Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 17 janvier 2023 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné d'office et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de vingt-quatre mois.
Par un jugement n° 2300736 du 3 mars 2023, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 14 mars 2023, M. A..., représenté par Me Funck, demande à la Cour :
1°) de l'admettre, à titre provisoire, au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;
2°) d'annuler ce jugement ;
3°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;
4°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de réexaminer sa situation dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, dans l'attente de ce réexamen, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ou, s'il n'est pas admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle, à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est entaché d'irrégularité dès lors, d'une part, que le premier juge a statué sur sa demande alors que le préfet n'avait pas produit les décisions attaquées, contrairement aux prescriptions résultant des articles R. 776-13-2 et R. 776-18 du code de justice administrative, d'autre part, qu'il a omis de répondre à son moyen tiré de l'erreur de droit entachant ces décisions dans la mesure où la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas été précédée d'un refus de séjour ;
- les décisions attaquées ont été signées par une autorité incompétente ;
- elles sont entachées d'une insuffisance de motivation ;
- elles sont entachées d'un défaut de base légale et d'un détournement de procédure dès lors qu'ayant présenté une demande de titre de séjour, il ne pouvait faire l'objet d'une mesure d'obligation de quitter le territoire français qu'en application des dispositions du 3° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elles sont entachées d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des articles L. 421-1 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'ayant pas pris à son encontre un refus de séjour ;
- elles méconnaissent les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
La requête de M. A... a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis qui n'a pas produit d'observations.
Par des courriers des 23 août 2024 et 16 septembre 2024, deux mesures d'instruction ont été diligentées par la Cour.
Par un mémoire en production d'une pièce, enregistré le 23 septembre 2024, le préfet de la Seine-Saint-Denis a répondu à cette mesure.
Par un mémoire, enregistré le 30 septembre 2024, M. A... conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens.
Il soutient, en outre, que :
- la décision portant obligation de quitter le territoire français a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière, en l'absence de justification de ce que l'agent de la préfecture, qui a consulté le traitement d'antécédents judiciaires, a été individuellement désigné et spécialement habilité par le représentant de l'Etat pour ce faire et faute, pour le préfet, d'avoir saisi, pour complément d'information, les services de la police nationale ou les unités de la gendarmerie nationale compétents et, aux fins de demandes d'information sur les suites judiciaires donnés, le ou les procureurs de la République compétents, conformément à l'article R. 40-29 du code de procédure pénale ;
- elle méconnaît les dispositions du 5° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étranger et du droit d'asile dès lors que son comportement ne constitue pas une menace pour l'ordre public ;
- elle est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de cet article L. 611-1 ;
- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français est illégale à raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- la décision portant signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen est illégale à raison de l'illégalité de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français.
Par une décision du 4 juillet 2023 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris, M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 en matière de séjour et de travail ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code du travail ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. d'Haëm, président-rapporteur.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant tunisien, né le 27 janvier 1990, fait appel du jugement du 3 mars 2023 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 janvier 2023 du préfet de la Seine-Saint-Denis l'obligeant à quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de destination et prononçant à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de vingt-quatre mois.
Sur la demande d'admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle :
2. Par une décision susvisée du 4 juillet 2023, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris a statué sur la demande de M. A... tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle. Dans ces conditions, il n'y a plus lieu de statuer sur sa demande tendant à son admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Sur la régularité du jugement attaqué :
3. Aux termes de l'article R. 412-1 du code de justice administrative : " La requête doit, à peine d'irrecevabilité, être accompagnée, sauf impossibilité justifiée, de l'acte attaqué (...) ". Par dérogation, l'article R. 776-18 du même code, dans sa rédaction applicable au présent litige et auquel renvoyaient les articles R. 776-13-1 et R. 776-13-2 de ce code s'agissant des recours formés contre les décisions d'obligation de quitter le territoire français prises sur le fondement des 1°, 2° ou 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dispose que : " (...) Les décisions attaquées sont produites par l'administration ".
4. Il ressort des pièces de la procédure devant le tribunal administratif de Montreuil que M. A... a présenté, le 19 janvier 2023, une demande tendant à l'annulation d'un arrêté du 17 janvier 2023 du préfet de la Seine-Saint-Denis l'obligeant à quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de destination et prononçant à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de vingt-quatre mois, sans produire cet arrêté, mais en se prévalant des dispositions de l'article R. 776-18 précité. En outre, sa demande a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis qui n'a produit aucun mémoire, ni aucune pièce, ni, a fortiori, remis en cause l'existence de cet arrêté ou fait valoir que la décision d'obligation de quitter le territoire français en litige n'aurait pas été prise sur le fondement des dispositions du 1°, 2° ou 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Au surplus, à la suite d'une mesure d'instruction diligentée par la Cour, le préfet a produit l'arrêté en litige dont il ressort que la décision d'obligation de quitter le territoire français contestée a été prise sur le fondement des dispositions du 1° de cet article L. 611-1. Dans ces conditions, en statuant sur la demande présentée par M. A... et, en particulier, en écartant ses moyens de légalité externe et celui tiré d'un défaut d'examen particulier de sa situation au motif, notamment, que le requérant n'avait pas produit l'arrêté attaqué, sans disposer au dossier de cet arrêté, ni tirer les conséquences de l'absence de toute production en défense, alors qu'il incombait au préfet de produire les décisions attaquées, le premier juge a méconnu son office et entaché son jugement d'irrégularité. Par suite et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de régularité, M. A... est fondé à en demander l'annulation.
5. Il y a lieu, pour la Cour, de se prononcer immédiatement, par la voie de l'évocation, sur la demande de M. A... tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 17 janvier 2023.
Sur la légalité de l'arrêté attaqué :
6. En premier lieu, l'arrêté attaqué portant obligation de quitter le territoire français, refus de délai de départ volontaire, fixation du pays de destination et interdiction de retour sur le territoire français a été signé par M. C... D..., chef du pôle instruction et mise en œuvre des mesures d'éloignement de la préfecture, qui disposait d'une délégation de signature à cet effet consentie par un arrêté n° 2022-3175 du 22 novembre 2022 du préfet de la Seine-Saint-Denis, régulièrement publié le 24 novembre 2022 au bulletin d'informations administratives. Par suite, le moyen tiré de ce que les décisions attaquées auraient été signées par une autorité incompétence doit être écarté comme manquant en fait.
7. En deuxième lieu, les décisions contestées portant obligation de quitter le territoire français, refus de délai de départ volontaire, fixation du pays de destination et interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de vingt-quatre mois comportent les considérations de droit et de fait qui les fondent, et sont, par suite, suffisamment motivées. Par ailleurs, s'agissant de la décision portant interdiction de retour, cette motivation révèle la prise en compte par l'autorité préfectorale des critères énumérés à l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
8. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : / 1° L'étranger, ne pouvant justifier être entré régulièrement sur le territoire français, s'y est maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; / (...) 6° L'étranger qui ne réside pas régulièrement en France depuis plus de trois mois a méconnu les dispositions de l'article L. 5221-5 du code du travail (...) ".
9. Il ressort des pièces du dossier et il n'est d'ailleurs pas contesté que M. A..., qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, s'y est maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité. Par ailleurs, ne résidant pas régulièrement en France depuis plus de trois mois, l'intéressé, qui a travaillé sans être titulaire d'un titre de séjour, a méconnu les dispositions de l'article L. 5221-5 du code du travail. Par suite, il se trouvait dans les cas où, en application des 1° et 6° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de la Seine-Saint-Denis pouvait, sans commettre d'erreur de droit, l'obliger à quitter le territoire français.
10. En quatrième lieu, il ne ressort ni de la motivation de l'arrêté attaqué, ni d'aucune autre pièce du dossier qu'avant de prendre les quatre décisions en litige, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M. A.... Par suite, le moyen, à le supposer soulevé, tiré de ce que ces décisions seraient entachées de ce chef d'une erreur de droit, doit être écarté.
11. En cinquième lieu, la décision contestée portant obligation de quitter le territoire français, prise sur le fondement des dispositions citées au point 8, n'a pas été prise sur le fondement des dispositions du 5° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au motif que le comportement de M. A... constituerait une menace pour l'ordre public. Par suite, les moyens tirés de ce que cette mesure d'éloignement aurait été prise en méconnaissance des dispositions de l'article R. 40-29 du code de procédure pénale ou de celles du 5° de cet article L. 611-1, doivent être écartés comme inopérants.
12. En sixième lieu, si M. A... fait valoir les difficultés qu'il a rencontrées entre les mois de janvier et juillet 2022 afin d'obtenir un rendez-vous auprès de la sous-préfecture du Raincy pour déposer une demande d'admission exceptionnelle au séjour, il ressort des pièces du dossier et il n'est pas sérieusement contesté que sa demande de titre de séjour, enregistrée le 16 août 2022 sur la plateforme dématérialisée " Démarches simplifiées ", a fait l'objet d'un classement sans suite, au motif qu'elle revêtait un caractère incomplet, et qu'il a été invité à déposer une nouvelle demande dûment complétée. En outre, le requérant n'établit, ni n'allègue sérieusement avoir présenté une nouvelle demande. Dans ces conditions et alors qu'au demeurant les dispositions des 1° et 6° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne subordonnent pas le prononcé d'une obligation de quitter le territoire français au prononcé préalable d'une décision de refus de titre de séjour, le moyen tiré de ce que le préfet aurait entaché son arrêté d'un défaut de base légale ou d'un détournement de procédure, ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté.
13. En septième lieu, alors que l'article 3 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 en matière de séjour et de travail régit la délivrance des titres de séjour au titre d'une activité salariée, M. A..., ressortissant tunisien, ne peut, en tout état de cause, utilement se prévaloir, à l'encontre de la décision en litige portant obligation de quitter le territoire français, ni des autres décisions contestées, des dispositions des articles L. 421-1 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ces dispositions ne prescrivant pas la délivrance de plein droit d'un titre de séjour.
14. En huitième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
15. M. A... se prévaut de la durée de son séjour en France depuis l'année 2017 et de son insertion professionnelle sur le territoire. Toutefois, l'intéressé est entré et s'est maintenu de façon irrégulière en France, y a travaillé sans autorisation et ne conteste pas avoir fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement en date du 22 octobre 2020, à laquelle il s'est soustrait. En outre, s'il justifie avoir travaillé en qualité de " livreur " d'abord auprès de la Sarl " El Bahia " entre juillet 2017 et mai 2018, puis auprès de la Sarl " Glovo " entre août 2018 et février 2020, enfin, sous contrat à durée indéterminée, auprès de la Sarl " Pizza Cinq " entre juin 2020 et novembre 2022, il ne saurait être regardé comme justifiant d'une insertion professionnelle stable et ancienne sur le territoire. Il ne fournit d'ailleurs aucune explication sur les conditions dans lesquelles il aurait pu être embauché par cette dernière société, son contrat de travail et le registre du personnel de cette entreprise indiquant qu'il serait de nationalité italienne. Par ailleurs, le requérant, qui est célibataire et sans charge de famille en France et qui ne livre aucune précision sur les liens de toute nature, notamment d'ordre amical, qu'il y aurait noués, ne justifie d'aucune circonstance particulière de nature à faire obstacle à ce qu'il poursuive normalement sa vie privée et familiale à l'étranger et, en particulier, en Tunisie où il n'allègue pas être dépourvu d'attaches personnelles et familiales et où il a vécu jusqu'à l'âge de vingt-sept ans. Enfin, il n'établit, ni n'allègue sérieusement qu'il serait dans l'impossibilité de s'y réinsérer. Ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment des conditions de séjour en France de M. A..., l'arrêté attaqué portant, notamment, obligation de quitter le territoire français sans délai et interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de vingt-quatre mois ne peut être regardé comme ayant porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquelles ces mesures ont été prises. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées doit être écarté. Pour les mêmes motifs, en prenant à l'encontre de M. A... ces mesures d'éloignement et d'interdiction de retour, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a commis aucune erreur manifeste dans son appréciation des conséquences de ces mesures sur la situation personnelle de l'intéressé.
16. En neuvième lieu, aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : / 1° Le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ; / (...) 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet ". Aux termes de l'article L. 612-3 du même code : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / 1° L'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; / (...) 4° L'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ; / 5° L'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; / 8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité (...), qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale (...) ".
17. Contrairement à ce qu'indique la décision en litige portant refus de délai de départ volontaire, M. A... dispose d'un passeport en cours de validité ainsi que d'un logement. Par ailleurs, les faits mentionnés dans cette décision, à savoir que l'intéressé " est connu au fichier automatisé des empreintes digitales pour des faits de détention de produits stupéfiants et pour infraction aux conditions générales d'entrée et de séjour ", ne permettent pas, en l'absence de toute précision et élément sur la date et les circonstances de ces faits, leur matérialité, leur gravité ou encore les suites judiciaires dont ils auraient éventuellement fait l'objet, de caractériser une menace pour l'ordre public. Toutefois, il résulte de l'instruction que le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait pris la même décision en se fondant sur les autres motifs de son arrêté, à savoir, notamment, que M. A..., qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour, qu'il a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français et qu'il s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement en date du 22 octobre 2020. Dans ces conditions, alors que le requérant ne conteste sérieusement aucun de ces motifs, le préfet de la Seine-Saint-Denis, en estimant qu'il existait un risque que l'intéressé se soustraie à la mesure d'éloignement en litige et, en conséquence, en refusant de lui accorder un délai de départ volontaire, n'a pas commis d'erreur de droit ou d'appréciation au regard des dispositions précitées du 3° de l'article L. 612-2 et des 1°, 4° et 5° de l'article L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
18. En dixième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier la portée ou le bien-fondé.
19. En onzième lieu, il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision portant interdiction de retour sur le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français.
20. En douzième lieu, aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".
21. Si la décision attaquée portant interdiction de retour indique à tort, en l'absence, ainsi qu'il a été dit au point 17, de toute précision et élément sur la date et les circonstances des faits délictueux qui sont reprochés à M. A..., leur matérialité, leur gravité ou les suites judiciaires dont ils auraient éventuellement fait l'objet, que sa présence en France représente une menace pour l'ordre public, cette erreur est sans incidence sur la légalité de cette décision dès lors qu'il résulte de l'instruction que le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait pris la même mesure en se fondant seulement sur les autres motifs qu'il a retenus, en particulier le fait que M. A... est entré et a séjourné irrégulièrement sur le territoire français, y a travaillé sans autorisation, ne justifie pas de liens personnels et familiaux caractérisés en France et s'est soustrait à une précédente mesure d'éloignement en date du 22 octobre 2020. En outre, le requérant ne démontre, ni n'allègue d'ailleurs, aucune circonstance humanitaire de nature à faire obstacle au prononcé d'une interdiction de retour qui doit assortir en principe, en application des dispositions de l'article L. 612-6 précité, l'obligation faite à un ressortissant étranger de quitter le territoire français sans délai. En particulier, ainsi qu'il a été dit au point 15, l'intéressé, qui est entré et s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire et qui a déjà fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement, ne justifie ni d'une insertion professionnelle stable et ancienne, ni d'une vie familiale en France, ni qu'il serait dépourvu d'attaches privées et familiales dans son pays d'origine ou qu'il serait dans l'impossibilité de s'y réinsérer. Par suite, en se fondant, notamment, sur les conditions irrégulières de son séjour en France, le préfet de la Seine-Saint-Denis a pu, sans entacher sa décision d'une erreur d'appréciation, prononcer à son encontre une interdiction de retour d'une durée de vingt-quatre mois.
22. Enfin, il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision de signalement aux fins de non admission dans le système d'information Schengen doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français.
23. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 17 janvier 2023 du préfet de la Seine-Saint-Denis. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles présentées au titre des frais de l'instance doivent également être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : Il n'y pas lieu de statuer sur la demande de M. A... tendant à son admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Article 2 : Le jugement n° 2300736 du 3 mars 2023 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montreuil est annulé.
Article 3 : La demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Montreuil et le surplus des conclusions de sa requête sont rejetés.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.
Délibéré après l'audience du 29 octobre 2024, à laquelle siégeaient :
- M. d'Haëm, président,
- M. Pagès, premier conseiller,
- Mme Lorin, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 novembre 2024.
Le président-rapporteur,
R. d'HAËML'assesseur le plus ancien,
D. PAGESLa greffière,
E. TORDO
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 23PA01065 2