novembre 2023 ", puis que " les critères prévus par le chapitre III ne sont pas applicables à la situation de M. A..., qu'en conséquence, au regard des articles 3 et 18 (1) (b), les autorités roumaines doivent être regardées comme étant responsables de la demande d'asile de M. A... " et qu'enfin, ces autorités, après avoir été saisies sur ce fondement, " ont fait connaître leur accord le 3 janvier 2024 en application de l'article 18-1-b du règlement ". Par ailleurs, le préfet de police a précisé que " l'ensemble des éléments de fait et de droit caractérisant la situation de M. A... ne relève pas des dérogations prévues par les articles 3-2 ou 17 du règlement (UE) n° 604/2013 ". Dès lors, cet arrêté comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et permet ainsi à l'intéressé d'en contester utilement le bien-fondé. En outre, contrairement à ce que soutient M. A..., le préfet de police n'avait pas à faire état de l'ensemble des éléments de fait en raison desquels il a estimé que sa décision ne méconnaissait pas les textes qu'il a visés. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation ne peut qu'être écarté.

8. En deuxième lieu, il ne ressort ni des termes de l'arrêté attaqué ni des pièces du dossier que le préfet de police aurait entaché son arrêté du 19 janvier 2024 d'un défaut d'examen de la situation de M. A.... Par suite, ce moyen ne peut qu'être écarté.

9. En troisième lieu, aux termes de l'article 5 du règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'Etat membre responsable, l'État membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. / [...] 4. L'entretien individuel est mené dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend et dans laquelle il est capable de communiquer. Si nécessaire, les États membres ont recours à un interprète capable d'assurer une bonne communication entre le demandeur et la personne qui mène l'entretien individuel. / 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national [...] ".

10. D'une part, ni ces dispositions, ni aucun principe n'imposent que figure sur le compte rendu de l'entretien individuel la mention de l'identité de l'agent qui a mené l'entretien. D'autre part, il ressort des pièces du dossier de première instance que M. A... a été reçu le 20 décembre 2023 par un agent du bureau de l'accueil de la demande d'asile de la délégation à l'immigration de la préfecture de police, lequel, en l'absence de tout élément qui conduirait à mettre en doute sa qualification, - et alors que le résumé de l'entretien montre que celui-ci a permis d'inviter M. A... à fournir les informations en sa possession utiles au processus de détermination de l'État membre responsable - doit être regardé comme une personne qualifiée en vertu du droit national au sens des dispositions citées au point 9. À cette occasion, M. A... a bénéficié de l'assistance d'un interprète en langue bengali de l'organisme ISM Interprétariat, agréé par l'administration. Enfin, l'intéressé n'apporte aucun élément de nature à faire douter du caractère confidentiel de l'entretien. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 5 du règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 doit être écarté.

11. En quatrième lieu, aux termes de l'article 23 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Lorsqu'un État membre auprès duquel une personne visée à l'article 18, paragraphe 1, point b), c) ou d), a introduit une nouvelle demande de protection internationale estime qu'un autre État membre est responsable conformément à l'article 20, paragraphe 5, et à l'article 18, paragraphe 1, point b), c) ou d), il peut requérir cet autre État membre aux fins de reprise en charge de cette personne. / 2. Une requête aux fins de reprise en charge est formulée aussi rapidement que possible et, en tout état de cause, dans un délai de deux mois à compter de la réception du résultat positif Eurodac (" hit "), en vertu de l'article 9, paragraphe 5, du règlement (UE) no 603/2013. / (...) / 3. Lorsque la requête aux fins de reprise en charge n'est pas formulée dans les délais fixés au paragraphe 2, c'est l'État membre auprès duquel la nouvelle demande est introduite qui est responsable de l'examen de la demande de protection internationale (...) ". Aux termes de l'article 25 du même règlement : " 1. L'État membre requis procède aux vérifications nécessaires et statue sur la requête aux fins de reprise en charge de la personne concernée aussi rapidement que possible et en tout état de cause dans un délai n'excédant pas un mois à compter de la date de réception de la requête. Lorsque la requête est fondée sur des données obtenues par le système Eurodac, ce délai est réduit à deux semaines. / 2. L'absence de réponse à l'expiration du délai d'un mois ou du délai de deux semaines mentionnés au paragraphe 1 équivaut à l'acceptation de la requête, et entraîne l'obligation de reprendre en charge la personne concernée, y compris l'obligation d'assurer une bonne organisation de son arrivée. ". Aux termes de l'article 15 du règlement (CE) n° 1560/2003 : " Les requêtes et les réponses, ainsi que toutes les correspondances écrites entre Etats membres visant à l'application du règlement (UE) n° 604/2013, sont, autant que possible, transmises via le réseau de communication électronique " DubliNet " établi au titre II du présent règlement (...). / 2. Toute requête, réponse ou correspondance émanant d'un point d'accès national (...) est réputée authentique. / 3. L'accusé de réception émis par le système fait foi de la transmission et de la date et de l'heure de réception de la requête ou de la réponse ".

12. En vertu de ces dispositions, lorsque le préfet est saisi d'une demande d'enregistrement d'une demande d'asile, il lui appartient, s'il estime après consultation du fichier " Eurodac " que la responsabilité de l'examen de cette demande d'asile incombe à un État membre autre que la France, de saisir la direction générale des étrangers en France du ministère de l'intérieur, qui gère le " point d'accès national " du réseau " DubliNet " pour la France. Les autorités de l'État regardé comme responsable sont alors saisies par le point d'accès français, qui archive les accusés de réception de ces demandes. Les demandes émanant des préfectures sont, en principe, transmises le jour même aux autorités des autres États membres si elles parviennent avant 16 heures 30 au point d'accès national et le lendemain si elles y parviennent après cette heure. En outre, si les préfectures n'avaient pas directement accès aux accusés de réception archivés par le point d'accès national, elles peuvent désormais y accéder directement.

13. La décision de transfert d'un demandeur d'asile vers l'État membre responsable, au vu de la consultation du fichier " Eurodac ", ne peut être prise qu'après l'acceptation de la reprise en charge par l'État requis, saisi dans le délai de deux mois à compter de la réception du résultat de cette consultation. À cet égard, s'il est nécessaire que les autorités françaises aient effectivement saisi les autorités de l'autre État avant l'expiration de ce délai de deux mois et que les autorités de cet État aient, implicitement ou explicitement, accepté cette demande, la légalité de la décision de transfert prise par le préfet de police ne dépend pas du point de savoir si les services de la préfecture disposaient matériellement, à la date de la décision du préfet, des pièces justifiant de l'accomplissement de ces démarches. Si le juge de l'excès de pouvoir peut écarter des allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées, il ne saurait exiger de l'auteur du recours que ce dernier apporte la preuve des faits qu'il avance.

14. Il résulte des dispositions précitées du règlement (CE) n° 1560/2003 du 2 septembre 2003 que la production de l'accusé de réception émis, dans le cadre du réseau " DubliNet " par le point d'accès national de l'État requis lorsqu'il reçoit une demande présentée par les autorités françaises, établit l'existence et la date de cette demande et permet, en conséquence, de déterminer le point de départ du délai de quinze jours au terme duquel la demande de reprise en charge est tenue pour implicitement acceptée. Pour autant, la production de l'accusé de réception prévu par ces dispositions ne constitue pas le seul moyen d'établir que les conditions mises à la reprise en charge du demandeur ont été effectivement remplies. Il appartient au juge administratif, lorsque l'accusé de réception n'est pas produit, de se prononcer au vu de l'ensemble des éléments qui ont été versés au débat contradictoire devant lui, par exemple du rapprochement des dates de consultation du fichier " Eurodac " et de saisine du point d'accès national français ou des éléments figurant dans une confirmation explicite par l'État requis de son acceptation implicite de prise en charge.

15. Il ressort des pièces du dossier de première instance que le préfet de police a saisi les autorités roumaines le 26 décembre 2023, ainsi qu'en atteste l'accusé de réception Dublinet, d'une demande de prise en charge de la demande d'asile de M. A... sur la base des résultats positifs du système Eurodac communiqués le 15 décembre 2023, et que ces mêmes autorités ont fait part de leur accord par un courrier en date du 3 janvier 2024. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure de reprise en charge de M. A... par les autorités roumaines doit être écarté.

16. En dernier lieu, aux termes de l'article 3 paragraphe 2, du règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 : " [...] Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'État membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre État membre peut être désigné comme responsable [...] ". Le paragraphe 1 de l'article 17 du même règlement dispose : " Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque Etat membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / L'Etat membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'Etat membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité [...] ".

17. Ces dispositions doivent être appliquées dans le respect des droits garantis par la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

18. M. A... soutient qu'il a subi des traitements inhumains et dégradants en Roumanie, que sa demande d'asile sera nécessairement rejetée en cas de transfert dans cet État et qu'il sera renvoyé au Bangladesh, pays où il a subi des persécutions en raison de ses opinions politiques. Toutefois, d'une part, l'arrêté contesté a seulement pour objet de renvoyer l'intéressé en Roumanie, et non dans son pays d'origine. Or, il ne ressort pas des pièces du dossier que le transfert de M. A... en Roumanie entraînera un risque de traitements inhumains ou dégradants au sens de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. D'autre part, il ne ressort pas davantage de ces pièces que les autorités roumaines n'évalueront pas, avant de procéder à un éloignement de l'intéressé, les risques auxquels il serait exposé en cas de retour dans son pays d'origine. Par suite, en décidant de ne pas examiner la demande d'asile de M. A... comme le permettent les articles 3 et 17 précités du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, le préfet de police n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation.

19. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 19 janvier 2024. Dès lors, il y a lieu d'annuler ce jugement et de rejeter la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Paris.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2402594/8 du 14 mars 2024 du tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Paris est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au préfet de police, à M. C... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Délibéré après l'audience du 2 juillet 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Ivan Luben, président de chambre,

- Mme Marianne Julliard, présidente-assesseure,

- Mme Gaëlle Mornet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 juillet 2024.

La rapporteure,

G. B...Le président,

I. LUBEN

La greffière,

N. DAHMANI

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 24PA01674 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 24PA01674
Date de la décision : 29/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LUBEN
Rapporteur ?: Mme Gaëlle MORNET
Rapporteur public ?: Mme DÉGARDIN

Origine de la décision
Date de l'import : 04/08/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-29;24pa01674 ?
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