Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 8 juillet 2021 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée d'office à l'expiration de ce délai.
Par un jugement n° 2208334 du 12 mai 2023, le tribunal administratif de Montreuil a annulé l'arrêté du 8 juillet 2021 du préfet de la Seine-Saint-Denis, lui a enjoint de réexaminer la situation de Mme B... dans le délai de trois mois à compter de la notification du jugement et, dans l'attente de ce réexamen, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à verser à son conseil, Me Langlois, au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 8 juin 2023, le préfet de la Seine-Saint-Denis demande à la Cour d'annuler ce jugement et de rejeter la demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif de Montreuil.
Il soutient que :
- c'est à tort que le tribunal administratif a annulé l'arrêté attaqué au motif d'une irrégularité de la composition de la commission du titre de séjour, qui a rendu un avis en date du 17 juin 2021, dès lors qu'il produit l'arrêté n° 2021-0334 du 3 février 2021 portant composition de la commission du titre de séjour de la Seine-Saint-Denis ;
- l'arrêté attaqué est suffisamment motivé ;
- il est exempt d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- Mme B... n'est pas fondée à soutenir que le préfet aurait dû examiner sa situation au regard des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de ces dispositions ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français ne méconnaît pas les dispositions du 9° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 septembre 2024, Mme B..., représentée par Me Langlois, conclut :
1°) au rejet de la requête ;
2°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer sans délai une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", sous astreinte de 200 euros par jour de retard, ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous la même astreinte, et, dans l'attente de ce réexamen, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- c'est à bon droit que le tribunal administratif a annulé l'arrêté en litige dès lors que la commission du titre de séjour était irrégulièrement composée au regard des dispositions des articles L. 432-14 et R. 432-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision portant refus de titre de séjour a été signée par une autorité incompétente ;
- elle est entachée d'une insuffisance de motivation ;
- elle est entachée d'un vice de procédure dès lors que l'avis de la commission du titre de séjour ne lui a pas été communiqué, contrairement aux prescriptions de l'article R. 432-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'erreurs de fait quant à sa situation personnelle et professionnelle ;
- elle est entachée d'une erreur de droit dès lors que le préfet a méconnu l'étendue de sa compétence en matière de régularisation ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale à raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;
- elle est entachée d'une erreur de droit dès lors que le préfet s'est cru à tort en situation de compétence liée pour prononcer cette mesure d'éloignement ;
- elle est entachée d'erreur de droit dès lors que le préfet a omis de saisir pour avis le service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;
- elle méconnaît les dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le délai de départ volontaire est illégale à raison de l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ;
- elle est entachée d'une insuffisance de motivation ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le pays de destination est illégale à raison de l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par une décision du 11 septembre 2023 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris, Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. d'Haëm, président-rapporteur.
Considérant ce qui suit :
1. Le préfet de la Seine-Saint-Denis fait appel du jugement du 12 mai 2023 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a annulé son arrêté du 8 juillet 2021 rejetant la demande d'admission exceptionnelle au séjour présentée par Mme B..., ressortissante malienne, née le 5 avril 1964 et entrée en France le 28 mars 2004, lui a enjoint de réexaminer la situation de l'intéressée dans le délai de trois mois et, dans l'attente de ce réexamen, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre des frais de l'instance.
Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal administratif :
2. Aux termes de l'article L. 432-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La commission du titre de séjour est composée : / 1° D'un maire ou de son suppléant désignés par le président de l'association des maires du département ou, lorsqu'il y a plusieurs associations de maires dans le département, par le préfet en concertation avec celles-ci (...) ; / 2° De deux personnalités qualifiées désignées par le préfet (...). / Le président de la commission du titre de séjour est désigné, parmi ses membres, par le préfet (...) ". Aux termes de l'article R. 432-6 du même code : " Le préfet (...) met en place la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 432-14 par un arrêté : 1° Constatant la désignation des élus locaux mentionnés au 1° du même article ; / 2° Désignant les personnalités qualifiées mentionnées au 2° du même article ; / 3° Désignant le président de la commission ".
3. Pour annuler l'arrêté en litige, le tribunal administratif, après avoir rappelé que " la consultation de la commission du titre de séjour constitue une garantie substantielle " et relevé que " le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a pas produit, malgré une mesure d'instruction diligentée en ce sens, l'arrêté désignant les membres de la commission du titre de séjour ayant émis un avis sur la situation de Mme B... ", a considéré que " cette irrégularité est de nature à entacher d'illégalité la décision de refus de titre de séjour prise à l'encontre de l'intéressée ".
4. Cependant, il ressort des pièces produites en appel par le préfet de la Seine-Saint-Denis que la commission du titre de séjour, qui a émis l'avis du 17 juin 2021 sur la situation de Mme B..., était composée, d'une part, de Mme Pauline Lukaszewicz, présidente, d'autre part, de M. A... F... et de Mme G... J..., représentante de M. C... E..., directeur général de l'URSSAF d'Île-de-France, personnalités qualifiées, tous trois désignés par le préfet par un arrêté n° 2021-0334 du 3 février 2021 mettant en place cette commission, régulièrement publié le 4 février 2021 au bulletin d'informations administratives. Par ailleurs, si Mme B... fait valoir que cet arrêté n'a pas désigné nominativement Mme G... J..., mais seulement M. C... E..., directeur général de l'URSSAF d'Île-de-France, " ou son représentant ", la requérante n'établit, ni n'allègue que Mme G... J... n'aurait pas eu qualité pour représenter le directeur général de l'URSSAF d'Île-de-France. Par suite, le préfet de la Seine-Saint-Denis est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a annulé son arrêté du 8 juillet 2021 au motif d'une composition irrégulière de la commission du titre de séjour ayant émis l'avis du 17 juin 2021.
5. Il appartient toutefois à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme B... devant le tribunal administratif et devant la Cour.
Sur les autres moyens soulevés par Mme B... :
En ce qui concerne la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :
6. En premier lieu, la décision attaquée du 8 juillet 2021 a été signée par Mme I... D..., cheffe du bureau du contentieux, qui disposait d'une délégation de signature à cet effet consentie par un arrêté n° 2021-1191 du 18 mai 2021 du préfet de la Seine-Saint-Denis, régulièrement publiée le 19 mai 2021 au bulletin d'informations administratives de la préfecture. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision en litige aurait été signée par une autorité incompétente doit être écarté comme manquant en fait.
7. En deuxième lieu, la décision contestée, qui comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui la fondent, est, par suite, suffisamment motivée, alors même qu'elle ne mentionne pas l'ensemble des éléments relatifs à la situation personnelle et familiale de Mme B..., notamment le suivi médical dont elle fait l'objet en France, ses attaches familiales sur le territoire ou le fait qu'elle est locataire de son logement.
8. En troisième lieu, en vertu de l'article R. 432-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'avis émis par la commission du titre de séjour " est également communiqué à l'intéressé ".
9. Il ressort des pièces du dossier qu'un exemplaire de l'avis du 17 juin 2021 de la commission du titre de séjour a été notifié le même jour à Mme B..., qui l'a signé, soit avant l'intervention de la décision attaquée. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées doit être écarté.
10. En quatrième lieu, il ne ressort ni de la motivation de la décision contestée, ni d'aucune autre pièce du dossier que le préfet de la Seine-Saint-Denis, qui a examiné la situation de Mme B... au regard des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, aurait méconnu le pouvoir discrétionnaire dont il dispose, quant à l'opportunité d'une mesure de régularisation de l'intéressée, notamment à raison de la durée de son séjour en France ou de sa situation familiale.
11. En cinquième lieu, si Mme B... fait état de la durée de son séjour en France, de son insertion sur le territoire, notamment professionnelle, et de la présence de plusieurs membres de sa famille, ces éléments ne sont pas de nature à démontrer que le préfet de la Seine-Saint-Denis, pour rejeter sa demande d'admission exceptionnelle au séjour, se serait fondé sur des faits matériellement inexacts.
12. En sixième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 (...) ".
13. En présence d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour présentée sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et, à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ". Dans cette dernière hypothèse, un demandeur qui justifierait d'une promesse d'embauche ou d'un contrat de travail ne saurait être regardé, par principe, comme attestant, par là-même, des motifs exceptionnels exigés par la loi. Il appartient, en effet, à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour.
14. Si Mme B... se prévaut de la durée de son séjour en France depuis le mois de mars 2004, cette seule circonstance ne saurait constituer un motif d'admission exceptionnelle, alors que l'intéressée s'y est maintenue de façon irrégulière. En outre, si elle fait état de la présence en France de membres de sa famille, notamment de cousins, elle n'établit, ni n'allègue que sa présence auprès d'eux revêtirait pour elle un caractère indispensable. Par ailleurs, si Mme B..., âgée de cinquante-sept ans à la date de la décision contestée, qui est divorcée depuis 1990 et sans charge de famille sur le territoire, ne justifie d'aucune circonstance particulière de nature à faire obstacle à ce qu'elle poursuive normalement sa vie à l'étranger et, en particulier, au Mali où résident ses frère et sœurs ainsi que ses trois enfants nés en 1988, 1995 et 1997 et où elle-même a vécu jusqu'à l'âge de trente-neuf ans, de sorte qu'elle y dispose d'attaches personnelles et familiales au moins aussi fortes qu'en France, ni n'allègue qu'elle serait dans l'impossibilité de s'y réinsérer. Enfin, la requérante ne justifie ni d'une activité professionnelle à la date de l'arrêté attaqué, ni, en tout état de cause, d'une insertion professionnelle stable et ancienne en France. Par suite, en refusant de régulariser sa situation au regard du séjour, au titre de sa vie privée et familiale ou au titre du travail, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a commis aucune erreur manifeste dans son appréciation de la situation de Mme B... au regard des dispositions de l'article L. 435-1 précité, ni aucune erreur manifeste dans son appréciation des conséquences de ce refus sur la situation personnelle de l'intéressée.
15. En dernier lieu, par les mêmes motifs que ceux énoncés au point précédent, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
En ce qui concerne la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
16. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision obligeant Mme B... à quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour qui lui a été opposée, ne peut qu'être écarté.
17. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : / (...) 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ". Aux termes de l'article R. 611-1 du même code : " Pour constater l'état de santé de l'étranger mentionné au 9° de l'article L. 611-3, l'autorité administrative tient compte d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (...) ". Aux termes de l'article R. 611-2 de ce code : " L'avis mentionné à l'article R. 611-1 est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu : / 1° D'un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement l'étranger ou un médecin praticien hospitalier ; / 2° Des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...) ".
18. D'une part, il résulte de l'ensemble des dispositions précitées que, dès lors qu'elle dispose d'éléments d'information suffisamment précis permettant d'établir qu'un étranger, résidant habituellement en France, présente un état de santé susceptible de le faire entrer dans la catégorie qu'elles prévoient des étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'éloignement, l'autorité préfectorale doit, lorsqu'elle envisage de prendre une telle mesure à son égard, recueillir préalablement l'avis du collège de médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration (OFII). En l'espèce, Mme B... n'établit pas, ni même n'allègue sérieusement, avoir, notamment par la production d'éléments suffisamment circonstanciés à l'appui de sa demande d'admission exceptionnelle au séjour, informé le préfet de la Seine-Saint-Denis de la nature et de la gravité des pathologies dont elle souffre et qui, selon elle, auraient dû conduire cette autorité à solliciter l'avis du collège de médecins de l'OFII. En outre, la seule circonstance que l'intéressée a produit, lors d'instances contentieuses précédentes, des documents médicaux ne permet pas de considérer que le préfet disposait, à la date de cette demande ou à la date de l'arrêté attaqué, d'éléments d'information suffisamment précis devant le conduire à saisir pour avis ce collège. Par suite, le moyen tiré de ce qu'en l'absence d'un tel avis, la mesure d'éloignement litigieuse aurait été édictée au terme d'une procédure irrégulière ne peut qu'être écarté.
19. D'autre part, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle de Mme B..., avant de prononcer à son encontre la mesure d'éloignement attaquée, ni qu'il se serait estimé en situation de compétence liée pour prendre à son encontre une telle mesure.
20. Enfin, Mme B..., qui fait valoir qu'elle souffre d'un diabète non insulinodépendant, d'une hypertension artérielle et d'une hépatite B, soutient qu'elle ne pourrait pas bénéficier effectivement au Mali d'un traitement approprié, les médicaments et le suivi médical dont elle bénéfice en France n'y étant pas disponibles. Toutefois, ni les données générales fournies par la requérante sur ses pathologies ou sur le système de santé et les offres de soins prévalant au Mali, ni les documents d'ordre médical qu'elle produit, notamment cinq certificats médicaux établis les 5 janvier 2015, 9 mai 2019, 8 octobre 2019, 30 novembre 2020 et 2 juin 2022 par un médecin généraliste, rédigés en des termes succincts, ne permettent d'établir, en l'absence d'éléments précis et objectifs tant sur la gravité et l'évolution des pathologies de l'intéressée que sur l'absence d'un traitement approprié à ses pathologies au Mali, qu'un tel traitement et un tel suivi seraient indisponibles dans son pays d'origine. En outre, il ne ressort pas de ces documents qu'à la date de la décision attaquée, Mme B... bénéficiait d'un traitement pour son hépatite B. Enfin, la requérante n'apporte aucun élément suffisant et probant sur le coût d'une prise en charge médicale adaptée à ses pathologies en Mali, ni, en tout état de cause, ne fournit pas de précisions sur ses propres ressources, ou sur celles de sa famille, dont elle pourrait disposer pour se soigner en cas de retour dans son pays d'origine. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 9° de l'article L. 611-1 précité doit être écarté.
21. En dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 14, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure d'éloignement en litige sur la situation personnelle de Mme B..., doivent être écartés.
En ce qui concerne la légalité de la décision fixant à trente jours le délai de départ volontaire :
22. D'une part, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision fixant à trente jours le délai de départ volontaire doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français, ne peut qu'être écarté.
23. D'autre part, il résulte des dispositions de l'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que lorsque l'autorité préfectorale prévoit qu'un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement dispose du délai de départ volontaire de trente jours, soit le délai normalement applicable, ou d'un délai supérieur, elle n'a pas à motiver spécifiquement sa décision. Par suite, le moyen tiré de l'absence de motivation de la décision par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a accordé à Mme B... un délai de trente jours pour satisfaire à l'obligation de quitter le territoire prise à son encontre doit être écarté.
24. Enfin, Mme B... ne justifie d'aucune circonstance particulière de nature à rendre nécessaire la prolongation de ce délai de trente jours qui lui a été accordé pour quitter volontairement le territoire. Au surplus, l'intéressée n'établit, ni n'allègue d'ailleurs, avoir sollicité auprès de l'autorité préfectorale une telle prolongation. Par suite, en fixant le délai de départ volontaire à trente jours, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a commis aucune erreur manifeste dans l'appréciation de la situation de l'intéressée au regard des dispositions de l'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
En ce qui concerne la légalité de la décision fixant le pays de destination :
25. D'une part, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français, ne peut qu'être écarté.
26. D'autre part, aux termes de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ". Aux termes des stipulations de cet article 3 : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
27. Il ne ressort pas des pièces versées au dossier que Mme B... ne pourrait pas bénéficier effectivement d'un traitement et d'un suivi appropriés à ses pathologies dans le cas d'un retour dans son pays d'origine. Par suite, en décidant, par l'arrêté attaqué, que l'intéressée pourra être éloignée à destination du Mali, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a pas méconnu les dispositions et stipulations précitées.
28. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Seine-Saint-Denis est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a annulé son arrêté du 8 juillet 2021, lui a enjoint de réexaminer la situation de Mme B... dans le délai de trois mois et, dans l'attente de ce réexamen, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre des frais de l'instance. Par suite, les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées par Mme B... et ses conclusions tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 2208334 du 12 mai 2023 du tribunal administratif de Montreuil est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif de Montreuil et ses conclusions d'appel sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à Mme H... B....
Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.
Délibéré après l'audience du 29 octobre 2024, à laquelle siégeaient :
- M. d'Haëm, président,
- M. Pagès, premier conseiller,
- Mme Lorin, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 novembre 2024.
Le président-rapporteur,
R. d'HAËML'assesseur le plus ancien,
D. PAGESLa greffière,
E. TORDO
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 23PA02519 2