Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 23 février 2023 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine l'a obligée à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée d'office et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.
Par un jugement n° 2302334 du 11 mai 2023, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Montreuil a annulé l'arrêté du 23 février 2023 du préfet des Hauts-de-Seine, enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis, territorialement compétent, de réexaminer la situation de Mme C... dans un délai de quatre mois et, dans l'attente de ce réexamen, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 8 juin 2023, le préfet des Hauts-de-Seine demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement et de rejeter la demande présentée par Mme C... devant le tribunal administratif de Montreuil ;
2°) de mettre à la charge de Mme C... le versement de la somme de 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- c'est à tort que la première juge a annulé l'arrêté en litige au motif d'un défaut d'examen de la situation de Mme C... dès lors que la circonstance que cet arrêté ne mentionne pas l'activité professionnelle de l'intéressée ne saurait démontrer un tel défaut, que l'intéressée ayant été interpellée sur son lieu de travail, cet élément a nécessairement été pris en compte pour apprécier sa situation, que Mme C... n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " salarié " et qu'elle ne justifie pas avoir travaillé de manière continue et à temps complet depuis le mois de novembre 2020, ni d'une réelle insertion professionnelle ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est suffisamment motivée ;
- elle n'a pas été prise en méconnaissance du droit à être entendue de l'intéressée ;
- elle est exempte d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision portant refus de délai de départ volontaire est suffisamment motivée ;
- la décision fixant le pays de destination n'est pas illégale du fait d'une prétendue illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français est suffisamment motivée.
La requête du préfet des Hauts-de-Seine a été communiquée à Mme C... qui n'a pas produit d'observations.
Par une ordonnance du 23 août 2024, la clôture de l'instruction de l'affaire a été fixée au 26 septembre 2024 à 12h00.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- les arrêts de la Cour de justice de l'Union européenne C-383/13 du 10 septembre 2013, C-166/13 du 5 novembre 2014 et C-249/13 du 11 décembre 2014 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. d'Haëm, président-rapporteur.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C..., ressortissante tunisienne, né le 17 septembre 1983 et entrée en France le 21 mars 2018, a été interpellée, le 23 février 2023, lors d'un contrôle d'identité et placée en retenue aux fins de vérification de son droit de circulation ou de séjour sur le territoire français. Par un arrêté du même jour, le préfet des Hauts-de-Seine l'a obligée à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an. Le préfet des Hauts-de-Seine fait appel du jugement du 11 mai 2023 par lequel la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Montreuil a, à la demande de Mme C..., annulé son arrêté du 23 février 2023, enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis, territorialement compétent, de réexaminer la situation de l'intéressée dans un délai de quatre mois et, dans l'attente de ce réexamen, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 800 euros au titre des frais de l'instance.
Sur le motif d'annulation retenu par la première juge :
2. Pour annuler l'arrêté du 23 février 2023 au motif d'un " défaut d'examen ", la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Montreuil, après avoir relevé que cet arrêté " a été édicté à l'issue d'un contrôle effectué sur le lieu de travail de [Mme C...], alors que celle-ci était en service ", a considéré qu'" il ressort des pièces du dossier que [l'intéressée], qui établit sa présence habituelle en France depuis 2018, justifie travailler de manière continue et à temps complet depuis le mois de novembre 2020, soit plus de deux ans à la date de la décision attaquée " et a estimé que, " pour examiner les liens de l'intéressée avec la France, le préfet des Hauts-de-Seine s'est borné à envisager la réalité du concubinage invoqué par la requérante et l'existence de liens familiaux dans son pays d'origine, sans mentionner aucun élément relatif à son activité professionnelle ".
3. Cependant, il ne ressort ni de la motivation de l'arrêté en litige, ni d'aucune autre pièce du dossier que le préfet des Hauts-de-Seine, avant d'obliger Mme C... à quitter le territoire français sans délai, de fixer le pays de destination et de prononcer à son encontre une interdiction de retour, aurait omis de procéder à un examen particulier de la situation personnelle de l'intéressée. En particulier, s'il est vrai que l'arrêté contesté, qui n'avait pas à faire état de l'ensemble des éléments caractérisant la situation de Mme C..., ne mentionne pas les emplois qu'elle a occupés entre les mois de novembre 2020 et février 2023, cette seule circonstance ne saurait caractériser une telle omission, alors que l'intéressée ayant été interpellée, le 23 février 2023, sur son lieu de travail, la boulangerie " Fresh Market " à Boulogne-Billancourt, et interrogée, lors de son audition par les services de police, sur cette activité, sans être à même de justifier d'une autorisation de travail, ni, d'ailleurs, de l'ancienneté de cette activité par la production d'un contrat de travail ou de bulletins de salaire, ces éléments ont nécessairement été pris en compte par l'autorité préfectorale dans son appréciation de la situation de Mme C.... Par ailleurs, alors que l'intéressée n'a jamais sollicité la délivrance d'un titre de séjour, notamment en qualité de salariée, la seule circonstance qu'elle a produit en première instance différents documents permettant d'établir qu'elle a travaillé d'abord comme " assistante polyvalente ", sous contrat à durée indéterminée et à temps complet, auprès de la société " JSL Sécurité " du 25 novembre 2020 au 16 juin 2021, puis en qualité de vendeuse, à temps partiel, auprès de la société " Le Fournil " du 1er octobre 2021 au 1er janvier 2022 et du 1er avril 2022 au 31 décembre 2022, sans pour autant justifier avoir travaillé " de manière continue et à temps complet " depuis le mois de novembre 2020, ne saurait davantage permettre de considérer que le préfet n'aurait pas, avant de prendre l'arrêté en litige, procédé, au vu de l'ensemble des éléments dont il disposait, à un examen particulier ou sérieux de sa situation. Par suite, le préfet des Hauts-de-Seine est fondé à soutenir que c'est à tort que la première juge a annulé son arrêté du 23 février 2023 au motif d'un défaut d'examen particulier de la situation personnelle de l'intéressée.
4. Toutefois, il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme C... devant le tribunal administratif.
Sur les autres moyens soulevés par Mme C... :
En ce qui concerne la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
5. En premier lieu, aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : / (...) 2° L'étranger, entré sur le territoire français sous couvert d'un visa désormais expiré ou, n'étant pas soumis à l'obligation du visa, entré en France plus de trois mois auparavant, s'est maintenu sur le territoire français sans être titulaire d'un titre de séjour (...) ".
6. Il est constant que Mme C..., entrée sur le territoire français le 21 mars 2018 sous couvert d'un visa Schengen de court séjour valable du 12 mars 2018 au 11 avril 2018, s'y est maintenue, après l'expiration de ce visa, sans être titulaire d'un titre de séjour. Par suite, le préfet des Hauts-de-Seine pouvait légalement, en application des dispositions du 2° de l'article L. 611-1 précité, l'obliger à quitter le territoire français.
7. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La décision portant obligation de quitter le territoire français est motivée (...) ".
8. La mesure d'éloignement contestée, qui vise, notamment, le 2° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mentionne que si Mme C... " a déclaré être entrée régulièrement sur le territoire français en mars 2018 munie d'un visa de court séjour ", " elle se maintient depuis cette date sur le territoire français et a dépassé la durée de validité de son visa " et n'est pas titulaire d'un titre de séjour. Elle indique, en outre, que l'intéressée " n'a pas effectué de démarche visant à solliciter un titre de séjour " et que " si elle déclare être titulaire d'une CNI italienne, elle n'en apporte pas la preuve ". Elle fait état également de ce que si " Mme C... déclare vivre en concubinage sans enfant à charge ", elle " n'établit, ni n'allègue être dépourvue de toutes attaches personnelles et familiales dans son pays d'origine où elle aurait vécu jusqu'à l'âge de 35 ans ", de sorte que " ses liens personnels et familiaux en France ne peuvent être regardés comme suffisamment anciens, intenses et stables ". Par suite, cette décision, qui comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui la fondent, est suffisamment motivée au regard des exigences résultant des dispositions précitées.
9. En troisième lieu, il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, notamment de ses arrêts C-166/13 Sophie Mukarubega du 5 novembre 2014 et C-249/13 Khaled Boudjlida du 11 décembre 2014, que le droit d'être entendu préalablement à l'adoption d'une décision de retour implique que l'autorité administrative mette le ressortissant étranger en situation irrégulière à même de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur l'irrégularité du séjour et les motifs qui seraient susceptibles de justifier que l'autorité s'abstienne de prendre à son égard une décision de retour. Ce droit n'implique toutefois pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français, dès lors qu'il a pu être entendu sur l'irrégularité du séjour ou la perspective de l'éloignement. Il résulte également de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, notamment de son arrêt C-383/13 M. A..., N. R./Staatssecretaris van Veiligheid en Justitie du 10 septembre 2013, que toute irrégularité dans l'exercice des droits de la défense lors d'une procédure administrative concernant un ressortissant d'un pays tiers en vue de son éloignement ne saurait constituer une violation de ces droits et, en conséquence, que tout manquement, notamment, au droit d'être entendu n'est pas de nature à entacher systématiquement d'illégalité la décision prise. Il revient à l'intéressé d'établir devant le juge chargé d'apprécier la légalité de cette décision que les éléments qu'il n'a pas pu présenter à l'administration auraient pu influer sur le sens de cette décision et il appartient au juge saisi d'une telle demande de vérifier, lorsqu'il estime être en présence d'une irrégularité affectant le droit d'être entendu, si, eu égard à l'ensemble des circonstances de fait et de droit spécifiques de l'espèce, cette violation a effectivement privé celui qui l'invoque de la possibilité de mieux faire valoir sa défense dans une mesure telle que cette procédure administrative aurait pu aboutir à un résultat différent.
10. Il ressort des pièces du dossier et, notamment, du procès-verbal d'audition du 23 février 2023 par les services de police, que Mme C..., qui, au demeurant, ne pouvait ignorer qu'elle se maintenait irrégulièrement sur le territoire français, a été interrogée, lors de sa retenue aux fins de vérification de son droit de circulation ou de séjour sur le territoire, sur son identité, son pays d'origine, les conditions de son entrée et de son séjour en France, sa situation professionnelle et familiale ainsi que la perspective d'un éloignement vers son pays d'origine. Ainsi, Mme C... a été mise à même de présenter son point de vue sur l'irrégularité de son séjour et les motifs qui auraient été susceptibles de justifier que l'autorité préfectorale s'abstienne de prendre à son égard une décision de retour. Au surplus, Mme C... ne justifie d'aucun élément propre à sa situation qu'elle aurait été privée de faire valoir lors de son audition et qui, si elle avait été en mesure de l'invoquer préalablement, aurait été de nature à influer sur le sens de la décision prise par le préfet. A cet égard, les emplois qu'elle a occupés entre les mois de novembre 2020 et février 2023, au demeurant sans autorisation, n'étaient pas de nature à faire obstacle au prononcé d'une décision de retour. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de son droit à être entendue doit être écarté.
11. En dernier lieu, Mme C... justifie séjourner en France depuis le mois de mars 2018 et avoir exercé une activité salariée comme " assistante polyvalente ", sous contrat à durée indéterminée et à temps complet, auprès de la société " JSL Sécurité " du 25 novembre 2020 au 16 juin 2021, puis en qualité de vendeuse, à temps partiel, auprès de la société " Le Fournil " du 1er octobre 2021 au 1er janvier 2022 et du 1er avril 2022 au 31 décembre 2022. Elle a également été employée, au mois de février 2023, par la boulangerie " Fresh Market ". Toutefois, Mme C... ne peut se prévaloir d'une insertion professionnelle stable et ancienne sur le territoire où elle a séjourné de façon irrégulière, tandis qu'elle ne justifie pas de la relation maritale dont elle a fait état lors de son audition par les services de police et est sans charge de famille en France. De plus, elle n'allègue pas être dépourvue d'attaches privées et familiales en Tunisie où elle a vécu jusqu'à l'âge de trente-quatre ans. Ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en l'obligeant à quitter le territoire français, le préfet des Hauts-de-Seine aurait commis une erreur manifeste dans son appréciation des conséquences de cette mesure d'éloignement sur la situation personnelle de l'intéressée.
En ce qui concerne la légalité de la décision portant refus de délai de départ volontaire :
12. Aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : / (...) 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet ". Aux termes de l'article L. 612-3 du même code : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / (...) 2° L'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; / (...) 4° L'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français (...) ".
13. Alors même que le comportement de Mme C... ne constitue pas une menace pour l'ordre public et qu'elle dispose d'un passeport en cours de validité et d'un logement, il est constant qu'elle s'est maintenue sur le territoire français de façon irrégulière, après l'expiration de son visa, durant plusieurs années et n'a jamais sollicité la délivrance d'un titre de séjour. En outre, elle a explicitement déclaré, lors de son audition par les services de police, son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français. Dans ces conditions, le préfet des Hauts-de-Seine, en estimant qu'il existait un risque que l'intéressée se soustraie à la mesure d'éloignement en litige et, en conséquence, en refusant de lui accorder un délai de départ volontaire, n'a pas commis d'erreur d'appréciation au regard des dispositions précitées.
En ce qui concerne la légalité de la décision fixant le pays de destination :
14. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français, ne peut qu'être écarté.
En ce qui concerne la légalité de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :
15. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision portant interdiction de retour sur le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français, doit être écarté.
16. En second lieu, aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ". Enfin, en vertu de l'article L. 613-2 de ce code, les décisions d'interdiction de retour sont motivées.
17. D'une part, il ressort de l'examen de l'arrêté attaqué que le préfet des Hauts-de-Seine, qui n'était pas tenu de préciser expressément que la présence de l'intéressée ne représentait pas une menace pour l'ordre public et qu'elle n'avait pas fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement, a indiqué dans sa décision les éléments propres à la situation de Mme C..., notamment la durée de son séjour en France depuis le mois de mars 2018 et l'absence d'attaches fortes dans ce pays ainsi que de toute circonstance faisant obstacle à son retour dans son pays d'origine. Dans ces conditions, les moyens tirés de ce que la décision contestée portant interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an serait insuffisamment motivée et de ce que cette décision aurait été prise en méconnaissance des dispositions de l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, doivent être écartés.
18. D'autre part, Mme C... ne démontre aucune circonstance humanitaire de nature à faire obstacle au prononcé d'une interdiction de retour qui doit assortir en principe, en application des dispositions de l'article L. 612-6 précité, l'obligation faite à un ressortissant étranger de quitter le territoire français sans délai. En particulier, ainsi qu'il a été dit au point 11, elle a séjourné irrégulièrement sur le territoire durant plusieurs années et ne justifie ni d'une vie familiale, ni d'une insertion professionnelle stable et ancienne en France, ni d'aucune circonstance faisant obstacle à ce qu'elle poursuive normalement sa vie privée et familiale en Tunisie où elle n'allègue pas être dépourvue d'attaches personnelles et familiales. Par suite, en se fondant, notamment, sur les conditions irrégulières du séjour en France de Mme C..., le préfet des Hauts-de-Seine a pu, sans entacher sa décision d'une erreur dans son appréciation de la situation personnelle de l'intéressée, prononcer à son encontre une interdiction de retour d'une durée d'un an.
19. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet des Hauts-de-Seine est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Montreuil a annulé son arrêté du 23 février 2023, a enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis, territorialement compétent, de réexaminer la situation de l'intéressée dans un délai de quatre mois et, dans l'attente de ce réexamen, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 800 euros au titre des frais de l'instance.
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
20. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par le préfet des Hauts-de-Seine sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 2302334 du 11 mai 2023 de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Montreuil est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme C... devant le tribunal administratif de Montreuil est rejetée.
Article 3 : Les conclusions du préfet des Hauts-de-Seine tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à Mme B... C....
Copie en sera adressée au préfet des Hauts-de-Seine et au préfet de la Seine-Saint-Denis.
Délibéré après l'audience du 29 octobre 2024, à laquelle siégeaient :
- M. d'Haëm, président,
- M. Pagès, premier conseiller,
- Mme Lorin, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 novembre 2024.
Le président-rapporteur,
R. d'HAËML'assesseur le plus ancien,
D. PAGESLa greffière,
E. TORDO
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23PA02516